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05/11/2019 | BELGIQUE | N°P.19.0635.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 05 novembre 2019, P.19.0635.N


N° P.19.0635.N
P. D. G.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Luc Arnou, avocat au barreau de Flandre occidentale.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 23 mai 2019 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque sept moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général Alain Winants a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
1. Le moyen, en cet

te branche, est pris de la violation des articles 6, § 1er, et 6, § 2, de la Convention de sauvegarde...

N° P.19.0635.N
P. D. G.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Luc Arnou, avocat au barreau de Flandre occidentale.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 23 mai 2019 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque sept moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général Alain Winants a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
1. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation des articles 6, § 1er, et 6, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de la méconnaissance des principes généraux du droit relatifs à la présomption d'innocence et à l'impartialité du juge : l'arrêt rejette la défense du demandeur invoquant que le juge d'instruction a manqué à son devoir d'impartialité et a méconnu la présomption d'innocence en admettant, dans ses ordonnances relatives à des mesures d'écoute et dans ses demandes d'entraide judiciaire adressées à l'Espagne et au Panama, que les faits d'importation de stupéfiants et de vol de cuivre faisant l'objet de l'instruction étaient établis à charge du demandeur ; les juges d'appel ne pouvaient déduire de leurs constatations à cet égard, telles celles relatives au caractère incomplet des termes du juge d'instruction cités par le demandeur et au contexte dans lequel ils ont été utilisés, que cette obligation et cette présomption n'ont pas été méconnues.
2. Le juge apprécie souverainement si le juge d'instruction a utilisé, dans les pièces qu'il a établies, des termes laissant apparaître un manque d'impartialité ou une violation de la présomption d'innocence de l'inculpé, affectant ainsi la régularité de ces pièces et des actes d'instruction qui s'y rapportent. La Cour vérifie uniquement si le juge ne tire pas des faits qu'il a constatés des conséquences qui y sont étrangères ou qui ne peuvent être admises sur leur fondement.
3. La seule circonstance que le juge d'instruction fasse mention, dans lesdites pièces, de certains faits que révèlent les actes d'instruction déjà posés, ou qu'il déduise de tels faits que l'inculpé ou d'autres personnes concernées par l'instruction ont agi ou ont dû agir d'une manière déterminée, ne démontre pas en soi la partialité du juge d'instruction envers l'inculpé ni la violation par ce juge de la présomption d'innocence.
Par contre, il appartient au juge statuant sur la régularité de l'instruction judiciaire d'apprécier les termes utilisés par le juge d'instruction à l'aune d'un ensemble de circonstances, telles la nature des éclairages que l'enquête avait déjà apportés au moment où les termes critiqués ont été utilisés, la manière dont le juge d'instruction s'exprime, la finalité des pièces dans lesquelles lesdits termes apparaissent et le contexte dans lequel ceux-ci ont été utilisés. Le juge est tenu de déterminer la véritable attitude que le juge d'instruction a adoptée à l'égard de l'inculpé en tenant compte de ces circonstances, et ne peut déduire cette attitude d'une lecture littérale des termes utilisés.
Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.
4. En ce qui concerne les ordonnances et les demandes d'entraide judiciaire critiquées par le demandeur, l'arrêt considère, en substance, que :
- considérant la complexité des faits portés à sa connaissance et leur qualification, le juge d'instruction ne s'est pas prononcé sur les aspects juridiques des faits constatés et n'a pas laissé entendre, par les termes concrets qu'il a utilisés dans les pièces en question, que le demandeur est coupable des faits concrètement mis à sa charge ;
- les pièces en question avaient été établies dans le but spécifique de répondre à de strictes obligations de motivation légalement prévues ou d'informer les autorités étrangères sur la situation de fait tout en leur permettant de se prononcer sur l'existence d'une double incrimination et de causes de refus éventuelles ;
- le contexte dans lequel les termes ont été utilisés ne ressort pas des extraits que le demandeur critique.
Par ces motifs, l'arrêt peut légitimement considérer que les termes utilisés par le juge d'instruction dans ses ordonnances et ses demandes visées en l'espèce ne révèlent pas une méconnaissance de son devoir d'impartialité ou de la présomption d'innocence du demandeur.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
(...)
Sur le deuxième moyen :
Quant à la première branche :
9. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation des articles 12 de la Constitution, 32 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale, 90quater du Code d'instruction criminelle, tel qu'applicable en l'espèce, ainsi que de la violation des règles relatives à l'application de la procédure pénale dans le temps : l'arrêt considère que la sanction de nullité prévue à l'article 90quater, § 1er, du Code d'instruction criminelle n'est plus applicable depuis l'entrée en vigueur de la loi du 5 février 2016 modifiant le droit pénal et la procédure pénale et portant des dispositions diverses en matière de justice ; il considère également que l'article 90quinquies, alinéa 3, du Code d'instruction criminelle ne prévoit pas en soi une sanction de nullité pour la violation de l'obligation de motivation spéciale qu'il consacre et que l'article 32 du titre préliminaire du Code de procédure pénale ne permet pas de prononcer de nullités autres que celles prévues par la loi ; toutefois, dès lors que l'article 90quinquies, alinéa 3, renvoie expressément aux conditions prévues à l'article 90quater, § 1er, dans sa version applicable, la nullité prévue par cette dernière disposition doit être réputée s'appliquer également à l'article 90quinquies, alinéa 3 ; la suppression, par la loi du 5 février 2016, de la sanction de nullité prévue à l'article 90quater est sans incidence à cet égard, dès lors que les règles relatives à l'administration de la preuve de la culpabilité d'une personne ne peuvent, en principe, être modifiées rétroactivement à son détriment ; la sanction de nullité était encore applicable au moment des mesures d'écoute et les juges d'appel auraient donc dû l'appliquer en l'espèce.
10. L'article 12 de la Constitution n'offre pas au prévenu la garantie que le juge frappera un acte d'instruction ne respectant pas une formalité, d'une sanction de nullité qui était prévue au moment où cet acte a été pris mais ne l'est plus au moment de sa décision.
11. L'article 90quater, § 1er, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle, tel que modifié par la loi du 5 février 2016, précise les formalités auxquelles une ordonnance d'écoute doit satisfaire, étant entendu qu'elles ne sont plus prescrites à peine de nullité.
Conformément aux articles 2 et 3 du Code judiciaire, ledit article modifié s'applique à toutes les poursuites qui, à la date de son entrée en vigueur le 29 février 2016, n'ont pas encore fait l'objet d'une décision définitive et ne sont pas encore prescrites, même si la mesure d'écoute est antérieure à ladite modification législative.
Dans la mesure où il procède d'une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.
12. Pour le surplus, le moyen, en cette branche, est déduit de cette prémisse juridique erronée et est irrecevable.
Quant à la deuxième branche :
13. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation de l'article 26 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle : les juges d'appel n'ont pas posé à la Cour constitutionnelle les questions préjudicielles proposées par le demandeur parce que la réponse à ces questions ne leur était pas indispensable pour rendre leur décision, compte tenu de l'ensemble des développements de l'arrêt et de la suppression de la sanction de nullité prévue à l'article 90quater, § 1er, du Code d'instruction criminelle ; ces motifs sont erronés.
14. Déduit de l'illégalité vainement invoquée en sa première branche, le moyen, en cette branche, est irrecevable.
Quant à la troisième branche :
15. Le moyen, en cette branche, demande à la Cour de poser à la Cour constitutionnelle les questions préjudicielles suivantes :
1/ Les articles 90quater et 90quinquies du Code d'instruction criminelle violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés à l'article 8, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lorsqu'ils sont lus en ce sens qu'ils prescrivent (au moment des enregistrements visés en l'espèce) des formalités à peine de nullité à l'article 90quater du Code d'instruction criminelle mais que la formalité prévue à l'article 90quinquies, alinéa 3, dudit code consistant en l'indication des circonstances précises, nouvelles et graves nécessitant le renouvellement d'une mesure d'écoute, n'est pas prescrite à peine de nullité, alors que tant l'article 90quater que l'article 90quinquies, alinéa 3, du Code d'instruction criminelle comportent des règles visant à déterminer quand et à quelles conditions une personne ou un lieu peuvent être mis sur écoute et quand et à quelles conditions une personne ou un lieu peuvent être de nouveau mis sur écoute ? ».
2/ « Les articles 90quater et 90quinquies, alinéa 3, du Code d'instruction criminelle violent-ils les articles 12, alinéa 2, 14 et 22 de la Constitution, combinés à l'article 8, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi qu'à l'article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et les articles 33, 108 et 159 de la Constitution, en ce que, en cas de renouvellement d'une mesure d'écoute, la sanction de nullité n'est expressément prévue (au moment des enregistrements visés en l'espèce) qu'en ce qui concerne les formalités énoncées à l'article 90quater, § 1er, du Code d'instruction criminelle, sans être expressément prévue en ce qui concerne la formalité prévue à l'article 90quinquies, alinéa 3, du Code d'instruction criminelle qui consiste à indiquer les circonstances précises, nouvelles et graves nécessitant le renouvellement d'une mesure d'écoute, alors que cette dernière formalité vise elle aussi à déterminer quand et à quelles conditions une personne ou un lieu peuvent être de nouveau mis sur écoute, de sorte que, compte tenu de l'intention du législateur, il n'apparait pas clairement si cette formalité est prescrite ou non à peine de nullité ? »
3/ « L'article 90quater, § 1er, du Code d'instruction criminelle, tel que modifié par l'article 66 de la loi du 5 février 2016 modifiant le droit pénal et la procédure pénale et portant des dispositions diverses en matière de justice, viole-t-il les articles 12, alinéa 2, 14 et 22 de la Constitution, combinés à l'article 8, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi qu'à l'article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et les articles 33, 108 et 159 de la Constitution, en ce que (ou, à tout le moins, dans la mesure où il a pour conséquence que) la sanction de nullité prescrite, jusqu'à l'entrée en vigueur de l'article 66 de la loi du 5 février 2016, par l'article 90quater, § 1er, initial du Code d'instruction criminelle en ce qui concerne les formalités y énoncées, ne s'applique plus aux mesures d'écoute qui ont été ordonnées et/ou exécutées avant l'entrée en vigueur, le 29 février 2016, de la modification apportée à l'article 90quater, § 1er, mais sont examinées par les juridictions pénales après l'entrée en vigueur de cette modification législative le 29 février 2016, de sorte que la suppression par la loi du 5 février 2016 de la sanction de nullité est appliquée rétroactivement, les règles à respecter par les autorités de poursuite en matière d'administration de la preuve de la culpabilité d'une personne étant, de ce fait, modifiées au détriment de la partie poursuivie ? ».
16. Selon l'article 26, § 1er, 3°, de la loi du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, cette cour statue à titre préjudiciel sur la violation par une loi des articles du titre II « Des Belges et de leurs droits » ainsi que des articles 170, 172 et 191 de la Constitution. Par conséquent, la Cour constitutionnelle n'est pas compétente pour statuer sur la violation par une loi des articles 33, 108 et 159 de la Constitution, qui ne relèvent pas de son titre II, ni sur la violation par une loi de la Convention ou du Pacte.
17. Aux termes de l'article 12 de la Constitution, nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, et dans la forme qu'elle prescrit. L'article 14 de la Constitution dispose que nulle peine ne peut être établie ni appliquée qu'en vertu de la loi.
Aux termes de l'article 22, alinéa 1er, de la Constitution, chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi.
18. Le principe de légalité en matière pénale ainsi que le droit au respect de la vie privée consacré par ces dispositions constitutionnelles sont des droits fondamentaux garantis de manière totalement ou partiellement analogue par les articles 7, § 1er, et 8 de la Convention et les articles 15, § 1er, et 17 du Pacte.
Par conséquent, conformément à l'article 26, § 4, alinéa 2, 2°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la Cour examine si la disposition contestée dans la troisième question ne viole manifestement pas les articles 12, alinéa 2, 14 et 22, alinéa 1er, de la Constitution.
19. L'article 66 de la loi du 5 février 2016, qui supprime, à compter du 29 février 2016, la sanction de nullité prévue auparavant par l'article 90quater, § 1er, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, n'est ni une loi qui instaure une nouvelle incrimination, ni une loi qui fixe le taux de la peine. Il s'agit d'une loi de procédure applicable, dès son entrée en vigueur, à toute procédure pénale même si l'irrégularité est antérieure à la suppression de ladite sanction. Ceci constitue une application des articles 2 et 3 du Code judiciaire.
20. Après l'entrée en vigueur de l'article 66 de la loi du 5 février 2016, les formalités prévues à l'article 90quater, § 1er, du Code d'instruction criminelle pour une mesure d'écoute et la valeur probante des éléments que cette mesure permet de recueillir, restent identiques à ce qu'elles étaient au moment de la commission par le demandeur des agissements que l'arrêt considère punissables. Le non-respect desdites formalités reste sanctionné, même si la sanction de nullité n'est plus automatique. Le simple fait que le demandeur ne puisse plus bénéficier automatiquement de cette nullité n'a pas pour effet de rendre la procédure peu claire ou imprévisible pour lui, ni de le priver des garanties relatives à la charge de la preuve de sa culpabilité incombant au ministère public.
21. Aucune disposition constitutionnelle ou conventionnelle n'implique l'obligation de prévoir automatiquement une sanction de nullité en cas d'inobservation des formalités auxquelles un acte d'instruction est soumis, lorsqu'elles touchent au droit au respect de la vie privée.
22. Il s'ensuit que l'application immédiate, à partir du 29 février 2016, de la suppression de la sanction de nullité prévue à l'article 90quater, § 1er, du Code d'instruction criminelle ne viole manifestement pas les articles 12, alinéa 2, 14 et 22, alinéa 1er, de la Constitution.
Il n'y a pas lieu de poser la troisième question préjudicielle.
23. Les première et deuxième questions sont déduites de la prémisse juridique erronée selon laquelle le juge reste tenu de prononcer la sanction de nullité prévue à l'article 90quater, § 1er, du Code d'instruction criminelle, malgré la suppression de cette sanction par la loi du 5 février 2016.
Il n'y a pas davantage lieu de poser ces questions.
(...)
Sur le quatrième moyen :
Quant à la première branche :
26. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation de l'article 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : l'arrêt tient compte, à tort, des initiatives procédurales de coprévenus pour apprécier si le délai raisonnable a été dépassé au cours du règlement de la procédure ; toutefois, seule l'attitude de la personne concernée doit être prise en compte ; lorsque les retards de la procédure ont été causés par d'autres parties à la cause concernée, ils ne devraient pas être imputés au prévenu qui n'a lui-même rien entrepris pour retarder ou entraver temporairement la procédure.
27. L'article 6, § 1er, de la Convention ne s'oppose pas à ce que l'attitude des coprévenus soit prise en compte dans l'appréciation du délai raisonnable, dans la mesure où elle contraint l'autorité judiciaire à retarder ou à reporter la poursuite de l'examen de la cause.
Le moyen qui, en cette branche, procède d'une autre prémisse juridique, manque en droit.
(...)
Le contrôle d'office
41. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
Sur l'arrestation immédiate
42. Eu égard au rejet du pourvoi en cassation, l'arrêt est passé en force de chose jugée. Dans la mesure où il est dirigé contre le mandement d'arrestation immédiate du demandeur, le pourvoi est, partant, sans objet.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi.
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président, Peter Hoet, Antoine Lievens, Erwin Francis et Sidney Berneman, conseillers, et prononcé en audience publique du cinq novembre deux mille dix-neuf par le conseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence de l'avocat général Alain Winants, avec l'assistance du greffier Vanity Vanden Hende.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Eric de Formanoir et transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.


Synthèse
Formation : Chambre 2n - tweede kamer
Numéro d'arrêt : P.19.0635.N
Date de la décision : 05/11/2019
Type d'affaire : Droit international public - Droit pénal - Autres - Droit constitutionnel

Analyses

La seule circonstance que le juge d'instruction fasse mention, dans les pièces qu'il a établies, de certains faits que révèlent les actes d'instruction déjà posés, ou qu'il déduise de tels faits que l'inculpé ou d'autres personnes concernées par l'instruction ont agi ou ont dû agir d'une manière déterminée, ne démontre pas en soi la partialité du juge d'instruction envers l'inculpé ni la violation par ce juge de la présomption d'innocence; il appartient au juge statuant sur la régularité de l'instruction d'apprécier les termes utilisés par le juge d'instruction à l'aune d'un ensemble de circonstances, telles la nature des éclairages que l'enquête avait déjà apportés au moment où les termes critiqués ont été utilisés, la manière dont le juge d'instruction s'exprime, la finalité des pièces dans lesquelles lesdits termes apparaissent et le contexte dans lequel ceux-ci ont été utilisés, et le juge est tenu de déterminer la véritable attitude que le juge d'instruction a adoptée à l'égard de l'inculpé en tenant compte de ces circonstances et ne peut déduire cette attitude d'une lecture littérale des termes utilisés (1). (1) Voir Cass. 30 octobre 2013, RG P.13.1403.F, Pas. 2013, n° 566.

DROITS DE L'HOMME - CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 6 - Article 6, § 1er - Droit à un procès équitable - Impartialité du juge - Juge d'instruction - Termes utilisés par le juge d'instruction dans les pièces qu'il a établies - Portée - Conséquence - DROITS DE L'HOMME - CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 6 - Article 6, § 2 - Droit à un procès équitable - Présomption d'innocence - Juge d'instruction - Termes utilisés par le juge d'instruction dans les pièces qu'il a établies - Portée - Conséquence - JUGE D'INSTRUCTION - Termes utilisés par le juge d'instruction dans les pièces qu'il a établies - Impartialité - Présomption d'innocence - Portée - Conséquence - APPRECIATION SOUVERAINE PAR LE JUGE DU FOND - Juge d'instruction - Termes utilisés par le juge d'instruction dans les pièces qu'il a établies - Impartialité - Présomption d'innocence - Portée - Conséquence

L'article 12 de la Constitution n'offre pas au prévenu la garantie que le juge frappera un acte d'instruction ne respectant pas une formalité, d'une sanction de nullité qui était prévue au moment où cet acte a été pris mais ne l'est plus au moment de sa décision; l'article 90quater, § 1er, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle, tel que modifié par la loi du 5 février 2016, précise les formalités auxquelles une ordonnance d'écoute doit satisfaire, étant entendu qu'elles ne sont plus prescrites à peine de nullité et, conformément aux articles 2 et 3 du Code judiciaire, cet article 90quater modifié s'applique à toutes les poursuites qui, à la date de son entrée en vigueur le 29 février 2016, n'ont pas encore fait l'objet d'une décision définitive et ne sont pas encore prescrites, même si la mesure d'écoute est antérieure à ladite modification législative (1).(1) Cass. 13 juin 2017, RG P. 17.0450.N, Pas. 2017, n° 382.

CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 12 - Principe de légalité en matière pénale - Mesure d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence

L'article 12 de la Constitution n'offre pas au prévenu la garantie que le juge frappera un acte d'instruction ne respectant pas une formalité, d'une sanction de nullité qui était prévue au moment où cet acte a été pris mais ne l'est plus au moment de sa décision; l'article 90quater, § 1er, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle, tel que modifié par la loi du 5 février 2016, précise les formalités auxquelles une ordonnance d'écoute doit satisfaire, étant entendu qu'elles ne sont plus prescrites à peine de nullité et, conformément aux articles 2 et 3 du Code judiciaire, cet article 90quater modifié s'applique à toutes les poursuites qui, à la date de son entrée en vigueur le 29 février 2016, n'ont pas encore fait l'objet d'une décision définitive et ne sont pas encore prescrites, même si la mesure d'écoute est antérieure à ladite modification législative (1). (1) Cass. 13 juin 2017, RG P. 17.0450.N, Pas. 2017, n° 382.

INSTRUCTION EN MATIERE REPRESSIVE - INSTRUCTION - Actes d'instruction - Mesure d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence - LOIS. DECRETS. ORDONNANCES. ARRETES - APPLICATION DANS LE TEMPS ET DANS L'ESPACE - Application dans le temps - Matière répressive - Instruction en matière répressive - Instruction - Actes d'instruction - Mesure d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence

La loi du 5 février 2016, qui supprime la sanction de nullité prévue auparavant par l'article 90quater, § 1er, alinéa 2, du Code d'instruction criminelle, n'est ni une loi qui instaure une nouvelle incrimination, ni une loi qui fixe le taux de la peine, mais une loi de procédure applicable, dès son entrée en vigueur, à toute procédure pénale même si l'irrégularité est antérieure à la suppression de ladite sanction, ce qui constitue une application des articles 2 et 3 du Code judiciaire; après l'entrée en vigueur de la loi du 5 février 2016, les formalités prévues à l'article 90quater, § 1er, du Code d'instruction criminelle pour une mesure d'écoute et la valeur probante des éléments que cette mesure permet de recueillir, restent identiques à ce qu'elles étaient au moment de la commission des agissements considérés comme punissables et le non-respect desdites formalités reste sanctionné même si la sanction de nullité n'est plus automatique, de sorte que le simple fait que le prévenu ne puisse plus bénéficier automatiquement de cette nullité n'a pas pour effet de rendre la procédure peu claire ou imprévisible pour lui, ni de le priver des garanties relatives à la charge de la preuve de sa culpabilité incombant au ministère public, et aucune disposition constitutionnelle ou conventionnelle n'implique l'obligation de prévoir automatiquement une sanction de nullité en cas d'inobservation des formalités auxquelles un acte d'instruction est soumis lorsqu'elles touchent au droit au respect de la vie privée (1). (1) Cass. 13 juin 2017, RG P.17.0450.N, Pas. 2017, n° 382 ; Cass. 14 octobre 2014, RG P.14.0507.N, Pas. 2014, n° 606 ; C. const. 21 décembre 2017, n° 148/2017, L. ARNOU, 'Het wegvallen van de nietigheidssanctie inzake het afluisteren vindt genade in de ogen van het Grondwettelijk Hof', N.C. 2018, 35-37.

CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 22 - Respect de la vie privée - Mesures d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence - DROITS DE L'HOMME - CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 7 - Article 7, § 1er - Principe de légalité - Mesure d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence - DROITS DE L'HOMME - CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 8 - Respect de la vie privée - Mesure d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence - DROITS DE L'HOMME - PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES - Article 15 - Article 15, § 1er - Principe de légalité - Mesure d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence - CONSTITUTION - CONSTITUTION 1994 (ART. 1 A 99) - Article 14 - Principe de légalité en matière pénale - Mesure d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence - PREUVE - MATIERE REPRESSIVE - Administration de la preuve - Instruction en matière répressive - Instruction - Actes d'instruction - Mesure d'écoute - Formalités - Sanction de nullité - Loi supprimant la sanction de nullité - Portée - Conséquence

L'article 6, § 1er, de la Convention des Droits de l'Homme ne s'oppose pas à ce que l'attitude des coprévenus soit prise en compte dans l'appréciation du délai raisonnable, dans la mesure où elle contraint l'autorité judiciaire à retarder ou à reporter la poursuite de l'examen de la cause (1). (1) Cass. 30 avril 2013, RG P.12.1290.N, Pas. 2013, n° 270.

DROITS DE L'HOMME - CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 6 - Article 6, § 1er - Droit à un procès équitable - Délai raisonnable - Appréciation - Critère - Attiude des coprévenus - Portée


Composition du Tribunal
Président : VAN VOLSEM FILIP
Greffier : VANDEN HENDE VANITY
Ministère public : DECREUS LUC
Assesseurs : HOET PETER, LIEVENS ANTOINE, FRANCIS ERWIN, BERNEMAN SIDNEY, COUWENBERG ILSE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2022
Fonds documentaire ?: juportal.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-11-05;p.19.0635.n ?

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