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15/04/1988 | FRANCE | N°57399

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 15 avril 1988, 57399


Vu la requête, enregistrée le 3 mars 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société anonyme "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères", dont le siège est ..., représentée par le président de son conseil d'administration, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement du 24 janvier 1984 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en réduction de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1974 au 31 décembre 1977 par avis de mise en recouvrement du 24 janvier 198

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°2 lui accorde une réduction de 77 541,79 F en droits et pénalités ...

Vu la requête, enregistrée le 3 mars 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société anonyme "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères", dont le siège est ..., représentée par le président de son conseil d'administration, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement du 24 janvier 1984 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en réduction de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1974 au 31 décembre 1977 par avis de mise en recouvrement du 24 janvier 1980 ;
°2 lui accorde une réduction de 77 541,79 F en droits et pénalités ;
°3 subsidiairement lui accorde la décharge des pénalités pour mauvaise foi, soit 8 751,45 F ;
°4 prononce le remboursement des frais exposés tant en première instance qu'en appel,

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Renauld, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Le Roy, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité en la forme du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre au détail de l'argumentation exposée par le contribuable à l'appui des moyens de sa requête, a répondu de manière suffisante au moyen invoqué par la société anonyme "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères" et qui était tiré de la méconnaissance par l'administration des prescriptions de l'article 1649 septies du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de l'article 4 de la loi du 30 décembre 1977 ; que le tribunal s'est livré à une analyse détaillée des faits et que son jugement n'est entaché d'aucune contradiction de motifs ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, d'une part, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1649 septies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : ... "Dans tous les cas, la procédure de vérification doit comporter l'envoi d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification ..." ;
Considérant qu'il est constant que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée procédant de la vérification de comptabilité dont la société "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères" a fait l'objet en 1978 et qui sont maintenus à sa charge ne concernent que les recettes de la période correspondant aux années 1974, 1975 et 1976 ; que ces années étaient mentionnées dans l'avis de vérification du 20 janvier 1978 comme étant les années soumises à ladite vérification ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes du °2 de l'article 1968 du code général des impôts applicable aux droits en litige : "En tant qu'elle concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible dans lesconditions fixées par l'article 271, la prescription prévue au °1 ne fait pas échec à l'obligation, pour les assujettis à cette taxe, de justifier, par la représentation de documents établis antérieurement à la période non prescrite, le montant de la taxe déductible dont ils prétendent bénéficier" ; qu'en application de ces dispositions, l'administration, pour la détermination du montant de la taxe due au cours de la période soumise à vérification, est en droit de contrôler toutes les opérations qui ont concouru à la formation du crédit de taxe déductible quelles qu'en puissent être les dates, sans que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le contrôle ainsi exercé constitue, eu égard à son objet et aux limites qui lui sont assignées, une extension de la procédure de vérification de la comptabilité à des années qui n'ont pas été précisées dans l'avis prévu à l'article 1649 septies ; que la société "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères" ne saurait, dès lors, utilement invoquer, pour contester la régularité de la procédure d'imposition, la circonstance que le vérificateur a recherché dans les écritures de l'année 1973 les éléments propres à définir le montant de la taxe déductible au 1er janvier 1974 ;

Considérant que la circonstance que l'administration a, par erreur, mentionné comme point de départ de la période d'imposition, dans divers documents et notamment dans le rapport qu'elle a adressé à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la date du 1er août 1973 au lieu de celle du 1er janvier 1974 et que cette simple erreur matérielle figure également dans l'avis de mise en recouvrement est, par elle-même, sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : "1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération" ; qu'aux termes de l'article 223 de l'annexe II au même code, pris sur le fondement des dispositions de l'article 273 pour l'application de l'article 271 précité : "1. La taxe dont les entreprises peuvent opérer la déduction est ... celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures ... 2. La déduction ne peut être opérée si les entreprises ne sont pas en possession ... desdites factures ..." ; que ces dispositions, contrairement à ce que soutient la société requérante, n'ont ni pour objet ni pour effet de rendre obligatoire, en matière de location d'immeubles, la délivrance au preneur de factures par le bailleur ; que, par "facture", au sens desdites dispositions, il faut entendre, en effet, tout document, suffisamment précis et détaillé, permettant de connaître la nature des fournitures et prestations, l'identité du débiteur et celle du créancier ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que la société anonyme "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères", en 1974 et 1976, n'était pas en possession de documents délivrés par la société de fait "BRIATTE", son bailleur, et pouvant tenir lieu de factures pour l'application des dispositions précitées, lorsqu'elle a opéré les déductions de la taxe ayant grevé les loyers mentionnés dans les déclarations produites par elle au titre des années susmentionnées ; que la société requérante ne justifie pas devant le juge de l'impôt que les déclarations de taxes sur le chiffre d'affaires dont la société de fait "BRIATTE" lui communiquait les doubles comportaient les mentions nécessaires pour permettre de les regarder comme les documents ci-dessus définis et, notamment, l'identité du débiteur ; que, par suite, et alors même qu'elle aurait effectivement grevé des opérations imposables, la taxe sur la valeur ajoutée versée par le bailleur du chef des locations de locaux et de matériels consentis à la société "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères" n'était pas déductible par celle-ci de celle dont elle était redevable à raison de ses propres affaires ;
Sur les pénalités :
Considérant que l'administration n'établit pas que le comportement de la société requérante au cours de l'exercice clos en 1974 soit, notamment en ce qui concerne certaines déductions de taxe, exclusif de la bonne foi alors, d'ailleurs, qu'il est constant que la société a commis au cours de la période d'imposition d'autres erreurs de même nature à son détriment ; que, par suite, la société est fondée à demander la décharge de la majoration de 60 % qui, en application de l'article 1789 du code général des impôts, lui a été infligée sur un montant de droits éludés de 14 585,76 F au titre de l'année 1974 ; qu'il y a lieu, toutefois, de substituer à la pénalité ainsi appliquée les indemnités de retard prévues par l'article 1727 du même code dont le montant doit, cependant, être limité, en tout état de cause, à celui des majorations indûment appliquées ;
Article 1er : Les indemnités de retard prévues à l'article 1727 du code général des impôts sont substituées à la majoration de 60 % appliquée à un montant de droits s'élevant à 14 585,76 F au titre de la période correspondant à l'année 1974 dans la limite du montant de la majoration indûment mise à la charge de la société "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères".
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 24 janvier 1984 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères" est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société "ETABLISSEMENTS BRIATTE Frères" et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 57399
Date de la décision : 15/04/1988
Sens de l'arrêt : Réformation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-06-02-07-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PROCEDURE DE TAXATION - PROCEDURE DE REDRESSEMENT -Vérification du montant de taxe déductible au 1er janvier d'une année sur les années antérieures - Absence de nécessité de mentionner ces dernières dans l'avis de vérification.

19-06-02-07-03 Aux termes du 2° de l'article 1968 du code général des impôts : "en tant qu'elle concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible dans les conditions fixées par l'article 271, la prescription prévue au 1° ne fait pas échec à l'obligation, pour les assujettis à cette taxe, de justifier, par la présentation de documents établis antérieurement à la période non prescrite, le montant de la taxe déductible dont ils prétendent bénéficier". En application de ces dispositions, l'administration, pour la détermination du montant de la taxe due au cours de la période soumise à vérification, est en droit de contrôler toutes les opérations qui ont concouru à la formation du crédit de taxe déductible, quelles qu'en puissent être les dates, sans que le contrôle ainsi exercé constitue, eu égard à son objet et aux limites qui lui sont assignées, une extension de la procédure de vérification de la comptabilité à des années qui n'auraient pas été précisées dans l'avis prévu à l'article 1649 septies et qui ne font l'objet d'aucun redressement. Ainsi le vérificateur pouvait rechercher, dans les écritures de l'année 1973 d'une société, les éléments propres à définir le montant de la taxe déductible au 1er janvier 1974 pour des rappels de taxe concernant les années 1974, 1975 et 1976, années mentionnées dans l'avis de vérification.


Références :

. CGIAN2 223
CGI 1649 septies al. 2, 1968 2°, 271, 273, 1789, 1727
Loi 77-1467 du 30 décembre 1977 art. 4 Finances pour 1978


Publications
Proposition de citation : CE, 15 avr. 1988, n° 57399
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Ducamin
Rapporteur ?: M. Renault
Rapporteur public ?: M. Le Roy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:57399.19880415
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