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16/10/2000 | FRANCE | N°212054

France | France, Conseil d'État, 7 / 5 ssr, 16 octobre 2000, 212054


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 6 et 20 septembre 1999, présentés pour la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU, dont le siège est ... ; la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 12 août 1999 par laquelle le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia, statuant en application des dispositions de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d

'appel, a rejeté sa requête tendant, d'une part, à ce que so...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 6 et 20 septembre 1999, présentés pour la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU, dont le siège est ... ; la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 12 août 1999 par laquelle le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia, statuant en application des dispositions de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, a rejeté sa requête tendant, d'une part, à ce que soit ordonnée la suspension des procédures d'attribution de délégations de service public par le district de Bastia et, d'autre part, à l'annulation des décisions par lesquelles les candidatures de l'office hydraulique de Corse ont été retenues ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Edouard Philippe, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du district de Bastia et de Me Odent, avocat de l'office d'équipement hydraulique de la Corse,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président du tribunal administratif, ou son délégué, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics et des conventions de délégation de service public./ Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par ce manquement ( ...)./ Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du marché ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. ( ...)./ Le président du tribunal administratif ou son délégué statue en premier et dernier ressort en la forme des référés" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'après avoir publié, au cours du mois de janvier 1999, plusieurs avis d'appels publics à la concurrence, le conseil du district de Bastia, qui souhaitait procéder à la délégation du service public de distribution d'eau potable et d'assainissement, a admis, par une décision du 29 avril 1999, quatre candidats à présenter une offre, au nombre desquels se trouvait l'office d'équipement hydraulique de la Corse et la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU ; qu'après la transmission par le conseil du district de Bastia du dossier de consultation aux candidats restant en lice, la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU a contesté la décision par laquelle le conseil du district de Bastia avait admis l'office d'équipement hydraulique de la Corse à présenter une offre et a saisi, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le président du tribunal administratif de Bastia ; que la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU demande l'annulation de l'ordonnance du 12 août 1999 par laquelle le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel que les seuls manquements visés par ces dispositions sont ceux commis par l'autorité responsable de la passation du contrat ; que s'il appartient au juge institué par les dispositions précitées de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de vérifier que l'appréciation portée par la personne responsable de la passation du contrat de délégation de service public envisagé sur les éléments justifiant qu'un candidat soit admis à présenter une offre ne constitue pas un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles elle est soumise, il ne lui revient pas de contrôler le respect, par le candidat à l'obtention d'un marché public ou d'une délégation de service public, de son objet social ou, lorsqu'il s'agit d'un établissement public, du principe de spécialité auquel il est tenu ; qu'ainsi, en se fondant, pour rejeter la requête de la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU, sur ce que, statuant sur le fondement des dispositions de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, il ne lui appartenait pas de vérifier que la candidature de l'office d'équipement hydraulique de la Corse ne conduisait pas cet établissement public à intervenir au-delà des limites de sa spécialité, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia n'a pas entaché son ordonnance d'une erreur de droit ;
Considérant qu'il ressort du dossier soumis au juge du fond que la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU a saisi le président du tribunal administratif de Bastia postérieurement à la décision du conseil du district d'admettre quatre candidats à présenter une offre mais avant l'expiration du délai au terme duquel ces quatre candidats devaient présenter leur offre ; qu'à la date à laquelle le magistrat délégué a statué la négociation prévue par les dispositions de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales n'avait pas été engagée, aucune offre n'ayant été formulée ; que le magistrat délégué, qui, contrairement à ce que soutient la société requérante, n'a pas estimé que la requête était prématurée, a pu, sans commettre d'erreur de droit, apprécier à ce stade si la procédure engagée respectait les obligations de publicité et de mise en concurrence ;
Considérant que le principe de la liberté du commerce et de l'industrie ne fait pas obstacle, par lui-même, à ce qu'un établissement public se porte candidat à l'obtention d'une délégation de service public proposée par une collectivité territoriale ; que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain et sans dénaturer les pièces du dossier que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bastia a estimé que les subventions que reçoit l'office d'équipement hydraulique de la Corse et les négociations qu'il menait avec le district de Bastia pour la conclusion d'autres contrats ne le plaçaient pas dans une situation avantageuse par rapport aux autres candidats ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;
Sur les conclusions de l'office d'équipement hydraulique de la Corse tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU à payer à l'office d'équipement hydraulique de la Corse la somme de 15 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens et au district de Bastia la somme de 20 000 F qu'il demande au même titre ;
Article 1er : La requête de la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU est rejetée.
Article 2 : La COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU versera à l'office d'équipement hydraulique de la Corse une somme de 15 000 F et au district de Bastia une somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMPAGNIE MEDITERRANEENNE D'EXPLOITATION DES SERVICES D'EAU, à l'office d'équipement hydraulique de la Corse, au district de Bastia et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 7 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 212054
Date de la décision : 16/10/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

- RJ1 COMMERCE - INDUSTRIE - INTERVENTION ECONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - PRINCIPES GENERAUX - LIBERTE DU COMMERCE ET DE L'INDUSTRIE - Principe faisant obstacle à la candidature d'un établissement public à l'obtention d'une délégation de service public - Absence (1).

14-01-01, 39-02-02-01 Le principe de la liberté du commerce et de l'industrie ne fait pas obstacle, par lui-même, à ce qu'un établissement public se porte candidat à l'obtention d'une délégation de service public proposée par une collectivité territoriale.

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHES - MODE DE PASSATION DES CONTRATS - DELEGATIONS DE SERVICE PUBLIC - Candidature d'un établissement public - Compatibilité avec le principe de la liberté du commerce et de l'industrie - Existence (1).

39-08-015, 39-08-03 Lorsqu'il est saisi sur le fondement des dispositions de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le président du tribunal administratif apprécie la régularité de la procédure de passation de marché telle qu'elle est engagée à la date à laquelle il statue.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - PROCEDURES D'URGENCE - Article L - 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel - Contrôle par le président du tribunal administratif de la régularité de la procédure à la date à laquelle il statue.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - POUVOIRS ET OBLIGATIONS DU JUGE - Article L - 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel - Contrôle par le président du tribunal administratif de la régularité de la procédure à la date à laquelle il statue.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L22
Code général des collectivités territoriales L1411-1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

1.

Cf. 2000-11-08, Société Jean-Louis Bernard Consultants, à publier au recueil


Publications
Proposition de citation : CE, 16 oct. 2000, n° 212054
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. Edouard Philippe
Rapporteur public ?: Mme Bergeal

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:212054.20001016
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