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01/07/1988 | FRANCE | N°34351

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 01 juillet 1988, 34351


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 20 mai 1981 et 21 septembre 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE MONTSINERY-TONNEGRANDE (Guyane), représentée par son maire en exercice, à ce dûment autorisé par une délibération du conseil municipal de Montsinéry-Tonnegrande en date du 20 juin 1981, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- annule le jugement du 18 février 1981 par lequel le tribunal administratif de Cayenne l'a condamnée à payer à Mlle Henriette X... une somme de quarante mille francs ave

c tous intérêts au jour du jugement en réparation de son éviction irré...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 20 mai 1981 et 21 septembre 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE MONTSINERY-TONNEGRANDE (Guyane), représentée par son maire en exercice, à ce dûment autorisé par une délibération du conseil municipal de Montsinéry-Tonnegrande en date du 20 juin 1981, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- annule le jugement du 18 février 1981 par lequel le tribunal administratif de Cayenne l'a condamnée à payer à Mlle Henriette X... une somme de quarante mille francs avec tous intérêts au jour du jugement en réparation de son éviction irrégulière du poste de secrétaire de mairie ;
2- rejette la demande d'indemnité de Mlle X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Schwartz, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Desaché, Gatineau, avocat de la COMMUNE DE MONTSINERY-TONNEGRANDE et de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de Mlle Henriette X...,
- les conclusions de M. E. Guillaume, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une décision du 10 juin 1983, le Conseil d'Etat statuant au Contentieux a confirmé le jugement par lequel le tribunal administratif de Cayenne a annulé l'arrêté du 12 avril 1977 du maire de la COMMUNE DE MONTSINERY-TONNEGRANDE annulant la nomination de Mlle Henriette X... en qualité de secrétaire de mairie à temps partiel ; que cette décision est fondée sur le fait que cet arrêté avait été pris pour des motifs étrangers à l'intérêt du service ; que, par le jugement attaqué, en date du 18 février 1981, le tribunal administratif de Cayenne a condamné la commune à verser à Mlle X... la somme de 40 000 F en réparation du préjudice subi par elle du fait de la mesure illégale prise à son encontre ;
Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret du 29 octobre 1936 modifié relatif au cumul d'emplois, qui s'applique notamment aux agents des communes : "Nul ne peut exercer simultanément plusieurs emplois rémunérés sur les budgets des collectivités visées par l'article 1er. Est considérée comme emploi ... toute fonction qui, en raison de son importance, suffirait à occuper normalement à elle seule l'activité d'un agent et dont la rémunération, quelle que soit sa dénomination, constituerait, à raison de sa qualité, un traitement normal pour ledit agent ... Il ne pourra être dérogé qu'à titre exceptionnel aux dispositions qui précèdent. Les cumuls autorisés auront une durée limitée ..." ; qu'il ressort des pièces du dossier que les fonctions de secrétaire de mairie à temps partiel à MONTSINERY-TONNEGRANDE comportaient un traitement égal aux huit dixièmes de celui d'un commis ; qu'eu égard à l'importance de cette rémunération, eles doivent être regardées comme ayant constitué un emploi au sens de l'article 7 rappelé ci-dessus ; qu'en vertu de ces dispositions, Mlle X..., qui occupait déjà un emploi de commis dans un bureau d'aide sociale ne pouvait être autorisée à occuper ce second emploi qu'à titre exceptionnel et pour une durée limitée ; qu'ainsi, à la date du jugement attaqué, Mlle X... n'aurait pu continuer à occuper légalement l'emploi de secrétaire de mairie dont elle a été illégalement privée ; que, dans les circonstances de l'affaire, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mlle X... en l'évaluant à 10 000 F ; que, par suite, la COMMUNE DE MONTSINERY-TONNEGRANDE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cayenne l'a condamnée à verser à Mlle X... une indemnité de 40 000 F ;

Considérant que Mlle X... n'établit pas avoir subi un préjudice moral indemnisable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter les conclusions du recours incident de Mlle X... tendant au relèvement de l'indemnité qui lui a été allouée par le jugement attaqué ;
Sur les intérêts :
Considérant que Mlle X... a droit aux intérêts de la somme de 10 000 F à compter du 18 février 1981, date du jugement du tribunal administratif ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 3 décembre 1981, 22 novembre 1982, 16 avril 1986 et 16 mai 1988 ; qu'à la date du 3 décembre 1981 il n'était pas dû une année d'intérêts et qu'il y a donc lieu, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, de rejeter cette demande ; que les 22 novembre 1982, 16 avril 1986 et 16 mai 1988, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions précitées, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Article 1er : La somme que la COMMUNE DE MONTSINERY-TONNEGRANDE a été condamnée à verser à Mlle X... par le jugement du tribunal administratif de Cayenne en date du 18 février 1981 est ramenée de 40 000 F à 10 000 F. Cette somme portera intérêtsau taux légal à compter du 18 février 1981. Les intérêts échus les 22novembre 1982, 16 avril 1986 et 16 mai 1988 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le surplus de la requête de la COMMUNE DE MONTSINERY-TONNEGRANDE et les conclusions du recours incident de Mlle X... sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE MONTSINERY-TONNEGRANDE, à Mlle X... et au ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des départements et des territoires d'outre-mer.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 34351
Date de la décision : 01/07/1988
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMMUNE - AGENTS COMMUNAUX - REMUNERATION - CUMULS - Cumuls d'emplois - Conditions du cumul - Eviction illégale d'un des deux emplois - Modalités de la réparation du préjudice subi.

16-06-07-03, 36-08-04, 60-04-01-01-02 Aux termes de l'article 7 du décret du 29 octobre 1936 modifié relatif au cumul d'emplois, qui s'applique notamment aux agents des communes : "Nul ne peut exercer simultanément plusieurs emplois rémunérés sur les budgets des collectivités visées par l'article 1er. Est considéré comme emploi ... toute fonction qui, en raison de son importance, suffirait à occuper normalement à elle seule l'activité d'un agent et dont la rémunération, quelle que soit sa dénomination, constituerait, à raison de sa qualité, un traitement normal pour ledit agent ... Il ne pourra être dérogé qu'à titre exceptionnel aux dispositions qui précèdent. Les cumuls autorisés auront une durée limitée ...". Les fonctions de secrétaire de mairie à temps partiel à Montsinery-Tonnegrande comportaient un traitement égal aux huit dixièmes de celui d'un commis. Eu égard à l'importance de cette rémunération, elles doivent être regardées comme ayant constitué un emploi au sens de l'article 7 rappelé ci-dessus. En vertu de ces dispositions, Mlle M., qui occupait déjà un emploi de commis dans un bureau d'aide sociale ne pouvait être autorisée à occuper ce second emploi qu'à titre exceptionnel et pour une durée limitée. Ainsi, à la date du jugement attaqué, Mlle M. n'aurait pu continuer à occuper légalement l'emploi de secrétaire de mairie dont elle a été illégalement privée par un arrêté du maire pris pour des motifs étrangers à l'intérêt du service. Dans les circonstances de l'affaire, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par Mlle M. en l'évaluant à 10 000 F.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - REMUNERATION - CUMULS - Cumuls d'emplois - Agents communaux - Conditions du cumul - Eviction illégale d'un des deux emplois - Modalités de la réparation du préjudice subi.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - ABSENCE OU EXISTENCE DU PREJUDICE - EXISTENCE D'UN PREJUDICE INDEMNISABLE - Agents publics - Cumul d'emplois - Eviction illégale d'un des emplois.


Références :

Code civil 1154
Décret du 29 octobre 1936 art. 7


Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 1988, n° 34351
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Coudurier
Rapporteur ?: M. Schwartz
Rapporteur public ?: M. E. Guillaume

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:34351.19880701
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