Vu le jugement du 19 juillet 2007, enregistré le 30 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel le tribunal administratif de Lille, avant de statuer sur la requête de M. Altin A, demeurant ... tendant, en premier lieu, à l'annulation des décisions du 10 avril 2007 par lesquelles le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a prononcé une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi, en deuxième lieu, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 20 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de son dossier dans un délai de quinze jours à compter de cette notification, en troisième lieu, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a décidé, en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :
1°) La procédure préalable au prononcé d'une obligation de quitter le territoire français exclut-elle par définition l'application de la procédure définie à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 '
2°) Un étranger qui dépose une demande de statut de réfugié doit-il être regardé comme demandant implicitement un titre de séjour en tant que demandeur d'asile ou en toute autre qualité, y compris au sens des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 '
3°) Le préfet peut-il se saisir de nouveau du dossier d'un étranger auquel un titre de séjour a été refusé antérieurement à l'entrée en vigueur des dispositions de la loi du 24 juillet 2006 pour opposer un nouveau refus de titre de séjour et l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français '
4°) Lorsque le préfet rejette une demande de titre de séjour, le lien entre la demande de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français est-il suffisant pour que l'exclusion prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, relative au cas où il est répondu à une demande de l'intéressé, puisse être opposée à l'étranger '
5°) Lorsque le préfet refuse un titre de séjour sans qu'une demande ait été présentée, retire un titre de séjour, un récépissé de demande de carte de séjour ou une autorisation provisoire de séjour, les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 sont-elles applicables quand il veut prononcer une obligation de quitter le territoire français '
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, modifiée, notamment son article 24 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Sophie-Justine Liéber, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Frédéric Lenica, Commissaire du gouvernement ;
REND L'AVIS SUIVANT
L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction résultant de l'article 52 de la loi du 24 juillet 2006 relative à l'intégration et à l'immigration, dispose : « I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa./.../ L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration... ». L'article L. 512-1 du code prévoit : « L'étranger qui fait l'objet d'un refus de séjour, d'un refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour ou d'un retrait de titre de séjour, de récépissé de demande de carte de séjour ou d'autorisation provisoire de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination peut, dans le délai d'un mois suivant la notification, demander l'annulation de ces décisions au tribunal administratif... Son recours suspend l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français sans pour autant faire obstacle au placement en rétention administrative dans les conditions prévues au titre V du présent livre. Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. Toutefois, en cas de placement en rétention de l'étranger avant qu'il ait rendu sa décision, il statue, selon la procédure prévue à l'article L. 512-2, sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi, au plus tard soixante-douze heures à compter de la notification par l'administration au tribunal de ce placement. Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ».
1°) Sur la question relative à la légalité d'une décision préfectorale se prononçant à nouveau sur la demande de titre de séjour d'un étranger, auquel un titre de séjour a déjà été refusé antérieurement à l'entrée en vigueur des dispositions de la loi du 24 juillet 2006, pour opposer un nouveau refus et l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français :
Les dispositions précitées de la loi du 24 juillet 2006 permettent à l'administration, à titre transitoire et dans un délai raisonnable qui ne saurait excéder un an à compter de l'entrée en vigueur de cette loi, de réexaminer une demande de titre de séjour à laquelle un refus aurait été opposé au titre des anciennes dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et d'opposer un nouveau refus assorti, le cas échéant, d'une décision portant obligation de quitter le territoire français. Si l'administration décide d'opposer à nouveau un refus à la demande initiale, cette nouvelle décision de refus est susceptible d'être contestée, dans un délai qui court à compter de sa notification, devant le juge administratif.
2°) Sur les questions relatives à l'application des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration :
L'article 24 de la loi du 12 avril 2000 dispose : « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales... ».
Il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, quel que soit le type de décision dont cette obligation de quitter le territoire français découle (refus ou retrait de titre de séjour, de récépissé de carte de séjour ou d'autorisation provisoire de séjour).
En vertu de leurs termes mêmes, ces dispositions ne peuvent pas non plus être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé.
Il en est notamment ainsi lorsque le préfet refuse la délivrance d'une carte de résident à un étranger auquel la qualité de réfugié a été refusée. Cette décision doit, en effet, être regardée comme prise en réponse à une demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile, la reconnaissance du statut de réfugié impliquant la délivrance immédiate d'une carte de résident.
En revanche, les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 trouvent à s'appliquer lorsque le préfet décide, d'office, de retirer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour.
Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Lille, à M. Altin A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.