Vu 1°) sous le n° 45 165, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 août 1982 et 22 décembre 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'OFFICE NATIONAL DES FORETS, dont le siège social est ..., représenté par son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 24 juin 1982 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a déclaré responsable, à concurrence de la moitié, des conséquences dommageables résultant de l'accident de voiture survenu à Mlle X... le 11 juillet 1979, alors qu'elle circulait dans la voiture de M. Y... sur une route forestière dite "piste du Truc Vert", sur le territoire de la commune de Lège (33510) ; l'a condamné à verser au propriétaire de la voiture une somme de 1 130 F augmentée des intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 1981 ; enfin a ordonné une expertise sur les préjudices corporel, esthétique et d'agrément subis par la victime ;
2°) rejette la demande présentée pour Mlle X... et M. Y... devant le tribunal administratif de Bordeaux,
Vu 2°) sous le n° 50 740, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 mai et 16 septembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'OFFICE NATIONAL DES FORETS et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 mars 1983 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamné à verser à Mlle X... la somme de 29 155,83 F et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde la somme de 96 688,34 F en réparation de la moitié des conséquences dommageables résultant de l'accident de voiture survenu à Mlle X... le 11 juillet 1979 alors qu'elle circulait dans la voiture de M. Y... sur une route forestière dite "piste du Truc Vert", sur le territoire de la commune de Lège (33510) ;
2°) rejette la demande présentée pour Mlle X..., pour M. Y... et pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde devant le tribunal administratif de Bordeaux,
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Daussun, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS et de Me Coutard, avocat de M. Y... et Mlle X...,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS enregistrées respectivement sous les n°s 45 165 et 50 740 sont relatives aux conséquences d'un même accident ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que si la route forestière dite du "Truc Vert" sise dans la forêt domaniale de Lège et Garonne fait partie du domaine privé de l'Etat, il ressort des pièces versées au dossier qu'elle est affectée à la circulation générale, notamment pour permettre à la population estivale d'accéder à la côte ; qu'en raison de cette affectation, elle a fait l'objet d'aménagements de la part de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS, notamment en vue d'inviter les usagers à y limiter leur vitesse ; qu'il suit de là que les actions en responsabilité nées de l'existence de dommages dus à ce que cette voie n'aurait pas été normalement entretenue par l'office ressortissent à la compétence de la juridiction administrative ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Bordeaux s'est reconnu compétent pour connaître de la demande de Mlle X... ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'accident dont Mlle X... a été victime le 11 juillet 1979, alors qu'elle circulait, dans une voiture appartenant à M. Y..., sur la route forestière du "Truc Vert" de la forêt domaniale de Lège et Garonne (Gironde), a été provoqué par la présence sur la chaussée asphaltée de plusieurs excavations importantes dont, notamment, l'une avait une profondeur de plus de 15 cm ; que l'existence de ces défectuosités et l'absence de toute signalisation du danger ainsi présenté pour la circulation sont constitutifs d'un défaut d'entretien normal de la route de nature à engager la responsabilité de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS ; que, toutefois, Mlle X..., avertie par des panneaux de limitation de vitesse à 50 km/h des précautions à apporter à la conduite de son véhicule sur cette route forestière que la pluie avait, au surplus, rendue glissante, a commis une imprudence en ne ralentissant pas suffisamment l'allure pour aborder la courbe où se trouvaient les excavations ; que cette imprudence est constitutive d'une faute de nature à exonérer partiellement l'OFFICE NATIONAL DES FORETS de sa responsabilité ; que le tribunal administratif de Bordeaux s'est livré à une exacte appréciation des circonstances de l'affaire en condamnant l'OFFICE NATIONAL DES FORETS à réparer la moitié des conséquences dommageables de l'accident ;
Sur la réparation :
Considérant que s'il ne ressort pas du dossier que l'incapacité permanente partielle de Mlle X..., fixée après consolidation à 27 %, ait entraîné une diminution de ses revenus professionnels, elle est à l'origine de troubles de toute nature dans ses conditions d'existence ; que le tribunal en a fait une juste appréciation en évaluant, après expertise, le montant de l'indemnité destiné à les réparer à 135 000 F ; que l'OFFICE NATIONAL DES FORETS, qui n'apporte aucun élément de nature à démontrer, contrairement aux conclusions de l'expert, que l'atteinte à l'intégrité physique de Mlle X... a été exagérée, n'est fondé à demander ni une nouvelle expertise ni une révision de l'estimation faite par le tribunal pour ce chef de préjudice, seul contesté par l'office en appel ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts dus à Mlle X... a été demandée le 12 décembre 1983 ; qu'à cette date, au cas où les jugements n'auraient pas été exécutés, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que ni l'OFFICE NATIONAL DES FORETS par la voie de ses appels principaux, ni Mlle X..., ni M. Y... par celle de leurs appels incidents, ne sont fondés à demander l'annulation ou la réformation des jugements du tribunal administratif de Bordeaux en date des 24 juin 1982 et 17 mars 1983 ;
Article 1er : Les requêtes de l'OFFICE NATIONAL DES FORETS dirigées contre les jugements du tribunal administratif de Bordeaux en date des 24 juin 1982 et 17 mars 1983 et les appels incidents de Mlle X... et de M. Y... dirigés contre les mêmes jugements sont rejetés.
Article 2 : Les intérêts afférents aux indemnités que l'OFFICE NATIONAL DES FORETS a été condamné à verser à Mlle X... par les jugements du tribunal administratif de Bordeaux des 24 juin 1982 et 17 mars 1983 et échus le 12 décembre 1983 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts au cas où les jugements n'auraient pas été exécutés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à Mlle X..., à l'OFFICE NATIONAL DES FORETS, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde et au ministre de l'agriculture et de la forêt.