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07/01/2020 | BELGIQUE | N°P.19.0963.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 07 janvier 2020, P.19.0963.N


N° P.19.0963.N
LE PROCUREUR DU ROI DE HAL-VILVORDE,
demandeur en cassation,
contre
T. F.,
prévenu,
défendeur en cassation,
Me Leroy Lievens, avocat au barreau de Termonde.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 5 septembre 2019 par le tribunal correctionnel néerlandophone de Bruxelles, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général délégué Bart De Smet a conclu

.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
(...)
Quant à la première branche :
2. Le moyen, en cett...

N° P.19.0963.N
LE PROCUREUR DU ROI DE HAL-VILVORDE,
demandeur en cassation,
contre
T. F.,
prévenu,
défendeur en cassation,
Me Leroy Lievens, avocat au barreau de Termonde.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 5 septembre 2019 par le tribunal correctionnel néerlandophone de Bruxelles, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général délégué Bart De Smet a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
(...)
Quant à la première branche :
2. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation de l'article 37/1, § 1er, de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière : le jugement attaqué considère comme inopportun de limiter la validité du permis de conduire du défendeur aux véhicules à moteur équipés d'un éthylotest antidémarrage ; or l'analyse de l'haleine à laquelle le défendeur a été soumis a mesuré une concentration d'alcool de 0,79 milligramme par litre d'air alvéolaire expiré, de sorte que le défendeur relève de la disposition pénale de l'article 34, § 2, 1°, de la loi du 16 mars 1968 ; en ce cas, il est obligatoire d'imposer l'utilisation d'un éthylotest antidémarrage ; le juge ne peut y déroger qu'à titre exceptionnel, c'est-à-dire en cas de dépendance à l'alcool et moyennant une motivation expresse ; le jugement attaqué fait application de cette exception dans le seul but de statuer avec davantage de clémence sur l'infraction de roulage, ce qui va à l'encontre de l'intention du législateur ; par conséquent, la décision n'est pas légalement justifiée.
3. L'article 37 / 1, § 1er, alinéas 1 et 2, de la loi du 16 mars 1968 dispose :
« En cas de condamnation du chef d'une infraction à l'article 34, § 2, à l'article 35 en cas d'ivresse ou à l'article 36, le juge peut, s'il ne prononce pas la déchéance définitive du droit de conduire un véhicule à moteur ou s'il ne fait pas application de l'article 42, limiter la validité du permis de conduire du contrevenant, pour une période d'au moins un an à trois ans au plus ou à titre définitif, à tous les véhicules à moteur équipés d'un éthylotest antidémarrage, à condition que celui-ci remplisse, en tant que conducteur, les conditions du programme d'encadrement visé à l'article 61quinquies, § 3.
En cas de condamnation du chef d'une infraction à l'article 34, § 2, si l'analyse de l'haleine mesure une concentration d'alcool d'au moins 0,78 milligramme par litre d'air alvéolaire expiré ou si l'analyse sanguine révèle une concentration d'alcool par litre de sang d'au moins 1,8 gramme, le juge limite la validité du permis de conduire du contrevenant aux véhicules à moteur équipés d'un éthylotest antidémarrage selon les mêmes modalités que celles visées à l'alinéa 1er. Toutefois, si le juge choisit de ne pas recourir à cette sanction, il le motive expressément ».
4. Il s'ensuit que le juge est, en principe, tenu d'imposer l'utilisation d'un éthylotest antidémarrage au contrevenant qui répond à la condition d'intoxication alcoolique énoncée à l'article 37/1, alinéa 2, de la loi du 16 mars 1968 mais qu'il peut décider, dans des cas exceptionnels, de s'en abstenir pour des raisons qu'il doit expressément indiquer.

Ces raisons ne sont pas précisées par le législateur ni limitées à des cas spécifiques tels la dépendance à l'alcool. Ainsi, le juge détermine librement les raisons pour lesquelles il n'impose pas la mesure de sûreté visée en l'espèce.
Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.
5. Pour le surplus, le moyen, en cette branche, est déduit de cette prémisse juridique erronée et est, dès lors, irrecevable.
Quant à la seconde branche :
6. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et 37/1, § 1er, alinéa 2, de la loi du 16 mars 1968 : par les motifs qu'il contient, le jugement attaqué ne motive pas régulièrement la décision de ne pas limiter la validité du permis de conduire du défendeur aux véhicules à moteur équipés d'un éthylotest antidémarrage ; en effet, le jugement attaqué n'assortit cette motivation d'aucun élément concret concernant la personne du défendeur ou la situation dans laquelle les faits se sont produits, et la décision n'est pas fondée sur des arguments corrects d'un point de vue scientifique.
7. L'article 37/1, § 1er, alinéa 2, de la loi du 16 mars 1968 impose certes au juge de motiver expressément les raisons pour lesquelles il n'impose pas l'utilisation d'un éthylotest antidémarrage, mais ni cette disposition ni l'article 149 de la Constitution ne requièrent que le juge assortisse sa motivation d'éléments spécifiques. Il suffit que le juge indique de manière claire et non équivoque les raisons pour lesquelles il décide de ne pas imposer l'utilisation d'un tel éthylotest.
8. Le jugement attaqué considère :
« Au vu des éléments concrets du dossier répressif, des pièces produites et de l'instruction d'audience, le tribunal estime que, en ce cas particulier, il n'est pas opportun d'imposer par ailleurs l'utilisation d'un éthylotest antidémarrage.
La concentration d'alcool mesurée était certes élevée, mais [le défendeur] ne présentait pas de signes d'imprégnation alcoolique pouvant indiquer l'existence d'un état d'ébriété, et il n'a pas davantage été établi que [le défendeur] n'était plus maître de ses manœuvres et représentait ainsi un danger manifeste sur la route.
Le tribunal estime que l'objectif de sécurité routière voulu par le législateur lors de l'introduction de l'éthylotest antidémarrage peut, en l'espèce, être atteint au moyen des sanctions déjà infligées. Les sanctions infligées permettront de raisonner [le défendeur] et l'inciteront à être plus prudent et à se comporter conformément aux règles à l'avenir. La mesure drastique et coûteuse que représente l'éthylotest antidémarrage n'offre aucune valeur ajoutée dans le cas présent et ses inconvénients financiers seraient disproportionnés par rapport à la gravité des faits commis par [le défendeur] ».
Ainsi, la décision est régulièrement motivée.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
(...)
Le contrôle d'office
11. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Laisse les frais à charge de l'État.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président, Antoine Lievens, Erwin Francis, Sidney Berneman et Eric Van Dooren, conseillers, et prononcé en audience publique du sept janvier deux mille vingt par le conseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence de l'avocat général délégué Bart De Smet, avec l'assistance du greffier délégué Ayse Birant.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Eric de Formanoir et transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.


Synthèse
Formation : Chambre 2n - tweede kamer
Numéro d'arrêt : P.19.0963.N
Date de la décision : 07/01/2020
Type d'affaire : Droit pénal

Analyses

Le juge est, en principe, tenu d'imposer l'utilisation d'un éthylotest antidémarrage au contrevenant qui répond à la condition d'intoxication alcoolique énoncée à l'article 37/1 de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière, à savoir une concentration d'alcool d'au moins 0.78 milligrammes par litre d'air alvéolaire expiré ou d'au moins 1,8 gramme par litre de sang mais, dans des cas exceptionnels, il peut décider de s'en abstenir pour des raisons qu'il doit expressément indiquer; ces raisons ne sont pas précisées par le législateur ni limitées à des cas spécifiques tels la dépendance à l'alcool; ainsi, le juge détermine librement les raisons pour lesquelles il n'impose pas l'utilisation de l'éthylotest antidémarrage en tant que mesure de sûreté.

ROULAGE - LOI RELATIVE A LA POLICE DE LA CIRCULATION ROUTIERE - DISPOSITIONS LEGALES - Article 37 - Article 37/1 - Ethylotest antidémarrage - Motivation - Conditions [notice1]


Références :

[notice1]

Loi - 16-03-1968 - Art. 37/1 - 31 / No pub 1968031601


Composition du Tribunal
Président : VAN VOLSEM FILIP
Greffier : VANDEN BOSSCHE KRISTEL
Ministère public : DE SMET BART
Assesseurs : HOET PETER, LIEVENS ANTOINE, FRANCIS ERWIN, BERNEMAN SIDNEY, VAN DOOREN ERIC

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2020-01-07;p.19.0963.n ?

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