Sur les deux premiers moyens, réunis et pris en leurs diverses branches :
Attendu que la société X..., éditrice du journal Y..., fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée au profit de M. C... pour la publication d'un article relatant sa mise en examen, qui devait être suivie d'une décision de non-lieu, illustré d'une photographie le représentant ; qu'il est reproché à la cour d'appel d'avoir rejeté l'exception de nullité de l'assignation, fondée sur les articles 56 et 16 du nouveau Code de procédure civile, et 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, à défaut de précisions sur les diverses demandes ayant des fondements distincts, précisions qu'exigerait également le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que la demande d'indemnisation présentée toutes causes confondues satisfaisait aux exigences des textes visés au moyen ; que la critique fondée sur la règle de la réparation intégrale se heurte au pouvoir souverain reconnu aux juges du fond pour l'appréciation de l'existence et de l'étendue des divers préjudices invoqués devant eux ;
Que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 9-1 du Code civil ;
Attendu que pour décider qu'un article publié par le journal Y... constituait une atteinte à la présomption d'innocence dont bénéficiait M. C... à la suite de sa mise en examen, l'arrêt attaqué retient que le journaliste a accordé un crédit tout particulier à la thèse de l'accusation, aux mesures prises par le juge d'instruction ainsi qu'aux accusations portées par deux témoins dont les propos sont rapportés, de sorte que de l'ensemble de l'article se dégage une impression manifeste de culpabilité à l'encontre de M. C... ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que l'atteinte à la présomption d'innocence suppose que l'écrit litigieux contienne des conclusions définitives manifestant un préjugé tenant pour acquise la culpabilité de la personne visée, ce que l'arrêt attaqué ne relève pas, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le quatrième moyen, pris en ses trois branches :
Vu l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 9 du Code civil ;
Attendu que la liberté de communication des informations justifie la publication de l'image d'une personne impliquée dans une affaire judiciaire, sous réserve du respect de la dignité de la personne humaine ;
Attendu que pour juger illicite la publication, sans l'autorisation de l'intéressé, d'une photographie de M. C... pour l'illustration d'un article relatif à sa mise en examen, l'arrêt attaqué retient que cette publication, bien que réalisée par des moyens non critiquables et ne portant pas atteinte à la vie privée de l'intéressé, méconnaissait le droit exclusif de chacun sur son image comme sur l'utilisation qui en est faite ;
En quoi la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juillet 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.