AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLEE PLENIERE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 7 avril 2004), rendu sur renvoi après cassation (soc., 25 mars 2003, Bulletin V, n° 110), qu'après avoir envoyé les 12 octobre 1994, 26 octobre 1994 et 13 mai 1995, des mises en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'adresse effective de M. X..., afin d'obtenir le paiement des cotisations de sécurité sociale relevant du régime des travailleurs indépendants pour la période du 1er juillet 1991 au 30 juin 1994, l'union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) lui a fait signifier une contrainte le 10 janvier 1996 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de son opposition, de valider partiellement la contrainte et de dire la prescription non acquise alors, selon le moyen :
1 / que la mise en demeure envoyée par l'URSSAF d'avoir à régler les cotisations et majorations de retard constitue une décision de redressement qui fixe le point de départ de l'action en recouvrement des cotisations ; qu'en décidant que cette mise en demeure n'avait pas de nature contentieuse et que les règles de notification des actes prévues par le nouveau Code de procédure civile ne s'appliquaient pas, la cour d'appel a violé les articles L. 244-2 et R. 244-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 670 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que toute action ou poursuite en recouvrement de cotisations dues par un travailleur non salarié est précédée à peine de nullité par une mise en demeure adressée à la personne même du débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dont la notification est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire ; qu'en énonçant que quels qu'aient été les modes de délivrance (à Mme X... ou retournée à l'expéditeur non réclamée) les mises en demeure litigieuses envoyées à l'adresse toujours effective de M. X... produisaient leur plein effet, la cour d'appel a violé les articles L. 244-2 et R. 244-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 670 du nouveau Code de procédure civile ;
3 / que l'interruption d'une prescription ne peut avoir lieu qu'au moment où l'acte interruptif est porté à la connaissance de la personne en faveur de laquelle le délai de prescription a couru ; que l'avertissement ou la mise en demeure adressés pour le recouvrement des cotisations sociales ne peut concerner que les cotisations exigibles dans les trois années qui précédent la date de réception par le destinataire de la notification ; qu'en décidant que la prescription triennale avait été interrompue par la date d'envoi de la mise en demeure, adressée par l'URSSAF à M. X..., la cour d'appel a violé les articles L. 244-2, L. 244-3, R. 244-1 du Code de la sécurité sociale et l'article 670 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'à la différence de la contrainte, la mise en demeure préalable délivrée par une URSSAF n'est pas de nature contentieuse et que le cours de la prescription visée à l'article L. 244-3 du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en la cause, est interrompu par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception valant mise en demeure ; qu'ayant exactement retenu que les dispositions des articles 640 à 694 du nouveau Code de procédure civile ne sont pas applicables à cette mise en demeure, la cour d'appel en a déduit à bon droit que, quels qu'en aient été les modes de délivrance, les mises en demeure envoyées à l'adresse de M. X... ne pouvaient être de nul effet et que les créances visées n'étaient pas prescrites ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X... à payer à l'URSSAF de Paris la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en Assemblée plénière, et prononcé par le président doyen remplaçant le premier président empêché, en son audience publique du sept avril deux mille six.
Moyen produit par Me de Nervo, Avocat aux Conseils, pour M. X... ;
MOYEN ANNEXE à l'arrêt n° 535 (plénière) ;
MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la mise en demeure prévue par les articles L. 244-2, L. 244-3, R 244-1 du Code de la sécurité sociale n'est pas de nature contentieuse ; dit que se trouvent inapplicables les dispositions prévues par le livre 1er titre XVII du nouveau Code de procédure civile ; dit non acquise la prescription édictée à l'article L. 244-3 du Code de la sécurité sociale en ce qui concerne les cotisations et majorations de retard visées aux mises en demeure des 26 octobre 1994 et 13 mai 1995 ; et validé en conséquence ces mises en demeure pour la somme totale de 27 975,15 euros en cotisations et 085,48 euros en majorations de retard
AUX MOTIFS QUE l'article L. 244-2 du Code de la sécurité sociale subordonne la poursuite du débiteur par l'organisme de recouvrement à l'envoi d'une mise en demeure adressée à l'employeur ou au travailleur indépendant ; que l'article L. 244-3 du même code dispose que l'avertissement ou la mise en demeure ne peut concerner que des cotisations exigibles dans les trois années qui précèdent leur envoi ; que l'article R. 244-1 du même code précise que "l'envoi par la caisse ou par la direction régionale des affaires sanitaires et sociales de l'avertissement ou de la mise en demeure prévus à l'article L. 244-2 est effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; lorsque l'employeur ou le travailleur indépendant qui fait l'objet de l'avertissement ou de la mise en demeure prévus à l'article R. 133-2 saisit la juridiction compétente dans les conditions prévues à l'article R. 133-2, la prescription des actions mentionnées aux articles L. 244-7 et L. 244-11 est interrompue et de nouveaux délais recommencent à courir à compter du jour où le jugement est devenu définitif ; que la mise en demeure telle que prévue par ces textes du Code de la sécurité sociale n'est pas de nature contentieuse ; que constituant une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation elle se trouve être le préalable nécessaire à la délivrance d'une contrainte, cette dernière seule revêtant la dite nature contentieuse ; que par conséquent les dispositions prévues par le livre 1er du nouveau Code de procédure civile titre XVII, à savoir les articles 640 à 694, ne sont pas applicables à cette mise en demeure ; que, de plus, il résulte expressément de la rédaction de l'article L. 244-3 du Code de la sécurité sociale que c'est la date d'envoi de la mise en demeure qui doit être prise en compte pour l'examen de la prescription et non celle de la présentation de la lettre recommandée ce qui est d'ailleurs conforme à la jurisprudence dégagée pour l'application de l'article 2244 du Code civil en matière d'actes interruptifs de prescription ; que par conséquent, quels qu'aient été les modes de délivrance, les mises en demeure litigieuses envoyées à l'adresse toujours effective de Monsieur X... ne sauraient être dites de nul effet ; que la mise en demeure portant sur les cotisations provisionnelles afférentes au 1er trimestre 1992 troisième trimestre 1993 et de régularisation de l'avant dernière année (N-2) a été envoyée par l'URSSAF le 13 mai 1995 ainsi qu'il résulte du cachet de la poste de Bobigny ; que les échéances respectives de ces cotisations se situaient selon l'article R 243-22 du Code de la sécurité sociale dans les quinze premiers jours du second mois de chaque trimestre civil, ce étant précisé que le solde dû en cotisations de régularisation de l'avant dernière année (année -2) ne peut se prescrire qu'en même temps et dans les mêmes conditions de délai que la cotisation provisionnelle due au titre de l'année en cours au moment de la régularisation ;
qu'ainsi ces échéances se situaient au 15 mai 1992, 15 août 1992 et 15 novembre 1993 ; qu'elles n'étaient pas encore prescrites lors de l'envoi de la mise en demeure le 13 mai 1995
1) ALORS QUE la mise en demeure envoyée par l'URSSAF d'avoir à régler les cotisations et majorations de retard constitue une décision de redressement qui fixe le point de départ de l'action en recouvrement des cotisations ; qu'en décidant que cette mise en demeure n'avait pas de nature contentieuse et que les règles de notification des actes prévues par le nouveau Code de procédure civile ne s'appliquaient pas la cour d'appel a violé les articles L. 244-2 et R 244-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 670 du nouveau Code de procédure civile
2) ALORS QUE toute action ou poursuite en recouvrement de cotisations dues par un travailleur non salarié est précédée à peine de nullité par une mise en demeure adressée à la personne même du débiteur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dont la notification est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire ; qu'en énonçant que, quels qu'aient été les modes de délivrance (à Madame X... ou retournée à l'expéditeur non réclamée) les mises en demeure litigieuses envoyées à l'adresse toujours effective de Monsieur X... produisaient leur plein effet, la cour d'appel a violé les articles L.244-2 et R.244-1 du Code de la sécurité sociale ensemble l'article 670 du nouveau Code de procédure civile
3) ALORS QUE l'interruption d'une prescription ne peut avoir lieu qu'au moment où l'acte interruptif est portée à la connaissance de la personne en faveur de laquelle le délai de prescription a couru ; que l'avertissement ou la mise en demeure adressés pour le recouvrement des cotisations sociales ne peut concerner que les cotisations exigibles dans les 3 années qui précèdent la date de réception par le destinataire de la notification ; qu'en décidant que la prescription triennale avait été interrompue par la date d'envoi de la mise demeure, adressée par l'URSSAF à Monsieur X..., la cour d'appel a violé les articles L. 244- 2, L. 244-3, R 244-1 du Code de la sécurité sociale et l'article 670 du nouveau Code de procédure civile