Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 mai 1983 et 26 septembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'Association Indépendante pour la défense des élèves de l'Ecole Nationale d'administration A.I.D.E-E.N.A. , dont le siège social est ...Université à Paris 75007 , représentée par son président en exercice, et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 83-229 du 22 mars 1983 pris pour l'application de la loi n° 83-26 du 19 janvier 1983 modifiant l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 4 février 1959 ;
Vu la loi n° 83-86 du 19 janvier 1983 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Pepy, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de M. C... et autres,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'intervention de l'Association des anciens élèves de l'Ecole Nationale d'Administration et sur la recevabilité de la requête :
Considérant d'une part que si l'association des anciens élèves de l'E.N.A. a intérêt à l'annulation du décret n°83-229 du 22 mars 1983 attaqué par la requête de l'Association Indépendante pour la défense des élèves de l'E.N.A. et si, par suite, son intervention sur ce point peut être admise, elle n'est en revanche pas recevable lorsqu'elle demande l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 1984 "fixant les emplois offerts aux élèves issus du troisième concours d'accès à l'E.N.A. terminant leur scolarité au mois de mai 1985", contre lequel aucune conclusion n'a été dirigée par la requête de l'Association Indépendante pour la défense des élèves de l'E.N.A. ;
Considérant, d'autre part, que les conclusions de l'Association Indépendante pour la défense des élèves de l'E.N.A. tendent également à l'annulation, par voie de conséquence, des mesures réglementaires et individuelles prises pour l'application du décret du 22 mars 1983, et notamment des arrêtés du 22 mars 1983 ; que toutefois ces conclusions enregistrées le 26 septembre 1983 sont tardives en tant qu'elles sont dirigées contre les arrêtés du 22 mars 1983 publiés au Journal Officiel du 26 mars 1983 ; qu'en outre, lorsqu'elles tendent, sans autre précision permettant de les identifier, à l'annulation des mesures réglementaires et individuelles prises pour l'application du décret attaqué, elles ne sont pas recevables ; qu'il suit de là que l'intervention de l'association des anciens élèves de l'E.N.A. ne saurait non plus être admise en tant qu'elle concerne ces conclusions ;
Sur l'intervention de MM. C..., D..., F..., X..., A..., Y..., E..., B... et G... :
Considérant que MM. C..., D..., F..., X..., Z..., Y...
E..., B... et G... ont intérêt au maintien du décret attaqué ; qu'ainsi leur intervention est recevable ;
Sur la légalité du décret attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 20 bis introduit dans l'ordonnance du 4 février 1959 par la loi n°83-26 du 19 janvier 1983, "Pour cinq nominations prononcées dans chacun des corps recrutés par la voie de l'Ecole Nationale d'Administration parmi les anciens élèves de cette école, à l'issue de leur scolarité, une nomination peut être prononcée parmi les candidats déclarés admis à un concours de sélection sur épreuves ouvert aux personnes justifiant de l'exercice durant huit années au total de l'une ou de plusieurs des fonctions suivantes... Les nominations interviennent dans chacun des corps, en fonction des choix exercés entre ces corps par les intéressés, dans l'ordre d'une liste établie selon le mérite à l'issue d'une formation dispensée par l'Ecole Nationale d'Administration... Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat" et qu'aux termes de l'article 3 de la loi susvisée : "Dans la limite prévue à l'article 20 bis de l'ordonnance du 4 février 1959, un décret en Conseil d'Etat fixe pour l'ensemble des corps la proportion des nominations prévues à cet article" ;
Sur les dispositions du décret relatives au concours de sélection sur épreuves :
Considérant d'une part que si l'une des épreuves d'admissibilité prévue par l'article 7-2° du décret attaqué consiste en "une conversation avec le jury ayant pour point de départ un dossier composé par le candidat relatif à ses activités antérieures au titre desquelles il a été admis à concourir", il ressort des termes mêmes de ces dispositions que la valeur du candidat est appréciée, non pas sur le dossier, mais sur la conversation avec le jury ; qu'en prévoyant une telle épreuve, le décret attaqué n'a, en tout état de cause, pas violé le principe de l'égalité entre les candidats à un concours ;
Considérant d'autre part que la troisième épreuve d'admissibilité, instituée par l'article 7-3° du décret attaqué, consiste en une épreuve sur dossier ou la rédaction d'une note portant, au choix du candidat, sur une des cinq options prévues ; qu'elle n'a pas pour effet de porter atteinte au principe d'anonymat alors même que le nombre des candidats serait peu élevé et que cette épreuve, corrigée par un membre du jury au moins, se déroulerait peu après l'épreuve orale d'admissibilité prévue par l'article 7-2° ;
Considérant enfin qu'eu égard à la nature du concours institué, le décret attaqué a pu, sans violer le principe d'égalité des candidats, ne prévoir, en son article 13, l'anonymat que pour les seules épreuves écrites ;
Sur les dispositions relatives à la scolarité :
Considérant d'une part qu'il résulte des termes de l'avant dernier alinéa de l'article 20 bis précité de l'ordonnance du 4 février 1959 que le législateur n'a pas entendu interdire au pouvoir réglementaire de conférer aux candidats reçus au concours qu'il institue, comme le fait le 2ème alinéa de l'article 15 du décret attaqué, la qualité d'élève de l'E.N.A., tout en les faisant bénéficier d'une formation, d'un classement et de postes spécifiques ;
Considérant d'autre part que le nombre des postes qui sont ainsi réservés aux candidats reçus à ce concours est déterminé par l'application aux nominations prononcées dans chacun des corps recrutés par la voie de l'E.N.A., parmi les anciens élèves de cette école, d'une proportion unique ; qu'il ressort des termes de la loi susvisée du 19 janvier 1983 éclairée par ses travaux préparatoires que les nominations d'anciens élèves de l'E.N.A. qui servent de base au calcul du nombre de postes spécifiques ainsi offerts et qui sont visées au premier alinéa de l'article 20 bis de l'ordonnance du 4 février 1959 sont, au sens de cet alinéa, uniquement celles des anciens élèves issus des concours externe et interne d'accès à l'E.N.A. ; qu'il suit de là que l'association requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en reconnaissant aux candidats reçus au concours de sélection sur épreuves institué par l'article 20 bis précité la qualité d'élèves de l'E.N.A. le décret attaqué aurait introduit illégalement dans le nombre des nominations qui servent au calcul du nombre des postes offerts aux élèves issus de ce concours celles qui sont intervenues également parmi les anciens élèves issus de ce même concours ; qu'elle ne saurait non plus utilement invoquer à l'encontre des dispositions édictées en application de la loi du 19 janvier 1983 la violation du principe d'égalité entre membres d'un même corps ou la violation des dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 9 octobre 1945 ;
Sur les dispositions diverses et transitoires :
Considérant qu'il appartenait au gouvernement, en vertu des dispositions précitées de l'article 3 de la loi du 19 janvier 1983, de fixer, pour l'ensemble des corps et dans la limite prévue à l'article 20 bis de l'ordonnance du 4 février 1959, la répartition des nominations prévues à cet article ; qu'aucune disposition ni aucun principe général ne lui interdisaient de répartir entre plusieurs textes réglementaires successifs les mesures à prendre pour assurer l'exécution de la loi ; que le gouvernement pouvait donc légalement, ainsi qu'il l'a fait, fixer, par l'article 37 du décret attaqué, la proportion définie à l'article 2 du décret à un pour treize pour la seule année 1983, alors même que les modalités retenues comportent des conséquences sur le calcul du nombre des postes à offrir au titre des années suivantes, que les dispositions ultérieures ne pourraient d'ailleurs méconnaitre sans comporter une rétroactivité illégale ;
Considérant, enfin, que s'il résulte de l'article 3 de la loi du 19 janvier 1983 que le nombre de nominations réservées aux élèves issus du concours de sélection sur épreuves doit être fixé, dans chacun des corps recrutés par la voie de l'Ecole Nationale d'Administration, selon une même proportion des nominations offertes aux élèves issus des concours externe et interne, cette proportion uniforme ne peut être assurée, en raison des effectifs différents des corps, que par référence à une période pluriannuelle ; que pour tenir compte de cette situation, l'article 37 du décret attaqué a pu légalement, dans des dispositions transitoires qui ne méconnaissent pas les limites posées par l'article 20 bis de l'ordonnance du 4 février 1959, prévoir que, lorsque dans un corps donné l'application de la proportion de un pour treize fixée pour le concours ouvert en 1983 conduirait à une fraction inférieure à l'unité, une place pourrait néanmoins être offerte au titre de l'année 1983, sous la triple condition que soit respectée pour ce corps la proportion d'une place pour cinq nominations effectivement prononcées qui est définie à l'article 20 bis de l'ordonnance du 4 février 1959, que le nombre total des places offertes ne dépasse pas celui qui résulte de l'application pour l'ensemble des corps de la proportion de un pour treize et qu'il soit tenu compte, au titre des années suivantes, d'un report négatif égal à la différence entre 1 et la fraction susmentionnée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Association Indépendante pour la défense des élèves de l'E.N.A. n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 22 mars 1983 ;
Article 1er : L'intervention de MM. C..., D..., F..., X..., A..., Y..., E..., B... et G... est admise. L'intervention de l'association des anciens élèves de l'E.N.A. n'est admise qu'en tant qu'elle concerne le décret du 22 mars 1983.
Article 2 : La requête de l'Association Indépendante pour la défense des élèves de l'E.N.A. est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Association Indépendante pour la défense des élèves de l'E.N.A., à l'association des anciens élèves de l'E.N.A., au ministre délégué auprès du Premierministre, chargé de la fonction publique et du Plan et au Premier ministre.