LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article R. 241-51-1, alinéa 1er, devenu R. 4624-31 du code du travail ;
Attendu que, selon ce texte, sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude d'un salarié à son poste de travail qu'après deux examens médicaux espacés de deux semaines ; qu'il s'ensuit que cette inaptitude ne peut être déclarée après un seul examen médical que si la situation de danger résulte de l'avis du médecin du travail ou si cet avis indique, outre la référence à l'article R. 4624-31 du code du travail, qu'une seule visite est effectuée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 5 août 1977 en qualité d'ouvrier routier par la société Appia Loiret, devenue Eiffage travaux publics, a connu d'importants problèmes de santé courant 2005 et à l'issue de la visite médicale de reprise, le 2 février 2006, a été déclaré inapte par le médecin du travail en application de la procédure d'urgence de l'article R. 241-51-1 du code du travail ; qu'il a été licencié pour inaptitude, le 2 mars suivant ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour contester le licenciement et demander le paiement de diverses sommes ;
Attendu que, pour refuser de déclarer nul le licenciement de M. X... et décider qu'il était fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'article R. 241-51-1 du code du travail dispose que "sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste de travail qu'après une étude de ce poste et des conditions de travail dans l'entreprise et deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés le cas échéant, des examens complémentaires mentionnés à l'article R. 241-52", que ces dispositions renvoient à deux situations possibles à savoir celle du salarié pour lequel la reprise du travail même pendant deux semaines serait susceptible d'aggraver son état et celle de celui qui peut reprendre une activité durant cette même période de temps, sans pour autant menacer sa santé ou celle des tiers, qu'il s'ensuit que le médecin du travail qui vise à la fois ledit article et l'urgence se positionne nécessairement et clairement par rapport à la situation de danger immédiat, toute autre interprétation revenant à dénaturer le sens de son avis ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'avis du médecin du travail ne mentionnait pas, outre la référence à l'article R. 241-51-1, devenu l'article R. 4624-31 du code du travail, qu'une seule visite était effectuée et que la mention d'une procédure d'urgence ne pouvait y suppléer, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la société Eiffage travaux publics Ile-de-France Centre aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR refusé de déclarer nul le licenciement de Monsieur X... et décidé qu'il était fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE « l'article R.241-51-1 du code du travail dispose que : « Sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste de travail qu'après une étude de ce poste et des conditions de travail dans l'entreprise et deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés le cas échéant des examens complémentaires mentionnés à l'article R.241-52 » ; que ces dispositions renvoient à deux situations possibles à savoir celle du salarié pour lequel la reprise du travail même pendant deux semaines serait susceptible d'aggraver son état et celle de celui qui peut reprendre une activité durant cette même période de temps, sans pour autant menacer sa santé ou celle des tiers ; qu'il s'ensuit que le médecin du travail qui vise à la fois ledit article et l'urgence se positionne nécessairement et clairement par rapport à la situation de danger immédiat toute autre interprétation revenant à dénaturer le sens de son avis ; que par ailleurs, « le poste proposé » à ce stade de la procédure ne peut s'entendre que de celui qu'avait toujours occupé le salarié, la société n'ayant pas encore effectué la moindre la proposition de reclassement à la date du 2 février 2006 ; qu'ainsi la société EIFFAGE TRAVAUX PUBLICS n'avait pas à exiger une seconde visite de contrôle avant d'engager la procédure de licenciement » (arrêt attaqué, p. 4, al. 1 à 5) ;
ALORS, d'une part, QU'il résulte de l'article R.241-51-1 (article R.4624-31) du Code du travail que le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste de travail après une seule visite médicale que dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celle des tiers ; qu'il appartient alors au médecin du travail de caractériser l'existence d'un tel danger, sans qu'il puisse se borner à une référence au texte qui précède ; que pour déclarer valable le licenciement fondé sur l'avis d'inaptitude qui se bornait à mentionner : « Inapte au poste proposé à dater de ce jour en application de la procédure d'urgence de l'article R.241-51-1», ces mentions étant impropres à caractériser en quoi le maintien de Monsieur X... à son poste entraînait un danger immédiat pour la santé ou la sécurité du salarié ou celle des tiers et se référant à une « procédure d'urgence » étrangère aux dispositions légales, la cour d'appel ne pouvait énoncer que le médecin du travail qui visait à la fois ledit article et l'urgence « se positionnait nécessairement et clairement par rapport à la situation de danger immédiat » sans violer les articles L.122-45 (article L 1132-1) et R.241-51-1 (article R.4624-31) du Code du travail ;
ALORS, d'autre part, QU'en déclarant valable le licenciement prononcé sur le fondement de l'avis d'inaptitude qui se bornait à une référence à l'article R.241-51-1 du Code du travail, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que l'avis d'inaptitude mentionnait qu'une seule visite avait été effectuée, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L.122-45 (article L 1132-1) et R.241-51-1 (article R.4624-31) du Code du travail.