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15/06/2021 | FRANCE | N°20BX03954

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2eme chambre (formation a 3), 15 juin 2021, 20BX03954


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté

du 26 décembre 2019 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre

de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé

le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans,

et d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour, ou à titre subsidiaire de r

examiner

sa situation.

Par un jugement n° 2002850 du 4 novembre 2020, le tribunal a annulé l'arrêté

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté

du 26 décembre 2019 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre

de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé

le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans,

et d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour, ou à titre subsidiaire de réexaminer

sa situation.

Par un jugement n° 2002850 du 4 novembre 2020, le tribunal a annulé l'arrêté

du 26 décembre 2019 et enjoint à la préfète de la Gironde de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 novembre 2020, la préfète de la Gironde demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de M. E... alias A... une somme de 800 euros au titre

des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative " et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ".

Elle soutient que :

- le rapport technique de la cellule " fraude documentaire " de la police aux frontières du 24 janvier 2019 et les informations recueillies dans le fichier Visabio, selon lesquelles l'intéressé a obtenu le 24 janvier 2014 un visa Schengen de court séjour auprès des autorités portugaises sous l'identité d'Aquiles Fukiau E... né le 27 avril 1995 à Mbanza, établissent le caractère frauduleux des actes d'état-civil présentés au nom d'Achil A... né le 1er janvier 1999 à Kinshasa ; l'ambassade de la République Démocratique du Congo a d'ailleurs demandé aux autorités françaises de ne pas accepter les documents d'état-civil qu'elle n'avait pas " légalisés " ; eu égard à cette fraude, M. E... alias A... ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour ;

- M. E... alias A... ne démontre pas entretenir des liens avec sa prétendue soeur résidant à Rouen, dont la demande de titre de séjour est en cours d'instruction, et n'a pas justifié d'une relation de concubinage ; il ne justifie pas du décès de ses parents ; il n'est pas dépourvu de liens privés et familiaux dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 19 ans,

et a d'ailleurs continué à entretenir des relations avec son frère aîné ; c'est ainsi à tort que les premiers juges ont estimé que le refus de titre de séjour méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 mars 2021, M. A..., représenté par Me I..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 80 euros par jour de retard, ou à défaut de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte

et de lui délivrer dans l'attente un récépissé autorisant le séjour et le travail ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- c'est à bon droit que le tribunal a annulé l'arrêté du 26 décembre 2019 au motif de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il est entré en France à l'âge de 15 ans avec

sa soeur, il n'a plus d'attaches au Congo, il a démontré sa volonté d'intégration en obtenant plusieurs diplômes, il travaille sous contrat à durée indéterminée à temps complet et donne entière satisfaction, et enfin il entretient une relation avec une ressortissante française depuis début 2017 ;

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- de manière inexplicable, l'administration lui a notifié l'arrêté le 29 juin 2020,

six mois après sa date, alors qu'il l'avait informée de sa situation professionnelle les 12 mars et 22 juin 2020, ce qui démontre un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- le rapport de la cellule " fraude documentaire " ne conclut pas de manière formelle à la fraude, il n'est pas démontré que les autorités congolaises auraient été saisies d'une demande de vérification, et il a produit deux documents émanant de celles-ci et confirmant sa nationalité ; ainsi, la preuve d'une fraude n'est pas apportée et la décision de refus de titre de séjour est fondée sur des faits inexacts ;

- la préfète ne pouvait régulièrement se fonder sur la consultation du fichier Visabio

au-delà du délai maximal de conservation des données de cinq ans prévu à l'article R. 611-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- dès lors qu'il n'a jamais dissimulé son identité, l'interdiction de retour est entachée d'une erreur de motivation, d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (CE) n° 767/2008 du Parlement européen et du Conseil du 9 juillet 2008 concernant le système d'information sur les visas (VIS) et l'échange de données entre les États membres sur les visas de court séjour (règlement VIS) ;

- le règlement (CE) n° 810/2009 du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 26 septembre 2017 portant création d'un traitement automatisé de données

à caractère personnel relatif aux étrangers sollicitant la délivrance d'un visa, dénommé

France-Visas ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., se disant né le 1er janvier 1999 et de nationalité congolaise (République Démocratique du Congo), a déclaré être entré en France le 26 mars 2014.

Son placement auprès des services de l'aide sociale à l'enfance de l'Eure, ordonné à titre provisoire le 2 avril 2014, a été maintenu par un jugement du tribunal pour enfants H... du 29 avril 2014. Les services de la préfecture de l'Eure lui ont délivré un premier titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 7 novembre 2017 au 6 novembre 2018, sur le fondement des dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... en a sollicité le renouvellement auprès des services de la préfecture de la Gironde. Par un arrêté du 26 décembre 2019, la préfète de la Gironde a rejeté sa demande aux motifs qu'elle était irrecevable en l'absence de documents probants justifiant de son état-civil et que la prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance, viciée par la fraude, n'avait pu créer de droit à son profit, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. La préfète relève appel du jugement

du 4 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté au motif que la décision de refus de titre de séjour portait au droit de M. A... au respect de sa vie privée

et familiale une atteinte contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne

de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et lui a enjoint de délivrer

à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

2. La préfète soutient en premier lieu qu'une fraude à l'état civil ferait obstacle à ce que soit pris en considération le parcours du jeune homme en France. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". En vertu de l'article 1er du décret du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger : " Lorsque, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger, l'autorité administrative saisie d'une demande d'établissement ou de délivrance d'un acte ou de titre procède ou fait procéder, en application de l'article 47 du code civil, aux vérifications utiles auprès de l'autorité étrangère compétente, le silence gardé pendant huit mois vaut décision de rejet ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a présenté un jugement supplétif

du 20 décembre 2016 ordonnant, à la demande de son frère, l'enregistrement de sa naissance

au 1er janvier 1999 à Kinshasa, une notification de ce jugement supplétif du 20 décembre 2016, un acte de naissance du 14 février 2017, une copie intégrale d'acte de naissance

du 16 février 2017, ainsi qu'un passeport délivré par les autorités congolaises sur la base de l'acte de naissance. Les services de la préfecture de la Gironde, qui avaient consulté le fichier VISABIO prévu à l'article R. 611-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, permettant l'échange d'informations avec les autorités des Etats Schengen au travers

du système d'information sur les visas (VIS) pour les données biométriques se rapportant

aux visas, ont sollicité l'expertise de la cellule de lutte contre la fraude documentaire

et à l'identité de la police aux frontières. Le rapport technique de cette dernière, daté

du 24 janvier 2019, relève que le jugement supplétif, sa notification et les actes d'état-civil sont réguliers en la forme, mais que l'acte de naissance aurait dû porter la signature du déclarant,

et que le fichier VISABIO fait apparaître que le titulaire du passeport a présenté à l'ambassade du Portugal en Angola, le 17 janvier 2014, une demande de visa au nom de J... (prénoms) E... (nom), né le 27 avril 1995 en Angola, pays voisin de la République Démocratique du Congo. Ce rapport conclut qu'il est fort probable que l'intéressé soit

un ressortissant angolais cherchant à se faire passer pour congolais, ce qui est " facile " car l'état-civil est très peu sécurisé en République Démocratique du Congo. La préfète de la Gironde produit en outre une note d'information du ministère de l'intérieur du 7 septembre 2016 faisant référence à un courrier du 31 août 2016 par lequel l'ambassade de la République Démocratique du Congo a alerté les autorités françaises sur le faible degré d'informatisation de son système de délivrance des actes d'état-civil, à l'origine de fraudes documentaires.

4. M. E... alias A..., qui ne conteste pas avoir présenté une demande de visa en Angola en janvier 2014, se prévaut des dispositions de l'article R. 611-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fixant la durée de conservation des données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé VISABIO à cinq ans à compter de leur inscription. Ces dispositions sont précisées par l'article 1er de l'arrêté du 26 septembre 2017 susvisé, selon lequel les données en cause sont conservées pendant une période maximale

de cinq ans à compter de la date d'expiration du visa, en cas de délivrance d'un visa. Il ressort

des pièces du dossier que le visa délivré le 27 janvier 2014 à M. E... alias A... expirait

le 12 mars 2014, de sorte que ces données pouvaient être conservées jusqu'au 12 mars 2019.

Par suite, elles ne pouvaient plus être opposées à l'intéressé le 26 décembre 2019, date de l'arrêté en litige.

5. La préfète soutient en second lieu que la situation de l'intéressé ne permettait pas de retenir une atteinte à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, aux termes duquel: " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, soit le

26 décembre 2019, M. E... alias A..., qui résidait en France depuis près de six ans, ne justifiait pas entretenir de relations avec la personne qu'il présente comme sa jeune soeur, placée en même temps que lui auprès des services de l'aide sociale à l'enfance de l'Eure, et résidant à Rouen alors que lui-même s'était installé à Mérignac. Son concubinage avec une ressortissante française depuis août 2018 était encore récent, et il venait seulement d'être embauché, à compter

du 9 décembre 2019, en qualité de technicien sous contrat à durée indéterminée à temps plein par une société de location de matériel. Dans ces circonstances, l'arrêté contesté ne peut, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, être regardé comme portant au droit de M. E... alias A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte contraire aux stipulations précitées.

7. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E... alias A... en première instance et en appel.

8. En premier lieu, par un arrêté du 12 septembre 2019, publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture du 13 septembre 2019, la préfète de la Gironde a donné délégation à M. Thierry F..., secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer toutes les décisions en matière de droit au séjour, d'éloignement et de décisions accessoires s'y rapportant, prises en application des livres III, IV et V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, M. F... avait compétence pour prendre l'arrêté contesté.

9. En deuxième lieu, la décision de refus de titre de séjour énonce les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. Cette décision est ainsi suffisamment motivée.

10. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 26 décembre 2019, envoyé par pli recommandé à l'adresse de M. E... alias A..., a été posté le 27 décembre 2019 et retourné à l'expéditeur au motif que le destinataire serait inconnu à cette adresse. Dès lors que les conditions de notification d'une décision sont sans incidence sur sa légalité, la circonstance que l'arrêté en litige a été notifié une seconde fois avec succès le 29 juin 2019 à la même adresse, après que l'intéressé, qui en ignorait l'existence, ait alerté à deux reprises les services de la préfecture sur le non renouvellement de son récépissé de demande de titre de séjour, ne saurait faire regarder la décision de refus de titre de séjour comme entachée d'un défaut d'examen particulier de la situation de M. E... alias A...

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. (...). "

M. E... alias A..., qui a obtenu la délivrance d'un premier titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, ne peut utilement en invoquer la méconnaissance en se prévalant d'un droit au renouvellement, qu'elles ne prévoient pas.

12. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

13. Pour prononcer une interdiction de retour d'une durée de deux ans, la préfète de la Gironde a relevé que l'intéressé, bien qu'il ne représente pas une menace actuelle pour l'ordre public, a tenté d'obtenir indûment une protection réservée aux mineurs non accompagnés et ainsi le renouvellement de son titre de séjour, qu'il n'a jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement, et qu'il ne justifie ni être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, ni de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la fraude reprochée ne pouvait être prise en compte. Dans ces circonstances, M. E... alias A... est fondé à soutenir que l'interdiction de retour est entachée d'erreur d'appréciation.

14. Il résulte de ce qui précède, que la préfète de la Gironde est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé les décisions du 26 décembre 2019 par lesquelles elle a refusé de délivrer un titre de séjour à M. E... alias A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", et que la demande présentée devant le tribunal par M. E... alias A... doit, dans cette mesure, être rejetée. Par suite, les conclusions de M.A... tendant à ce qu'il soit enjoint à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux est annulé en tant qu'il a annulé les décisions du 26 décembre 2019 par lesquelles la préfète de la Gironde a refusé de délivrer un titre de séjour à M. E... alias A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et la demande de M. E... alias A... présentée devant le tribunal est rejetée dans cette mesure.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. J... E... alias B... A.... Une copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne D..., présidente-assesseure,

Mme C... G..., conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021.

La rapporteure,

Anne D...

La présidente,

Catherine GiraultLa greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

7

N° 20BX03954


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 20BX03954
Date de la décision : 15/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme BEUVE-DUPUY
Avocat(s) : TREBESSES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-06-15;20bx03954 ?
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