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27/10/2020 | BELGIQUE | N°P.20.0587.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 27 octobre 2020, P.20.0587.N


N° P.20.0587.N
FULLCONTROL MEDICAL, société à responsabilité limitée,
prévenue,
demanderesse en cassation,
Me Joost Peeters, avocat au barreau d’Anvers.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 17 avril 2020 par le tribunal correctionnel de Flandre occidentale, division Bruges, statuant en degré d’appel.
La demanderesse invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L’avocat général Dirk Schoeters a conc

lu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
1. Le moyen est pris de la violation de...

N° P.20.0587.N
FULLCONTROL MEDICAL, société à responsabilité limitée,
prévenue,
demanderesse en cassation,
Me Joost Peeters, avocat au barreau d’Anvers.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 17 avril 2020 par le tribunal correctionnel de Flandre occidentale, division Bruges, statuant en degré d’appel.
La demanderesse invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L’avocat général Dirk Schoeters a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
1. Le moyen est pris de la violation de l’article 149 de la Constitution : le jugement attaqué ne répond pas à la défense proposée par la demanderesse concernant la règle de décumul prévue à l’article 5, alinéa 2, du Code pénal ; le jugement attaqué ne mentionne pas, à tort, les conclusions d’appel qui ont été déposées ; en particulier, les juges d’appel ne répondent pas à l’argument selon lequel il ressort du dossier répressif qu’aucune enquête n’a été menée concernant la faute la plus grave et qu’il peut donc être mis en doute que cette dernière ait été commise par la société, étant donné que le gérant n’a pas été impliqué dans la procédure.
2. Aucune disposition n’oblige le juge à faire mention du dépôt de conclusions.
3. En application de l’article 210, alinéa 1er, du Code d’instruction criminelle, le prévenu est entendu en appel sur les griefs précis qui sont invoqués contre le jugement entrepris. La simple réitération d’une défense formulée en première instance ne constitue pas un grief précis au sens de ladite disposition. Les juges d’appel ne sont pas davantage tenus de répondre à une telle défense.
4. Dans la mesure où il procède d’autres prémisses juridiques, le moyen manque en droit.
5. Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que la demanderesse a invoqué la défense mentionnée au moyen dans des conclusions prises devant le premier juge et que le jugement entrepris a par ailleurs répondu à cette défense. La demanderesse a repris mot pour mot cette défense dans ses conclusions d’appel sans critiquer la réponse y apportée par le jugement entrepris. Les juges d’appel n’étaient donc pas tenus de répondre à cette défense identique.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
Sur le second moyen :
Quant à la première branche :
6. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation des articles 29ter et 67ter de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière : le jugement attaqué ne peut condamner la demanderesse du chef d’une infraction à l’article 67ter de la loi du 16 mars 1968 parce qu’il ne ressort aucunement du dossier répressif qu’une infraction initiale a été commise, à savoir une infraction aux articles 37.4 ou 61.1.1° de la même loi.
7. L’obligation prévue à l’article 67ter de la loi du 16 mars 1968 existe indépendamment de la preuve préalable qu’une infraction a été commise et ne requiert donc pas que l’infraction initiale ait été prouvée. Il suffit qu’une infraction à la loi du 16 mars 1968 ou à ses arrêtés d’exécution ait été constatée. L’enquête portant sur cette infraction nécessite l’identification et éventuellement l’interrogatoire du conducteur.
Le moyen, qui, en cette branche, procède d’une autre prémisse juridique, manque en droit.
Quant à la seconde branche :
8. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation des articles 29ter et 67ter de la loi du 16 mars 1968 : les juges d’appel ne tiennent pas suffisamment compte du fait que la demanderesse a pris les mesures nécessaires pour fournir une réponse concernant l’infraction ; le formulaire de réponse a été correctement suivi d’effet ; la demanderesse y a mentionné que le contexte de l’infraction était celui de l’exécution d’un transport prioritaire, de sorte que les éléments constitutifs de l’infraction initiale n’ont pas été prouvés ; si la personne morale ou la personne physique responsable de la personne morale n’est pas en mesure de communiquer l’identité du conducteur qui a commis l’infraction, alors qu’elle a pris les mesures nécessaires pour assurer cette communication, elle n’est pas punissable ; en ne tenant pas compte de la réponse donnée par la demanderesse, les juges d’appel n’ont pas légalement justifié la décision.
9. Dans la mesure où le moyen, en cette branche, a la même portée que le moyen, en sa première branche, il y a lieu de le rejeter pour le motif qui y est énoncé.
10. L’article 67ter, alinéa 1er, de la loi du 16 mars 1968 impose, en cas d’infraction à ladite loi et à ses arrêtés d’exécution commise avec un véhicule à moteur immatriculé au nom d’une personne morale et à défaut d’identification du conducteur au moment de la constatation de l’infraction, l’obligation pour la personne morale de communiquer l’identité du conducteur indiscutable au moment de l’infraction ou, si elle ne la connaît pas, l’identité de la personne responsable du véhicule, sauf si elle peut prouver le vol, la fraude ou la force majeure. Selon l’article 67ter, alinéa 4, de la même loi, applicable en l’espèce, la personne morale en tant que titulaire de la plaque d’immatriculation ou en tant que titulaire du véhicule doit prendre les mesures nécessaires en vue d’assurer le respect de cette obligation. Le non-respect des obligations visées à l’article 67ter de la loi du 16 mars 1968 est passible des peines prévues à l’article 29ter de la même loi.
11. La personne morale au nom de laquelle est immatriculé le véhicule à moteur avec lequel l’infraction a été commise, qui se limite délibérément à déclarer que l’infraction commise avec le véhicule s’inscrivait dans le contexte de l’exécution d’un transport prioritaire sans mentionner l’identité du conducteur au moment des faits ni l’identité de la personne responsable, n’accomplit pas les obligations susmentionnées.
Dans la mesure où il est déduit d’une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.
12. Le jugement attaqué constate que la demanderesse a demandé à la zone de police concernée le classement sans suite de l’affaire parce qu’il s’agissait d’un transport prioritaire réalisé à la demande de la Rode Kruis Vlaanderen et ce, par courrier du 26 février 2018 auquel était annexé un pièce et par lequel était aussi communiqué un document expliquant que la divulgation de l’identité des chauffeurs n’était pas envisageable parce que la demanderesse entendait les protéger et parce que les chauffeurs ne le souhaitaient pas non plus. Ensuite, les juges d’appel ont considéré que :
- ils n’aperçoivent pas en quoi la divulgation de l’identité des conducteurs pourrait leur causer un quelconque préjudice ;
- ces conducteurs doivent également respecter les règles de la circulation et, en outre, des règles particulières et plus souples s’appliquent aux véhicules prioritaires, comme celles relatives au franchissement d’un feu rouge ;
- le fait que le véhicule ait franchi le feu rouge à une vitesse de 31 km/h indique qu’il ne s’y est pas arrêté ;
- il n’est pas exact, comme semble le suggérer la demanderesse, qu’elle a le droit de commettre des infractions en raison du transport spécial ;
- tout cela n’enlève rien au fait que l’infraction à l’article 67ter de la loi du 16 mars 1968 a été prouvée, laquelle est distincte de l’infraction à l’article 61.1.1° de la même loi ;
- l’article 67ter de la loi du 16 mars 1968 ne prévoit pas d’exception pour le transport prioritaire ;
- la ratio legis de l’article 67ter consiste, entre autres, en imposant l’obligation de communiquer l’identité du conducteur dans le cas où il n’a pas été identifié au moment de l’infraction, à l’identifier et à s’assurer de son respect de la législation relative à la circulation routière, ce qui doit être possible quelle que soit la nature du transport.
Par ces motifs, les juges d’appel ont légalement justifié la déclaration de culpabilité de la demanderesse du chef d’une infraction à l’article 67ter de la loi relative à la police de la circulation routière.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Le contrôle d’office
13. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président, Antoine Lievens, Erwin Francis, Ilse Couwenberg et Eric Van Dooren, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-sept octobre deux mille vingt par le conseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence de l’avocat général Dirk Schoeters, avec l’assistance du greffier Kristel Vanden Bossche
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Frédéric Lugentz et transcrite avec l’assistance du greffier Fabienne Gobert.


Synthèse
Formation : Chambre 2n - tweede kamer
Numéro d'arrêt : P.20.0587.N
Date de la décision : 27/10/2020
Type d'affaire : Droit pénal - Autres

Analyses

En application de l'article 210, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle, le prévenu est entendu en appel sur les griefs précis qui sont invoqués contre le jugement entrepris; la simple réitération d'une défense formulée en première instance ne constitue pas un grief précis au sens de ladite disposition, et les juges d'appel ne sont pas davantage tenus de répondre à une telle défense (1). (1) Cass 24 novembre 2015, RG P.14.1192.N, Pas. 2015, n° 694 ; Cass. 8 septembre 2015, RG P.14.1752.N, Pas. 2015, n° 494.

APPEL - MATIERE REPRESSIVE (Y COMPRIS DOUANES ET ACCISES) - Procédure en degré d'appel - Prévenu - Précision des griefs - Réitération de la défense formulée en première instance - Conséquence - MOTIFS DES JUGEMENTS ET ARRETS - EN CAS DE DEPOT DE CONCLUSIONS - Matière répressive (y compris les boissons spiritueuses et les douanes et accises) - Procédure en degré d'appel - Prévenu - Précision des griefs - Réitération de la défense formulée en première instance - Conséquence [notice1]

L'obligation prévue à l'article 67ter de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière existe indépendamment de la preuve préalable qu'une infraction a été commise et ne requiert donc pas que l'infraction initiale ait été prouvée; il suffit qu'une infraction à la loi du 16 mars 1968 ou à ses arrêtés d'exécution ait été constatée (1). (1) Cass. 6 mars 2018, RG P.17.0190.N, Pas. 2018, n° 147 ; Cass. 27 octobre 2009, RG P.09.0778.N, Pas. 2009, n° 620 ; S. STALLAERT, “De strafrechtelijke aansprakelijkheid van rechtspersonen en wegverkeer: artikel 67ter Wegverkeerswet en het belang van de pleitbezorger”, T.Strafr. 2013, (105) 108.

ROULAGE - LOI RELATIVE A LA POLICE DE LA CIRCULATION ROUTIERE - DISPOSITIONS LEGALES - Article 67 - Article 67ter - Obligation de communiquer l'identité du conducteur - Condition [notice3]

La personne morale au nom de laquelle est immatriculé le véhicule à moteur avec lequel l'infraction a été commise qui se limite délibérément à déclarer que l'infraction commise au moyen du véhicule s'inscrivait dans le contexte de l'exécution d'un transport prioritaire, sans mentionner l'identité du conducteur au moment des faits ni l'identité de la personne responsable, ne satisfait pas aux obligations prévues à l'article 67ter, alinéas 1er et 4, de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière, dont le non-respect est passible des peines prévues à l'article 29ter de la même loi.

ROULAGE - LOI RELATIVE A LA POLICE DE LA CIRCULATION ROUTIERE - DISPOSITIONS LEGALES - Article 67 - Article 67ter - Obligation de communiquer l'identité du conducteur - Portée [notice4]


Références :

[notice1]

Code d'instruction criminelle - 17-11-1808 - Art. 210, al. 1er - 30 / No pub 1808111701

[notice3]

Loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée par Arrêté Royal du 16 mars 1968 - 16-03-1968 - Art. 67ter - 31 / No pub 1968031601

[notice4]

Loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée par Arrêté Royal du 16 mars 1968 - 16-03-1968 - Art. 29ter et 67ter - 31 / No pub 1968031601


Composition du Tribunal
Président : JOCQUE GEERT
Greffier : VANDEN BOSSCHE KRISTEL, BIRANT AYSE
Ministère public : SCHOETERS DIRK
Assesseurs : VAN VOLSEM FILIP, HOET PETER, LIEVENS ANTOINE, FRANCIS ERWIN, BERNEMAN SIDNEY, COUWENBERG ILSE, VAN DOOREN ERIC, VAN OVERBEKE STEVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-10-27;p.20.0587.n ?

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