Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 412-8, L. 412-17 et L. 424-3 du Code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 12 février 1993, M. X..., M. Z... et Mme Y..., salariés de la société des Grands magasins de la Samaritaine (la Samaritaine) ont distribué aux démonstrateurs et démonstratrices, sur les lieux et pendant le temps de travail, des enveloppes contenant une lettre concernant les conditions de travail et les invitant à une réunion du syndicat ; que considérant qu'il s'agissait d'une faute au regard de l'article L. 412-8, alinéa 4, selon lequel " les publications et tracts de nature syndicale peuvent être librement diffusés aux travailleurs de l'entreprise dans l'enceinte de celle-ci aux heures d'entrée et de sortie du personnel ", la Samaritaine leur a notifié une mise à pied de deux jours ; que les salariés on saisi la juridiction prud'homale aux fins d'annulation de leur mise à pied et paiement des salaires retenus durant celles-ci ;
Attendu que, pour condamner la Samaritaine à verser à M. X..., M. Z... et Mme Y... des sommes correspondant aux retenues effectuées sur leurs salaires à raison des mises à pied prononcées à leur encontre pour distribution illicite de tracts syndicaux sur le lieu et pendant les horaires de travail, la cour d'appel a énoncé que les intéressés n'avaient commis aucune faute en distribuant aux salariés à leur poste de travail un document sous enveloppe leur proposant de participer à une réunion syndicale portant sur les conditions de travail, ce qui s'analyse en une prise de contact autorisée par l'article L. 412-17 du Code du travail pour les délégués syndicaux, qualité qu'avaient Jean Gilbert et Yvon Z... et par l'article L. 424-3 du Code du travail pour les délégués du personnel, qualité qu'avait Madeleine Y... laquelle n'a pas excédé, en la circonstance, la mission impartie aux délégués du personnel par l'article L. 422-1 du Code du travail ; que, contrairement à ce que soutenait la Samaritaine, ce document ne constituait pas un tract (dont la distribution aux salariés alors qu'ils sont à leur poste de travail est interdite par l'article L. 412-8 du Code du travail), et ne se présentait pas comme tel, indiquant au contraire que, le tract étant un moyen d'information insuffisant, une réunion était organisée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le document distribué aux salariés constituait un tract, peu important qu'il leur ait été remis sous enveloppe, ce dont il résultait qu'il ne pouvait leur être diffusé qu'aux heures d'entrée et de sortie du travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 février 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.