La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2010 | FRANCE | N°09-65400

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 06 mai 2010, 09-65400


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, qui est recevable :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 décembre 2008), que la Banque Indosuez, aux droits de laquelle vient la société Calyon, ayant mandaté la société Cogim pour obtenir un permis de construire un immeuble à Cannes, la taxe de surdensité pour dépassement du coefficient d'occupation des sols a été sous-évaluée du fait d'agissements pour lesquels le maire de Cannes et le président de la société Cogim ont été condamnés pénalement ; que l

e 9 janvier 2006, la commune de Cannes a assigné la société Calyon en dommages-i...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, qui est recevable :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 4 décembre 2008), que la Banque Indosuez, aux droits de laquelle vient la société Calyon, ayant mandaté la société Cogim pour obtenir un permis de construire un immeuble à Cannes, la taxe de surdensité pour dépassement du coefficient d'occupation des sols a été sous-évaluée du fait d'agissements pour lesquels le maire de Cannes et le président de la société Cogim ont été condamnés pénalement ; que le 9 janvier 2006, la commune de Cannes a assigné la société Calyon en dommages-intérêts en réparation de son préjudice ;
Attendu que la commune de Cannes fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son action pour cause de prescription, alors, selon le moyen :
1°/ que la prescription d'une action en responsabilité civile ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en retenant, en l'espèce, que le point de départ du délai de prescription devait être fixé au 20 janvier 1994, date de l'arrêté ayant abusivement minoré la taxe de surdensité, quand la commune de Cannes n'a eu pourtant connaissance de son préjudice résultant d'un manque à gagner au titre de la taxe de surdensité, que le 1er décembre 2004, date de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ayant révélé le caractère frauduleux de cet arrêté municipal et le délit de corruption passive dont s'était rendu coupable l'ancien maire de Cannes, M. X..., en signant cet arrêté, la cour d'appel a violé l'article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;
2°/ que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité absolue d'agir par suite d'un empêchement quelconque résultant soit de la loi, soit de la convention, soit de la force majeure ; qu'une ignorance légitime et raisonnable suffit à permettre d'invoquer une telle impossibilité ; qu'en estimant que le point de départ du délai de prescription devait être fixé au 20 janvier 1994, date de l'arrêté ayant abusivement minoré la taxe de surdensité, quand la commune de Cannes a pourtant été dans l'impossibilité d'agir jusqu'à l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 1er décembre 2004, pour avoir légitimement et raisonnablement ignoré jusqu'à cette date le caractère frauduleux de cet arrêté municipal et le délit de corruption passive dont s'était rendu coupable l'ancien maire de Cannes, M. X..., en signant cet arrêté, la cour d'appel a violé l'article 2251 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;
Mais attendu qu'ayant relevé que par un jugement définitif du 15 mars 2007, le tribunal administratif de Nice avait déchargé la société Calyon de la taxe de surdensité mise à sa charge pour dépassement du coefficient d'occupation des sols, la cour d'appel en a déduit à bon droit, justifiant légalement sa décision par ces seuls motifs, que la commune de Cannes n'était pas recevable à demander la même somme par une voie détournée et en violation de l'autorité de la chose jugée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la commune de Cannes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour la commune de CANNES ;
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'action de la VILLE DE CANNES pour cause de prescription ;
Aux motifs que « la commune de Cannes soutient à titre principal une action en responsabilité délictuelle sur le fondement de l'article 1382 du code civil, contre la société CALYON ; elle demande à ce titre la reconnaissance d'une faute de la société Banque INDOSUEZ, aux droits et obligations de laquelle se trouve la société CALYON et la condamnation de cette dernière à lui payer à titre de dommages et intérêts les sommes de 2.654.257 € plus 50,000 € de préjudice matériel plus 50.000 € de préjudice moral, soit au total 2.754.257 euros. A titre subsidiaire, la commune de Cannes présente son action comme une demande, fondée sur l'article 1371 du code civil, pour enrichissement sans cause de la société Banque INDOSUEZ, aux droits et obligations de laquelle se trouve la société CALYON, et la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 2.624.257 € dont cette dernière CALYON a fait l'économie au détriment de la commune de Cannes. La demande principale est soumise à la prescription décennale fixée par l'article 2270-1 du code civil dispose, en sa version applicable au litige, antérieure à la loi du 17 juin2008, qui dispose que les actions en responsabilité civile extra contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou à son aggravation. Le dommage invoqué par la commune de Cannes consiste en la perte d'un montant de taxe de dépassement du plafond légal de densité pour une construction excédant le coefficient d'occupation des sols correspondant à la différence entre celui qui aurait dû, selon elle, être fixé à celui qui a été retenu par le maire par arrêté municipal du 20 janvier 1994. Lorsque l'arrêté municipal du 20 janvier 1994 a été signé, il l'a été par M. Z... adjoint agissant sur délégation du maire et au nom de la commune. C'est bien la commune, personne morale existant quelque soit la personne physique qui la représente, qui est censée avoir décidé d'un montant de taxe de dépassement du plafond légal de densité. La commune de Cannes qui a décidé de ce montant et qui estime que ce montant est un dommage, ne peut prétendre l'avoir ignoré. Cette action est prescrite depuis le 20 janvier 2004. Au demeurant la commune est responsable de son propre dommage, si dommage il y a. La demande subsidiaire, au titre l'enrichissement sans cause, ne peut être admise qu'à défaut de toute autre action ouverte au demandeur. Elle ne peut l'être pour suppléer à l'action que la commune ne peut intenter par suite de la prescription. Au surplus, il convient de relever que la somme principale de 2.654.257 € que tente d'obtenir la commune de Cannes par la présence action correspond au montant qu'elle a elle-même fixé en son arrêté du 5 décembre 2005 comme représentant le montant complémentaire dû au titre d'un dépassement du coefficient d'occupation des sols généré par son arrêté de permis de construire du 20 janvier1994. Par jugement définitif du 13 mars 2007, le tribunal administratif de Nice a estimé que le maire de Cannes n'avait pas compétence pour prendre un tel arrêté, par application de l'article R.424-1 du code de l'urbanisme, alors qu'il n'était pas établi qu'un arrêté du préfet des Alpes maritimes ait délégué au maire de la commune de Cannes compétence en ce domaine et dit que la société CALYON était déchargée de cette redevance de 2.654.257 € pour dépassement de coefficient d'occupation des sols mise à sa charge. Il a été ainsi jugé que la commune ne peut exiger cette somme de la société CALYON. Cette procédure, atteinte de prescription, et correspondant à obtenir par une voie détournée ce qui a déjà été jugé, est totalement irrecevable » ;
Alors que, d'une part, la prescription d'une action en responsabilité civile ne court qu'à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en retenant, en l'espèce, que le point de départ du délai de prescription devait être fixé au 20 janvier 1994, date de l'arrêté ayant abusivement minoré la taxe de surdensité, quand la VILLE DE CANNES n'a eu pourtant connaissance de son préjudice résultant d'un manque à gagner au titre de la taxe de surdensité, que le 1er décembre 2004, date de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ayant révélé le caractère frauduleux de cet arrêté municipal et le délit de corruption passive dont s'était rendu coupable l'ancien maire de Cannes, Monsieur X..., en signant cet arrêté, la cour d'appel a violé l'article 2270-1 du Code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;
Alors que, d'autre part, la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité absolue d'agir par suite d'un empêchement quelconque résultant soit de la loi, soit de la convention, soit de la force majeure ; qu'une ignorance légitime et raisonnable suffit à permettre d'invoquer une telle impossibilité ; qu'en estimant que le point de départ du délai de prescription devait être fixé au 20 janvier 1994, date de l'arrêté ayant abusivement minoré la taxe de surdensité, quand la VILLE DE CANNES a pourtant été dans l'impossibilité d'agir jusqu'à l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 1er décembre 2004, pour avoir légitimement et raisonnablement ignoré jusqu'à cette date le caractère frauduleux de cet arrêté municipal et le délit de corruption passive dont s'était rendu coupable l'ancien maire de Cannes, Monsieur X..., en signant cet arrêté, la cour d'appel a violé l'article 2251 du Code civil, dans sa rédaction applicable à la cause.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-65400
Date de la décision : 06/05/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

ARRET du 04 décembre 2008, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4 décembre 2008, 07/20133

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 04 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 06 mai. 2010, pourvoi n°09-65400


Composition du Tribunal
Président : Mme Foulon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.65400
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award