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19/07/2022 | FRANCE | N°20TL21835

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 19 juillet 2022, 20TL21835


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

La société par actions simplifiée Clinique d'Occitanie a demandé au tribunal administratif de Toulouse :

- sous le n° 1804769 d'annuler l'arrêté du 3 août 2018 de la directrice régionale de santé d'Occitanie portant adoption du schéma régional de santé en tant qu'il détermine les objectifs quantitatifs de l'offre de soins des activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, en cardiologie pour la pratique des actes portant sur les autres cardiopathies de l'adul

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Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

La société par actions simplifiée Clinique d'Occitanie a demandé au tribunal administratif de Toulouse :

- sous le n° 1804769 d'annuler l'arrêté du 3 août 2018 de la directrice régionale de santé d'Occitanie portant adoption du schéma régional de santé en tant qu'il détermine les objectifs quantitatifs de l'offre de soins des activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, en cardiologie pour la pratique des actes portant sur les autres cardiopathies de l'adulte dans la zone d'implantation de la Haute-Garonne et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative,

- sous le n° 1903011 d'annuler la décision implicite de la ministre de la santé rejetant son recours hiérarchique dirigé contre l'arrêté du 3 août 2018 de la directrice régionale de santé d'Occitanie portant adoption du schéma régional de santé en tant qu'il détermine les objectifs quantitatifs de l'offre de soins des activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, en cardiologie pour la pratique des actes portant sur les autres cardiopathies de l'adulte dans la zone d'implantation de la Haute-Garonne et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1805327, 1903011 du 2 avril 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 3 août 2018 en tant qu'il détermine les objectifs quantitatifs de l'offre de soins des activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, en cardiologie pour la pratique des actes portant sur les autres cardiopathies de l'adulte dans la zone d'implantation de la Haute-Garonne ainsi que la décision implicite de la ministre rejetant son recours hiérarchique contre cette décision et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 juin 2020, sous le n°20BX01835, au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°20TL21835, et un mémoire en réplique enregistré le 22 avril 2022, l'agence régionale de santé d'Occitanie, représentée par Me Porte, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 2 avril 2020 ;

2°) à titre subsidiaire de le réformer en toutes ses dispositions ;

3°) de rejeter les demandes de première instance de la société par actions simplifiée Clinique d'Occitanie.

Elle soutient que :

- le tribunal a estimé à tort que les objectifs quantitatifs de l'offre de soins fixés en Haute-Garonne par le schéma régional de santé pour les activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire en cardiologie pour la pratique des actes portant sur les " autres cardiopathies de l'adulte " ne s'appuient pas sur un diagnostic réalisé en conformité avec les dispositions de l'article R. 1434-4 du code de la santé publique ;

- les dispositions de l'article R.1434-4 du code de la santé publique n'impliquent pas que l'évaluation des besoins sanitaires doive être intégrée au schéma régional de santé, l'article R.1434-5 prévoyant au contraire qu'elle le précède ;

- la jurisprudence rendue en matière d'annulation des documents de planification sanitaire montre que si le juge s'attache à vérifier que le schéma régional de santé a été établi sur la base d'une analyse suffisamment complète des besoins de santé et de l'offre existante, ce contrôle s'exerce sur la base du schéma mais aussi des documents préparatoires et des études externes sur lesquels l'autorité sanitaire s'est appuyée pour élaborer le schéma ;

- le tribunal ne pouvait porter son appréciation sur les seuls extraits du schéma régional de santé et devait tenir compte des éléments de diagnostic mentionnés dans le mémoire en défense et / ou versés au débat ;

- il a été porté une appréciation erronée sur le contenu du schéma régional de santé ainsi que fait une mauvaise application des dispositions des articles L.1434-2, R.1434-4 et -5 du code de la santé publique en ne prenant en considération que les éléments de diagnostic figurant dans le schéma régional de santé ;

- les dispositions de l'article R.1434-4 du code de la santé publique relatives au contenu du diagnostic des besoins de santé n'impliquent pas qu'il contienne une analyse détaillée des cinq items, mais seulement que ces items soient pris en considération par l'autorité sanitaire dans son analyse des besoins de santé ;

- elle établit, par les pièces versées au dossier, avoir élaboré un diagnostic complet répondant aux prescriptions de l'article R.1434-4 du code de la santé publique, lequel justifie le maintien des objectifs quantitatifs de l'offre de soin en angioplastie coronaire à quatre implantations en Haute-Garonne ;

- elle a réalisé une évaluation des besoins de santé comprenant un diagnostic régional et des bilans prospectifs thématiques, une évaluation des besoins de santé sur laquelle sont fondés les objectifs quantifiés de l'offre de soins en cardiologie interventionnelle pour les actes de type 3 sur la zone d'implantation de la Haute-Garonne ;

- le diagnostic qu'elle a établi démontre l'intérêt du maintien des objectifs du schéma ;

- il n'y a pas de carence dans la prise en charge des syndromes coronariens aigus en Haute-Garonne et il n'y a pas de risque de prévalence de la mortalité par infarctus du myocarde et de la consommation de soins pour les actes d'angioplastie coronarienne dans les années à venir ;

- les besoins d'angioplastie coronaire sur le territoire de la Haute-Garonne étant satisfaits, même au-delà du nécessaire, elle n'a pas identifié de besoins supplémentaires pour les actes de type 3 dans cette zone ;

- le département de la Haute-Garonne se caractérise par une sous mortalité par cardiopathies ischémiques, ce qui témoigne d'une prise en charge adaptée de ces pathologies, notamment en contexte d'urgence où les patients ont besoin d'une désobstruction de l'artère coronaire bouchée ;

- pour les populations résidant à l'extrême sud du département, l'accessibilité en urgence à un plateau technique d'angioplastie coronaire dans un délai d'une heure à une heure trente nécessite l'emploi de moyens héliportés, qui permettent d'acheminer les patients vers Toulouse ou Tarbes en moins d'une heure ;

- la création d'un cinquième plateau technique au sud de l'agglomération toulousaine n'apporterait aucune plus-value en terme d'amélioration de l'accessibilité aux soins pour la population du sud du département ;

- l'accessibilité ne serait améliorée que si le centre d'angioplastie était implanté dans le sud de la Haute-Garonne ; or il n'existe sur ce territoire aucun centre hospitalier en capacité de remplir les conditions d'implantation imposées par la réglementation pour exploiter un tel centre ;

- les chiffres avancés par la clinique Occitanie ne permettent pas d'en déduire que la population résidant au sud de la Haute-Garonne et en Ariège présenterait une surmortalité par maladies cardiovasculaires due à des difficultés d'accès à un centre d'angioplastie ;

- l'examen de la cartographie révèle qu'il n'y a pas de corrélation entre le taux de mortalité et l'éloignement d'un centre d'angioplastie coronaire ;

- il n'est pas exact d'affirmer que la concentration des centres d'angioplastie sur Toulouse serait la cause d'un nombre très important de transferts secondaires, liés à la prise en charge de syndromes coronariens aigus ;

- les autres moyens soulevés par la société par actions simplifiée Clinique d'Occitanie en première instance et repris en appel ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense enregistrés le 23 février 2022 et le 20 mai 2022, la société par actions simplifiée Clinique d'Occitanie, représentée par Me Cormier, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le tribunal n'a pas imposé l'inclusion du diagnostic dans le schéma régional, mais constaté que celui que comporte le schéma régional de santé est insuffisant ;

- il ne s'est pas mépris sur les dispositions des articles L.1434-2, R.1434-4 et R.1434-5 du code de la santé publique dont il a fait une exacte applications aux circonstances de fait et de droit dont il était saisi ;

- le tribunal n'a pas exigé une analyse exhaustive de chaque élément énuméré à l'article R.1434-4 du code de la santé publique mais a constaté qu'aucune information se rapportant à plusieurs d'entre eux ne figure au diagnostic de la région Occitanie tel qu'il est présenté dans le schéma ;

- le jugement n'est pas irrégulier faute de ne pas avoir tenu compte de pièces qui n'ont pas été portées à la connaissance des premiers juges ; les pièces nouvelles auxquelles se réfère l'agence régionale de santé ne constituent pas le diagnostic, lequel est constitué du seul document qui en porte le nom ;

- le document qui constitue le diagnostic ne comporte aucune analyse de la continuité du parcours de santé des patients affectés d'une sténose coronarienne ou susceptibles de l'être comme le prévoit pourtant le 2ème alinéa de l'article R. 1434-4 du code de la santé publique ; l'accessibilité territoriale aux sites d'angioplastie, correspondant au 3° de l'article R. 1434-4 du code de la santé publique, est absente du diagnostic territorial ; la démographie médicale correspondant au 4° de l'article R.1434-4 du code de la santé publique n'a pas non plus été analysée alors même que ces données semblent exister ;

- si l'agence régionale de santé fournit plusieurs données qui sont de nature à réduire le périmètre des lacunes du schéma régional de santé telles qu'identifiées par les premiers juges, il n'en demeure pas moins que certains des items énumérés à l'article R. 1434-4 du code de la santé publique n'ont pas été pris en compte ;

- les pièces éparses, certaines constituant seulement des documents de travail, produites devant le tribunal pour suppléer cette insuffisance, ne peuvent être qualifiées de diagnostic, et les pièces postérieures à la décision produites devant la cour, notamment en matière de temps d'accès par hélismur, ne peuvent y suppléer ;

- le tribunal ne s'est pas mépris en recherchant les informations prévues par l'article R.1434-4 du code de la santé publique et en constatant qu'en leur absence, ces dispositions étaient méconnues ;

- il n'y a pas de corrélation entre les constats effectués et les objectifs retenus ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation faute d'avoir augmenté les implantations autorisées, compte tenu de l'augmentation prévisible du nombre d'actes, de l'impossibilité de raisonner sur des transports héliportés qui ne sont pas toujours envisageables et créent des évènements indésirables, de la possibilité d'une amélioration des temps d'accès pour 13 communes alors que sa clinique dispose du service d'urgences le plus important de l'offre privée en Midi-Pyrénées ;

- la planification antérieure envisageait 5 sites d'implantation et non 4, et la participation de médecins des hôpitaux concurrents à la commission chargée d'examiner l'évolution des structures disqualifie les conclusions, qui ne sont pas fondées sur le diagnostic réalisé ; en s'abstenant de porter à cinq le nombre d'implantations autorisées, l'agence régionale de santé méconnaît les objectifs d'améliorer l'accessibilité à l'offre, la qualité et la sécurité des soins qu'elle a fixés ;

- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure résultant de la composition restreinte de la commission chargée de préparer l'avis de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie contraire à l'article D.1432-38 du code de la santé publique, de la présence de membres travaillant au sein des hôpitaux concurrents ne pouvant être impartiaux, et de la méconnaissance du délai prévu à l'article D.1432-50 du code de la santé publique permettant de prendre connaissance des documents utiles à la séance ;

- il est entaché d'une erreur de droit en raison de l'absence, à la date de la décision, de la parution du décret prévu par le I de l'article L.1434-3 du code de la santé publique précisant les modalités de détermination des objectifs du schéma régional de santé ;

- l'arrêté portant approbation du schéma régional est illégal en raison de l'illégalité de l'arrêté du directeur de l'agence régionale de santé d'Occitanie n° 2017-4311 du 12 janvier 2018 relatif aux zones du schéma régional de santé, qui a méconnu les critères prévus à l'article R.1434-30 du code de la santé publique.

Par une ordonnance du 20 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 14 juin 2022 à 12 heures.

Par une ordonnance en date du 16 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de l'agence régionale de santé d'Occitanie.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé ;

- le décret n° 2016-1024 du 26 juillet 2016 relatif aux territoires de démocratie sanitaire, aux zones des schémas régionaux de santé et aux conseils territoriaux de santé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me Porte pour l'agence régionale de santé d'Occitanie et celles de Me Audouin substituant Me Cormier pour la société clinique d'Occitanie.

Une note en délibéré présentée pour la société par actions simplifiée Clinique d'Occitanie a été enregistrée le 12 juillet 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Le directeur général de l'agence régionale de santé d'Occitanie a approuvé, par arrêté du 3 août 2018, le schéma régional de santé de la région Occitanie qui fixe les objectifs quantitatifs de l'offre de soins. L'agence régionale de santé d'Occitanie relève appel du jugement du 2 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé, à la demande de la société clinique Occitanie, l'arrêté du 3 août 2018 en tant qu'il détermine les objectifs quantitatifs de l'offre de soin des activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, en cardiologie pour les actes portant sur les autres cardiopathies de l'adulte dans la zone d'implantation de la Haute-Garonne, ainsi que la décision implicite de la ministre des solidarités et de la santé rejetant son recours hiérarchique.

Sur l'insuffisance du diagnostic initial :

2. Aux termes des dispositions de l'article R.1434-4 du code de la santé publique : " Le schéma régional de santé est élaboré par l'agence régionale de santé sur le fondement d'une évaluation des besoins. A cette fin, elle effectue un diagnostic comportant une dimension prospective des besoins de santé, sociaux et médico-sociaux et des réponses existantes à ces besoins, y compris celles mises en œuvre dans le cadre d'autres politiques publiques. (...) Le diagnostic tient compte notamment : 1° De la situation démographique et épidémiologique ainsi que de ses perspectives d'évolution ; 2° Des déterminants de santé et des risques sanitaires ; 3° Des inégalités sociales et territoriales de santé ; 4° De la démographie des professionnels de santé et de sa projection ; 5° Des évaluations des projets régionaux de santé antérieurs ; (...).

3. Il résulte de ces dispositions que le diagnostic à partir duquel l'agence régionale de santé évalue les besoins et élabore le schéma régional de santé doit comporter une dimension prospective des besoins de santé sociaux et médico-sociaux et des réponses existantes à ces besoins, y compris celles mises en œuvre dans le cadre d'autres politiques publiques et tenir compte de différentes données notamment celles qu'elles listent. Elles n'exigent pas toutefois que l'ensemble des éléments du diagnostic soit inclus dans le schéma, ni que chaque élément soit identifié pour tous les domaines.

4. Si la partie intitulée " diagnostic prospectif des besoins et des réponses " des activités interventionnelles sous imagerie médicale par voie endovasculaire en cardiologie du schéma régional de santé ne comporte pas d'analyse des perspectives d'évolution de la situation démographique et épidémiologique, des déterminants de santé et des risques sanitaires, des inégalités sociales et territoriales de santé et de la démographie des professionnels de santé, il ressort des pièces du dossier et notamment du diagnostic général, du diagnostic prospectif de juin 2017 mis en ligne au mois d'octobre 2017, et des pièces produites pour la première fois en appel telles que le tableau de bord sur la santé en Occitanie ou des éléments de diagnostic présentés dans le cadre du groupe de travail sur la cardiologie interventionnelle dont les travaux ont servi à élaborer le schéma, que le diagnostic réalisé par l'agence régionale de santé, à partir duquel les besoins de santé pour les activités interventionnelles ou imagerie médicale, par voie endovasculaire en cardiologie pour les pratiques des actes portant sur les autres cardiopathies de l'adulte ont été évalués, a été réalisé conformément aux dispositions de l'article R.1434-4 du code de la santé publique.

5. Ainsi, c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur la méconnaissance de cet article pour annuler l'arrêté du 3 août 2018 en tant qu'il détermine les objectifs quantitatifs de l'offre de soin des activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, en cardiologie pour les actes portant sur les autres cardiopathies de l'adulte dans la zone d'implantation de la Haute-Garonne ainsi que la décision implicite de la ministre des solidarités et de la santé rejetant son recours hiérarchique. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Clinique Occitanie tant en première instance qu'en appel.

Sur les autres moyens :

6. Aux termes de l'article R. 1434-1 du code de la santé publique : " Le projet régional de santé est arrêté par le directeur général de l'agence régionale de santé après avis, dans le champ de leurs compétences respectives : 1° De la conférence régionale de la santé et de l'autonomie (...)" et aux termes de l'article D. 1432-31 : " La conférence régionale de la santé et de l'autonomie organise ses travaux au sein des formations suivantes : - la commission permanente prévue aux articles D. 1432-33 et D. 1432-34 ; - quatre commissions spécialisées prévues aux articles D. 1432-35 à D. 1432-43. La composition de chacune de ces commissions est fixée par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé. La conférence régionale de la santé et de l'autonomie peut, en outre, constituer des groupes de travail permanents. Ces groupes réunissent des membres de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie et des personnes choisies en raison de leur compétence ou de leur qualification au regard des questions pour lesquelles ils ont été constitués. Ils peuvent recueillir tous avis utiles dans les domaines dont ils sont chargés ". Par ailleurs, aux termes de l'article D.1432-32 : " L'assemblée plénière de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie (...) rend un avis sur le projet régional de santé ". Enfin, aux termes de l'article D. 1432-38 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " I.- La commission spécialisée de l'organisation des soins contribue à la définition et à la mise en œuvre de la politique régionale d'organisation des soins. 1° Elle prépare un avis sur le projet de schéma régional d'organisation des soins, dans ses volets hospitalier et ambulatoire, incluant la détermination des zones de mise en œuvre des mesures prévues pour l'installation et le maintien des professionnels de santé libéraux, des maisons de santé et des centres de santé. (...) ". L'article D. 1432-43 précise quant à lui que : " L'avis de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie sur le schéma régional de santé est rendu par la commission permanente ou, sur la demande de cette dernière, par l'assemblée plénière, au regard des avis préparés par chacune des commissions spécialisées ". En outre, aux termes de l'article D. 1432-50 dudit code : " l'ordre du jour des réunions de chacune des commissions spécialisées mentionnées à l'article D. 1432-31 est fixé par son président. Le président de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie assure l'information auprès de chacun des présidents des autres commissions spécialisées des ordres du jour ainsi fixés. (...) Sauf urgence, les membres des différentes formations reçoivent dix jours au moins avant la date de la réunion, une convocation comportant l'ordre du jour et le cas échéant, les documents nécessaires à l'examen des affaires qui y sont inscrites. ".

7. La conférence régionale de la santé et de l'autonomie a rendu son avis en formation plénière le 14 mai 2018 après avoir reçu le compte-rendu de sa commission permanente qui s'est réunie les 4 et 24 avril 2018 afin de préparer cet avis en s'appuyant sur les propositions des commissions spécialisées, au nombre desquelles figurent celles de la commission spécialisée de l'organisation des soins. Alors qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'interdit à cette commission de créer en son sein des groupes de travail par spécialités médicales préalablement à l'élaboration de sa contribution à la préparation de l'avis à rendre par la conférence régionale sur le projet de schéma régional de santé, la seule présence au sein de ces groupes de travail de membres des quatre établissements ayant précédemment obtenu l'autorisation d'exercer des activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, n'est pas en elle-même de nature à faire regarder cet avis comme ayant été rendu en méconnaissance du principe d'impartialité. Par ailleurs, à supposer même qu'il soit établi que les membres du groupe de travail thématique sur la cardiologie interventionnelle réuni aux mois de mai et juin 2017, composé de cardiologues issus du secteur privé et du secteur public, n'aient pas disposé le jour des séances de certains éléments, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils aient été empêchés de se prononcer en toute connaissance de cause sur les sujets à l'ordre du jour des réunions des groupes de travail. Aucun élément du dossier n'établit au demeurant qu'un vice ait été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il ait privé l'intéressée d'une garantie. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'adoption du schéma régional de santé en tant qu'il détermine les objectifs afférents à la cardiologie interventionnelle doit être écarté.

8. Aux termes de l'article L. 1434-3-I du code de la santé publique tel que modifié par l'article 158 du la loi du 26 janvier 2016 : " Le schéma régional de santé (...) 2° Fixe, pour chaque zone définie au a du 2° de l'article L. 1434-9 : " a) Les objectifs quantitatifs et qualitatifs de l'offre de soins, précisés par activité de soins et par équipement matériel lourd, selon des modalités définies par décret ". A la date du 3 août 2018 de l'arrêté litigieux, les dispositions des articles D.6121-6 à 10 du code de la santé publique applicables fixaient les modalités d'application du 2° a) de l'article L.1434--I. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit faute de décret fixant les modalités d'application du schéma régional de santé doit être écarté.

9. Aux termes de l'article L. 1434-3 du code de la santé publique : " .I- Le schéma régional de santé : (...)2° Fixe, pour chaque zone définie au a du 2° de l'article L. 1434-9 : a) Les objectifs quantitatifs et qualitatifs de l'offre de soins, précisés par activité de soins et par équipement matériel lourd, selon des modalités définies par décret ;(...). Aux termes de l'article L.1434-9 du même code : " L'agence régionale de santé délimite : 1° Les territoires de démocratie sanitaire à l'échelle infrarégionale, de manière à couvrir l'intégralité du territoire de la région ; 2° Les zones donnant lieu : a) A la répartition des activités et des équipements mentionnés à l'article L. 1434-3 (...). ", et enfin aux termes de son article R 1434-30 : " Les zones du schéma régional de santé donnant lieu à la répartition des activités de soins et des équipements matériels lourds définis au 2° du I de l'article L. 1434-3 sont délimitées par le directeur général de l'agence régionale de santé pour chaque activité de soins définie à l'article R. 6122-25 et équipement matériel lourd défini à l'article R. 6122-26. Ces zones peuvent être communes à plusieurs activités de soins et équipements matériels lourds. Au sein de ces zones sont définis des objectifs quantitatifs pour chaque activité de soins ou équipement matériel lourd. La délimitation de ces zones prend en compte, pour chaque activité de soins et équipement matériel lourd :1° Les besoins de la population; 2° L'offre existante et ses adaptations nécessaires ainsi que les évolutions techniques et scientifiques; 3° La démographie des professionnels de santé et leur répartition; 4° La cohérence entre les différentes activités de soins et équipements matériels lourds soumis à autorisation; 5° Les coopérations entre acteurs de santé. La délimitation des zones concourt à garantir pour chaque activité de soins et équipement matériel lourd la gradation des soins organisée pour ces activités, la continuité des prises en charge et la fluidification des parcours, l'accessibilité aux soins, notamment aux plans géographique et financier, la qualité et la sécurité des prises en charge et l'efficience de l'offre de soins. ".

10. Dès lors que le schéma régional de santé fixe les objectifs quantitatifs et qualitatifs de l'offre de soins pour chaque zone délimitée par l'agence régionale de santé, lesquelles concourent à garantir pour chaque activité de soins et équipement matériel lourd la gradation des soins organisée pour ces activités, la continuité des prises en charge et la fluidification des parcours, l'accessibilité aux soins, notamment aux plans géographique et financier, la qualité et la sécurité des prises en charge et l'efficience de l'offre de soins, l'arrêté du 3 août 2018 doit être regardé comme pris pour l'application du l'arrêté du 12 janvier 2018 portant adoption des zones du schéma régional de santé relatives aux activités de soins, aux équipements matériels lourds et aux laboratoires de biologie médicale. Par suite, la société clinique Occitanie peut utilement invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cet arrêté à l'appui de son recours tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 août 2018.

11. Il ressort des pièces du dossier et notamment du diagnostic élaboré par l'agence régionale de santé que l'implantation d'une activité de cardiologie interventionnelle doit à la fois permettre une accessibilité territoriale facilitant la prise en charge du plus grand nombre dans des délais conformes aux recommandations scientifiques et respecter des seuils réglementaires nécessaires au maintien de la qualité des soins avec l'exercice de 350 procédures par an, impliquant que soit desservi un bassin de population comprenant entre 300 000 et 500 000 habitants par an. Quatre départements de la région Occitanie, dont l'Ariège et le Gers, limitrophes de la Haute-Garonne, ne bénéficient pas toutefois de plateau technique nécessaire permettant d'envisager l'implantation d'une activité d'angioplastie. Le schéma régional de santé précise que les habitants des quatre départements dont la population est inférieure à 200 000 habitants est prise en charge dans le cadre de l'offre existante en région, les établissements des départements concernés ayant mis en place, en lien avec le service médical d'urgence, des protocoles de prise en charge permettant de mettre en œuvre une stratégie de reperfusion avant même l'arrivée du patient à l'hôpital, conformément aux recommandations professionnelles. Seules deux zones en Ariège sont situées à plus de quatre-vingt-dix minutes par la route d'un site autorisé pour la réalisation des actes de type 3. Il ressort d'ailleurs des pièces nouvelles produites en appel que ces quatre départements ont des indices de sur-recours à l'angioplastie coronaire, attestant d'une accessibilité développée de la population à cette technique. Dans ces conditions, en choisissant le cadre départemental comme zone de cardiologie interventionnelle, lequel concourt à garantir à la gradation des soins organisée pour ces activités, la continuité des prises en charge et la fluidification des parcours, l'accessibilité aux soins, notamment aux plans géographique et financier, la qualité et la sécurité des prises en charge et l'efficience de l'offre de soins, et en prenant en compte comme elle l'a fait le caractère complémentaire des territoires associés dans le cadre d'une approche globale, l'agence régionale de santé n'a pas méconnu les modalités de délimitation des zones définies par les dispositions de l'article R. 1434-30 du code de la santé publique.

12. Il ressort des pièces du dossier et notamment du diagnostic territorial que le département de la Haute-Garonne présente la particularité de concentrer l'essentiel de sa population dans l'agglomération toulousaine et ses environs, les arrondissements de Toulouse et celui de Muret, distant de 22 kilomètres, totalisant 1,3 million d'habitants sur une population totale de 1,385 million à l'échelle départementale. Quatre sites d'angioplastie sont localisés à Toulouse, l'activité se concentrant d'ailleurs principalement sur deux des quatre sites toulousains. Les données populationnelles, géographiques et épidémiologiques ne caractérisent pas par ailleurs de carence dans la prise en charge des syndromes coronariens aigus. De la même manière, les études prospectives ne montrent pas de risque d'augmentation de la prévalence de la mortalité par infarctus du myocarde, et de la consommation de soins pour les actes d'angioplastie coronarienne. La consommation d'angioplastie coronaire a d'ailleurs augmenté de façon continue, plus rapidement que la population départementale au cours de la période. Enfin, pour les populations résidant à l'extrême sud du département, dans des communes isolées situées à l'écart des axes autoroutiers, l'accessibilité en urgence à un plateau de technique d'angioplastie coronaire nécessite l'utilisation de moyens héliportés. En estimant que seule une implantation dans le sud du département permettrait d'améliorer la prise en charge de la population y résidant mais qu'aucun centre n'est toutefois à ce jour en capacité de remplir les conditions d'implantation, et en en déduisant que l'ouverture d'un cinquième site à Muret n'aurait pas pour effet d'améliorer l'accessibilité aux soins pour la population du sud du département, et en décidant dans ces conditions de maintenir à quatre le nombre d'implantations d'angioplasties coronaires pour ce département, l'agence régionale de santé n'a pas mal apprécié la situation de la zone de la Haute-Garonne,

13. Il résulte de ce qui précède que l'agence régionale de santé d'Occitanie est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 3 août 2018 en tant qu'il détermine les objectifs quantitatifs de l'offre de soin des activités interventionnelles sous imagerie médicale, par voie endovasculaire, en cardiologie pour les actes portant sur les autres cardiopathies de l'adulte dans la zone d'implantation de la Haute-Garonne, ensemble la décision implicite de la ministre des solidarités et de la santé rejetant son recours hiérarchique.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'agence régionale de santé, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la société clinique d'Occitanie, la somme qu'elle réclame au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 2 avril 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société par actions simplifiées Clinique d'Occitanie devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la société par actions simplifiées Clinique d'Occitanie tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'agence régionale de la santé d'Occitanie et à la société par actions simplifiées Clinique d'Occitanie.

Copie en sera adressée au ministre de la santé et de la prévention.

Délibéré après l'audience du 5 juillet 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 juillet 2022.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20TL21835


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL21835
Date de la décision : 19/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-07-01-04-04-02 PROCÉDURE. - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE. - QUESTIONS GÉNÉRALES. - MOYENS. - EXCEPTION D'ILLÉGALITÉ. - RECEVABILITÉ. - DÈS LORS QUE LE SCHÉMA RÉGIONAL DE SANTÉ FIXE LES OBJECTIFS QUANTITATIFS ET QUALITATIFS DE L'OFFRE DE SOINS POUR CHAQUE ZONE DÉLIMITÉE PAR L'AGENCE RÉGIONALE DE SANTÉ, LESQUELLES CONCOURENT À GARANTIR POUR CHAQUE ACTIVITÉ DE SOINS ET ÉQUIPEMENT MATÉRIEL LOURD LA GRADATION DES SOINS ORGANISÉE POUR CES ACTIVITÉS, LA CONTINUITÉ DES PRISES EN CHARGE ET LA FLUIDIFICATION DES PARCOURS, L'ACCESSIBILITÉ AUX SOINS, NOTAMMENT AUX PLANS GÉOGRAPHIQUE ET FINANCIER, LA QUALITÉ ET LA SÉCURITÉ DES PRISES EN CHARGE ET L'EFFICIENCE DE L'OFFRE DE SOINS, L'ARRÊTÉ PORTANT APPROBATION DU SCHÉMA RÉGIONAL DE SANTÉ PRÉVU PAR L'ARTICLE L. 1434-3-I DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE DOIT ÊTRE REGARDÉ COMME PRIS POUR L'APPLICATION DE L'ARRÊTÉ PRÉVU À L'ARTICLE L.1434-9 DU MÊME CODE PORTANT ADOPTION DES ZONES DU SCHÉMA RÉGIONAL DE SANTÉ RELATIVES AUX ACTIVITÉS DE SOINS, AUX ÉQUIPEMENTS MATÉRIELS LOURDS ET AUX LABORATOIRES DE BIOLOGIE MÉDICALE. PAR SUITE, L'ILLÉGALITÉ DE L'ARRÊTÉ PORTANT ADOPTION DES ZONES PEUT ÊTRE UTILEMENT INVOQUÉE, PAR VOIE D'EXCEPTION, À L'APPUI DU RECOURS TENDANT À L'ANNULATION DE L'ARRÊTÉ PORTANT APPROBATION DU SCHÉMA RÉGIONAL DE SANTÉ.

54-07-01-04-04-02 Comp. CE 28 décembre 2016 N°391358, 400049, Fédération de l'hospitalisation privée, B.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Céline ARQUIÉ
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SELARL HOUDART ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-07-19;20tl21835 ?
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