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03/06/1988 | FRANCE | N°41918

France | France, Conseil d'État, 10/ 2 ssr, 03 juin 1988, 41918


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 avril 1982 et 25 août 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour ELECTRICITE DE FRANCE et GAZ DE FRANCE, services nationaux, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 24 février 1982 en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation des articles 11 et 23 de l'arrêté municipal par lequel le maire de la Rochelle a fixé les règles d'occupation et d'exécution des travaux sur le domaine public communal e

t de la décision du maire de la Rochelle du 29 janvier 1981 refusant...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 avril 1982 et 25 août 1982 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour ELECTRICITE DE FRANCE et GAZ DE FRANCE, services nationaux, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 24 février 1982 en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation des articles 11 et 23 de l'arrêté municipal par lequel le maire de la Rochelle a fixé les règles d'occupation et d'exécution des travaux sur le domaine public communal et de la décision du maire de la Rochelle du 29 janvier 1981 refusant de rapporter les dispositions attaquées ;
°2) annule ces articles 11 et 23 de l'arrêté du maire de la Rochelle relatif à l'occupation et à la réalisation des travaux sur le domaine public communal ainsi que la décision du maire de la Rochelle du 29 janvier 1981 refusant de les rapporter ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code des communes ;
Vu l'ordonnance °n 59-115 du 7 janvier 1959 ;
Vu la loi du 15 juin 1906 ;
Vu le décret °n 64-81 du 23 janvier 1964 ;
Vu le décret °n 64-262 du 14 mars 1964 ;
Vu les décrets du 17 janvier 1928 et 27 novembre 1958 ;
Vu les décrets du 15 janvier 1952 et 27 octobre 1961 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de Montgolfier, Auditeur,
- les observations de la SCP Defrénois, Lévis, avocat d'ELECTRICITE DE FRANCE et de GAZ DE FRANCE et de Me Garaud, avocat de la ville de la Rochelle,
- les conclusions de M. Van Ruymbeke, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions de l'appel principal d'ELECTRICITE DE FRANCE et de GAZ DE FRANCE :
Sur la légalité des articles 11 et 23 de l'arrêté du maire de La Rochelle fixant les conditions d'occupation et d'exécution des travaux sur le domaine public communal :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 10 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie électrique : "la concession confère à l'entrepreneur le droit d'exécuter sur les voies publiques et leur dépendances tous travaux nécessaires à l'établissement et à l'entretien des ouvrages en se conformant aux conditions du cahier des charges, des règlements de voirie et des règlements d'administration publique prévus à l'article 18 ci-après" ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 16 du décret du 23 janvier 1964 portant règlement d'administration publique en ce qui concerne le régime des transports de gaz combustibles par canalisations, : "la concession confère au concessionnaire le droit d'exécuter sur et sous les voies publiques et leurs dépendances tous travaux nécessaires à l'établissement et à l'entretien des ouvrages de transport de gaz en se conformant aux conditions du cahier des charges, aux règlements de voire et à toutes autres dispositions réglementaires en vigueur..." ; qu'il ressort de ces dispositions que le droit d'occupation du domaine public routier reconnu à ELECTRICITE DE FRANCE et GAZ DE FRANCE ne peut s'exercer que dans les conditions prévues par les règlements de voirie ; que les autorités compétentes pour édicter ces règlements peuvent subordonner l'exercice du droit dont il s'agit aux conditions qui se révèlent indispensables pour assurer la protection du domaine public routier dont elles ont la charge et en garantir un usage répondant à sa destination ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles 3 et 11 de l'arrêté municipal attaqué que le maire de La Rochelle n'a pas remis en cause le droit permanent d'occupation du domaine public routier reconnu à ELECTRICITE DE FRANCE et GAZ DE FRANCE mais s'est borné à subordonner les conditions d'exécution des travaux projetés par ces établissements publics à son autorisation dans le but d'une meilleure coordination des tranches de travaux prévues par les titulaires du droit d'occupation du domaine public routier communal ; que les dispositions de l'article 11 susvisé n'instaurent pas une interdiction générale et absolue ; que si le décret du 14 mars 1964 relatif aux caractéristiques techniques, aux alignements, à la conservation et à la surveillance des voies communales et l'arrêté du préfet de la Charente-Maritime en date du 25 mai 1964 pris pour son application posent le principe de l'autorisation de droit d'effectuer des travaux pour les concessionnaires dont le cahier des charges a été approuvé, le maire de La Rochelle pouvait subordonner l'exécution des travaux effectués sur le domaine public routier communal à son autorisation préalable, sur le fondement de son pouvoir de police et de conservation dudit domaine, à condition de ne pas porter une atteinte excessive au droit des établissements publics requérants d'occupation du domaine ; qu'en l'occurrence, les dispositions litigieuses de l'article 11 de l'arrêté municipal attaqué ne portent pas une atteinte excessive à ce droit d'occupation permanent du domaine public routier reconnu à ELECTRICITE DE FRANCE et à GAZ DE FRANCE mais se bornent à en réglementer l'exercice ; qu'ELECTRICITE DE FRANCE et GAZ DE FRANCE ne sont dès lors pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de l'article 11 de l'arrêté du maire de La Rochelle relatif à l'occupation et à la réalisation des travaux sur le domaine public communal de cette ville ;

Considérant, en revanche, qu'en posant le principe de l'interdiction, sauf dérogation, de l'exécution de travaux dans les chaussées nouvellement refaites depuis moins de deux ans, l'article 23 de l'arrêté municipal litigieux porte une atteinte excessive au droit d'ELECTRICITE DE FRANCE et de GAZ DE FRANCE d'occupation du domaine public routier que ni le pouvoir de police générale du maire, ni le pouvoir de police spéciale de conservation du domaine public communal qu'il détient ne pouvaient légalement justifier ; qu'ELECTRICITE DE FRANCE et GAZ DE FRANCE sont, par suite, fondés à demander l'annulation du jugement en date du 24 février 1982 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'article 23 de l'arrêté attaqué ;
Sur les conclusions du recours incident de la commune de La Rochelle :
Considérant que l'article 41 de l'arrêté précité du maire de La Rochelle a prévu le remboursement par les permissionnaires, outre du montant des travaux de réfection définitive des tranchées, des dépenses indirectes résultant de la dépréciation des voies entraînée par l'exécution des travaux ; que quelle que soit la nature de cette majoration, redevance, recette fiscale ou augmentation des droits de voirie, le maire de La Rochelle était incompétent pour l'instituer ; que par suite, la commune de La Rochelle n'est pas fondée à demander, par la voie du recours incident, l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a prononcé l'annulation de cet article 41 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 24 février 1982 en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande d'ELECTRICITE DE FRANCE-GAZ DE FRANCE tendant à l'annulation de l'article 23 de l'arrêté du maire de La Rochelle relatif à l'occupation et à l'exécution des travaux sur le domaine public communale, et ledit article 23 sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête d'ELECTRICITE DE FRANCE-GAZ DE FRANCE et le recours incident de la ville de La Rochelle sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à ELECTRICITE DE FRANCE et GAZ DE FRANCE, à la ville de La Rochelle et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10/ 2 ssr
Numéro d'arrêt : 41918
Date de la décision : 03/06/1988
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPETENCE - COMPETENCE EN MATIERE DE DECISIONS NON REGLEMENTAIRES - MAIRE - Incompétence - Arrêté municipal imposant à des permissionnaires de voirie le remboursement de dépenses indirectes résultant de la dépréciation des voies.

24-01-02-01(1), 71-02-03-01(21) Il ressort des dispositions du premier alinéa de l'article 10 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie électrique et du premier alinéa de l'article 16 du décret du 23 janvier 1964 portant règlement d'administration publique en ce qui concerne le régime des transports de gaz combustibles par canalisations que le droit d'occupation du domaine public routier reconnu à Electricité de France et Gaz de France ne peut s'exercer que dans les conditions prévues par les règlements de voirie. Les autorités compétentes pour édicter ces règlements peuvent subordonner l'exercice du droit dont il s'agit aux conditions qui se révèlent indispensables pour assurer la protection du domaine public routier dont elles ont la charge et en garantir un usage répondant à sa destination.

COMMUNE - FINANCES - BIENS - CONTRATS ET MARCHES - BIENS DES COMMUNES - DOMAINE PUBLIC - REGIME - VOIRIE COMMUNALE - Arrêté municipal imposant aux permissionnaires le remboursement de dépenses indirectes résultant de la dépréciation des voies - Arrêté entaché d'incompétence.

24-01-02-01(2), 71-02-03-01(22) Il résulte de la combinaison des articles 3 et 11 de l'arrêté municipal attaqué que le maire de La Rochelle n'a pas remis en cause le droit permanent d'occupation du domaine public routier reconnu à Electricité de France et à Gaz de France mais s'est borné à subordonner les conditions d'exécution des travaux projetés par ces établissements publics à son autorisation dans le but d'une meilleure coordination des tranches de travaux prévues par les titulaires du droit d'occupation du domaine public routier communal. Les dispositions de l'article 11 de l'arrêté susmentionné n'instaurent pas une interdiction générale et absolue. Si le décret du 14 mars 1964 relatif aux caractéristiques techniques, aux alignements, à la conservation et à la surveillance des voies communales et l'arrêté du préfet de la Charente-Maritime en date du 25 mai 1964 pris pour son application posent le principe de l'autorisation de droit d'effectuer des travaux pour les concessionnaires dont le cahier des charges a été approuvé, le maire de La Rochelle pouvait subordonner l'exécution des travaux effectués sur le domaine public routier communal à son autorisation préalable, sur le fondement de son pouvoir de police et de conservation dudit domaine, à condition de ne pas porter une atteinte excessive au droit d'occupation du domaine des établissements publics requérants.

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - REGIME - OCCUPATION - Droit d'occupation du domaine public routier reconnu à E - D - F - et G - D - F - (loi du 15 juin 1906 - décret du 23 janvier 1964) - (1) - RJ1 Droit s'exerçant dans les conditions prévues par des règlements de voirie (1) - Application au domaine public communal - (2) Principe d'une autorisation préalable à l'exécution des travaux - Légalité - (3) Atteinte excessive à ce droit - Interdiction de l'exécution de travaux dans les chaussées nouvellement refaites.

24-01-02-01(3), 71-02-03-01(23) Les dispositions de l'article 11 de l'arrêté du maire de La Rochelle fixant les conditions d'occupation et d'exécution des travaux sur le domaine public communal ne portent pas une atteinte excessive au droit d'occupation permanent du domaine public routier reconnu à Electricité de France et à Gaz de France, mais se bornent à en réglementer l'exercice. En revanche, en posant le principe de l'interdiction, sauf dérogation, de l'exécution de travaux dans les chaussées nouvellement refaites depuis moins de deux ans, l'article 23 de l'arrêté municipal litigieux porte une atteinte excessive au droit d'occupation du domaine public routier reconnu à Electricité de France et à Gaz de France, que ni le pouvoir de police générale du maire, ni le pouvoir de police spéciale de conservation du domaine public communal qu'il détient ne pouvaient légalement justifier.

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - REGIME - OCCUPATION - UTILISATIONS PRIVATIVES DU DOMAINE - REDEVANCES - Arrêté municipal imposant aux permissionnaires le remboursement de dépenses indirectes résultant de la dépréciation des voies - Arrêté entaché d'incompétence.

01-02-03-04, 16-04-02-02-04-01, 24-01-02-01-01-04, 71-02-03-01(1) L'article 41 de l'arrêté du maire de La Rochelle fixant les conditions d'occupation et d'exécution des travaux sur le domaine public communal a prévu le remboursement par les permissionnaires du montant des travaux de réfection définitive des tranchées, mais aussi des dépenses indirectes résultant de la dépréciation des voies entraînée par l'exécution des travaux. Quelle que soit la nature de cette majoration, redevance, recette fiscale ou augmentation des droits de voirie, le maire de La Rochelle était incompétent pour l'instituer.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - CONCLUSIONS RECEVABLES EN APPEL - CONCLUSIONS INCIDENTES - Conclusions recevables - Conclusions principales tendant à l'annulation de deux articles d'un arrêté municipal relatif à l'occupation et à la réalisation des travaux sur le domaine public - Conclusions incidentes de la commune tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif - en tant qu'il a annulé un autre article du même arrêté.

54-08-01-02-02 Litige principal portant, en appel, sur la légalité, contestée par E.D.F. et G.D.F., d'un arrêté municipal fixant les règles d'occupation et d'exécution des travaux sur le domaine public communal. Ne soulèvent pas un litige distinct, et sont par suite recevables les conclusions incidentes de la commune tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif en tant qu'il a annulé un autre article de l'arrêté municipal qui imposait aux permissionnaires un remboursement des dépenses indirectes résultant de la dépréciation des voies.

VOIRIE - REGIME JURIDIQUE DE LA VOIRIE - OCCUPATIONS PRIVATIVES DE LA VOIE PUBLIQUE - DROITS ET OBLIGATIONS DU PERMISSIONNAIRE (1) Arrêté municipal imposant aux permissionnaires le remboursement de dépenses indirectes résultant de la dépréciation des voies - Arrêté entaché d'incompétence - (2) Droit d'occupation du domaine public routier reconnu à E - D - F - et G - D - F - (loi du 15 juin 1906 et décret du 23 janvier 1964) - (21) - RJ1 Droit s'exerçant dans les conditions prévues par des règlements de voirie (1) - (22) - RJ1 Principe d'une autorisation préalable à l'exécution des travaux - Légalité (1) - (23) Atteinte excessive au droit d'E - D - F - -G - D - F - Interdiction des travaux sur les chaussées nouvellement refaites.


Références :

Décret 64-262 du 14 mars 1964
Décret 64-81 du 23 janvier 1964
Loi du 15 juin 1906 art. 10 et 18

1.

Cf. 1985-03-13, Ministre des transports c/ G.D.F. et E.D.F., p. 78


Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 1988, n° 41918
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. de Montgolfier
Rapporteur public ?: M. Van Ruymbeke

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:41918.19880603
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