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05/05/2021 | BELGIQUE | N°P.21.0458.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 05 mai 2021, P.21.0458.F


N° P.21.0458.F
ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d'Etat à l'Asile et la migration, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, rue Lambermont, 2,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Sophie Matray, avocat au barreau de Liège, et Stamatina Arkoulis, avocat au barreau de Bruxelles,
contre
M. M., sans domicile ni résidence connue en Belgique,
étranger, privé de liberté,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 24 mars 2021 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mi

ses en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, e...

N° P.21.0458.F
ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d'Etat à l'Asile et la migration, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, rue Lambermont, 2,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Sophie Matray, avocat au barreau de Liège, et Stamatina Arkoulis, avocat au barreau de Bruxelles,
contre
M. M., sans domicile ni résidence connue en Belgique,
étranger, privé de liberté,
défendeur en cassation.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 24 mars 2021 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Françoise Roggen a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
En vertu de l'article 74/5, § 1er, 1°, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, peut être maintenu dans un lieu déterminé situé aux frontières, l'étranger passible de refoulement conformément aux articles 3 et 4 de ladite loi.
Devant la chambre des mises en accusation, le demandeur a fait valoir que la décision de maintien prise sur le fondement de cette disposition, ne doit pas faire l'objet d'une motivation incluant un examen individualisé, ainsi que la Cour constitutionnelle en a décidé à propos d'une situation comparable, celle des étrangers présentant à la frontière une demande de protection internationale.
Pour rejeter cette thèse, l'arrêt considère que l'article 62, § 2, de la loi, aux termes duquel les décisions administratives doivent être motivées, accorde aux étrangers, en termes de motivation, une protection plus étendue que celle garantie par l'article 5.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Le moyen critique cette considération. Il fait valoir que la loi nationale ne prévoit pas une protection plus étendue mais n'impose qu'une obligation de motivation identique ou similaire à celle qui résulte de la Convention.
Quand bien même la portée de l'obligation de motiver ne différerait pas d'un ordre juridique à l'autre, il ne s'en déduit pas que la décision de maintien visée à l'article 74/5, § 1er, 1°, ne doive pas être motivée ni que cette motivation puisse faire l'économie d'une appréciation individuelle de la situation de l'étranger sujet à refoulement.
Dénué d'intérêt, le moyen est irrecevable.
Quant à la deuxième branche :
Le moyen reproche à l'arrêt de considérer que la situation des demandeurs de protection internationale à la frontière, détenus sur la base de l'article 74/5, § 1er, 2°, n'est pas nécessairement comparable à celle des étrangers qui tentent d'entrer sur le territoire belge sans être munis d'un passeport ou d'un visa valable, et qui sont maintenus par application de l'article 74/5, § 1er, 1°. Selon le demandeur, ces deux catégories étant comparables, l'absence de nécessité d'un examen individuel, décrétée par la Cour constitutionnelle pour l'une, doit valoir pour l'autre.
Mais l'article 62, § 2, de la loi dispose que les décisions administratives sont motivées par l'indication des faits qui les justifient, ce qui implique un examen individuel de la situation de la personne visée par l'acte. Cette règle est générale et il ne se déduit d'aucune disposition de la loi qu'étant applicable aux étrangers visés par l'article 74/5, § 1er, 1°, elle ne le serait pas aux étrangers visés par l'article 74/5, § 1er, 2°.
Reposant sur l'affirmation du contraire, le moyen manque en droit.
Quant à la troisième branche :
L'article 74/5, § 1er, 1°, de la loi du 15 décembre 1980 permet le maintien, dans un lieu déterminé, de l'étranger passible de refoulement.
Le refoulement est l'acte par lequel l'autorité chargée du contrôle aux frontières refuse l'entrée en Belgique d'un étranger se trouvant dans un des cas prévus par l'article 3 de la loi.
En exigeant, de manière indifférenciée, la motivation des décisions administratives prises en application de la loi, l'article 62, § 2, implique que la décision privative de liberté de l'étranger à refouler indique, de manière individuelle, les faits susceptibles de constituer, dans son chef, un cas de refoulement.
Soutenant le contraire, le moyen manque en droit.
Quant à la quatrième branche :
Le demandeur soutient que la motivation du maintien peut être trouvée dans la référence à la décision de refoulement.
Mais l'acte litigieux n'est pas motivé par référence à cette décision.
Le moyen manque en fait.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de soixante-sept euros septante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du cinq mai deux mille vingt et un par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Formation : Chambre 2f - deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.21.0458.F
Date de la décision : 05/05/2021
Type d'affaire : Droit administratif

Analyses

L'article 62, § 2, de la loi du 15 décembre 1980 dispose que les décisions administratives sont motivées par l'indication des faits qui les justifient, ce qui implique un examen individuel de la situation de la personne visée par l'acte; cette règle est générale et il ne se déduit d'aucune disposition de la loi qu'étant applicable aux étrangers visés par l'article 74/5, § 1er, 1°, elle ne le serait pas aux étrangers visés par l'article 74/5, § 1er, 2° (1); le refoulement est l'acte par lequel l'autorité chargée du contrôle aux frontières refuse l'entrée en Belgique d'un étranger se trouvant dans un des cas prévus par l'article 3 de la loi; en exigeant, de manière indifférenciée, la motivation des décisions administratives prises en application de la loi, l'article 62, § 2, implique que la décision privative de liberté de l'étranger à refouler indique, de manière individuelle, les faits susceptibles de constituer, dans son chef, un cas de refoulement (2). (1) Contra C. const. 25 février 2021, n° 23/2021, § B.122.11. (2) Voir les concl. contraires « dit en substance » du MP. ; Cass. 29 avril 2020, RG P.20.0378.F, Pas. 2020, n° 256, avec concl. contraires du MP. Il importe de relever, quant à la portée de l'obligation de motivation individuelle, dont elle confirme le principe, que la Cour précise ici que la décision de maintien sur pied de l'article 74/5, § 1er, 1°, de la loi du 15 décembre 1980 doit « indique[r] les faits susceptibles de constituer, dans [le] chef [de l'étranger privé de liberté], un cas de refoulement ».

ETRANGERS [notice1]


Références :

[notice1]

Loi - 15-12-1980 - Art. 62, § 2, et 74/5 $ 1er, 1° et 2° - 30 / No pub 1980121550


Composition du Tribunal
Président : DE CODT JEAN
Greffier : GOBERT FABIENNE
Ministère public : NOLET DE BRAUWERE MICHEL
Assesseurs : DEJEMEPPE BENOIT, ROGGEN FRANCOISE, LUGENTZ FREDERIC, STEVENART MEEUS FRANCOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2021-05-05;p.21.0458.f ?

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