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08/12/2020 | BELGIQUE | N°P.20.0683.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 08 décembre 2020, P.20.0683.N


N° P.20.0683.N
L.V.D.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Tanja Smit, avocat au barreau d’Anvers.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 29 mai 2020 par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque six moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt.
Le conseiller Steven Van Overbeke a fait rapport.
L’avocat général Dirk Schoeters a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur la recevabilité du pourvoi
(…)
Sur le premier moyen :
9. Le moyen invoque la viol

ation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 14 ...

N° P.20.0683.N
L.V.D.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Tanja Smit, avocat au barreau d’Anvers.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 29 mai 2020 par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque six moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt.
Le conseiller Steven Van Overbeke a fait rapport.
L’avocat général Dirk Schoeters a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur la recevabilité du pourvoi
(…)
Sur le premier moyen :
9. Le moyen invoque la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 10, 11 et 149 de la Constitution, 65 du Code pénal, 4.2.1.5°, a), et 6.1.1, alinéa 1er, 1°, devenu 6.2.1, alinéa 1er, 1°, du Code flamand de l’aménagement du territoire : la motivation de l’arrêt est illégale et les juges d’appel appliquent la loi de manière incorrecte; l’arrêt considère que les faits ont été commis avec la même intention délictueuse et constituent ensemble une infraction continue dont la prescription ne prend cours qu’à partir du dernier fait, à savoir le 26 janvier 2018, mais omet de motiver quels actes distincts sont à considérer comme ayant des implications en matière d’aménagement du territoire ; le fait d’utiliser généralement, sans autorisation, une parcelle pour l’entreposage de véhicules usagés ou déclassés ou de toutes sortes de matériaux, matériels ou déchets, est une infraction instantanée et l’utilisation ultérieure qui en découle doit être considérée comme une situation de maintien dépénalisée ; l’arrêt opère également, à tort, une distinction entre l’utilisation habituelle d’un terrain sans autorisation et la modification sans autorisation de la fonction principale d’un bâtiment.
10. Le moyen ne précise pas comment ni en quoi l’arrêt viole l’article 6 de la Convention et l’article 14 du pacte précité.
Dans la mesure où il manque de clarté, le moyen est irrecevable.
11. En vertu des articles 4.2.1, 5°, a) et 6.2.1, alinéa 1er, 1°, du Code flamand de l’aménagement du territoire, personne ne peut, sans autorisation urbanistique préalable, utiliser, aménager ou équiper de façon générale un terrain pour l'entreposage de véhicules utilisés ou déclassés, ou de toutes sortes de matériaux, matériels ou déchets.
12. Par utilisation habituelle, le législateur décrétal ne vise pas à instaurer une obligation d’autorisation pour l’entreposage occasionnel de véhicules usagés ou déclassés ou de toutes sortes de matériaux, matériels ou déchets, mais il exige une utilisation du terrain avec une certaine régularité pendant une certaine période avant qu’une autorisation urbanistique soit nécessaire. L’infraction existe dès que l’utilisation générale prend naissance suite à plusieurs actes d’utilisation sans que l’autorisation nécessaire à cet effet ait été obtenue, ce que le juge apprécie souverainement en fait. Cette infraction n’est pas une infraction instantanée, dont l’incrimination découle d’un comportement unique, mais une infraction d’habitude.
13. L’utilisation habituelle continue d’exister tant que le terrain est utilisé pour l’entreposage de véhicules usagés ou déclassés ou de toutes sortes de matériaux, matériels ou déchets, à savoir parce que des actes positifs sont posés par lesquels il est procédé avec une certaine régularité à l’entreposage de véhicules usagés ou déclassés ou de toutes sortes de matériaux, matériels ou déchets, sur le terrain en question. Aussi longtemps qu’il n’est pas question de l’infraction continue de maintien, il s’agit de la simple abstention de mettre fin par un acte quelconque à l’existence de la situation d’utilisation illégale du terrain qui a été créée. La prescription de l’action publique ne commence donc à courir qu’à partir du moment où le terrain n’est plus utilisé pour l’entreposage de véhicules usagés ou déclassés ou de toutes sortes de matériaux, matériels ou déchets par des actes positifs d’entreposage et d’enlèvement de véhicules posés avec une certaine régularité.
Dans la mesure où il procède d’une autre prémisse juridique, le moyen manque en droit.
14. L’arrêt ne constate pas qu’après qu’une situation d’utilisation générale du terrain pour l’entreposage de véhicules usagés ou déclassés ou de toutes sortes de matériaux, matériels ou déchets ait pris naissance, le demandeur se soit limité à maintenir cette situation en état. L’arrêt (…) considère au contraire qu’il ressort des éléments du dossier que des actes constants d’utilisation du terrain dans le sens mentionné ont été posés. En outre, l’arrêt considère (…) qu’il est question d’une manière peu discrète et dérangeante d’empiler les conteneurs et que le demandeur, depuis plusieurs années, offre aux alentours et aux riverains une vue très dérangeante, entre autres en empilant des conteneurs, ce qui est d’autant plus problématique dans une zone résidentielle et encore davantage dans une zone agricole d'intérêt paysager, et en déduit que ces actes ont des implications en matière d’aménagement du territoire.
Dans la mesure où il s'appuie sur une lecture erronée de l'arrêt, le moyen manque en fait.
15. La nature des actes visés aux articles 4.2.1.5°, a), et 6.2.1, alinéa 1er, 1°, du Code flamand de l’aménagement du territoire n’est pas comparable à la nature des actes visés aux articles 4.2.1, 6°, et 6.2.1, alinéa 1er, 1°, du Code flamand de l’aménagement du territoire, qui portent sur la modification entière ou partielle, sans autorisation, de la fonction principale d’un bien immeuble bâti dont la modification de fonction a été désignée comme sujette à l’obligation de permis, de sorte que les auteurs de ces infractions ne se trouvent pas dans une situation juridique comparable.
Dans cette mesure, le moyen manque en droit.
Sur le deuxième moyen :
16. Le moyen invoque la violation des articles 6 de la Convention, 14 du pacte précité, 149 de la Constitution, 4.2.14, §§ 1 et 2, du Code flamand de l’aménagement du territoire: la présomption décrétale d’autorisation vaut également pour l’utilisation de façon générale du terrain pour l’entreposage de véhicules et de matériaux, ce qui doit être considéré comme une présomption prétorienne ; comme il y avait déjà des véhicules entreposés sur la parcelle avant l’année 2000, les actes du demandeur sont couverts par la présomption d’autorisation ; il n’est pas porté atteinte à cette présomption par une période temporaire de non-utilisation, de sorte que les juges d’appel ne peuvent pas légalement déduire de leur constatation selon laquelle aucune concession automobile n’était temporairement présente sur la parcelle, à savoir entre mai 2012 et le 1er janvier 2016, qu’il n’y avait pas de présomption d’autorisation.
17. Le moyen ne précise pas comment ni en quoi l’arrêt viole les articles 6 de la Convention, 14 du pacte précité, 149 de la Constitution et 4.2.14, § 1er, du Code flamand de l’aménagement du territoire.
Dans la mesure où il manque de clarté, le moyen est irrecevable.
18. La présomption d’autorisation visée à l’article 4.2.14, § 2, du Code flamand de l’aménagement du territoire ne vaut pas pour les actes soumis à l’obligation d’autorisation décrits à l’article 4.2.1, 5°, a), et b), du Code flamand de l’aménagement du territoire et consistant à utiliser, aménager ou équiper généralement un terrain pour l’entreposage de véhicules usagés ou déclassés ou de toutes sortes de matériaux, matériels ou déchets ou pour garer des voitures, des véhicules ou des remorques.
Dans la mesure où il procède d’une autre prémisse juridique, le moyen manque en droit.
19. L’arrêt ne considère pas qu’il n’y a pas de présomption d’autorisation parce qu’il y a eu une période temporaire de non-utilisation, notamment parce qu’entre mai 2012 et le 1er janvier 2016 il n’y avait pas de concession automobile présente sur la parcelle.
Dans la mesure où il repose sur une lecture erronée de l'arrêt, le moyen manque en fait.
20. Par un ensemble de motifs, l’arrêt considère (…) que le demandeur, dans la période allant du 1er septembre 2010 au 26 janvier 2018 inclus, a posé des actes constants d’utilisation sans interruption intermédiaire conduisant à la prescription, parmi lesquels l’installation de conteneurs en 2010 et 2016. De ce fait, l’utilisation habituelle d’un terrain sans autorisation n’est pas présumée avoir été accordée mais s’est au contraire poursuivie sans avoir été affectée par la circonstance que le demandeur entreposait et vendait déjà auparavant des véhicules à cet endroit et qu’un autre marchand y vendait également des véhicules avant qu’il achète la parcelle en l’an 2000.
Par ces motifs, l’arrêt justifie légalement la décision selon laquelle il n’y a pas de présomption d’autorisation et la prévention, qui porte sur le fait d’utiliser habituellement la parcelle sans autorisation urbanistique préalable, pour garer des véhicules, empiler des conteneurs avec leurs accessoires et entreposer toutes sortes de matériaux, est établie.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
(…)
Le contrôle d’office
27. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Geert Jocqué, président de section, Peter Hoet, Erwin Francis, Sidney Berneman, et Steven Van Overbeke, conseillers, et prononcé en audience publique du huit décembre deux mille vingt par le président de section Geert Jocqué, en présence de l’avocat général Dirk Schoeters, avec l’assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller François Stévenart Meeûs et transcrite avec l’assistance du greffier Fabienne Gobert.


Synthèse
Formation : Chambre 2n - tweede kamer
Numéro d'arrêt : P.20.0683.N
Date de la décision : 08/12/2020
Type d'affaire : Droit administratif - Droit pénal - Autres

Composition du Tribunal
Président : JOCQUE GEERT
Greffier : VANDEN BOSSCHE KRISTEL, BIRANT AYSE
Ministère public : SCHOETERS DIRK
Assesseurs : VAN VOLSEM FILIP, HOET PETER, LIEVENS ANTOINE, FRANCIS ERWIN, BERNEMAN SIDNEY, COUWENBERG ILSE, VAN DOOREN ERIC, VAN OVERBEKE STEVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-12-08;p.20.0683.n ?

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