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10/01/2023 | FRANCE | N°21PA01772

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 10 janvier 2023, 21PA01772


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 22 mars 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé son admission en France au titre de l'asile et a ordonné son réacheminement vers le Mali ou vers tout pays où il serait légalement admissible.

Par un jugement n° 2106140/8 du 26 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoi

res en réplique enregistrés les 6 avril et 31 août 2021, et 3 mars 2022, M. C..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 22 mars 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé son admission en France au titre de l'asile et a ordonné son réacheminement vers le Mali ou vers tout pays où il serait légalement admissible.

Par un jugement n° 2106140/8 du 26 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés les 6 avril et 31 août 2021, et 3 mars 2022, M. C..., représenté par Me Berdugo, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 mars 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 22 mars 2021 lui ayant refusé l'entrée sur le territoire français, et ayant prescrit son réacheminement vers le Mali ou vers tout pays où il serait légalement admissible ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de l'admettre au séjour sans délai, sous astreinte de 300 euros par jours retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, dès lors que l'enregistrement sonore de son entretien avec l'agent de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ne lui a pas été communiqué malgré sa demande devant le tribunal, et d'autant que la retranscription écrite de l'entretien ne peut être vérifiée, à défaut de signature et contre-signature de sa part ; il a ainsi été privé d'une garantie procédurale en méconnaissance de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision contestée méconnaît les articles L. 723-6 et R. 213-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 12 de la directive 2005/85/CE dès lors qu'il n'a pas bénéficié d'une information suffisante sur le déroulement de la procédure de demande d'asile et en particulier que la liste des associations agréées ne lui a pas été notifiée ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a pu bénéficier que d'un interprète par téléphone, alors que l'administration ne justifie pas, contrairement à ce que prévoit l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la nécessité dans laquelle elle se trouvait d'y recourir, ni de l'inscription de l'interprète sur la liste mentionnée à l'article L. 111-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de son appartenance à un organisme agréé par l'administration ; ces dispositions sont opposables à l'OFPRA qui est tenu d'avoir recours à un organisme d'interprétariat agréé ; il a donc été privé d'une garantie ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le ministre s'est cru lié par l'avis de l'OFPRA ;

- le ministre de l'intérieur a méconnu les dispositions de l'article L. 213-8-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en exerçant un contrôle approfondi du bien-fondé de sa demande ;

- le ministre de l'intérieur a commis une erreur d'appréciation en estimant sa demande manifestement infondée ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 août 2021, le ministre de l'intérieur, représenté par Me Claisse, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Un mémoire en observations, enregistré le 28 février 2022, a été présenté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 31 juillet 2015 relatif aux conditions sécurisées d'accès à l'enregistrement sonore prévu à l'article L. 723-7-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- et les observations de Me Berdugo, avocat de M. C....

1. M. C..., ressortissant sri-lankais arrivé en France le 21 mars 2021 à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle par un vol en provenance de Bamako au Mali, a sollicité le même jour son admission au séjour au titre de l'asile et a été placé en zone d'attente. Par une décision du 22 mars 2021, prise après avis de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du même jour, le ministre de l'intérieur a estimé que sa demande au titre de l'asile était manifestement infondée et a décidé en conséquence de lui refuser l'entrée sur le territoire français, en prescrivant son réacheminement vers le Mali ou vers tout pays où il serait légalement admissible. M. C... fait appel du jugement du 26 mars 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'étranger qui a fait l'objet d'un refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile et, le cas échéant, d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans les quarante-huit heures suivant la notification de ces décisions, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président, ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine. ". Aux termes de l'article L. 723-6 du même code, alors en vigueur : " L'office convoque, par tout moyen garantissant la confidentialité et la réception personnelle par le demandeur, le demandeur à un entretien personnel. (...) / Le demandeur se présente à l'entretien et répond personnellement aux questions qui lui sont posées par l'agent de l'office. Il est entendu, dans les conditions prévues à l'article L. 741-2-1, dans la langue de son choix ou dans une autre langue dont il a une connaissance suffisante. ". Aux termes de l'article L. 723-7 du même code, alors en vigueur : " I. - L'entretien personnel mené avec le demandeur, ainsi que les observations formulées, font l'objet d'une transcription versée au dossier de l'intéressé. (...) / II. (...) Lorsque l'entretien personnel mené avec le demandeur a fait l'objet d'une transcription et d'un enregistrement sonore, le demandeur ne peut avoir accès à cet enregistrement, dans des conditions sécurisées définies par arrêté du ministre chargé de l'asile, qu'après la notification de la décision négative de l'office sur la demande d'asile et pour les besoins de l'exercice d'un recours contre cette décision. (...) Dans les cas d'un recours exercé en application de l'article L. 213-9, cet accès peut également être rendu possible auprès du tribunal administratif. (...) ". Aux termes de l'article R. 723-7 du même code, alors en vigueur : " A l'issue de l'entretien personnel, le demandeur et son avocat ou le représentant de l'association qui l'accompagne sont informés de leur droit d'obtenir communication de la transcription. S'ils en font la demande, elle est consignée dans le dossier du demandeur. ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 31 juillet 2015 pris pour l'application de ces dispositions : " (...) L'étranger qui se présente à la frontière et demande à bénéficier du droit d'asile a accès à l'enregistrement après la notification de la décision de refus d'entrée visée à l'article L. 213-8-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et pour les besoins de l'exercice du recours contre cette décision. La demande d'accès est adressée à l'office avant le dépôt du recours et, postérieurement à celui-ci, auprès (...) de la juridiction administrative compétente pour statuer sur les recours visés aux alinéas précédents ". Aux termes de l'article 3 de cet arrêté : " L'enregistrement sonore est accessible dans les locaux de l'office où l'entretien personnel s'est tenu. (...) Lorsque l'office a procédé à l'entretien personnel à distance ou si le demandeur d'asile ou la personne qui a fait l'objet d'une décision de fin de protection est retenu dans un lieu privatif de liberté où l'office ne dispose pas de locaux, l'accès à l'enregistrement a lieu à distance, selon des modalités sécurisées. ", et aux termes de l'article 5 du même arrêté : " Lorsque le tribunal administratif est saisi d'un recours contre une décision de refus d'entrée en France au titre de l'asile en application de l'article L. 213-9 du même code, l'office donne accès à l'enregistrement sonore à distance, selon des modalités sécurisées, sur demande du requérant ou du tribunal. La demande est adressée à l'office par messagerie électronique à l'adresse figurant dans la notification de la décision de refus d'entrée. ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'accès à l'enregistrement sonore de l'entretien individuel avec un agent de l'OFPRA d'un étranger qui a sollicité l'asile et fait l'objet d'une décision de refus d'entrée en France en application de l'article L. 213-8-1 du code de l'entrée et du séjour d'un étranger et du droit d'asile est une possibilité ouverte à cet étranger et que l'OFPRA doit en principe donner accès à cet enregistrement lorsqu'il existe. Toutefois ces dispositions ne font pas obligation au tribunal administratif, qui doit statuer dans un délai de soixante-douze heures, de solliciter et d'attendre la production de cet enregistrement avant de rendre son jugement.

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que, l'entretien que M. C... a eu avec un agent de l'OFPRA, a fait l'objet d'une transcription établie le 22 mars 2021, et d'autre part, que le conseil de M. C..., a saisi l'OFPRA par courriel du 24 mars 2021 d'une demande de communication de l'enregistrement sonore de cet entretien, lequel lui a indiqué, par courriel du même jour, qu'il pouvait être consulté sur place ou par voie téléphonique. Comme le conseil de M. C... l'a indiqué dans un courrier enregistré au greffe du tribunal le 25 mars 2021, dans lequel il demandait la communication de l'enregistrement sonore de l'entretien, il est allé écouter lui-même cet enregistrement dans les locaux de l'OFPRA. L'accès à l'enregistrement sonore prévu par les dispositions précitées a donc bien été effectif. Alors que le conseil de l'intéressé s'est borné, dans sa demande au tribunal administratif, à faire valoir qu'il avait constaté des carences dans la transcription de l'entretien relatives aux éléments de personnalisation du récit, sans toutefois apporter aucune précision sur ceux-ci, le jugement, qui indique que le requérant n'apporte aucun élément sérieux de nature à faire douter de la fidélité du rapport écrit aux propos qu'il a tenus, ne peut être regardé comme étant irrégulier, faute pour le premier juge d'avoir ordonné la communication de cet enregistrement sonore. En appel, le conseil du requérant n'apporte pas plus de précisions sur la nature des carences de la transcription de l'entretien qu'il dénonce et s'il fait valoir que cette transcription ne peut pas non plus être vérifiée, dans la mesure où elle n'est pas signée, elle est nécessairement réalisée par un agent de l'OFPRA qui était donc qualifié pour le conduire, aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoyant, par ailleurs, qu'elle soit signée ou contresignée par le requérant. S'il fait enfin valoir que ne parlant pas la langue tamoule, il ne lui a pas été possible de vérifier la qualité de l'interprétariat, il lui était loisible d'avoir accès à une communication téléphonique de cet entretien comme proposé par l'OFPRA, pour vérifier celle-ci le cas échéant avec le requérant. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, relatif au droit à un recours effectif, doit donc, en tout état de cause, être également écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. En premier lieu, les dispositions, relatives à l'entretien individuel avec un agent de l'OFPRA de l'article L. 723-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, déjà cité, prévoient également que : " (...) / Le demandeur peut se présenter à l'entretien accompagné soit d'un avocat, soit d'un représentant d'une association de défense des droits de l'homme, d'une association de défense des droits des étrangers ou des demandeurs d'asile (...). Les conditions d'habilitation des associations et les modalités d'agrément de leurs représentants par l'office sont fixées par décret en Conseil d'Etat ; peuvent seules être habilitées les associations indépendantes à l'égard des autorités des pays d'origine des demandeurs d'asile et apportant une aide à tous les demandeurs. L'avocat ou le représentant de l'association ne peut intervenir qu'à l'issue de l'entretien pour formuler des observations (...) ". Aux termes de l'article R. 213-2 du même code : " Lorsque l'étranger qui se présente à la frontière demande à bénéficier du droit d'asile, il est informé sans délai, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, de la procédure de demande d'asile et de son déroulement, de ses droits et obligations au cours de cette procédure, des conséquences que pourrait avoir le non-respect de ses obligations ou le refus de coopérer avec les autorités et des moyens dont il dispose pour l'aider à présenter sa demande. ".

6. Il résulte des dispositions précitées de l'article R. 213-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ont assuré la transposition de l'article 12 de la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013, que l'étranger qui se présente à la frontière et demande à bénéficier du droit d'asile doit être informé du déroulement de la procédure dont il fait l'objet et des moyens dont il dispose pour satisfaire à son obligation de justifier du bien-fondé de sa demande. Ces dispositions impliquent notamment que l'étranger soit informé, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, de la possibilité non seulement d'entrer en contact et de se faire assister d'un représentant d'une association ou de tout autre organisation qui fournit des conseils juridiques ou d'autres orientations aux demandeurs mais aussi de communiquer avec un représentant du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).

7. Il ressort du procès-verbal du 21 mars 2021 transcrivant l'entretien de notification des droits et obligations du demandeur d'asile, tenu en présence d'un interprète en langue tamoule, que M. C... a été informé de la possibilité de se faire assister au cours de son entretien auprès de l'OFPRA par un avocat ou par une association dont le nom figure sur la liste établie par l'OFPRA et de la possibilité de communiquer avec un représentant du HCR. En outre, la convocation à l'entretien avec l'agent de l'OFPRA, également traduite par un interprète en langue tamoule, rappelait à M. C... qu'il pouvait se présenter accompagné soit d'un avocat, soit d'un représentant agréé d'une association habilitée par le directeur général de l'Office et précisait que les coordonnées des associations habilitées étaient affichées dans les locaux de la zone d'attente, pouvaient être demandées aux services de la police aux frontières et étaient également disponibles sur le site internet " www.ofpra.gouv.fr ". Enfin, le ministre produit en appel des photographies de l'affichage dans la zone d'attente de la liste des associations habilitées, précisant leurs coordonnées, rédigée en plusieurs langues. Si ces affiches ne sont pas rédigées en langue tamoule, il ressort de l'ensemble de ces éléments que M. C... a été suffisamment et effectivement informé de la possibilité de se faire assister d'un représentant d'une association habilitée et a eu accès à la liste de ces associations. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 213-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C... a bénéficié lors de son entretien individuel avec un agent de l'OFPRA du 22 mars 2021, des services téléphoniques d'un interprète en langue tamoule du cabinet Rick, qui, s'il est inscrit sur la liste des experts judiciaires de la cour d'appel de Versailles pour l'année 2021, ne l'est que pour le chinois. M. C... soutient qu'il n'est pas justifié de la nécessité d'avoir recours à un interprète par téléphone, ni de l'inscription ou de l'agrément par l'administration de cet interprète conformément aux dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. D'une part, aux termes de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, alors en vigueur : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI et à l'article L. 742-3 du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. / En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur l'une des listes mentionnées à l'article L. 111-9 ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger. " et aux termes des dispositions de l'article R. 111-1 de ce code, alors en vigueur : " La liste des interprètes traducteurs prévue à l'article L. 111-9 est dressée chaque année par le procureur de la République dans chaque tribunal judiciaire. ".

10. D'autre part, aux termes de l'article L. 213-8-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La décision de refuser l'entrée en France à un étranger qui se présente à la frontière et demande à bénéficier du droit d'asile ne peut être prise par le ministre chargé de l'immigration que si : (...) / 3° (...) la demande d'asile est manifestement infondée. /(...)/ Sauf dans le cas où l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat, la décision de refus d'entrée ne peut être prise qu'après consultation de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui rend son avis dans un délai fixé par voie réglementaire et dans le respect des garanties procédurales prévues au chapitre III du titre II du livre VII ".

11. Aux termes d'une part, de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui figure dans le titre Ier Généralités du livre 1er portant dispositions générales applicables aux étrangers, celui-ci régit les décisions qui relèvent du livre II de ce code relatif à " L'entrée en France ", en particulier les décisions ou les informations délivrées dans le cadre de la procédure de refus d'entrée en France à un étranger qui se présente à la frontière, notamment en vue de bénéficier du droit d'asile et, d'autre part, aux termes des dispositions de l'article L. 213-8-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la procédure à l'issue de laquelle l'OFPRA, après consultation, rend son avis, est soumise, quant à elle, aux garanties procédurales du livre VII, relatif au droit d'asile. Par suite, M. C... ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la décision de refus de séjour attaquée de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont pas applicables à la procédure à l'issue de laquelle l'OFPRA émet son avis, en particulier au déroulement de l'entretien, qui relève des seules garanties auxquelles renvoie l'article L. 213-8-1.

12. En troisième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni de la motivation de la décision contestée que le ministre se serait cru lié par l'avis de l'OFPRA.

13. En quatrième lieu, d'une part, il résulte des dispositions précitées au point 10 de l'article L. 213-8-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le ministre chargé de l'immigration peut rejeter, en raison de son caractère manifestement infondée, la demande d'asile présentée par un étranger se présentant aux frontières du territoire national lorsque ses déclarations et les documents qu'il produit à leur appui, du fait notamment de leur caractère incohérent, inconsistant ou trop général, sont manifestement dépourvus de crédibilité et font apparaître comme manifestement dénuées de fondement les menaces de persécutions alléguées par l'intéressé au titre de l'article 1er A. (2) de la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'en appréciant la crédibilité de ses déclarations faisant état de persécutions dans son pays d'origine et de risques en cas de retour dans ce pays et en se prononçant sur le bien-fondé de sa demande, le ministre a excédé la compétence que lui confèrent les dispositions précitées de l'article L. 213-8-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision litigieuse doit être écarté.

14. D'autre part, il ressort du procès-verbal de l'entretien avec l'agent de l'OFPRA et de l'avis de cet office, que M. C..., a indiqué être de nationalité sri-lankaise et d'ethnie tamoule, et avoir quitté son pays en avril 2020 compte tenu des persécutions qu'il craignait. Selon ses affirmations, ces dernières seraient liées, d'une part, à l'appartenance de son père au mouvement des " Tigres libérateurs de l'Eelam Tamoul " (LTTE), pour lequel il gérait des aides financières, celui-ci ayant été obligé de fuir après avoir été arrêté en 2011 et, d'autre part, à sa propre participation à une manifestation universitaire organisée à la mémoire des combattants morts pour les mouvements tamouls et contre la destruction d'un monument mémoriel de la guerre, à la suite de laquelle il a été arrêté par l'armée et a été frappé. Toutefois, il ressort de ce même procès-verbal que le requérant n'a apporté que très peu de précisions sur les circonstances de sa participation à la manifestation et sur celles de l'engagement de son père dans le mouvement LTTE, et que certains de ses propos étaient confus. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur, qui a estimé que la demande de M. C... était manifestement dépourvue de toute crédibilité en ce qui concerne le risque de persécutions ou d'atteintes graves en cas de retour dans son pays, n'a pas commis d'erreur d'appréciation en rejetant la demande du requérant comme manifestement infondée, en application des dispositions précitées de l'article L. 213-8-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

15. En dernier lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, la demande présentée par M. C... étant manifestement infondée et celui-ci se bornant à se référer à des documents relatifs à la situation générale au Sri-Lanka, sans apporter plus de précisions à l'appui de ses allégations selon lesquelles il encourrait des risques actuels le visant personnellement en cas de retour dans son pays d'origine, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 22 mars 2021. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- Mme Renaudin, première conseillère,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 janvier 2023.

La rapporteure,

M. RENAUDINLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA01772 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01772
Date de la décision : 10/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-01-01


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : CABINET KOSZCZANSKI et BERDUGO

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-01-10;21pa01772 ?
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