La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/11/1988 | FRANCE | N°54347

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 02 novembre 1988, 54347


Vu 1°, sous le n° 54 347 la requête enregistrée le 21 septembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir des paragraphes I e et I f de l'article 1er du décret n° 83-714 du 2 août 1983 pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 83-580 du 5 juillet 1983 modifiant certaines dispositions du code du travail relatives à la garantie de ressources des travailleurs privés d'emploi ;
Vu 2°, sous le n° 54 499 la requête sommaire et le mémoire complémentai

re, enregistrés les 3 octobre 1983 et 3 février 1984, présentés pour l...

Vu 1°, sous le n° 54 347 la requête enregistrée le 21 septembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir des paragraphes I e et I f de l'article 1er du décret n° 83-714 du 2 août 1983 pris pour l'application de l'article 2 de la loi n° 83-580 du 5 juillet 1983 modifiant certaines dispositions du code du travail relatives à la garantie de ressources des travailleurs privés d'emploi ;
Vu 2°, sous le n° 54 499 la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 octobre 1983 et 3 février 1984, présentés pour l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE DEFENSE DES PRERETRAITES, RETRAITES ET ASSIMILES (UNAPA), dont le siège est ..., représentée par ses dirigeants en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir le décret précité du 2 août 1983 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 83-580 du 5 juillet 1983 ;
Vu le décret n° 82-991 du 24 novembre 1982 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Daguet, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE DEFENSE DES PRE-RETRAITES, RETRAITES ET ASSIMILES,
- les conclusions de M. Tuot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. X... et de l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE DEFENSE DES PRERETRAITES, RETRAITES ET ASSIMILES (UNAPA) sont dirigées contre un même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;
Sur la compétence des auteurs du décret attaqué :
Considérant que le décret attaqué du 2 août 1983 a été pris en application de la loi susvisée du 5 juillet 1983, dont l'article 1er, modifiant l'article L. 351-5 du code du travail, a pour effet de supprimer l'allocation de garantie de ressources de la liste des prestations constituant le revenu de remplacement dont peuvent bénéficier les travailleurs involontairement privés d'emploi, et dont l'article 2 dispose que "les dispositions de l'article 1er ci-dessus ne font pas obstacle au maintien des droits acquis à la garantie de ressources résultant des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date de publication de la présente loi ou d'engagements conventionnels pris avec l'Etat avant la publication de la présente loi. Les modalités d'application du présent article seront fixées par décret" ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'UNAPA n'est pas fondée à soutenir que le décret attaqué, qui fixe les modalités d'application de l'article 2 de la loi précitée, aurait dû être pris en Coneil d'Etat ;
Sur la légalité interne du décret attaqué :
Sur les conclusions de la requête de M. X..., dirigées contre les paragraphes I e) et I f) de l'article 1er :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des affaires sociales et de l'emploi :

Considérant, en premier lieu, qu'en vertu du paragraphe I e) de l'article 1er du décret attaqué, pourront continuer à bénéficier de l'allocation de garantie de ressources ou être admis à en bénéficier au taux de 70 % "les anciens salariés des entreprises ayant signé une convention d'allocations spéciales du Fonds National de l'Emploi (F.N.E.) avant le 31 décembre 1982 qui avaient renoncé à figurer sur la liste des bénéficiaires de ces conventions FNE sous réserve que leur licenciement leur ait été notifié avant le 27 novembre 1982" ; que si M. X... soutient que cette disposition viole le principe d'égalité en ce qu'elle traiterait de façon différente des salariés licenciés suivant qu'après leur licenciement, leur entreprise a signé ou n'a pas signé une convention d'allocations spéciales du FNE, il ressort de son texte même que le paragraphe I e) vise à régler le cas de salariés qui auraient pu bénéficier d'une telle convention mais ont renoncé à y adhérer et ont opté pour le régime de droit commun de l'article L. 351-5 du code du travail ; que la situation de ces salariés est nécessairement différente de celle des salariés qui, appartenant à une entreprise qui n'a pas signé de convention de cette nature, n'ont pas eu, de ce fait, la possibilité d'exercer l'option susmentionnée ; que, par suite, le paragraphe I e) ne viole pas le principe d'égalité ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes du paragraphe I f) de l'article 1er du décret attaqué, pourront continuer à bénéficier de l'allocation de garantie de ressources ou être admis à en bénéficier au taux de 70 % "les chômeurs dont la rupture du contrat de travail pour cause économique s'est produite alors qu'ils étaient âgés d'au moins 59 ans, sous réserve que leur licenciement leur ait été notifié avant le 27 novembre 1982" ; que M. X... soutient que cette disposition viole le principe d'égalité en ce que, ne concernant que les seuls salariés licenciés après 59 ans , elle excluerait, selon lui, de la garantie de ressources tous les salariés licenciés entre 55 et 59 ans ;

Mais considérant que la disposition attaquée n'a, par elle-même, ni pour objet ni pour effet de priver de la garantie de ressources les salariés licenciés entre 55 ans et 59 ans ; qu'elle se borne à fixer à 70 % le taux de la garantie de ressources à laquelle auront droit ses bénéficiaires ; que les travailleurs concernés par le paragraphe I f) se trouvent, au regard des règles fixant leur accession à la garantie de ressources, telles que définies par le règlement annexé à la convention du 27 mars 1979 régissant les institutions visées à l'article L. 351-2 du code du travail, dans une situation différente de celle des chômeurs moins âgés ; que dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que le paragraphe I f) méconnaîtrait le principe d'égalité ;
Sur les conclusions de l'UNAPA dirigées contre les premiers alinéas des paragraphes I et II de l'article 1er du décret attaqué, en tant que ces textes disposent que la garantie de ressources cesse d'être versée le dernier jour du mois suivant le 65ème anniversaire des allocataires et contre le 1er alinéa du paragraphe II de l'article 1er du décret attaqué, en tant que ce texte dispose que la garantie de ressources cesse d'être versée à la date à laquelle les allocataires justifieront de 150 trimestres validés au titre de l'assurance vieillesse au sens de l'article L. 331 du code de la sécurité sociale :
Considérant qu'ainsi que le relève l'UNAPA, les dispositions ainsi critiquées se bornent à reprendre celles des articles 2 et 3 du décret n° 82-991 du 24 novembre 1982, lequel est au nombre des dispositions réglementaires auxquelles se réfère l'article 2 précité de la loi du 5 juillet 1983 ; que l'Union requérante conteste la légalité desdites dispositions ;

Considérant que si, en vertu de l'article L. 351-1 du code du travail, les travailleurs involontairement privés d'emploi "ont droit à un revenu de remplacement", l'article L. 351-5 du même code précise que ce revenu "est servi pendant une durée limitée" ; que les articles 2 et 3 du décret du 24 novembre 1982 ont pu légalement se fonder sur ces dispositions pour décider que les allocations du régime visé à l'article L. 351-2 "cessent d'être versées aux allocataires atteignant l'âge de soixante cinq ans" et "cessent d'être versées aux allocataires âgés de plus de soixante ans et justifiant de 150 trimestres validés au titre de l'assurance-vieillesse" ;
Sur les conclusions de l'UNAPA reposant sur des moyens tirés de la violation du principe d'égalité :
Considérant que si l'UNAPA soutient que diverses dispositions du décret attaqué seraient illégales en tant que contraires au principe d'égalité, la requête ne désigne pas clairement les dispositions qu'elle critique et n'est assortie d'aucune précision permettant d'apprécier le bien-fondé des moyens qu'elle invoque ; que dès lors, les conclusions susvisées ne sont pas recevables ;
Sur les autres conclusions de l'UNAPA :
Considérant que si l'UNAPA soutient que diverses dispositions du décret attaqué seraient illégales en tant qu'elles prendraient effet avant la date de publication de la loi du 5 juillet 1983, sa requête ne désigne clairement que le paragraphe I c, de l'article 1er du décret attaqué comme objet de ces critiques, et n'est, sauf en ce qui concerne ce paragraphe, assortie d'aucune précision permettant d'apprécier le bien-fondé des moyens invoqués ; que dès lors, les conclusions susanalysées de l'UNAPA ne sont recevables qu'en tant qu'elles concernent le paragraphe I c) ;

Considérant qu'en vertu de ce paragraphe, pourront continuer à bénéficier de la garantie de ressources ou être admis à en bénéficier, au taux de 70 %, "les personnes licenciées dans le cadre d'une convention d'allocations spéciales du FNE conclue avant le 1er janvier 1983" .... ; que l'Union requérante reproche à ce texte d'exclure du bénéfice de l'avantage qu'il édicte les personnes qui ont adhéré à une telle convention entre le 1er janvier 1983 et la date d'entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 1983 ;
Mais considérant que le paragraphe I c du décret attaqué se borne à tirer les conséquences de la disposition figurant au dernier alinéa de l'article 12 du décret précité du 24 novembre 1982 et à maintenir les droits acquis à raison de ce décret, conformément aux dispositions de l'article 2 précité de la loi du 5 juillet 1983 ; qu'ainsi le moyen de l'UNAPA doit être rejeté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de M. X... et l'UNAPA doivent être rejetées ;
Article 1er : Les requêtes de M. X... et de l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE DEFENSE DES PRE-RETRAITES, RETRAITES ET ASSIMILES sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à l'UNION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE DEFENSE DES PRE-RETRAITES, RETRAITES ET ASSIMILES et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - PRINCIPES GENERAUX DU DROIT - EGALITE DEVANT LA LOI - Absence de violation - Décret n° 83-714 du 2 août 1983 pris pour l'application de la loi n° 83-580 du 5 juillet 1983 modifiant certaines dispositions du code du travail relatives à la garantie de ressources des travailleurs privés d'emploi - (1) Article 1er - paragraphe I e) - (2) Article 1er - paragraphe I f).

01-04-03-01(1), 66-10-02(1) En vertu du paragraphe I e) de l'article 1er du décret du 2 août 1983 pris pour l'application de l'article 2 de la loi du 5 juillet 1983 modifiant certaines dispositions du code du travail relatives à la garantie de ressources des travailleurs privés d'emploi, pourront continuer à bénéficier de l'allocation de garantie de ressources ou être admis à en bénéficier au taux de 70 % "les anciens salariés des entreprises ayant signé une convention d'allocations spéciales du Fonds National de l'Emploi (F.N.E.) avant le 31 décembre 1982 qui avaient renoncé à figurer sur la liste des bénéficiaires de ces conventions F.N.E. sous réserve que leur licenciement leur ait été notifié avant le 27 novembre 1982". Si M. L. soutient que cette disposition méconnaîtrait le principe d'égalité en ce qu'elle traiterait de façon différente des salariés licenciés suivant qu'après leur licenciement leur entreprise a signé ou n'a pas signé une convention d'allocations spéciales du F.N.E., il ressort de son texte même que le paragraphe I e) vise à régler le cas de salariés qui auraient pu bénéficier d'une telle convention mais ont renoncé à y adhérer et ont opté pour le régime de droit commun de l'article L.351-5 du code du travail. La situation de ces salariés est nécessairement différente de celle des salariés qui, appartenant à une entreprise qui n'a pas signé de convention de cette nature, n'ont pas eu, de ce fait, la possibilité d'exercer l'option susmentionnée. Par suite, le paragraphe I e) ne méconnaît pas le principe d'égalité.

TRAVAIL ET EMPLOI - POLITIQUES DE L'EMPLOI - INDEMNISATION DES TRAVAILLEURS PRIVES D'EMPLOI - Suppression de la garantie de ressources du revenu de remplacement dont peuvent bénéficier les travailleurs involontairement privés d'emploi (loi n° 83-580 du 5 juillet 1983) - Maintien des droits acquis résultant de dispositions législatives ou conventionnelles ou d'engagements conventionnels pris avec l'Etat - Décret n° 83-714 du 2 août 1983 - (1) Article 1er - paragraphe I e) - Absence de violation du principe d'égalité - (2) Article 1er - paragraphe I f) - Absence de violation du principe d'égalité.

01-04-03-01(2), 66-10-02(2) Aux termes du paragraphe I f) de l'article 1er du décret du 2 août 1983 pris pour l'application de l'article 2 de la loi du 5 juillet 1983 modifiant certaines dispositions du code du travail relatives à la garantie de ressources des travailleurs privés d'emploi, pourront continuer à bénéficier de l'allocation de garantie de ressources ou être admis à en bénéficier au taux de 70 % "les chômeurs dont la rupture du contrat de travail pour cause économique s'est produite alors qu'ils étaient âgés d'au moins 59 ans, sous reserve que leur licenciement leur ait été notifié avant le 27 novembre 1982". Cette disposition n'a, par elle-même, ni pour objet ni pour effet de priver de la garantie de ressources les salariés licenciés entre 55 ans et 59 ans. Elle se borne à fixer à 70 % le taux de la garantie de ressources à laquelle auront droit ses bénéficiaires. Les travailleurs concernés par le paragraphe I f) se trouvent, au regard des règles fixant leur accession à la garantie de ressources, telles que définies par le règlement annexé à la convention du 27 mars 1979 régissant les institutions visées à l'article L.351-2 du code du travail, dans une situation différente de celle des chômeurs moins âgés. Le paragraphe I f) ne méconnaît donc pas le principe d'égalité.


Références :

Code de la sécurité sociale L331
Code du travail L351-5, L351-2, L351-1
Décret 82-991 du 24 novembre 1982 art. 2, art. 3, art. 12
Décret 83-714 du 02 août 1983 art. 1 par. I e, par. I f décision attaquée confirmation
Loi 83-580 du 05 juillet 1983 art. 1, art. 2


Publications
Proposition de citation: CE, 02 nov. 1988, n° 54347
Mentionné aux tables du recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. Daguet
Rapporteur public ?: M. Tuot

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 02/11/1988
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 54347
Numéro NOR : CETATEXT000007753889 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1988-11-02;54347 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award