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26/05/2010 | FRANCE | N°08-44366

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 mai 2010, 08-44366


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 1332-4 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Promotal qui l'employait depuis le 5 juillet 1982 en qualité d'attaché commercial, a été licencié pour faute grave le 14 septembre 2006 ;

Attendu que pour décider que le licenciement repose sur une faute grave, l'arrêt retient que, dès lors qu'il est établi que le salarié a, dans le délai de deux mois précédant l'engage

ment de la procédure de licenciement, eu un comportement fautif en faisant usage essentiell...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 1332-4 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Promotal qui l'employait depuis le 5 juillet 1982 en qualité d'attaché commercial, a été licencié pour faute grave le 14 septembre 2006 ;

Attendu que pour décider que le licenciement repose sur une faute grave, l'arrêt retient que, dès lors qu'il est établi que le salarié a, dans le délai de deux mois précédant l'engagement de la procédure de licenciement, eu un comportement fautif en faisant usage essentiellement à des fins personnelles d'un téléphone mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de ses fonctions, peuvent être prises en compte les fautes commises antérieurement à ce délai par l'intéressé, consistant en un refus répété d'adresser des rapports hebdomadaires et dans le dénigrement tant de la politique commerciale de l'entreprise que des compétences des dirigeants, et que cet ensemble d'agissements fautifs caractérise la faute grave ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle ne pouvait pas prendre en considération les agissements antérieurs prescrits qui n'étaient pas de même nature que ceux commis dans le délai de prescription, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er juillet 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;

Condamne la société Promotal aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Promotal à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X....

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de Monsieur X..., salarié de la société PROMOTAL, pour faute grave était justifié et d'avoir, en conséquence, débouté ce salarié de toutes ses demandes ;

AUX MOTIFS QU ‘ il convient d'examiner les griefs récents constatés dans les deux mois précédant l'engagement de la procédure et que si au moins l'un d'entre eux est vérifié que pourront être invoqués utilement les griefs les plus anciens : attitude hostile, dénigrement, refus de rédiger des rapports qui d'après les écritures de l'employeur constituent une attitude persistante du salarié, et donc, par hypothèse, connue de l'employeur depuis de nombreux mois ; qu'on doit prendre en compte le fait que le salarié était absent de l'entreprise pour maladie depuis plus de quatre mois à la date de l'engagement de la procédure ; que seules des fautes découvertes pendant l'absence du salarié, peuvent justifier l'engagement de la procédure disciplinaire, au regard des exigences de l'article L 122-44 du Code du travail ; que l'employeur invoque trois fautes : refus persistant de renseigner les services commerciaux sur les affaires en cours pendant son absence ; qu'il s'agit d'une attitude peu coopérative ; que pour autant elle ne peut être considérée comme fautive dès lors que pendant la période de suspension liée à la maladie les obligations contractuelles sont suspendues et le salarié n'est plus sous l'autorité de son employeur qui ne peut donc lui reprocher comme une faute le fait de refuser d'exécuter une tâche en lien avec son travail ; que ce grief n'est pas établi ; que sur le grief fondé sur le fait de tenir sa comptabilité et de s'occuper de la gestion de ses affaires personnelles courantes sur son temps de travail, le seul fait établi est la présence de dossiers personnels dans son bureau ce qui ne constitue pas un manquement à des obligations contractuelles ; que le grief n'est pas établi ; que sur l'utilisation abusive du téléphone portable à des fins personnelles, Monsieur X... a, en 2001, reçu un téléphone portable et émargé un bon de remise précisant que l'usage personnel devait rester exceptionnel ; qu'il résulte des pièces produites que de mai à fin août 2001, Monsieur X... a passé de très nombreux coups de téléphone ; que s'agissant de coups donnés pendant un arrêt de travail, il s'agit de coups de téléphone personnels, au moins dans leur immense majorité ; que l'employeur relie à juste titre cette attitude au refus du salarié de communiquer avec sa direction pour des affaires urgents, en raison de la suspension de son contrat de travail ; que quand bien même le salarié peut faire état d'une tolérance de son employeur pour une imbrication de coups de téléphone professionnels et personnels pendant ses périodes d'activité, autant il ne peut être fait état d'une tolérance pour des coups de téléphone uniquement personnels pendant une période de suspension du contrat de travail relativement importante ; que ce grief est vérifié et qu'il conduit à examiner les autres griefs plus anciens et non sanctionnés ; qu'il résulte des éléments produits, que le salarié refusait, malgré des demandes répétées d'établir des rapports périodiques d'activité ; qu'il s'agir d'une exigence que l'employeur pouvait formuler, quand bien même elle n'aurait pas été requise par sa précédente direction ; que le salarié ne justifie pas avoir été contractuellement dispensé d'établir des rapports d'activité ; qu'enfin il résulte des pièces versées aux débats que le salarié avait adopté vis-à-vis de sa direction une attitude critique et hostile, dénigrant la politique commerciale et mettant en doute publiquement la capacité des responsables ; que cette attitude apparaît relativement ancienne que toutefois, il résulte d'attestations que le salarié a eu une attitude de même ordre le 31 mars 2006 ; qu'au total un certain nombre des griefs formés contre Monsieur X... sont justifiés ; que le débat porte sur le point de savoir s'ils constituent une faute grave requise par l'article L 122-32-2 du Code du travail puisque le licenciement est intervenu en période de suspension ; qu'il résulte des éléments produits que le salarié avait un comportement difficile voire excessif en certaines occasions, vis-à-vis de sa hiérarchie, et dans sa critique de la politique commerciale de l'entreprise ; qu'il s'est rendu responsable d'un certain nombre de manquements à ses obligations contractuelles ; que cet ensemble de faits fautifs rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ;

ALORS D'UNE PART QUE si les dispositions de l'article L 122-44 du Code du travail ne font pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs à deux mois, y compris ceux ayant été déjà sanctionnés, c'est à la condition que le comportement du salarié se soit poursuivi dans ce délai ; que l'employeur ne peut donc se prévaloir que de faits similaires procédant d'un comportement identique du salarié et non d'un quelconque autre agissement commis antérieurement ; que dès lors, en décidant que la réalité du grief relatif à l'utilisation personnelle du téléphone portable par Monsieur X... permettait à la société PROMOTAL de se prévaloir du refus de ce salarié d'établir des rapports périodiques d'activité ou de son attitude critique et hostile vis-à-vis de sa direction, griefs fondés sur des faits totalement distincts, la Cour d'appel a violé l'article L 1332-4 du Code du travail (ancien article L 122-44) ;

ALORS D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT QU'aux termes de l'article L 1332-4 du Code du travail (ancien article L 122-44) aucun fait non fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; que dès lors en décidant que le grief tiré de l'utilisation personnelle par Monsieur X... du portable laissé à sa disposition par l'employeur était vérifié, sans rechercher à quelle date l'employeur, qui recevait chaque mois les factures du téléphone de Monsieur X... dont l'arrêt de travail avait débuté le 13 mai 2006, avait eu connaissance d'une telle utilisation la Cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article L 1332-4 du Code du travail (ancien article L 122-44) ;

ALORS ENFIN QUE le seul fait pour un salarié ayant une ancienneté de vingt quatre ans d'utiliser, pendant un arrêt de travail, le téléphone portable dont son employeur lui a laissé la disposition, à des fins personnelles ne saurait, en l'absence de toute mise en garde préalable de l'employeur, constituer une faute grave ; qu'en décidant néanmoins le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail (anciens articles L 122-6, L 122-8 et L 122-9)


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44366
Date de la décision : 26/05/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 01 juillet 2008, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 1 juillet 2008, 07/01845

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 01 juillet 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 mai. 2010, pourvoi n°08-44366


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44366
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