Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er juillet 1983 et 2 novembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. René X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1) annule un jugement, en date du 3 mai 1983, par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande en réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti respectivement au titre des années 1972, 1973 et 1975 et au titre des années 1973 et 1975,
°2) lui accorde la réduction des impositions et pénalités contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu l'article 93-II de la loi °n 83-1179 du 29 décembre 1983 portant loi de finances pour 1984 ;
Vu le III de l'article 81 de la °n 86-1317 du 30 décembre 1986, modifié par l'article 93 de la loi °n 87-1060 du 30 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Teissier du Cros, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Baraduc-Benabent, avocat de M. René X...,
- les conclusions de M. Le Roy, Commissaire du gouvernement ;
Sur les revenus imposés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "1 - Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : °1) Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre. - Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu." ; qu'en vertu du 5 du même article, les rémunérations directes et indirectes des dirigeants, et notamment les dépenses afférentes aux véhicules, "peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise" ; qu'aux termes du 1 de l'article 109 du même code : "Sont considérés comme revenus distribués : °1) Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital" ;
En ce qui concerne les rémunérations servies à M. X... pendant les années 1972 et 1973 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X..., associé majoritaire de la société anonyme "Bearn-Bureau", était lié à celle-ci, par un contrat en date du 25 juin 1965, le chargeant , sur un territoire déterminé, de fonctions de "représentant VRP" pour le compte de cette société, laquelle exploite une entreprise de vente et d'entretiende mobilier et de matériel de bureau ; qu'il prospectait et visitait effectivement la clientèle et jouait un rôle prépondérant dans la réalisation de chiffre d'affaires global de l'entreprise ; que, dès lors, M. X... exerçait dans l'entreprise des fonctions de représentation qui, alors même qu'elles n'auraient pas été de la nature de celles des voyageurs, représentants ou placiers qui sont visées à l'article 29 K) de l'ancien code du travail repris à l'article L.751-1 du nouveau code et qu'elles n'auraient pas donné droit à l'intéressé au bénéfice de la déduction complémentaire pour frais prévus par le °3 de l'article 83 du code général des impôts et par l'article 5 de l'annexe IV audit code, n'en devaient pas moins être prises en compte pour l'appréciation de "l'importance du service rendu au sens du 1-°1) précité de l'article 39 de ce code ;
Considérant que l'administration se prévaut, pour justifier la réintégration dans les bénéfices taxables de la société "Bearn Bureau" à l'impôt sur les sociétés correspondant aux exercices clos les 30 juin 1972 et 1973, de ce que les rémunérations servies par celle-ci à M. X... sont excessives, dans la mesure où elles excèdent respectivement 110 000 F et 120 000 F ; qu'elle soutient à cet effet que M. X... aurait exercé en fait des fonctions dirigeantes ; que, toutefois, elle ne conteste pas que l'intéressé exerçait, outre lesdites fonctions dirigeantes, les fonctions de représentation susindiquées ; que, se fondant seulement sur ce que les rémunérations litigieuses auraient excédé celles qui étaient, à l'époque, servies à leurs dirigeants par des entreprises semblables, alors que lesdites entreprises, qui rémunéraient ainsi des fonctions de dirigeant exercées à titre exclusif, ne peuvent constituer des termes de référence pertinents, l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe dès lors qu'elle ne conteste pas l'irrégularité de l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, du caractère excessif des rémunérations servies à M. X... eu égard à l'importance du service rendu à l'entreprise par ce dernier ;
En ce qui concerne l'avantage en nature consenti à M. X... :
Considérant que, n'apportant ainsi aucune justification, du caractère excessif des rémunérations directes ou indirectes versées à M. X..., l'administration ne justifie pas davantage qu'en laissant à ce dernier la disposition, pour son usage privé, d'un véhicule de tourisme qui figurait dans ses immobilisations la société aurait consenti à son dirigeant un avantage excessif ;
Considérant, dès lors, que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a réintégré dans les bénéfices de la société "Bearn Bureau" les parts, jugées excessives par elle, des rémunérations et de l'avantage ci-dessus et a imposé ces parts entre ses mains, sur le fondement des dispositions du °1) de l'article 109 du code, comme excédents de distribution ; qu'il y a lieu, en conséquence, de réduire les revenus imposables de M. X... des fractions des rémunérations litigieuses correspondant aux années civiles 1972 et 1973, soit 71 974 F et 61 434 F respectivement, et, d'autre part, des parties de l'avantage en nature correspondant aux années civiles 1972, 1973 et 1975 et imposées dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers, soit 1 750 F, 2 250 F et 1 500 F respectivement ; que la réduction des bases taxables de ces montants entraîne la décharge des impositions litigieuses des années 1972 et 1973 et la réduction de la base d'imposition de l'année 1975 de 1 500 F ;
Sur les revenus imposés dans la catégorie des traitements et salaires, au titre des années 1974 et 1975 :
En ce qui concerne l'avantage en nature :
Considérant, d'une part, que, si le requérant soutient qu'il aurait effectivement pris à sa charge la part des frais d'entretien correspondant à l'utilisation privée du véhicule susmentionné, il n'apporte aucune justification à l'appui de son allégation ; que la circonstance que la société aurait manqué à son obligation contractuelle de remplacer ce véhicule pour cause de vétusté est sans influence sur l'imposition de l'avantage ainsi consenti, dès lors que le requérant ne conteste pas l'évaluation de cet avantage par l'administration ; qu'ainsi, M. X... n'apporte aucun élément de nature à démentir la réalité de l'avantage en nature que lui a consenti la société, en lui laissant la disposition, pour son usage privé, du véhicule dont s'agit ;
Considérant, d'autre part, que la circonstance qu'eu égard aux servcies rendus, l'avantage en nature dont s'agit n'était pas excessif ne mettait pas obstacle à ce que l'administration imposât une partie dudit avantage dans la catégorie des traitements et salaires ;
En ce qui concerne les frais de formation professionnelle :
Considérant que, dans un avis émis le 5 octobre 1977, lequel est distinct de l'avis du 6 novembre 1978 dont l'irrégularité n'est pas contestée, la commission départementale des impôts a estimé que les sommes perçues par M. X... à titre de formation professionnelle doivent être regardées comme des compléments de salaire" ; que, ne contestant pas avoir perçu ces sommes, le requérant n'apporte pas la preuve qui lui incombe ;
Sur les pénalités :
Considérant que M. X... n'a pas contesté devant les premiers juges les pénalités mises à sa charge ; que ses conclusions relatives aux pénalités qui sont présentées pour la première fois devant le Conseil d'Etat, ne sont, dès lors, pas recevables ;
Article 1er : Le revenu imposable de M. X... au titre de l'année 1975 est réduit de 1 500 F.
Article 2 : Il est accordé à M. X..., d'une part, la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti, respectivement, au titre des années 1972 et 1973 et au titre de l'année 1973, d'autre part la réduction, pénalités comprises, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et à la majoration exceptionnelle auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1975 découlant de ce qui est dit à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Pau, en date du 3 mars 1983, est réformé en ce qu'il a de contraire àla présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête susvisée deM. X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X... etau ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.