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10/07/2017 | FRANCE | N°392752

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 10 juillet 2017, 392752


Vu la procédure suivante :

La société d'intérêt collectif agricole (SICA) Cité Domaine de Lorgeril a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006 à 2009 ainsi que de cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010. Par un jugement n° 1103462 du 14 février 2013, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 13MA01431 du 2 juillet 2015, la cour administr

ative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la société Cité Domaine de L...

Vu la procédure suivante :

La société d'intérêt collectif agricole (SICA) Cité Domaine de Lorgeril a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006 à 2009 ainsi que de cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010. Par un jugement n° 1103462 du 14 février 2013, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 13MA01431 du 2 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la société Cité Domaine de Lorgeril contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, deux mémoires complémentaires et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 août 2015, 18 novembre 2015, 14 décembre 2015 et 19 décembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SICA Cité Domaine de Lorgeril demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la société d'intérêt collectif agricole Cité Domaine de Lorgeril ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société d'intérêt collectif agricole (SICA) Cité Domaine de Lorgeril exerce, dans des locaux situés à Carcassonne (Aude), une activité de mise en bouteille et de conditionnement de vin pour le compte de ses membres. Elle a fait l'objet d'un contrôle portant sur la taxe professionnelle, pour les années 2006 à 2009, et sur la cotisation foncière des entreprises, pour l'année 2010, au terme duquel l'administration fiscale a qualifié ses locaux d'établissement industriel, au sens de l'article 1499 du code général des impôts. La SICA Cité Domaine de Lorgeril demande l'annulation de l'arrêt du 2 juillet 2015 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son appel contre le jugement du 14 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle et de cotisation foncière des entreprises auxquelles elle a été assujettie.

2. Aux termes de l'article 1450 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 : " Les exploitants agricoles (...) sont exonérés de la cotisation foncière des entreprises. / En sont également exonérés les groupements d'employeurs constitués exclusivement d'exploitants individuels agricoles ou de sociétés civiles agricoles bénéficiant de l'exonération, et fonctionnant dans les conditions fixées au chapitre III du titre V du livre II de la première partie du code du travail ainsi que les groupements d'intérêt économique constitués entre exploitations agricoles (...) ". Ces dispositions, dans les mêmes termes, exonéraient les exploitants agricoles de la taxe professionnelle avant l'entrée en vigueur de la loi de finances pour 2010. L'article L 531-1 du code rural et de la pêche maritime dispose que : " Les sociétés d'intérêt collectif agricole ont pour objet de créer ou de gérer des installations et équipements ou d'assurer des services soit dans l'intérêt des agriculteurs d'une région rurale déterminée, soit de façon plus générale dans celui des habitants de cette région sans distinction professionnelle. / Les sociétés d'intérêt collectif agricole ont le statut de société coopérative ... ". Aux termes de l'article L. 311-1 du même code : " Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation ".

3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la SICA Cité Domaine de Lorgeril, qui fonctionnait conformément aux dispositions du code rural et de la pêche maritime régissant les sociétés d'intérêt collectif agricole, exerçait une activité de mise en bouteille et de conditionnement de vins fournis exclusivement par les viticulteurs qui en étaient membres. En se fondant, pour refuser de la regarder comme un exploitant agricole entrant dans le champ de l'exonération des dispositions, citées au point 2, de l'article 1450 du code général des impôts, sur la circonstance qu'elle n'exploitait elle-même aucun domaine agricole et que son activité d'embouteillage et de conditionnement de vin ne s'inscrivait pas dans le cycle biologique complet de production de ce dernier, sans rechercher si cette activité constituait ou non le prolongement normal des opérations agricoles de ses membres, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit. La société requérante est, dès lors, fondée à en demander l'annulation pour ce motif, sans qu'il soit besoin d'examiner ses autres moyens.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SICA Cité Domaine de Lorgeril au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 2 juillet 2015 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 3 000 euros à la SICA Cité Domaine de Lorgeril au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société d'intérêt collectif agricole Cité Domaine de Lorgeril et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 392752
Date de la décision : 10/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

AGRICULTURE ET FORÊTS - EXPLOITATIONS AGRICOLES - COOPÉRATIVES AGRICOLES ET SOCIÉTÉS D'INTÉRÊT COLLECTIF AGRICOLE - EXONÉRATION DE COTISATION FONCIÈRE DES ENTREPRISES (ART - 1450 DU CGI) - NOTION D'EXPLOITANT AGRICOLE - SOCIÉTÉ DONT L'ACTIVITÉ CONSTITUE LE PROLONGEMENT NORMAL DE L'ACTIVITÉ AGRICOLE DE SES MEMBRES [RJ1].

03-03 Société d'intérêt collectif agricole (SICA) exerçant une activité de mise en bouteille et de conditionnement de vins fournis exclusivement par les viticulteurs comptant parmi ses membres. Cette société, dont l'activité constitue le prolongement normal de l'activité de culture de la vigne et de vinification de ses membres, doit être regardée comme un exploitant agricole au sens des dispositions de l'article 1450 du code général des impôts (CGI).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - EXPLOITANTS AGRICOLES (ART - 1450 DU CGI) - NOTION - SOCIÉTÉ DONT L'ACTIVITÉ CONSTITUE LE PROLONGEMENT NORMAL DE L'ACTIVITÉ AGRICOLE DE SES MEMBRES [RJ1].

19-03-045-02 Société d'intérêt collectif agricole (SICA) exerçant une activité de mise en bouteille et de conditionnement de vins fournis exclusivement par les viticulteurs comptant parmi ses membres. Cette société, dont l'activité constitue le prolongement normal de l'activité de culture de la vigne et de vinification de ses membres, doit être regardée comme un exploitant agricole au sens des dispositions de l'article 1450 du code général des impôts (CGI).


Références :

[RJ1]

Rappr., en matière de taxes foncières, CE, 31 décembre 2008, Société coopérative agricole Opalin, n° 292723, T. p. 694 ;

CE, 31 décembre 2008, Société coopérative fromagère de Planèze, n° 308998, inédite au Recueil ;

CE, 21 novembre 2011, Min. c/ SCA de Broons, n° 338224, T. pp. 879-883. Comp. CE, 15 avril 2015, Institut coopératif du vin, n° 375531, inédite au Recueil.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 2017, n° 392752
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle Lemesle
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:392752.20170710
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