Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le CENTRE NATIONAL DES INDEPENDANTS ET PAYSANS (C.N.I.), dont le siège est ...Université à Paris (75007), représenté par son secrétaire général en exercice, et tendant, d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 88-945 du 5 octobre 1988 relatif à la campagne en vue du référendum du 6 novembre 1988 et, d'autre part, à l'annulation pour excès de pouvoir de l'ensemble des arrêtés, directives ou actes administratifs de toutes natures pris en application des dispositions dudit décret,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée par l'ordonnance du 4 février 1959 portant loi organique sur le Conseil Constitutionnel ;
Vu le décret du 5 octobre 1988 décidant de soumettre un projet de loi au référendum ;
Vu le décret n° 88-944 du 5 octobre 1988 portant organisation du référendum ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Frydman, Auditeur,
- les conclusions de M. Lévis, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation du décret n° 88-945 du 5 octobre 1988 relatif à la campagne en vue du référendum :
Sur la compétence :
Considérant que le décret attaqué est un acte administratif détachable des opérations du référendum ; qu'il appartient au Conseil d'Etat de statuer sur sa légalité ;
Sur la légalité du décret attaqué :
Sur l'article 3 :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 3 du décret attaqué : "Les partis et groupements politiques représentés, à la date du présent décret, au sein d'un groupe parlementaire à l'Assemblée Nationale ou au Sénat sont habilités, à leur demande, à participer à la campagne." ; que le second alinéa de ce même article dispose que : "Il en est de même des autres partis et groupements, sous réserve que les candidats qu'ils ont présentés aient obtenu, au plan national, au moins 5 p. 100 des suffrages exprimés au premier tour de scrutin lors du dernier renouvellement de l'Assemblée Nationale" ;
Considérant qu'en ajoutant au critère tiré de la représentation au sein d'un groupe parlementaire, auquel satisfaisait d'ailleurs le CENTRE NATIONAL DES INDEPENDANTS ET PAYSANS, un critère d'habilitation des partis et groupements politiques tiré des résultats obtenus à l'occasion d'une consultation électorale à caractère national, les auteurs du décret n'ont méconnu aucune disposition législative ou réglementaire ; qu'en choisissant de se référer aux résultats obtenus lors du dernier renouvellement de l'Assemblée Nationale, ils n'ont, contrairement à ce que soutient la requête, ni porté atteinte à l'égalité entre les partis et groupements politiques, ni méconnu les prérogatives du Sénat résultant de la Constitution, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'article 7 :
Considérant que le premier alinéa de l'article 7 du décret attaqué prévoit que : "Les principales familles politiques du territoire de la Nouvelle-Calédonie représentées au comité consultatif institué par l'article 2 de la loi n° 88-808 du 12 juillet 1988 disposent chacune, à leur demande, dans les programmes des sociétés nationales de programme, de cinq minutes d'émission télévisée et de cinq minutes d'émission radiodiffusée." ;
Considérant que, lors du référendum dont l'organisation a été décidée par le Président de la République, par décret du 5 octobre 1988, les électeurs seront appelés à se prononcer sur un projet de loi portant dispositions statutaires et préparatoires à l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1998 ;
Considérant, d'une part, qu'eu égard à l'objet de ce référendum, la participation à la campagne des "principales familles politiques du territoire de la Nouvelle-Calédonie" est susceptible d'éclairer le corps électoral sur la portée du choix qui lui est proposé et de concourir ainsi utilement à l'expression du suffrage ; que, compte tenu de l'intérêt général qui s'attache ainsi à cette participation, les auteurs du décret attaqué ont pu, sans discrimination illégale, prévoir que ces "principales familles politiques" seraient admises à participer à la campagne nationale en vue du référendum sans avoir à satisfaire aux conditions d'habilitation applicables aux autres organisations politiques en vertu de l'article 3 précité ; que, d'autre part, la disposition attaquée ne méconnaît pas le principe d'indivisibilité de la République ;
Sur les autres dispositions du décret attaqué :
Considérant que les conclusions dirigées contre les autres dispositions du décret attaqué ne sont assorties d'aucun moyen ; que lesdites conclusions ne sont par suite pas recevables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE NATIONAL DES INDEPENDANTS ET PAYSANS n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 5 octobre 1988 relatif à la campagne en vue du référendum ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation des "textes pris pour l'application" du décret attaqué :
Considérant que le CENTRE NATIONAL DES INDEPENDANTS ET PAYSANS se borne à demander l'annulation pour excès de pouvoir des "arrêtés pris sur la base" du décret précité et de "toute directive ou mesure" prise pour l'application de ces dispositions, sans désigner avec une précision suffisante les actes ainsi attaqués ; que les conclusions susanalysées ne sont dès lors pas recevables ;
Article 1er : La requête du CENTRE NATIONAL DES INDEPENDANTS ET PAYSANS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au CENTRE NATIONAL DES INDEPENDANTS ET PAYSANS, au Premier ministre, au ministre de l'intérieur et au ministre des départements et territoires d'outre-mer.