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28/04/2017 | FRANCE | N°390598

France | France, Conseil d'État, 6ème - 1ère chambres réunies, 28 avril 2017, 390598


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, Mme C...B...épouse A...demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 19 décembre 2014 par laquelle le procureur général près la cour d'appel de Versailles lui a infligé un avertissement et la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette décision reçue le 3 février 2015 ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice adm

inistrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, Mme C...B...épouse A...demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 19 décembre 2014 par laquelle le procureur général près la cour d'appel de Versailles lui a infligé un avertissement et la décision implicite rejetant son recours gracieux contre cette décision reçue le 3 février 2015 ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B...A...;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction applicable au litige : " Tout magistrat, lors de sa nomination à son premier poste, et avant d'entrer en fonctions, prête serment en ces termes : / "Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder religieusement le secret des délibérations et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat." " ; que le premier alinéa de son article 43 dispose que : " Tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute disciplinaire " ; que, selon son article 44, dans sa rédaction applicable au litige : " En dehors de toute action disciplinaire, l'inspecteur général des services judiciaires, les premiers présidents, les procureurs généraux et les directeurs ou chefs de service à l'administration centrale ont le pouvoir de donner un avertissement aux magistrats placés sous leur autorité. / L'avertissement est effacé automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucun nouvel avertissement ou aucune sanction disciplinaire n'est intervenu pendant cette période. " ;

2. Considérant que l'avertissement est une mesure prise en considération de la personne et doit, dès lors, respecter les droits de la défense, qui imposent à l'autorité compétente d'aviser, dans un délai raisonnable, l'agent concerné de la mesure qu'elle s'apprête à prendre et de lui communiquer, s'il le demande, son dossier ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le procureur près le tribunal de grande instance de Chartres a adressé, le 18 novembre 2014, au procureur général près la cour d'appel de Versailles un rapport sur le comportement de Mme C...B...épouseA..., substitut du procureur ; que, le 4 décembre 2014, le procureur général, qui envisageait de prononcer un avertissement à l'encontre de Mme B...A..., l'a convoquée à un entretien ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue de cet entretien, qui s'est déroulé le 15 décembre 2014, le procureur général a informé l'intéressée de sa décision de ne pas prononcer d'avertissement à son encontre, tout en l'invitant à modifier son comportement à l'égard de ses collègues et de son supérieur hiérarchique pour rétablir avec eux des relations plus conformes à ses obligations déontologiques ; que le procureur général a toutefois infligé un avertissement à Mme B...A...le 19 décembre 2014 ; que cette mesure est essentiellement fondée sur le motif tiré de ce que, le lendemain de l'entretien du 15 décembre, l'intéressée aurait adressé au procureur général un courrier critiquant en termes polémiques le procureur de la République, le fonctionnement du parquet, les conditions de son changement de bureau et les modalités selon lesquelles son évaluation professionnelle avait été portée à sa connaissance ; qu'en se fondant, pour infliger à l'intéressée un avertissement, sur cette circonstance nouvelle, sans l'informer préalablement de son intention de prendre cette mesure, afin de la mettre à même de demander la communication de son dossier et d'assurer sa défense, le procureur général a statué au terme d'une procédure irrégulière ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme B...A...est fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir des décisions qu'elle attaque ;

4. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Mme B...A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision du 19 décembre 2014 du procureur général près la cour d'appel de Versailles et la décision implicite rejetant le recours gracieux formé contre cette décision sont annulées.

Article 2 : L'État versera à Mme B...A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme C...B...épouse A...et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 390598
Date de la décision : 28/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 avr. 2017, n° 390598
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:390598.20170428
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