Joint les pourvois n°s 96-12.944 et 96-13.268 ;
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 12 décembre 1995) et les productions, que des saisies conservatoires ont été pratiquées par la Société de banque occidentale (la SDBO), après avoir été autorisées par des juges de l'exécution, sur des meubles appartenant à M. Y... et à Mme X... son épouse, pour sûreté notamment de sommes restant dues à la SDBO, en vertu d'actes notariés de prêt, par la société Financière et immobilière Bernard Y... (la FIBT), société en nom collectif ayant pour associés les époux Y... ; que la SDBO a fait signifier à M. et à Mme Y..., en vertu de ces actes notariés, la conversion des saisies conservatoires en saisie-vente pour paiement d'une certaine somme ; qu'après qu'il avait été procédé à la vérification des biens saisis, les époux Y... et la FIBT ont saisi le juge de l'exécution en demandant l'annulation des opérations de saisie ; que les mêmes meubles ont été également l'objet, de la part du trésorier principal du 6e arrondissement de Paris (le trésorier principal), et pour le recouvrement d'impôts dus par les époux Y..., d'une saisie conservatoire convertie en une saisie-vente ayant donné lieu à des procès-verbaux de vérification ; que devant le juge de l'exécution sont intervenus le trésorier principal, ainsi que les mandataires liquidateurs aux liquidations judiciaires, intervenues en cours de procédure, des époux Y... et de la FIBT, qui se sont prévalus de la suspension des poursuites ; que le juge de l'exécution a déclaré nulle la conversion en saisie-vente des saisies conservatoires pratiquées à la requête de la SDBO, ordonné la mainlevée de ces saisies, ainsi que la mainlevée de la saisie-vente diligentée à la requête du trésorier principal, et ordonné la restitution aux mandataires-liquidateurs, par la SDBO, des meubles de M. et de Mme Y... ; que la SDBO et le trésorier principal ont interjeté appel de ce jugement ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 96-12.944 :
Attendu que la société CDR Créances, venant aux droits de la SDBO, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré nulle la conversion en saisie-vente des saisies conservatoires pratiquées à la requête de la SDBO sur les meubles de M. et Mme Y..., et ordonné la mainlevée de ces saisies conservatoires, alors, selon le moyen, que, d'une part, le titre exécutoire dûment établi à l'encontre d'une société en nom collectif vaut également à l'encontre de l'associé en nom d'une société commerciale de ce type, tenu indéfiniment et solidairement des dettes sociales de ladite société sous la seule exigence d'une vaine mise en demeure de la société par acte extra-judiciaire ; que la cour d'appel, en subordonnant la transformation de la saisie conservatoire pratiquée à l'encontre de l'associé en une saisie-vente à l'obtention d'un titre distinct, n'ayant d'autre objet que de constater judiciairement la carence de la société, qui est pourtant légalement constituée par le seul effet de la mise en demeure, a violé ensemble les articles 10, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1966 et 3, 70 et 76 de la loi du 9 juillet 1991 ; alors que, d'autre part, la solidarité établie par la loi à l'égard de l'associé d'une société en nom collectif, si elle a trait à un engagement subsidiaire, produit tous les effets de la solidarité passive, de sorte que le titre exécutoire dressé contre la société, fût-il constitué par un acte notarié, est opposable audit associé de plein droit et le créancier est fondé à en poursuivre l'exécution contre celui-ci sans recourir à l'exigence d'une décision judiciaire à l'égard de l'associé ; que, dès lors, l'arrêt attaqué, en retenant que la banque ne détenait aucun titre à l'égard des époux Y..., a aussi violé les articles 10, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1966, 3, 70 et 76 de la loi du 9 juillet 1991, 1200 et suivants du Code civil ;
Mais attendu que toute exécution forcée implique que le créancier soit muni d'un titre exécutoire à l'égard de la personne même qui doit exécuter, et que le titre délivré à l'encontre d'une société n'emporte pas le droit de saisir les biens des associés, fussent-ils tenus indéfiniment et solidairement des dettes sociales, à défaut de titre exécutoire pris contre eux ;
Que l'arrêt, après avoir constaté que les actes authentiques sur le fondement desquels la conversion en saisie-vente avait été opérée par la SDBO ne visaient pas les époux Y..., retient à bon droit que le juge de l'exécution n'a méconnu ni l'article 10 de la loi du 24 juillet 1966 ni les effets secondaires de la solidarité, en décidant que la SDBO ne pouvait poursuivre la vente des meubles, saisis à titre conservatoire, sans avoir préalablement obtenu un titre exécutoire à l'encontre de M. et de Mme Y... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 96-13.268 :
Attendu que le trésorier principal fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné la mainlevée des saisies conservatoires et de la saisie-vente diligentées à sa requête, alors que, selon le moyen, le jugement de liquidation n'est pas de nature à arrêter ou interdire le déroulement d'une procédure de saisie-vente dès lors qu'est déjà intervenu le procès-verbal de vérification, lequel, en interdisant toute opposition de la part d'autres créanciers, entraîne le dessaisissement du débiteur et confère nécessairement au créancier saisissant un droit acquis sur le produit de la vente des meubles en cause ; qu'en estimant cependant que la saisie-vente en cours n'avait pas atteint son effet, le créancier ne pouvant se prévaloir d'aucun droit acquis, nonobstant le procès-verbal de vérification, la cour d'appel a violé l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985, l'article 54 de la loi du 9 juillet 1991 et les articles 117 et suivants du décret du 31 juillet 1992 ;
Mais attendu que la procédure de saisie-vente ne s'achève que par la vente des biens saisis qui fait sortir ces biens du patrimoine du débiteur, les dispositions de l'article 54 de la loi du 9 juillet 1991 n'ayant pour objet que de déterminer les créanciers admis à concourir sur le prix de la vente ; que dès lors l'arrêt retient exactement que la règle d'ordre public de l'arrêt des poursuites individuelles s'applique tant que cette procédure d'exécution n'a pas, par la vente, produit ses effets ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.