Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 25 juillet 1995), que la société Vestra (la société), qui employait mille trois cent douze salariés dans ses différents établissements, a consulté le comité central d'entreprise sur un projet de restructuration et de licenciement collectif de trois cent cinquante-neuf salariés accompagné d'un plan social ; que le comité central d'entreprise, réuni les 13 mars, 4 avril et 2 mai 1995, estimant que le plan social n'était pas conforme aux dispositions de l'article L. 321-4-1 du Code du travail, a assigné la société afin d'obtenir l'annulation de la procédure de licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir dit recevable l'appel formé par le comité central d'entreprise de cette société, alors, selon le moyen, que la cour d'appel ne pouvait déduire la régularité de l'appel interjeté par la secrétaire du comité d'entreprise du dépôt par un avoué de l'acte d'appel la désignant comme représentante du comité ni de la délibération prise par le comité le 13 mars 1995, antérieurement à l'introduction de l'instance devant les premiers juges, pour engager toute procédure nécessaire dans le cadre de la procédure de licenciement collectif pour motif économique ; qu'en s'abstenant de rechercher si, en l'absence de délibération du comité antérieure à l'acte d'appel sur l'exercice de cette voie de recours et la désignation d'un représentant pour cette procédure, l'appel, irrégulier à l'origine, avait pu être utilement régularisé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article R. 432-1 du Code du travail ;
Mais attendu que le mandat donné par le comité d'entreprise à l'un de ses membres pour agir en justice à l'occasion d'une affaire déterminée habilite celui-ci à intenter les voies de recours contre le jugement rendu sur cette action ; que la cour d'appel ayant relevé que Mme X..., secrétaire du comité central d'entreprise, avait été désignée pour représenter ce comité dans le cadre de la procédure de licenciement collectif pour motif économique, a, par ce seul motif justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société fait encore grief à l'arrêt d'avoir annulé la procédure de licenciement collectif, alors, selon le moyen, d'une part, que le plan social destiné à éviter des licenciements ou à en limiter le nombre doit prévoir des mesures telles que, par exemple, des mesures de réduction ou d'aménagement de la durée du travail ; qu'en estimant que le fait pour l'employeur d'avoir annoncé que le nombre de licenciements pourrait être réduit à un minimum de cinquante-sept personnes par le recours au travail à temps partiel annualisé prévu dans le plan social en fonction du nombre d'adhésions à une convention d'aide au passage au temps partiel, et qu'un minimum de quatre cent cinq adhésions à cette convention qui serait proposée à mille vingt-sept personnes serait nécessaire, ne permettait pas de déterminer le nombre de salariés dont le licenciement était envisagé, de sorte que le projet de licenciement ne répondait pas aux exigences de la loi, cela bien que la société Vestra ait expressément indiqué que le projet de licenciement prévoyait la suppression de trois cent cinquante-neuf postes de travail et que la mesure de recours au travail à temps partiel ait eu pour objet, conformément à la finalité du plan social, de réduire le nombre de licenciements et n'avait donc pas d'incidence sur le nombre de licenciements envisagés, mais seulement sur le nombre de licenciements qui seraient effectivement prononcés, la cour d'appel a violé les articles L. 321-4 et L. 321-4-1 du Code du travail ; alors, d'autre part, qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la société Vestra s'était engagée dans le plan social à diffuser par voie d'affichage la liste des emplois disponibles et à les proposer aux personnes dont le poste était supprimé, d'abord au sein d'un même établissement, ou d'autres établissements de l'entreprise et du groupe, étant précisé que cette possibilité de reclassement était ouverte à toutes les filiales françaises et étrangères de Vestra-Groupe, et que cet engagement a reçu exécution par la consultation des établissements du groupe par la société Vestra le 15 mai 1995 et l'affichage des postes disponibles le 2 juin suivant ; qu'en estimant que l'engagement ferme pris par la société Vestra de procéder à des reclassements internes, et selon des modalités expressément indiquées, n'était pas suffisamment précis au regard des exigences légales, la cour d'appel a violé l'article L. 321-4-1 du Code du travail ; et alors, enfin, qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions de la société Vestra soutenant que l'engagement qu'elle a pris de consulter l'ensemble des sociétés du groupe sur les postes disponibles et de les proposer aux salariés dont le poste était supprimé était le seul matériellement possible, dans la mesure où il n'existait au 4 mai 1995, date des dernières réunions des comités d'entreprise, aucun emploi disponible, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 321-4-1 du Code du travail que l'employeur est tenu de présenter un plan social comportant les mesures concrètes et précises afin que les représentants du personnel puissent formuler leurs avis, suggestions et propositions en toute connaissance de cause ;
Et attendu que la cour d'appel ayant relevé que le plan social, lequel précisait que des possibilités de reclassement existaient dans les différents établissements de l'entreprise et du groupe, ne comportait cependant aucune indication sur le nombre, la nature et la localisation des emplois qui pouvaient être proposés aux salariés dont le poste devait être supprimé, et que ce n'est que postérieurement aux réunions du comité central d'entreprise que la société a recensé les postes disponibles dans les différents établissements concernés, a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, que la consultation des représentants du personnel était irrégulière et que le plan social ne répondait pas aux exigences de l'article L. 321-4-1 du Code du travail ;
D'où il suit que c'est à bon droit que la cour d'appel a prononcé la nullité de la procédure suivie ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.