Vu, enregistré le 18 décembre 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, l'arrêt du 5 décembre 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy, avant de statuer sur la requête de la SARL Hofmiller tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 11 juillet 1989 rejetant son opposition à un commandement de payer le montant de la redevance d'enlèvement des ordures, déchets et résidus auquel elle a été assujettie au titre de 1984, sa demande en annulation de l'état exécutoire émis à son encontre concernant la même redevance au titre de 1985 et ses conclusions indemnitaires dirigées contre la commune de Sarre-Union, et, d'autre part, au bénéfice de ses conclusions initiales et à la condamnation de la commune au paiement d'une indemnité au titre des frais irrépétibles, a décidé, en application des dispositions de l'article 12 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif, de transmettre le dossier de cette requête au Conseil d'Etat en soumettant à son examen les questions suivantes :
Lorsqu'une redevance d'enlèvement des ordures, déchets et résidus a été légalement instituée par une commune en application de l'article L.233-78 du code des communes et est calculée en fonction de l'importance du service rendu, la juridiction administrative est-elle compétente pour connaître des litiges auxquels donne lieu le paiement de cette redevance, y compris lorsque ladite redevance est recouvrée par la commune au profit d'un concessionnaire de service public ? Dans l'hypothèse d'une compétence de la juridiction administrative, les personnes desservies peuvent-elles, en renonçant à l'utilisation dudit service de ramassage et d'élimination des ordures, déchets et résidus, être exonérées de la redevance et, dans l'affirmative, cette exonération peut-elle être subordonnée à la preuve d'une élimination des ordures, déchets ou résidus selon un procédé régulier ?
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Loloum, Maître des requêtes,
- les observations de Me Cossa, avocat de la commune de Sarre-Union,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
La possibilité, pour les communes, leurs groupements ou les établissements publics locaux qui assurent l'enlèvement des ordures, déchets et résidus, d'instituer une redevance pour service rendu, dont l'institution entraîne la suppression de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, résulte des dispositions du II de l'article 14 de la loi n° 74-1129 du 30 décembre 1974 codifiées à l'article L.233-78 du code des communes.
La faculté ainsi ouverte aux collectivités susvisées est directement liée à celle qui leur est smultanément ouverte par le I du même article 14, codifié à l'article 260 A du code général des impôts, d'opter pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des opérations relatives au service d'enlèvement et de traitement des ordures, déchets et résidus, lorsque ce service donne lieu au paiement de la redevance ainsi instituée. La même faculté d'assujettissement est d'ailleurs ouverte par cette disposition en ce qui concerne les opérations relatives à des services industriels et commerciaux tels que la fourniture de l'eau et l'assainissement.
Il résulte de ces dispositions, éclairées par leurs travaux préparatoires, que le législateur a entendu permettre à ces collectivités publiques, en substituant une rémunération directe du service par l'usager à une recette de caractère fiscal, de gérer ce service comme une activité industrielle et commerciale. Par suite, lorsqu'une commune décide de financer son service d'enlèvement des ordures ménagères par la redevance mentionnée à l'article L.233-78 du code des communes et calculée en fonction de l'importance du service rendu, ce service municipal, qu'il soit géré en régie ou par voie de concession, doit être regardé comme ayant un caractère industriel et commercial. Dès lors, il appartient à la juridiction judiciaire de connaître des litiges relatifs au paiement des redevances qui sont réclamées aux usagers du service.
Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu pour le Conseil d'Etat d'examiner la seconde question posée par la cour administrative d'appel et concernant la possibilité, pour un usager desservi par le service susmentionné d'enlèvement des ordures ménagères, d'être exonéré de la redevance au motif qu'il aurait renoncé aux prestations fournies par ledit service.
Le présent avis sera notifié à la cour administrative d'appel de Nancy, à la SARL Hofmiller et au ministre du budget.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.