Vu la procédure suivante :
M. A...B..., à l'appui de sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du ministre de l'intérieur en date du 24 novembre 2016 par lequel il a été assigné à résidence dans la commune de Saint-Jean-d'Angély (Charente-Maritime), astreint à se présenter quatre fois par jour au commissariat de police et à demeurer tous les jours de 21 h à 7 h dans les locaux où il réside, et qui lui interdit de se déplacer en dehors de son lieu d'assignation à résidence sans autorisation écrite préalable du préfet de Charente-Maritime, a produit un mémoire, enregistré le 27 avril 2017 au greffe du tribunal administratif de Paris, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel il soulève une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du huitième alinéa et de la troisième phrase du neuvième alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par une ordonnance n° 1621017/4-2 du 20 juin 2017, enregistrée le 22 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la vice-présidente déléguée par la présidente du tribunal administratif de Paris, avant qu'il soit statué sur la demande de M.B..., a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité ainsi soulevée.
Par la question prioritaire de constitutionnalité transmise et par un mémoire en réplique, enregistré le 8 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...soutient que le huitième alinéa et la troisième phrase du neuvième alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables au litige, méconnaissent l'article 66 de la Constitution, la liberté d'aller et venir, le droit au respect de la vie privée, et sont entachés d'incompétence négative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 561-1 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Louise Bréhier, auditrice,
- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. B...;
1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
2. Considérant que, sur le fondement de ces dispositions, M. B...demande, à l'appui du recours pour excès de pouvoir qu'il a formé contre l'arrêté du 24 novembre 2016 par lequel le ministre de l'intérieur l'a assigné à résidence dans la commune de Saint-Jean-d'Angély, que soit renvoyée au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du huitième alinéa et de la troisième phrase du neuvième alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant qu'aux termes des premier, huitième et neuvième alinéas de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence (...) / La décision d'assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois, renouvelable une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée. Par exception, dans le cas prévu au 4° du présent article, elle peut être renouvelée tant que l'interdiction de retour ou l'interdiction de circulation sur le territoire français demeure exécutoire. La durée de six mois ne s'applique ni aux cas mentionnés au 5° du présent article, ni à ceux mentionnés aux articles L. 523-3 à L. 523-5 du présent code. / L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie. Il doit également se présenter, lorsque l'autorité administrative le lui demande, aux autorités consulaires, en vue de la délivrance d'un document de voyage. L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou d'une interdiction judiciaire ou administrative du territoire prononcés en tout point du territoire de la République peut, quel que soit l'endroit où il se trouve, être astreint à résider dans des lieux choisis par l'autorité administrative dans l'ensemble du territoire de la République. L'autorité administrative peut prescrire à l'étranger la remise de son passeport ou de tout document justificatif de son identité dans les conditions prévues à l'article L. 611-2. Si l'étranger présente une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public, l'autorité administrative peut le faire conduire par les services de police ou de gendarmerie jusqu'aux lieux d'assignation " ;
4. Considérant que la dernière phrase du huitième alinéa et la troisième phrase du neuvième alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont applicables au litige dont est saisi le tribunal administratif de Paris ; que ces dispositions n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu'elles portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment à la liberté d'aller et venir, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'il y a lieu, par suite, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;
D E C I D E :
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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de la dernière phrase du huitième alinéa et de la troisième phrase du neuvième alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Premier ministre et au tribunal administratif de Paris.