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22/06/1988 | FRANCE | N°58968

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 22 juin 1988, 58968


Vu la requête, enregistrée le 4 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la societé anonyme "VIVIERS DE PORSGUEN", dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général en exercice et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 29 février 1984 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en réduction des compléments d'impôt sur les sociétés, assortis de pénalités, maintenus à sa charge au titre de chacune des années 1976 à 1979 ;
°2) lui accorde la réduction des droits

et pénalités contestés ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général d...

Vu la requête, enregistrée le 4 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la societé anonyme "VIVIERS DE PORSGUEN", dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général en exercice et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du 29 février 1984 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en réduction des compléments d'impôt sur les sociétés, assortis de pénalités, maintenus à sa charge au titre de chacune des années 1976 à 1979 ;
°2) lui accorde la réduction des droits et pénalités contestés ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Ph. Martin, Commissaire du gouvernement ;
Sur la réintégration d'un avoir de 80 000 F consenti, le 31 octobre 1977, à la société anonyme "VIVIERS DE L'OCEAN" :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 31 octobre 1977, la société anonyme "VIVIERS DE PORSGUEN", qui a pour activité le commerce de gros et de détail de poissons, crustacés et coquillages, à Plouescat (Finistère), a émis une "note d'avoir", pour un montant de 80 000 F, au profit de la société à responsabilité limitée "VIVIERS DE L'OCEAN", à laquelle elle avait vendu des crabes vivants destinés à l'exportation, ledit avoir étant consenti à titre de participation aux pertes subies par cette société du fait de la mortalité des crabes durant leur transport jusqu'au pays de destination ; que l'administration a rapporté cette somme aux bénéfices imposables de l'exercice clos le 31 octobre 1977 par la société "VIVIERS DE PORSGUEN", en se fondant sur ce que l'abandon de recettes ainsi consenti par elle en faveur d'une société dont les parts étaient détenues par ses propres principaux actionnaires et dont les résultats étaient demeurés déficitaires ne s'inscrivait pas dans le cadre d'une gestion commerciale normale et présentait le caractère d'un avantage consenti sans contrepartie ;
Considérant que, si la société "VIVIERS DE PORSGUEN" soutient que les marchandises livrées par elle à la société "VIVIERS DE L'OCEAN" auraient, durant leur transport ultérieur jusqu'au pays de destination, subi des avaries imprévues et dont il était normal qu'elle dédommageât en partie ladite société, elle ne justifie pas de la réalité de ces avaries ; qu'en outre, il résulte de l'instruction qu'elle n'ignorait pas que la société "VIVIERS DE L'OCEAN" ne poursuivrait pas son activité au-delà du 31 octobre 1977 ; qu'ainsi la requérante, qui ne pouvait trouver aucun intérêt commercial à consentir la note d'avoir susmentionnée, ne justifie pas qu'en accordant cette remise de prix partielle à la société "VIVIERS DE L'OCEAN" elle a accompli un acte de gesion commerciale normale ; que, par suite, c'est à bon droit que la somme susindiquée de 80 000 F a été rapportée aux bénéfices imposables de la société "VIVIERS DE PORSGUEN" dans les résultats de l'exercice clos le 31 octobre 1977 ;
Sur la réintégration d'une perte de créances de 249 816 F au titre de l'exercice clos le 31 août 1979 :

Considérant que, s'il résulte de l'instruction que le recouvrement des créances détenues par la société anonyme "VIVIERS DE PORSGUEN" sur l'un de ses clients, pour un montant comptabilisé de 249 816 F, pouvait apparaître douteux, à la clôture de l'exercice, le 31 août 1979, la société, qui n'avait, d'ailleurs, pas renoncé alors à toute diligence pour en obtenir le paiement, n'établit pas que, dès cette date, leur perte présentait un caractère certain et définitif justifiant l'écriture compable contestée ; que, par suite, l'administration en a rapporté à bon droit le montant aux bénéfices imposables de l'exercice clos le 31 août 1979 ;
Sur la réintégration d'une fraction des salaires et des avantages annexes alloués à M. X... au cours de chacun des exercices clos en 1976, 1977, 1978 et 1979 :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 dudit code : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... °1 Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre ... Toutefois, les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations, directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des exercices clos les 31 août de chacune des années 1976, 1977, 1978 et 1979, la société "VIVIERS DE PORSGUEN" a alloué à M. Francis X..., qui était son président-directeur général jusqu'au 1er mars 1976, puis, à compter de cette date, était employé en qualité de "cadre-chauffeur", des salaires et des avantages annexes dont le total s'est élevé respectivement à 234 520 F, 276 852 F, 212 935 F et 188 418 F ; que l'administration, se fondant sur les dispositions précitées de l'article 39 du code, a limité la fraction déductible de ces rémunérations à, respectivement, 65 510 F, 108 796 F, 90 610 F et 103 624 F ;

Considérant qu'il appartient à la societé "VIVIERS DE PORSGUEN", qui ne conteste pas avoir été régulièrement imposée suivant la procédure de rectification d'office, d'apporter la preuve de l'exagération des bases retenues par l'administration ;
Considérant que, si la fraction des rémunérations de M. X... dont l'administration a admis la déductibilité est en rapport avec les fonctions de "cadre-chauffeur" attribuées à l'intéressé après qu'une condamnation pénale l'eut temporairement exclu de la direction de la société et que cette dernière eut été dotée d'un nouveau président-directeur général, assisté d'un directeur-général adjoint, la société requérante justifie que M. X... a continué d'assumer en fait, notamment en ce qui concerne les relations commerciales et la recherche des débouchés, la conduite de l'entreprise, dont il était demeuré l'actionnaire prépondérant ; que, dans ces conditions, la societé "VIVIERS DE PORSGUEN" établit que les rémunérations allouées à M. X... n'étaient pas excessives eu égard aux services effectivement rendus par lui ;
Considérant, en second lieu, qu'en vertu du 5 de l'article 39 du code général des impôts, les "rémunérations directes et indirectes, y compris les remboursements de frais versés aux personnes les mieux rémunérées" ne sont déductibles des bénéfices, lorsqu'elles excèdent un certain montant, fixé par arrêté ministériel, que si elles figurent sur le relevé prévu à l'article 54 quater du code que les entreprises sont tenues de fournir à l'appui de la déclaration de leurs résultats de chaque exercice ;

Considérant qu'il est constant que la société "VIVIERS DE PORSGUEN" n'a mentionné sur le relevé prévu à l'article 54 quater et fourni à l'appui de la déclaration de ses résultats de chacun des exercices vérifiés, ni l'avantage qu'elle a consenti, en 1976, à M. X... en acquittant à son profit une prime d'assurance-vie de 8 050 F, ni des allocations forfaitaires pour frais de déplacement et de mission attribuées à l'intéressé, qui se sont élevées à, successivement, 18 000 F, 26 600 F, 12 650 F et 11 700 F ; que ces éléments, compris dans les rémunérations totales susindiquées de M. X..., lesquelles excédaient, pour les mêmes années, les montants fixés par arrêtés ministériels, ont, par suite, été, à bon droit, rapportés aux bénéfices imposables de la société sur le fondement des dispositions du 5 de l'article 39 du code ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société "VIVIERS DE PORSGUEN" est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande en réduction des compléments d'impôt sur les sociétés et des pénalités maintenus à sa charge au titre de chacune des années 1976 à 1979 dans la mesure où celle-ci correspondait à la déduction, pour l'établissement de ses bénéfices imposables des exercices clos au cours de ces mêmes années, des salaires versés à M. X..., à l'exclusion des llocations et avantages susmentionnés soit, respectivement, 208 470 F, 250 252 F, 200 285 F et 176 718 F ;
Article ler : Il est accordé à la société anonyme "VIVIERS DE PORSGUEN" décharge de la différence entre les compléments d'impôt su les sociétés et les pénalités maintenus à sa charge au titre de chacune des années 1976 à 1979 et le montant des droits et pénalités résultant de bénéfices déterminés sous déduction des salaires versés à M. Francis X... au cours des exercices clos les 31 août de chacune desdites années, pour les montants de, respectivement, 208 470 F, 250 252 F, 200 285 F et 176 718 F.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes, en date du 29 février 1984, est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société "VIVIERS DE PORSGUEN" est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société "VIVIERS DE PORSGUEN" et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget.


Sens de l'arrêt : Réformation décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-04-07 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - REMUNERATION DES DIRIGEANTS -Caractère normal ou excessif de la rémunération - Charge de la preuve.

19-04-02-01-04-07 Une société, régulièrement imposée suivant la procédure de rectification d'office, doit apporter la preuve que la rémunération qu'elle allouait à son président-directeur général n'était pas excessive.


Références :

CGI 39, 54 quater et 209


Publications
Proposition de citation: CE, 22 jui. 1988, n° 58968
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Ducamin
Rapporteur ?: M. Fabre
Rapporteur public ?: M. Ph. Martin

Origine de la décision
Formation : 9 / 7 ssr
Date de la décision : 22/06/1988
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 58968
Numéro NOR : CETATEXT000007626536 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1988-06-22;58968 ?
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