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07/09/2020 | BELGIQUE | N°C.19.0147.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 07 septembre 2020, C.19.0147.N


N° C.19.0147.N
G. M.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,
contre
BOUWGROEP PROBUILD, s.r.l.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 12 décembre 2018 par la cour d’appel d’Anvers.
Par ordonnance du 5 décembre 2019, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le conseiller Bart Wylleman a fait rapport.
Le premier avocat général Ria Mortier a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certif

iée conforme, le demandeur présente trois moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen ...

N° C.19.0147.N
G. M.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation,
contre
BOUWGROEP PROBUILD, s.r.l.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 12 décembre 2018 par la cour d’appel d’Anvers.
Par ordonnance du 5 décembre 2019, le premier président a renvoyé la cause devant la troisième chambre.
Le conseiller Bart Wylleman a fait rapport.
Le premier avocat général Ria Mortier a conclu.
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente trois moyens.
III. La décision de la Cour
Sur le premier moyen :
1. Selon l’article 1315, alinéa 1er, de l’ancien Code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
En vertu de l’article 13515, alinéa 2, de ce code, celui qui se prétend libéré doit, réciproquement, justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
L’article 870 du Code judiciaire dispose que chacune des parties a la charge de prouver les faits qu’elle allègue.
2. Il suit de ces dispositions qu’il appartient à celui qui se prévaut d’un droit de prouver que toutes les conditions qui font naître le droit auquel il prétend sont réunies.
Lorsqu’un entrepreneur réclame le paiement des travaux convenus et que le maître de l’ouvrage invoque que les travaux ou une partie de ceux-ci n’ont pas été effectués par l’entrepreneur, il appartient, par conséquent, à ce dernier de prouver qu’il les a exécutés.
3. Les juges d’appel ont constaté, d’une part, que, alors que les quantités exactes n’étaient pas connues au départ, un projet définitif concernant le travail additionnel « acier supplémentaire en raison d’une modification du projet » a été mis au point au cours de l’exécution des travaux, que « l’existence du contrat relatif aux travaux finalement exécutés est établie » et que « l’exécution (...) a, en outre, été acceptée par [le demandeur] », d’autre part, que « tant l’état d’avancement n° 18 que le décompte final des travaux en plus ou en moins ont été contestés par [le demandeur] par un courriel du 7 septembre 2014 et par une lettre recommandée du 10 septembre 2014 ».
4. En décidant ensuite que le demandeur « ne démontre ni que les travaux facturés n’ont pas été exécutés ni que le prix facturé ne correspond pas aux travaux réellement exécutés aux prix unitaires convenus », les juges d’appel ont déplacé la charge de la preuve de la défenderesse sur le demandeur, en violation des articles 1315 de l’ancien Code civil et 870 du Code judiciaire, et n’ont dès lors pas légalement justifié leur décision que la demande relative au travail additionnel « acier supplémentaire en raison de la modification du projet » est fondée.
Le moyen est fondé.
Sur le deuxième moyen :
Quant à la première branche :
5. Aux termes de l’article 1139 de l’ancien Code civil, le débiteur est constitué en demeure, soit par une sommation ou par autre acte équivalent, soit par l’effet de la convention, lorsqu’elle porte que, sans qu’il soit besoin d’acte, et par la seule échéance du terme, le débiteur sera en demeure.
L’article 1146 de ce code dispose que les dommages et intérêts ne sont dus que lorsque le débiteur est en demeure de remplir son obligation, excepté néanmoins lorsque la chose que le débiteur s’était obligé de donner ou de faire ne pouvait être donnée ou faite que dans un certain temps qu’il a laissé passer.
Suivant l’article 1153, alinéa 3, du même code, les intérêts légaux prévus au premier alinéa de cet article sont dus à partir du jour de la sommation de payer, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.
Ces dispositions impliquent que, pour pouvoir réclamer des dommages et intérêts, consistant en des intérêts légaux prévus à l’article 1153 du Code civil, le créancier doit, en règle, exprimer clairement et d’une manière non équivoque à son débiteur sa volonté de voir exécuter l’obligation.
6. Le juge apprécie souverainement en fait si un créancier a exprimé clairement et d’une manière non équivoque à son débiteur sa volonté de voir exécuter l’obligation.
La Cour vérifie cependant si, de ses constatations, le juge a pu légalement déduire sa décision.
7. Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que le demandeur soutenait dans ses conclusions d’appel que la défenderesse n’avait pas envoyé de mise en demeure en vue de faire courir les intérêts et que les juges d’appel ont constaté que, par une lettre recommandée du 29 août 2015, la défenderesse a invité le demandeur à procéder à la réception définitive.
8. En décidant, sur la base de cette seule constatation, que les intérêts légaux réclamés par la défenderesse sont dus à partir de la date de la mise en demeure, « soit à compter du 29 août 2015 », sans constater, eu égard à la contestation existant à ce sujet, que la lettre recommandée du 29 août 2015 contient l’expression claire et non équivoque de la volonté de la défenderesse d’obtenir du demandeur le paiement des montants réclamés, les juges d’appel ont violé les articles 1139, 1146 et 1153, alinéa 3, de l’ancien Code civil.
Le moyen, en cette branche, est fondé.
[…]
Sur les autres griefs :
Les autres griefs ne sauraient entraîner une cassation plus étendue.
Par ces motifs,
La Cour
Casse l’arrêt attaqué, sauf en tant qu’il reçoit l’appel ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d’appel de Bruxelles.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Koen Mestdagh, président, les conseillers Antoine Lievens, Bart Wylleman, Maxime Marchandise et Sven Mosselmans, et prononcé en audience publique du sept septembre deux mille vingt par le président de section Koen Mestdagh, en présence du premier avocat général Ria Mortier, avec l’assistance du greffier Mike Van Beneden.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Marie-Claire Ernotte et transcrite avec l’assistance du greffier Lutgarde Body.


Synthèse
Formation : Chambre 3n - derde kamer
Numéro d'arrêt : C.19.0147.N
Date de la décision : 07/09/2020
Type d'affaire : Droit civil - Autres

Analyses

Il suit des articles 1315, alinéas 1er et 2, du Code civil et 870 du Code judiciaire qu'il appartient à celui qui se prévaut d'un droit de prouver que toutes les conditions qui font naître le droit auquel il prétend sont réunies.

PREUVE - MATIERE CIVILE - Charge de la preuve. Liberté d'appréciation - Charge de la preuve - Etendue - Conséquence

Les articles 1139, 1145 et 1153, alinéa 3, du Code civil impliquent que, pour pouvoir réclamer des dommages et intérêts, consistant en des intérêts légaux prévus à l'article 1153 du Code civil, le créancier doit, en règle, avoir exprimé clairement et d'une manière non équivoque à son débiteur sa volonté de voir exécuter l'obligation.

CONVENTION - FORCE OBLIGATOIRE (INEXECUTION) - Responsabilité contractuelle - Intérêts de retard - Point de départ - INTERETS - INTERETS COMPENSATOIRES - Convention - Force obligatoire - Responsabilité contractuelle - Intérêts de retard - Point de départ

Le juge apprécie souverainement en fait si un créancier a exprimé clairement et d'une manière non équivoque à son débiteur sa volonté de voir exécuter l'obligation; La Cour vérifie cependant si, de ses constatations, le juge a pu légalement déduire sa décision.

CONVENTION - FORCE OBLIGATOIRE (INEXECUTION) - Volonté exprimée par le créancier - Appréciation souveraine par le juge du fond - APPRECIATION SOUVERAINE PAR LE JUGE DU FOND - Droit civil - Convention - Force obligatoire - Inexécution - Volonté exprimée par le créancier - Contrôle par la Cour [notice4]


Références :

[notice4]

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 1139 et 1145 - 30 / No pub 1804032150


Composition du Tribunal
Président : MESTDAGH KOEN
Greffier : VAN BENEDEN MIKE
Ministère public : VANDERLINDEN HENRI
Assesseurs : LIEVENS ANTOINE, WYLLEMAN BART, COUWENBERG ILSE, MOSSELMANS SVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-09-07;c.19.0147.n ?

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