Vu la procédure suivante :
La société Sicli a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008, à raison du dégrèvement prévu par les dispositions de l'article 1647 C quinquies du code général des impôts. Par un jugement n° 1007713 du 21 février 2012, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 12VE01587 du 18 juillet 2013, rendu sur l'appel formé par la société Sicli, la cour administrative d'appel de Versailles a prononcé la réduction des cotisations de taxe professionnelle litigieuses et rejeté le surplus des conclusions de la société Sicli tendant au versement par l'Etat d'intérêts moratoires.
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 octobre 2013 et 26 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre délégué, chargé du budget, demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles en tant qu'il a prononcé la réduction des cotisations de taxe professionnelle litigieuses.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2004-804 du 9 août 2004 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bastien Lignereux, auditeur,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la SCS Sicli ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article 1647 C quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : " I. - Les immobilisations corporelles neuves éligibles aux dispositions de l'article 39 A ouvrent droit à un dégrèvement égal respectivement à la totalité, aux deux tiers et à un tiers de la cotisation de taxe professionnelle pour la première année au titre de laquelle ces biens sont compris dans la base d'imposition et pour les deux années suivantes. / Pour bénéficier du dégrèvement, les redevables indiquent chaque année sur les déclarations prévues à l'article 1477 la valeur locative et l'adresse des biens éligibles. / Les biens pour lesquels les redevables demandent le bénéfice du dégrèvement ne peuvent faire l'objet des dégrèvements mentionnés aux articles 1647 C à 1647 C quater " ; qu'aux termes de l'article 1477 du même code, dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : " I. Les contribuables doivent déclarer les bases de taxe professionnelle avant le 1er mai de l'année précédant celle de l'imposition ou, en cas de création d'établissement ou de changement d'exploitant ou d'activité en cours d'année, avant le 1er mai de l'année suivant celle de la création ou du changement. (...) " ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Sicli a demandé, par deux réclamations présentées les 30 décembre 2008 et 27 mars 2009, à bénéficier, au titre des années 2007 et 2008, du dégrèvement institué par les dispositions précitées de l'article 1647 C quinquies du code général des impôts ; que l'administration fiscale a rejeté cette demande au motif qu'en application de ces dispositions, le bénéfice de ce dégrèvement ne pouvait être sollicité que dans la déclaration prévue à l'article 1477 du même code, sans possibilité de régularisation postérieure par voie de réclamation contentieuse ; que le ministre délégué, chargé du budget, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 juillet 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a, sur l'appel de la société Sicli dirigé contre un jugement du 21 février 2012 du tribunal administratif de Montreuil, prononcé la réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles cette société a été assujettie, à raison du dégrèvement sollicité ;
3. Considérant que les dispositions qui prévoient que le bénéfice d'un avantage fiscal est demandé par voie déclarative n'ont, en principe, pas pour effet d'interdire au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-2 du livre des procédures fiscales, sauf si loi a prévu que l'absence de demande dans le délai de déclaration entraîne la déchéance du droit à cet avantage, ou lorsqu'elle offre au contribuable une option entre différentes modalités d'imposition ;
4. Considérant, en premier lieu, que si les dispositions précitées de l'article 1647 C quinquies du code général des impôts disposent que, pour bénéficier du droit au dégrèvement qu'elles instituent, les redevables ayant procédé à l'acquisition d'immobilisations qui y sont éligibles indiquent chaque année sur la déclaration de taxe professionnelle la valeur locative et l'adresse de ces biens, il ressort des travaux préparatoires de la loi du 9 août 2004 relative à la consommation et à l'investissement dont elles sont issues que le législateur n'a pas entendu prévoir une règle de déchéance ; que la formalité prévue par ces dispositions a, dès lors, seulement pour objet de permettre à l'administration fiscale de s'assurer de l'éligibilité des immobilisations concernées au dégrèvement ainsi que de son montant ;
5. Considérant, en second lieu, que si, en application du dernier alinéa du I de l'article 1647 C quinquies, le bénéfice de ce dégrèvement est, au titre d'une même immobilisation, exclusif de celui des dégrèvements mentionnés aux articles 1647 C à 1647 C quater, cette circonstance, qui n'induit pas pour le contribuable l'existence d'une option entre différentes modalités d'imposition, ne fait pas obstacle à ce qu'un redevable, qui n'a sollicité dans sa déclaration de taxe professionnelle le bénéfice d'aucun de ces dispositifs, fasse valoir son droit au dégrèvement litigieux dans le délai de réclamation, ce qui implique alors son renoncement aux autres dégrèvements auxquels il aurait également pu prétendre pour les mêmes biens ;
6. Considérant qu'il suit de là que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance que la société Sicli avait omis de porter, dans les déclarations prévues à l'article 1477 du code général des impôts, la valeur locative et l'adresse des biens qu'elle estimait éligibles à ce dégrèvement, ne faisait pas obstacle à ce qu'elle en sollicite le bénéfice par voie de réclamation contentieuse ; qu'il résulte de ce qui précède que le ministre délégué, chargé du budget n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à la société Sicli au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du ministre délégué, chargé du budget, est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la société Omerin une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à la société Sicli.