Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 mai 1983 et 9 septembre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'OFFICE PUBLIC DEPARTEMENTAL D'HABITATION A LOYER MODERE D'ILLE-ET-VILAINE, dont le siège est ... à Rennes 35000 , représenté par son président en exercice et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 7 mars 1983 par lequel le tribunal administratif de Rennes a d'une part rejeté ses conclusions tendant à la condamnation du bureau d'études Bourgois, de l'entreprise Plancon et des héritiers de l'architecte X... en réparation des désordres ayant affecté le réseau de distribution de gaz et les installations de chauffage central des logements de la première tranche du lotissement de la Guerche-de-Bretagne, d'autre part a limité à 10 724,28 F la somme que doit verser l'entreprise Boulanger en raison de ces désordres ;
2° condamne l'architecte, le bureau d'études et les entrepreneurs à lui verser en réparation du préjudice subi les sommes de 133 429 F, 21 212 F, 11 450 F, 23 800 F, 68 000 F, 23 290 F avec intérêts de droit ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Bas, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, avocat de l'OFFICE PUBLIC DEPARTEMENTAL D'HABITATION A LOYER MODERE D'ILLE-ET-VILAINE, de Me Roger, avocat de l'entreprise Boulanger, de Me Boulloche, avocat des héritiers de M. X..., et de la SCP Peignot, Garreau, avocat du cabinet Bourgois,
- les conclusions de M. Lasserre, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions dirigées contre le bureau d'études Bourgois :
Considérant que si le cabinet Bourgois a prêté son concours à l'OFFICE PUBLIC DEPARTEMENTAL D'HABITATION A LOYER MODERE D'ILLE-ET-VILAINE pour la réalisation d'un lotissement à la Guerche de Bretagne, il résulte de l'instruction que non seulement aucun contrat exprès n'était intervenu entre ce bureau d'études et l'office, mais encore que ce dernier a refusé de passer un tel contrat et de rémunérer le bureau d'études ; que, dès lors, l'office ne pouvait se prévaloir de l'existence d'un prétendu contrat tacite pour rechercher la responsabilité du cabinet Bourgois ;
Sur les conclusions dirigées contre l'entreprise Plancon et les héritiers de l'architecte X... à raison des désordres ayant affecté le réseau de distribution extérieure de gaz :
Sur la garantie décennale :
Considérant que le procès-verbal de réception définitive des travaux dont s'agit, établi le 25 juin 1971, mentionnait expressément que cette réception définitive était prononcée à compter du 31 décembre 1970, conformément aux stipulations du marché selon lesquelles la réception définitive devait prendre effet un an après la date de la récption provisoire, qui avait elle-même été prononcée le 31 décembre 1969 ; qu'ainsi le point de départ du délai de garantie décennale dont disposait le maître d'ouvrage sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil doit être fixé au 31 décembre 1970 ; que ce délai était donc expiré lorsque l'office a présenté le 18 février 1981 des conclusions dirigées contre l'entreprise Plancon et le 9 juillet 1982 des conclusions dirigées contre les héritiers de l'architecte X... ;
Sur la mise en jeu de la responsabilité sur le fondement de l'article 2262 du code civil :
Considérant que si la responsabilité des constructeurs peut être engagée au-delà du délai de la garantie décennale en cas de fraude ou de dol dans l'exécution du contrat, il n'est pas établi que les constructeurs aient eu recours à des moyens frauduleux pour empêcher les vices de construction d'apparaître ni que les malfaçons constatées soient imputables à des fautes qui, par leur nature et leur importance, soient constitutives d'un dol ;
Sur les conclusions dirigées contre l'entreprise Boulanger et les héritiers de l'architecte X... à raison des désordres ayant affecté le réseau privé secondaire de distribution de gaz et le chauffage central :
Sur la garantie décennale :
Considérant qu'en vertu des stipulations de l'article 2-1 du cahier des prescriptions spéciales du marché passé entre l'Office public départemental d'habitations à loyer modéré d'Ille-et-Vilaine et l'entreprise Boulanger, l'entrepreneur était soumis à l'ensemble des documents cités audit article et notamment au cahier des prescriptions communes applicables aux marchés du bâtimant annexé au décret n° 62-1279 du 20 octobre 1962 ; qu'il résulte de l'article 7-4 de ce cahier que l'action en garantie décennale visée au 4è alinéa de l'article 47 du cahier des clauses administratives générales approuvé par le décret n° 61-529 du 8 mai 1961 court à partir de la date de la réception provisoire ;
Considérant que la réception provisoire des travaux effectués par l'entreprise Boulanger a été prononcée les 20 octobre 1969, 3 novembre 1969, 31 mars 1970 et 1er juin 1970 ; que l'office a donné son accord à ces réceptions provisoires sous les seules réserves figurant aux procès-verbaux, dont aucune ne portait sur la distribution du gaz et les installations de chauffage central ; qu'ainsi le point de départ du délai de la garantie décennale concernant ces travaux doit être fixé au 1er juin 1970 ; que ce délai était donc expiré lorsque l'office a présenté ses conclusions le 18 février 1981 contre l'entreprise Boulanger et le 9 juillet 1982 contre les héritiers de l'architecte X... ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que l'Office public départemental d'habitations à loyer modéré d'Ille-et-Vilaine n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses conclusions dirigées contre le bureau d'études Bourgois, l'entreprise Plancon et les héritiers de l'architecte X..., et, d'autre part, que l'entreprise Boulanger est fondée à demander, par la voie de l'appel incident l'annulation du même jugement en tant qu'il a déclaré que l'action en garantie décennale n'était pas tardive à son égard et l'a condamnée à payer à l'office la somme de 10 724,28 F, avec les intérêts et les intérêts des intérêts ainsi qu'une somme de 1 000 F au titre des frais d'expertise ;
Article 1er : La requête de l'Office public départemental d'habitations à loyer modéré d'Ille-et-Vilaine est rejetée.
Article 2 : Les articles 1, 2, 3, 4 et 5 du jugement du tribunaladministratif de Rennes en date du 7 mars 1983 sont annulés.
Article 3 : Les conclusions de la demande de l'OFFICE PUBLIC DEPARTEMENTAL D'HABITATION A LOYER MODERE D'ILLE-ET-VILAINE dirigées contre l'entreprise Boulanger sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'OFFICE PUBLICDEPARTEMENTAL D'HABITATION A LOYER MODERE D'ILLE-ET-VILAINE, au bureau d'études Bourgois, aux entreprises Boulanger et Plancon, aux héritiers de M. X... architecte, et au ministre de l'équipement, dulogement, de l'aménagement du territoire et des transports.