Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 18 février 2021 par lequel la préfète de la Corrèze a refusé de lui délivrer un titre de séjour et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par un jugement n° 2100389 du 24 février 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a renvoyé les conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour à une formation collégiale et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire en production de pièces, enregistrés les 25 mars et 23 avril 2021, M. C..., représenté par Me Dumaz Zamora, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 24 février 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 18 février 2021 portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Corrèze de procéder à l'effacement du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision méconnaît le principe général de l'Union du droit à être entendu ;
- elle est entachée d'erreur de droit, dès lors qu'il ne s'est pas maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, qui n'a commencé à courir qu'à compter de la notification du jugement rejetant sa demande d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français du 26 août 2020, et qui a été interrompu par sa nouvelle demande de titre ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il justifie d'une vie commune avec une ressortissante française depuis plus d'un an et est marié avec elle depuis le 14 mars 2020 ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par une décision du 22 avril 2021, M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la
République de Tunisie en matière de séjour et de travail, du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme B... D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., ressortissant tunisien, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 4 mars 2019. Il a épousé, le 14 mars 2020, une ressortissante française, et a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de Français. Par arrêté du 26 aout 2020, confirmé par cette cour, la préfète de la Corrèze a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé le pays de renvoi. Le 18 janvier 2021, M. C... a présenté une nouvelle demande de titre de séjour, et par l'arrêté litigieux du 18 février 2021, la préfète de la Corrèze a rejeté sa demande et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. C... relève appel du jugement du 24 février 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a renvoyé ses conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour à une formation collégiale et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
2. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " (...) Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative prononce une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.(...) Lorsqu'un étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire assortie d'une interdiction de retour justifie avoir satisfait à cette obligation dans le délai imparti, au plus tard deux mois suivant l'expiration de ce délai de départ volontaire, l'interdiction de retour est abrogée. Toutefois, par décision motivée, l'autorité administrative peut refuser cette abrogation au regard de circonstances particulières tenant à la situation et au comportement de l'intéressé ".
3. En premier lieu, à l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour, M. C... a été conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demandait que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartenait, lors du dépôt de cette demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il jugeait utiles, et il lui était loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'interdiction de retour sur le territoire français qui est prise concomitamment au refus de titre de séjour, au vu d'un précédent refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français.
4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que par un premier arrêté du 26 août 2020, notifié le 28 août 2020, la préfète de la Corrèze a refusé à M. C... la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé le pays de renvoi. Lors de l'instruction de la seconde demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par l'intéressé le 18 janvier 2021, la préfète de la Corrèze, constatant que l'intéressé s'était maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, a assorti sa décision de refus de titre de séjour d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Le recours intenté devant le tribunal administratif de Limoges contre l'obligation de quitter le territoire français du 26 août 2020 étant dépourvu d'effet suspensif, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le délai de soixante jours aurait commencé à courir à compter de la notification du jugement de ce tribunal administratif rejetant sa requête, et qu'il aurait été interrompu lors du dépôt de sa seconde demande de titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de ce qu'il ne se serait pas maintenu irrégulièrement sur le sol français au-delà du délai de départ volontaire doit être écarté.
5. En troisième lieu, si M. C... fait valoir qu'il a épousé le 14 mars 2020 une ressortissante française, cette circonstance ne constitue pas une circonstance exceptionnelle au sens des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. C... fait valoir qu'il a épousé une ressortissante française le 14 mars 2020, qu'il est très impliqué dans l'éduction de la fille de son épouse et qu'il bénéficie d'un contrat de travail à durée déterminée du 14 décembre 2020 au 13 mars 2021. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il est entré irrégulièrement en France en 2019, à l'âge de 32 ans, et s'est maintenu sur le territoire malgré l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 26 août 2020. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré de ce que l'interdiction de retour sur le territoire français attaquée porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles 37 de la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée à la préfète de la Corrèze.
Délibéré après l'audience du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,
Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2022.
La rapporteure,
Frédérique D...Le président
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX01317