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16/04/1986 | FRANCE | N°35704

France | France, Conseil d'État, 1 /10 ssr, 16 avril 1986, 35704


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 juillet 1981 et 16 novembre 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le Syndicat de la magistrature, dont le siège est situé ... à Paris 75015 , agissant poursuites et diligences de ses représentants en service, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule :
1- les dispositions de l'article 45 du décret n° 81-500 du 12 mai 1981 modifiant certaines dispositions du code de l'organisation judiciaire, en tant qu'elles ajoutent un article R.321-44 au code de l'organisation judiciair

e ;
2- l'article 1er du décret n° 81-527 du 12 mai 1981 modifi...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 juillet 1981 et 16 novembre 1981 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le Syndicat de la magistrature, dont le siège est situé ... à Paris 75015 , agissant poursuites et diligences de ses représentants en service, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule :
1- les dispositions de l'article 45 du décret n° 81-500 du 12 mai 1981 modifiant certaines dispositions du code de l'organisation judiciaire, en tant qu'elles ajoutent un article R.321-44 au code de l'organisation judiciaire ;
2- l'article 1er du décret n° 81-527 du 12 mai 1981 modifiant et complétant le décret n° 58-1277 du 22 décembre 1958 portant règlement d'administration publique pour l'application de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature ;
3- le décret n° 81-529 du 12 mai 1981 modifiant certaines dispositions relatives à l'organisation judiciaire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'organisation judiciaire ;
Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Faure, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat du Syndicat de la magistrature,
- les conclusions de M. Boyon, Commissaire du gouvernement ;
Sur la compétence de l'auteur des décrets attaqués :

Considérant qu'il a été mis fin aux fonctions de M. Raymond X..., Premier ministre, et des membres de son gouvernement par décret du Président de la République en date du 13 mai 1981 ; qu'ainsi, le syndicat de la magistrature n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que M. Raymond X... n'aurait pas été compétent pour prendre le 12 mai 1981 les décrets attaqués ;
Sur le décret n° 81-500 du 12 mai 1981 modifiant certaines dispositions du code de l'organisation judiciaire :
Sur les conclusions du garde des sceaux, ministre de la justice tendant à ce que la requête soit déclarée sans objet :
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les dispositions de l'article R.321-44, ajouté au code de l'organisation judiciaire par l'article 45 du décret n° 81-500 du 12 mai 1981, n'aient pas reçu application avant leur modification par le décret n° 81-1154 du 28 décembre 1981 ; que, par suite, les conclusions de la requête dirigée contre le décret n° 81-500 du 12 mai 1981 ne sont pas devenues sans objet du fait de l'intervention du décret du 28 décembre 1981 ;
Sur la légalité des dispositions attaquées :
Considérant qu'aux termes de l'article R.321-44 susmentionné : "Pendant la première quinzaine du mois qui précède l'année judiciaire, le président du tribunal de grande instance fixe par ordonnance, après avis du magistrat chargé de la direction et de l'administration de la juridiction, le nombre, le our et la nature des audiences des tribunaux d'instance situés dans son ressort" ;

Considérant, d'une part, que la modification qui a pour effet de transférer du juge directeur ou du juge d'instance au président du tribunal de grande instance le pouvoir d'organiser les séances de jugement n'a pas affecté le fonctionnement des tribunaux d'instance d'une manière telle que les dispositions attaquées puissent être regardées comme ayant créé un nouvel ordre de juridiction au sens de l'article 34 de la Constitution ; que le syndicat requérant n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que cette modification relevait du domaine de la loi ;
Considérant, d'autre part, que le pouvoir attribué par l'article R.321-44 au président du tribunal de grande instance de fixer le calendrier des audiences des tribunaux d'instance situés dans son ressort n'est pas de nature à porter atteinte à l'indépendance des magistrats chargés d'assurer le service de ces tribunaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'article 45 du décret n° 81-500 du 22 mai 1981, en tant qu'il a ajouté un article R.321-44 au code de l'organisation judiciaire ;
Sur le décret n° 81-527 du 22 mai 1981 modifiant et complétant le décret n° 58-1277 du 22 décembre 1958 portant règlement d'administration publique pour l'application de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature :
Considérant qu'aux termes de l'article L.321-5 du code de l'organisation judiciaire, issu de la loi n° 70-613 du 10 juillet 1970 modifiant l'ordonnance du 22 décembre 1958 : "Sauf dérogation prévue par décret en Conseil d'Etat, le service des tribunaux d'instance est assuré, en ce qui concerne les attributions dévolues aux magistrats du siège, par les magistrats des tribunaux de grande instance désignés à cet effet pour une durée de trois années renouvelable dans les formes prévues pour la nomination des magistrats du siège. Il peut être mis fin à leurs fonctions par un décret pris en la même forme" ;

Considérant que les dispositions du décret attaqué, qui ont supprimé de la liste des fonctions dévolues aux magistrats du second grade les fonctions de juge directeur d'un tribunal d'instance et de juge d'instance, n'ont pas eu pour objet et n'auraient pu avoir légalement pour effet de soustraire les magistrats affectés au service des tribunaux d'instance à l'application des règles de nomination et de cessation de fonctions fixées par l'article L.321-5 précité du code de l'organisation judiciaire ; que, par suite, le moyen tiré par le syndicat requérant tant de la méconnaissance de ces dispositions législatives que de l'atteinte portée, du fait de la précarité de l'emploi de magistrat chargé du service d'un tribunal d'instance, aux principes d'indépendance et d'inamovibilité des magistrats du siège doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'article 1er du décret n° 81-527 du 12 mai 1981 ;
Sur le décret n° 81-529 du 12 mai 1981 modifiant certaines dispositions relatives à l'organisation judiciaire :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 81-529 du 12 mai 1981, "les dispositions des articles R.321-39 et R.321-40 du code de l'organisation judiciaire sont abrogées. - Le service des tribunaux d'instance ayant leur siège à Paris ou dans les départements de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne et des Hauts-de-Seine est assuré, conformément aux dispositions de l'article L.321-5 du code de l'organisation judiciaire, par les magistrats du siège du tribunal de grande instance, dans le ressort duquel est situé le tribunal d'instance" ; que, si le syndicat requérant soutient que ces dispositions auraient pour effet d'interdire aux magistrats nouvellement sortis de l'école nationale de la magistrature d'occuper des fonctions dans un des tribunaux d'instance mentionnés ci-dessus et qu'il porterait "atteinte à la hiérarchie judiciaire", ce décret, qui se borne à mettre fin, comme le gouvernement en avait la possibilité à tout moment, à un régime dérogatoire aux dispositions de la loi n° 70-613 du 10 juillet 1970, n'est contraire à aucune disposition législative ; que, par suite, le SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE n'est pas fondé à demander l'annulation du décret n° 81-529 du 12 mai 1981 ;
Article ler : La requête du SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT DE LAMAGISTRATURE, au Premier ministre, au Garde des Sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'économie, des finances et du budget.


Synthèse
Formation : 1 /10 ssr
Numéro d'arrêt : 35704
Date de la décision : 16/04/1986
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - SERVICE PUBLIC DE LA JUSTICE - JURIDICTIONS JUDICIAIRES - ORGANISATION - Suppression des fonctions de juge d'instance.

37-02-01-02, 37-04-02-01[1] Le pouvoir attribué par l'article R.321-44 du code de l'organisation judiciaire au président du tribunal de grande instance de fixer le calendrier des audiences des tribunaux d'instance situés dans son ressort n'est pas de nature à porter atteinte à l'indépendance des magistrats chargés d'assurer le service de ces tribunaux.

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - SERVICE PUBLIC DE LA JUSTICE - JURIDICTIONS JUDICIAIRES - FONCTIONNEMENT - Tribunaux d'instance - Fixation du calendrier des audiences par le président du tribunal de grande instance [article R - 321-44 du code de l'organisation judiciaire] - Atteinte à l'indépendance des magistrats - Absence.

37-02-01-01, 37-04-02-01[2] Les dispositions du décret du 22 mai 1981, qui ont supprimé de la liste des fonctions dévolues aux magistrats du second grade les fonctions de juge directeur d'un tribunal d'instance et de juge d'instance n'ont pas eu pour objet et n'auraient pu avoir légalement pour effet de soustraire les magistrats affectés au service des tribunaux d'instance à l'application des règles de nomination et de cessation de fonctions fixées par l'article L.321-5 du code de l'organisation judiciaire. Par suite, doit être écarté le moyen tiré à l'encontre de ce décret tant de la méconnaissance de ces dispositions législatives que de l'atteinte portée, du fait de la précarité de l'emploi de magistrat chargé du service d'un tribunal d'instance, aux principes d'indépendance et d'inamovibilité des magistrats du siège.

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - MAGISTRATS ET AUXILIAIRES DE LA JUSTICE - MAGISTRATS DE L'ORDRE JUDICIAIRE - STATUT - DROITS - OBLIGATIONS ET GARANTIES [1] Indépendance des magistrats - Fixation du calendrier des audiences des tribunaux d'instance par le président du tribunal d'instance - Atteinte - Absence - [2] Inamovibilité des magistrats du siège - Décret du 22 mai 1981 - Atteinte - Absence.


Références :

Code de l'organisation judiciaire R321-44, L321-5
Décret 81-1154 du 28 décembre 1981
Décret 81-500 du 12 mai 1981 art. 45 décision attaquée confirmation
Décret 81-527 du 22 mai 1981 art. 1 décision attaquée confirmation
Décret 81-529 du 12 mai 1981 art. 1 décision attaquée confirmation
Loi 70-613 du 10 juillet 1970
Ordonnance 58-1270 du 22 décembre 1958
décret 58-1277 du 22 décembre 1958


Publications
Proposition de citation : CE, 16 avr. 1986, n° 35704
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Gazier
Rapporteur ?: M. Faure
Rapporteur public ?: M. Boyon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:35704.19860416
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