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10/03/2020 | BELGIQUE | N°P.19.1100.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 10 mars 2020, P.19.1100.N


N° P.19.1100.N
F. D.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Joachim Meese, avocat au barreau de Gand.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 7 octobre 2019 par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général Bart De Smet a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
1. Le moyen est pris de la violation des articles 42, 3°, 43bis et 44 du Cod

e pénal : l'arrêt ordonne la confiscation, à charge du demandeur, d'un avantage patrimonial de 30...

N° P.19.1100.N
F. D.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Joachim Meese, avocat au barreau de Gand.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 7 octobre 2019 par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général Bart De Smet a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
1. Le moyen est pris de la violation des articles 42, 3°, 43bis et 44 du Code pénal : l'arrêt ordonne la confiscation, à charge du demandeur, d'un avantage patrimonial de 30.000 euros tiré des préventions A (détournement d'actifs) et B (abus de biens sociaux) ; cette confiscation correspond aux dommages et intérêts réclamés par la partie civile mais modérés sur la base de l'article 43bis, alinéa 7, du Code pénal ; le premier juge a attribué le montant confisqué à la partie civile ; l'arrêt constate que la partie civile se désiste de son action civile du fait de la conclusion d'une transaction, lui donne acte de ce désistement et, en conséquence, ne procède pas à l'attribution précitée ; ce faisant, l'arrêt constate que le demandeur a restitué l'avantage patrimonial à la partie civile et qu'il ne peut ordonner la confiscation de cet avantage patrimonial à sa charge ; en effet, une telle restitution permet de remédier à la situation irrégulière née de l'infraction ; la confiscation d'un avantage patrimonial n'a pas pour but d'alourdir la peine mais de mettre fin à la situation patrimoniale illégale du prévenu résultant de l'infraction ; le prévenu qui restitue volontairement des avantages patrimoniaux non saisis à la partie civile serait, s'il était néanmoins condamné à la confiscation de ceux-ci, traité plus sévèrement que le prévenu condamné par le juge à la restitution d'avantages patrimoniaux saisis, lequel ne peut donc plus être condamné à la confiscation de ceux-ci.
Le moyen demande que soit, à tout le moins, posée à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle suivante :

« Les articles 42, 3°, 43bis et 44 du Code pénal, interprétés comme ne s'opposant pas à ce que le juge, qui constate que le prévenu a restitué l'avantage patrimonial tiré directement de l'infraction et appartenant à la partie civile, prononce néanmoins la confiscation de ce même avantage patrimonial, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution (principe d'égalité) et les articles 12 et 14 de la Constitution (principes de légalité et de sécurité juridique), dès lors que cette interprétation conduit le juge à décider de manière tout à fait arbitraire, sans être lié par un quelconque critère ou une quelconque limitation légale, soit qu'il n'est pas nécessaire de prononcer, du chef d'un fait qui a donné lieu à une restitution volontaire par le prévenu à la partie civile, la confiscation spéciale du montant concerné, soit que ledit montant doit être confisqué (ce qui, en comparaison avec la première option, donne lieu à une condamnation au double de l'avantage patrimonial tiré de l'infraction) ? ».
2. L'arrêt (...) constate que :
- « À l'audience du 9 septembre 2019, la partie civile, Maître P. H., s'est désisté de la demande introduite en sa qualité de curateur de la faillite de la société anonyme Y. E. et a affirmé n'avoir plus de chef de demande à formuler. À cet égard, le curateur s'est référé à la convention de transaction du 8 septembre 2019, déposée par l'avocat [du demandeur] à l'audience précitée » ;
- « Au moment de l'examen de la cause à l'audience de la cour [d'appel], le conseil [du demandeur] dépose une convention de transaction datée du 8 septembre 2019. Ladite transaction a été conclue entre [le demandeur] ainsi que M.D., d'une part, et le curateur, d'autre part. Elle fait référence à la mise en cause, par voie de citation lancée par le curateur, de la responsabilité [du demandeur] en tant que dirigeant et fondateur ainsi qu'au jugement attaqué, rendu le 21 décembre 2017 dans le cadre du présent litige pénal, et stipule qu'il sera mis fin aux litiges à caractère civil opposant les parties moyennant le paiement par [le demandeur] et M.D. d'un montant de 104.500,00 euros pour solde de tous comptes entre les parties » ;
- « Le premier juge a judicieusement mis en œuvre le pouvoir de modération qui lui est conféré par l'article 43bis, 7°, du Code pénal (...) et a procédé à une estimation ex aequo et bono d'un montant de 30.000,00 euros. La cour [d'appel] confirme la confiscation de ce montant à charge [du demandeur] ; la cour [d'appel] n'accueille pas la demande formulée par [le demandeur] tendant à ce qu'aucune confiscation ne soit prononcée, au motif que [le demandeur] doit se rendre compte que commettre des infractions ne peut être profitable » ;
- « Il a déjà été constaté ci-dessus que la partie civile (...) s'est désistée de sa demande et que la cour [d'appel] lui en donne acte. Ce désistement implique par ailleurs qu'il n'y a plus lieu d'attribuer la somme confisquée de 30.000,00 euros à la partie civile ».
3. Ces motifs ne laissent pas apparaître si la transaction a permis que la partie civile soit indemnisée de l'ensemble de son préjudice, ni dans quelle mesure le montant convenu est en lien avec la responsabilité du demandeur en tant que fondateur et dirigeant, laquelle est étrangère au préjudice résultant des préventions au sens des articles 1382 et 1383 du Code civil. Ainsi, par ces motifs, l'arrêt ne constate pas que le montant versé à la partie civile en application de la transaction correspond à l'avantage patrimonial dont il prononce la confiscation à charge du demandeur.
Dans la mesure où il procède d'une lecture erronée de l'arrêt, le moyen manque en fait.
4. Dans la mesure où il est déduit de cette même lecture erronée, le moyen est irrecevable.
5. La question préjudicielle, qui repose sur un moyen irrecevable pour des motifs non déduits des normes qui en font l'objet, n'est pas posée.
Le contrôle d'office
6. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président, Peter Hoet, Antoine Lievens, Erwin Francis et Ilse Couwenberg, conseillers, et prononcé en audience publique du dix mars deux mille vingt par le conseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence de l'avocat général Bart De Smet, avec l'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.


Synthèse
Formation : Chambre 2n - tweede kamer
Numéro d'arrêt : P.19.1100.N
Date de la décision : 10/03/2020
Type d'affaire : Droit pénal - Autres

Analyses

Lorsque la décision attaquée ne laisse pas apparaître si la transaction a permis que la partie civile soit indemnisée de l’ensemble de son préjudice, les juges d’appel n’ont pas constaté que le montant versé à la partie civile en application de la transaction correspond à l’avantage patrimonial dont l’arrêt prononce la confiscation à charge du prévenu (1). (1) J. RAEYMAEKERS, “De rechtsfiguren van teruggave en toewijzing ten gunste van een benadeelde, onder meer als bijzondere modaliteiten van de verbeurdverklaring als bijkomende strafsanctie”, N.C. 2017, 446-470.

PEINE - AUTRES PEINES - Confiscation - Avantage patrimonial - Montant indiqué dans la transaction - Portée - MOTIFS DES JUGEMENTS ET ARRETS - EN CAS DE DEPOT DE CONCLUSIONS - Matière répressive (y compris les boissons spiritueuses et les douanes et accises) - Confiscation - Restitution - Transaction - Divergence entre le montant de la transaction et l'avantage patrimonial illégal - Motivation - Portée - ACTION CIVILE - Restitution - Transaction - Divergence entre le montant de la transaction et l'avantage patrimonial illégal - Indemnisation de l'ensemble du préjudice [notice1]


Références :

[notice1]

Code pénal - 08-06-1867 - Art. 42, 3°, 43bis et 44 - 01 / No pub 1867060850 ;

ancien Code Civil - 21-03-1804 - Art. 2044 - 30 / No pub 1804032150


Composition du Tribunal
Président : VAN VOLSEM FILIP
Greffier : VANDEN BOSSCHE KRISTEL
Ministère public : DE SMET BART
Assesseurs : HOET PETER, LIEVENS ANTOINE, FRANCIS ERWIN, BERNEMAN SIDNEY, COUWENBERG ILSE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-03-10;p.19.1100.n ?

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