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29/06/1995 | FRANCE | N°92-22025

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 juin 1995, 92-22025


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Cofiroute, concessionnaire de travaux et services publics pour la construction et l'exploitation d'autoroutes, a indiqué annuellement à la caisse ORGANIC de Valbonne, depuis 1973, au titre de la contribution sociale de solidarité, un chiffre d'affaires global correspondant à la totalité de ses recettes de péage, tel que déclaré à l'administration fiscale ; que la loi de finances du 29 décembre 1983 étant venue définir pour de tels concessionnaires le chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, par la différence en

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Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Cofiroute, concessionnaire de travaux et services publics pour la construction et l'exploitation d'autoroutes, a indiqué annuellement à la caisse ORGANIC de Valbonne, depuis 1973, au titre de la contribution sociale de solidarité, un chiffre d'affaires global correspondant à la totalité de ses recettes de péage, tel que déclaré à l'administration fiscale ; que la loi de finances du 29 décembre 1983 étant venue définir pour de tels concessionnaires le chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, par la différence entre le montant total des péages et la fraction de ceux-ci affectée au financement des travaux de construction et des grosses réparations des ouvrages concédés, ainsi qu'au paiement des redevances proportionnelles versées à l'autorité concédante, la société Cofiroute a demandé le remboursement des sommes qu'elle estimait avoir versées indûment de 1973 à 1983, par l'effet de ses déclarations de la totalité des recettes de péage au titre de son chiffre d'affaires global ; que l'arrêt attaqué a accueilli cette demande ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal formé par la caisse ORGANIC, pris en ses diverses branches :

Attendu que la caisse ORGANIC de Valbonne fait grief à l'arrêt d'avoir statué ainsi, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il résulte de l'article L. 651-5 du Code de la sécurité sociale que l'assiette de la contribution sociale de solidarité est le montant du chiffre d'affaires global des sociétés assujetties déclaré à l'administration fiscale, et non le montant du chiffre d'affaires imposable à la TVA, dont il ne peut être déduit que " les droits et taxes indirects et les taxes intérieures de consommation, versés par ces sociétés et entreprises, grevant les produits médicamenteux et de parfumerie, les boissons, ainsi que les produits pétroliers " ; qu'en considérant que la notion de chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale servant d'assiette à la contribution sociale de solidarité ne pouvait s'entendre que du chiffre d'affaires entrant dans le champ d'application des taxes sur le chiffre d'affaires, à l'exclusion des recettes ayant le caractère de taxes et de droits indirects, et notamment des péages autoroutiers dans les limites fixées par l'article 109 de la loi de finances pour 1984, la cour d'appel a violé l'article L. 651-5 du Code de la sécurité sociale ; alors que, d'autre part, le caractère interprétatif de l'article 109 de la loi de finances pour 1984, qui a ajouté à l'article 266-1 du Code général des impôts un paragraphe h définissant la base d'imposition à la TVA des sociétés concessionnaires d'autoroutes, ne pouvait être étendu en dehors du champ d'application voulu par le législateur qui concernait exclusivement la TVA ; et qu'en étendant la rétroactivité de ce texte à la contribution sociale de solidarité régie par les articles L. 651-1 et suivants du Code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 109 de la loi du 29 décembre 1983 ; et alors, enfin, que l'article 10, de la loi de finances a, en ajoutant à l'article 266-1 du Code général des impôts des dispositions nouvelles spécifiques aux concessionnaires d'autoroutes restreignant leur chiffre d'affaires servant de base d'imposition à la TVA, innové et modifié l'état de droit préexistant qui, en matière de TVA, ne posait aucun problème d'interprétation ; et qu'en considérant que ce texte, prétendument interprétatif, privait rétroactivement de cause les versements effectués par la société Cofiroute au titre de la contribution sociale de solidarité calculée conformément à l'état du droit antérieur, la cour d'appel a violé l'article L. 651-5 du Code de la sécurité sociale et l'article 266-1 ancien du Code général des impôts ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a exactement retenu que l'assiette de la contribution sociale de solidarité est, selon l'article L. 651-5 du Code de la sécurité sociale, celle du chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale, laquelle en assure le contrôle et, le cas échéant, procède à sa rectification, ainsi qu'il est prévu à l'article D. 615-13 du Code de la sécurité sociale, toutes conséquences devant alors en être tirées quant au montant de la contribution sociale de solidarité ; que ce chiffre d'affaires n'est autre que celui entrant, aux termes de l'article L. 651-5 du Code de la sécurité sociale, dans le champ d'application des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, d'autre part, la définition donnée par l'article 109 de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983 de la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, disposition expressément déclarée comme ayant un caractère interprétatif, a eu, par là-même, pour effet de fixer la même base de calcul pour la contribution sociale de solidarité ; qu'enfin, la cour d'appel a justement relevé que le juge ne saurait méconnaître l'intention clairement exprimée par le législateur de donner à une loi un caractère interprétatif ; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli en aucune de ses branches ;

Mais, sur la première branche du pourvoi incident formé par la société Cofiroute :

Vu l'article 1153 du Code civil ;

Attendu que, pour fixer le point de départ des intérêts de droit au 27 mars 1991, la cour d'appel retient que cette date est celle du dépôt devant le tribunal des affaires de sécurité sociale des premières conclusions fixant formellement l'étendue du litige ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que la société Cofiroute avait réclamé à la caisse ORGANIC, le 25 février 1985, la restitution des sommes qu'elle estimait avoir versées indûment, soit 2 992 927 francs, sans rechercher si cette demande ne constituait pas une sommation de payer, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et, sur la deuxième branche du pourvoi incident :

Vu l'article 1154 du Code civil ;

Attendu que les seules conditions apportées par ce texte pour que les intérêts échus des capitaux produisent des intérêts sont que la demande en ait été judiciairement formée et qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ;

Attendu que, pour rejeter la demande de capitalisation des intérêts formée par la société Cofiroute, l'arrêt attaqué énonce que l'application des dispositions de l'article 1154 du Code civil, qui ne constitue pas une obligation pour les juges, s'avère en l'espèce inopportune ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'une telle considération n'était pas de nature à faire obstacle à la capitalisation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que l'arrêt a fixé le point de départ des intérêts de droit au 27 mars 1991, et en ce qu'il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts formée par la société Cofiroute, l'arrêt rendu le 19 octobre 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 92-22025
Date de la décision : 29/06/1995
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° SECURITE SOCIALE - ALLOCATION VIEILLESSE POUR PERSONNES NON SALARIEES - Contribution de solidarité - Régime de la loi du 3 janvier 1970 - Assiette - Chiffre d'affaires - Définition.

1° SECURITE SOCIALE - ALLOCATION VIEILLESSE POUR PERSONNES NON SALARIEES - Contribution de solidarité - Régime de la loi du 3 janvier 1970 - Assiette - Chiffre d'affaires - Déclaration fiscale.

1° L'assiette de la contribution sociale de solidarité est celle du chiffre d'affaires global déclaré à l'administration fiscale. Sa base de calcul est celle de l'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, dont la définition est donnée par la loi du 29 décembre 1983. Les seules conditions apportées par l'article 1154 du Code civil pour que les intérêts échus des capitaux produisent des intérêts sont que la demande en ait été judiciairement formée et qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière.

2° INTERETS - Anatocisme - Article 1154 du Code civil - Application - Pouvoirs des juges.

2° INTERETS - Anatocisme - Article 1154 du Code civil - Caractère d'ordre public 2° POUVOIRS DES JUGES - Applications diverses - Intérêts - Anatocisme - Article 1154 du Code civil - Caractère d'ordre public.

2° Viole l'article 1154 du Code civil, la cour d'appel qui estime que son application ne s'impose pas aux juges et s'avère inopportune.


Références :

Code civil 1153, 1154
Loi 83-1179 du 29 décembre 1983

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 octobre 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 jui. 1995, pourvoi n°92-22025, Bull. civ. 1995 V N° 228 p. 165
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1995 V N° 228 p. 165

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Kuhnmunch .
Avocat général : Avocat général : M. Kessous.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Favard.
Avocat(s) : Avocats : M. Delvolvé, la SCP Célice et Blancpain.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:92.22025
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