Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011.
Par un jugement n° 1802123 du 17 décembre 2020, le tribunal administratif d'Amiens rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 février 2021, 1er septembre 2022 et 30 septembre 2022, et par un mémoire, enregistré le 26 octobre 2022, qui n'a pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Soltner puis par le cabinet Intervista, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a été privé de la possibilité d'être assisté d'un conseil lors du rendez-vous du 6 novembre 2014 en raison de la remise en mains propres de la convocation le jour même ;
- le tribunal administratif d'Amiens a commis une erreur de droit sur la dévolution de la charge de la preuve au regard de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales ;
- le vérificateur a commis un faux réprimé par l'article 441-1 du code pénal en mentionnant sur le courrier du 8 octobre 2014 que la convocation pour le rendez-vous du 6 novembre 2014 lui avait été remise en mains propres le 8 octobre 2014 ;
- les faits de l'espèce ne sont pas constitutifs d'un abus de droit ; il n'avait pas plus intérêt à procéder à la cession de titres qu'à la liquidation de la société ;
- le tribunal correctionnel d'Amiens, par un jugement du 4 janvier 2022, l'a relaxé des chefs d'abus de biens sociaux, de blanchiment d'abus de biens sociaux et de blanchiment de fraude fiscale ;
- l'administration fiscale n'était pas fondée à imposer le produit de cession des titres de la SARL Manag'Air comme s'il s'agissait d'un boni de liquidation dès lors que la vente était une réalité juridique et économique ; l'administration n'était pas en droit, pour requalifier le prix de cession de ses titres de boni de liquidation, de s'immiscer dans le choix patrimonial réalisé en 2011 ;
- les prélèvements sociaux mis à sa charge sont contestés pour le surplus, soit 8 325 euros correspondant à la différence des prélèvements sociaux calculés entre l'imposition de la plus-value telle qu'il l'a déclarée et la position de l'administration tendant à imposer le prix de cession des titres de la SARL Manag'Air comme s'il s'agissait d'un boni de liquidation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2021, et un mémoire, enregistré le 21 octobre 2022, qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 3 octobre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 octobre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sauveplane, président assesseur,
- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me Bois et Me Brugière, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A... a fait l'objet d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle à l'issue duquel l'administration a remis en cause le bénéfice d'un abattement total de la plus-value nette, prévu par l'article 150-0 ter D du code général des impôts, réalisée par l'intéressé à l'occasion de la plus-value de cession, d'un montant de 327 553 euros, réalisée lors de la cession de la totalité de ses parts de la SARL Manag'Air à la SAS Air First Company. En conséquence, l'administration l'a assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, au titre de l'année 2011, en suivant la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales. M. A... relève appel du jugement du 17 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a ainsi été assujetti au titre de l'année 2011.
Sur la régularité du jugement :
2. La circonstance que les premiers juges auraient commis une erreur de droit dans la dévolution de la charge de la preuve au regard des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué. Par suite, le moyen doit être écarté.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu (...) ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit (...) mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que lorsque l'administration avise le contribuable qu'elle entreprend un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, elle doit, avant d'effectuer toute démarche tendant à recueillir, pour les besoins de cette vérification, des informations ou des documents soit auprès du contribuable lui-même, soit auprès de tiers, laisser à ce contribuable un délai suffisant pour lui permettre de s'assurer l'assistance d'un conseil de son choix.
5. Il résulte de l'instruction que l'avis d'examen de la situation fiscale personnelle, en date du 5 septembre 2014, adressé par le vérificateur à M. A... faisait mention de la faculté pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix et que M. A... s'est vu délivrer le pli contenant cet avis le 8 septembre 2014. L'administration a proposé au contribuable, par un courrier recommandé du 15 septembre 2014, que le premier rendez-vous ait lieu le 8 octobre 2014. M. A... a accusé réception de ce pli le 1er octobre 2014. Les opérations de vérification ayant commencé à l'occasion de ce premier entretien le 8 octobre 2014, M. A... a disposé, en l'espèce, d'un délai suffisant pour se faire assister par un conseil de son choix. Si le requérant allègue qu'il a été privé de la possibilité d'être assisté d'un conseil lors du second rendez-vous du 6 novembre 2014 en raison, selon lui, de la remise en mains propres de la convocation le jour même, cette circonstance, à la supposer établie, est toutefois sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors que l'intéressé a disposé d'un délai suffisant entre le retrait du pli contenant l'avis de vérification le 8 septembre 2014 et le premier rendez-vous qui a eu lieu le 8 octobre 2014. Par suite, le moyen doit être écarté.
6. En second lieu, en raison du caractère incertain et non probant de la mention manuscrite " remis en main propre le 6 novembre 2014 " portée par M. A... sur le courrier du 8 octobre 2014 contredite par la mention manuscrite portée sur le même document " courrier remis en main propre le 8 octobre 2014 " par le vérificateur, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure et de l'existence d'une " fraude commise par les agents de l'administration " ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
7. Il résulte des mentions de la proposition de rectification du 16 décembre 2014 adressée à M. A..., principal associé et gérant de la SARL Manag'Air, que cette dernière a cédé le 10 juin 2011 le seul actif de cette société lui permettant de réaliser son objet social, à savoir l'unique avion de la compagnie, pour un montant de 1 119 556 euros sur un compte bancaire spécialement ouvert à cet effet au Lichtenstein peu de temps avant cette cession. Les pilotes salariés de la société ont alors été licenciés. Le 10 novembre 2011, une partie du produit de la vente de l'avion, soit 880 000 euros, a été placée sur un contrat d'assurance capitalisation au bénéfice de la société Manag'Air par le biais d'une société basée au Liechtenstein. Le 15 novembre 2011, la direction générale de l'aviation civile (DGAC) a retiré le certificat de transporteur aérien (CTA) qui avait été délivré à la société Manag'Air. Le 16 décembre 2011, les associés de la société Manag'Air ont cédé leurs parts à la SAS Air First Company, société créée le 27 août 2011 avec un capital de 20 000 euros, laquelle a payé les parts sociales de la société Manag'Air au moyen d'un crédit de 750 000 euros en provenance d'une institution financière établie au Liechtenstein. La société Manag'Air n'a pas déposé ses déclarations fiscales au titre de l'année 2011. Le 25 juin 2012, la SAS Air First Company a décidé d'absorber la société Manag'Air sans liquidation et cette dernière a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 3 août 2012. Depuis, la SAS Air First Company ne possède ni ne loue d'avion, n'a pas obtenu de CTA, n'a pas d'activité et le faible chiffre d'affaires réalisé provient pour l'essentiel de la réalisation des créances clients de la société Manag'Air absorbée. M. A... a alors revendiqué le bénéfice des dispositions de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, relatives à l'abattement spécifique d'un tiers par année de détention révolue au-delà de la cinquième année qui est appliqué aux gains nets réalisés lors de la cession de parts par des dirigeants de certaines sociétés cédant leurs titres en vue de leur départ à la retraite, ce qui lui a permis de bénéficier d'une exonération totale d'impôt sur le revenu sur la plus-value ainsi réalisée sur la vente des titres de la société Manag'Air pour un montant de 327 553 euros.
8. L'administration fiscale a déduit de ces faits que l'interposition de la cession des titres de la société Manag'Air à la SAS Air First Company était un montage destiné à rechercher le bénéfice littéral de l'avantage fiscal prévu à l'article 150-0 D du code général des impôts, à l'encontre des objectifs du législateur, lesquels étaient de permettre la transmission d'entreprises, alors que la société Manag'Air cédée avait liquidé son principal actif et ne disposait d'aucun moyen d'exploitation permettant la continuation de l'activité de la société cédée. Faisant application des dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, l'administration a remis en cause l'existence de la plus-value de cession des titres de la société Manag'Air et a estimé que le produit de la vente des titres recueilli par M. A..., soit 440 033 euros diminué du montant des apports de 2 287 euros, constituait un boni de liquidation de 437 746 euros avant abattement distribué et imposable entre les mains de M. A... sur le fondement des articles 111 bis et 161 du code général des impôts.
En ce qui concerne la charge de la preuve :
9. Aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification. / (...) ".
10. Les dispositions législatives qui régissent la nature de la preuve à apporter et la désignation de la partie à qui incombe la charge de la preuve lorsque le contribuable conteste une imposition à laquelle il a été assujetti sont indissociables des règles qui régissent la procédure d'imposition et de celles qui définissent le fait générateur, l'assiette et le taux de l'impôt. Comme pour ces dernières, il y a donc lieu de se référer à la législation applicable à la période d'imposition litigieuse, quelles que soient la date d'établissement de l'impôt ou les conditions dans lesquelles l'instance contentieuse a été ensuite engagée et s'est poursuivie devant le juge de l'impôt. Ainsi, à la différence des règles relatives à la procédure contentieuse, les règles nouvelles ne sont pas, en pareille matière, immédiatement applicables. Par suite, l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 applicable depuis le 1er janvier 2019 relatif à la dévolution de la charge de la preuve en cas de saisine de la commission, n'est pas applicable en l'espèce.
11. Le litige a été soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal, lequel a rendu, le 5 octobre 2017, un avis favorable à l'administration auquel celle-ci s'est conformée. Par conséquent, la charge de la preuve incombe au contribuable.
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition en litige :
12. Aux termes du premier alinéa de l'article 111 bis du code général des impôts : " Lorsqu'une personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés cesse d'y être assujettie, ses bénéfices et réserves, capitalisés ou non, sont réputés distribués aux associés en proportion de leurs droits. ". Aux termes de l'article 161 du même code : " Le boni attribué lors de la liquidation d'une société aux titulaires de droits sociaux en sus de leur apport n'est compris, le cas échéant, dans les bases de l'impôt sur le revenu que jusqu'à concurrence de l'excédent du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ces droits dans le cas où ce dernier est supérieur au montant de l'apport. (...) ".
13. En premier lieu, si M. A... fait valoir, en substance, que l'opération ne présentait pas un caractère fictif et qu'il est de bonne foi, il n'explique pas pourquoi il a tout à la fois cédé le 10 juin 2011 le seul avion de la société, qui lui permettait de réaliser son objet social, tout en affirmant avoir cherché un repreneur pour la société ainsi dépouillée de son actif principal et avoir cherché simultanément à acquérir un nouvel avion. De surcroit, si M. A... affirme qu'il n'avait pas d'intérêt fiscal à mettre en place un tel montage, il est constant, au contraire, qu'il a obtenu une exonération totale d'impôt sur le revenu, sous couvert de l'avantage fiscal prévu par l'article 150-0 D ter du code général des impôts, sur la plus-value ainsi réalisée lors de la vente des titres de la société Manag'Air, d'un montant de 327 553 euros, tout en omettant par ailleurs de reporter la plus-value sur la déclaration d'ensemble des revenus n°2042 entraînant de ce fait l'absence d'assujettissement de la plus-value aux prélèvements sociaux. Enfin, si le requérant soutient que son but était de transmettre une entité économique qui disposait d'un actif, il résulte au contraire des éléments rappelés au point 7 qu'à la date de la cession des parts sociales le 16 décembre 2011, la société Manag'Air était tout à la fois dépourvue d'avion, de CTA et de clientèle, n'ayant plus d'activité économique depuis près de six mois et réalisant un chiffre d'affaires de 200 069 euros en 2011, en baisse de 80 % par rapport à 2010, résultant de la réalisation de créances clients antérieures à la cession. L'opération ne présentait donc aucune substance économique. La circonstance, à la supposer établie, que la société Manag'Air réalisait après la cession, une activité d'intermédiaire et pouvait sous-traiter les vols en affrétant des avions, reste sans incidence sur cette appréciation. Or, ainsi qu'il a déjà été dit, l'article 150-0 D du code général des impôts a pour objectif de permettre la transmission d'entreprises disposant d'un actif afin d'assurer la continuité de l'activité économique. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que la vente, dans de telles conditions, de la société Manag'Air présentait le caractère d'un montage destiné à rechercher l'application littérale de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, à l'encontre de l'intention du législateur, et a taxé le boni de liquidation sur le fondement des articles 111 bis et 161 du code général des impôts
14. En deuxième lieu, M. A... se prévaut des constatations contenues dans un jugement du 4 janvier 2022 par lequel le tribunal correctionnel d'Amiens l'a relaxé des chefs d'abus de biens sociaux et de blanchiment de fraude fiscale, qui selon lui, s'imposeraient à la juridiction administrative dans le présent litige.
15. L'autorité de la chose jugée procédant des décisions des juges répressifs devenues définitives qui s'impose aux juridictions administratives s'attache à la constatation matérielle des faits mentionnés dans le jugement et qui sont le support nécessaire du dispositif. La même autorité ne saurait, en revanche, s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tirés de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée, qui présente un caractère absolu, est d'ordre public.
16. Pour relaxer M. A... des chefs d'abus de biens sociaux et de blanchiment de fraude fiscale, le tribunal correctionnel d'Amiens, dans son jugement du 4 janvier 2022, a relevé que la responsabilité pénale de ce dernier ne pouvait être recherchée postérieurement au 31 décembre 2011, que la vente de l'avion de la société n'avait pas été fait à vil prix et que le placement d'une fraction du prix de vente avait produit des intérêts au profit de la société. Le tribunal a également relevé, dans le même jugement, que l'information judiciaire n'avait pas apporté la preuve d'un usage de mauvaise foi des biens de la société dans l'intérêt du prévenu ni la preuve de la connaissance par ce dernier du montage juridique mis en place aux fins de permettre l'octroi d'un prêt à l'acquéreur des parts sociales dans la société Manag'air. Toutefois, l'autorité de la chose jugée, qui s'attache à la constatation matérielle des faits ainsi mentionnés dans ce jugement, reste sans incidence sur l'existence, en l'espèce, d'un abus de droit tel qu'il a été relevé au point 13. Par suite, le moyen doit être écarté.
17. En troisième et dernier lieu, en imposant le produit de cession des titres de la société Manag'Air comme un boni de liquidation, l'administration ne s'est pas immiscée, en l'espèce, dans les choix de gestion de M. A... mais s'est bornée à constater que l'intention poursuivie par le législateur à travers l'article 150-0 D du code général des impôts n'avait pas été respectée par le contribuable à l'occasion de la cession des titres de la société Manag'Air, malgré une application littérale de ces dispositions. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.
18. Il résulte de ce qui précède que M. A... ne peut être regardé comme apportant la preuve que l'opération de cession des titres de la société Manag'Air à la SAS Air First Company n'était pas entachée d'abus de droit par la recherche du bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que le produit de la vente des titres de la société Manag'Air recueilli par M. A... constituait un boni de liquidation distribué et imposable entre ses mains sur le fondement des articles 111 bis et 161 du code général des impôts.
En ce qui concerne les prélèvements sociaux :
19. M. A... conteste, par voie de conséquence, le surplus des prélèvements sociaux mis à sa charge pour un montant de 8 325 euros. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit précédemment que c'est à bon droit que l'administration a refusé le bénéfice de l'avantage fiscal prévu à l'article 150-0 D du code général des impôts et taxé le boni issu de la liquidation de la société Manag'Air entre les mains de M. A.... Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.
Sur les pénalités :
20. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / (...) / b. 80 % en cas d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; elle est ramenée à 40 % lorsqu'il n'est pas établi que le contribuable a eu l'initiative principale du ou des actes constitutifs de l'abus de droit ou en a été le principal bénéficiaire ;/ (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ". La charge de la preuve du bien-fondé des pénalités pouvant être infligées à un contribuable en cas d'abus de droit est régie, non par les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, mais par celles de l'article L. 195 A du même livre, en vertu desquelles la preuve incombe à l'administration.
21. Pour justifier l'application aux droits en litige de la majoration de 80 % prévue au b. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fait valoir que M. A... était décidé à faire valoir ses droits à la retraite et avait progressivement liquidé les actifs de la société Manag'Air, que cette dernière avait cessé toute activité économique avant sa cession et ne possédait ni CTA, ni pilote, ni avion pour réaliser son objet social et ne disposait plus que de liquidités et de créances clients, que le produit de la cession de l'avion a été placé à l'étranger et a été dissimulé de l'administration fiscale du fait de la défaillance fiscale de la société, que la SAS Air First Company a acheté pour un prix substantiel la société Manag'Air qui n'avait plus que des liquidités comme actif et avait cessé tout activité économique, que la SAS Air First Company était une société sans activité propre et qui n'a pu acquérir les titres de la société Manag'Air que par le biais d'un prêt accordé par une société basée au Liechtenstein, dans la négociation duquel est probablement intervenu la perspective de disposer des liquidités de la société Manag'Air placées auprès d'une entité du Liechtenstein, enfin, que M. A... était l'initiateur et le principal bénéficiaire de ce montage. Les éléments ainsi invoqués par l'administration permettent de regarder comme établie l'existence d'un abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales et permettent également à l'administration de justifier l'application, aux droits en litige, de la majoration au taux de 80 %, prévue, en cas d'abus de droit, au b. de l'article 1729 du code général des impôts.
22. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
23. L'Etat n'étant pas partie perdante à l'instance, les conclusions de M. A... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 17 novembre 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Heu, président de chambre,
- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,
- M. D... C..., premier-conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2022.
Le président, rapporteur,
Signé : M. SauveplaneLe président de chambre,
Signé : HeuLa greffière,
Signé : S. Pinto Carvalho
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière,
Suzanne Pinto Carvalho
N°21DA00370 2