LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 7 juillet 2021
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 899 F-B
Pourvoi n° T 19-23.989
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 JUILLET 2021
La société Laboratoires Juva santé, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-23.989 contre l'arrêt rendu le 12 septembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant à M. [F] [Q], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Laboratoires Juva santé, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [Q], après débats en l'audience publique du 27 mai 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 septembre 2019), M. [Q] a été engagé du 10 juin 2013 au 14 février 2014 par la société Laboratoires Juva santé (la société) par un contrat à durée déterminée.
2. Le salarié détenait un mandat de conseiller du salarié qui expirait le 31 août 2015.
3. Soutenant l'existence d'une violation de son statut protecteur, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 22 janvier 2016 pour obtenir paiement de diverses sommes.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche et le second moyen, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches
Enoncé du moyen
5. La société fait grief à l'arrêt de déclarer abusif le licenciement et de la condamner à payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour violation du statut protecteur, de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail et d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, alors :
« 1°/ que l'article L. 2412-1 du code du travail, auquel renvoie l'article L. 2421-8 relatif à la "procédure applicable au salarié titulaire d'un contrat à durée déterminée", ne mentionne pas, parmi les mandats ouvrant droit à la protection, celui de conseiller du salarié ; que, pour considérer que M. [Q], titulaire d'un contrat à durée déterminée pour la période du 10 juin 2013 au 14 février 2014, aurait dû, eu égard à son mandat de conseiller du salarié, bénéficier d'un statut protecteur, dire que la cessation des relations contractuelles intervenue par l'échéance du terme sans saisine préalable de l'administration du travail était nulle, et condamner l'exposante au paiement de sommes à titre de dommages et intérêts pour méconnaissance du statut protecteur, rupture abusive, indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, la cour d'appel a successivement retenu que le conseiller du salarié bénéficiait d'une protection contre le licenciement, ce tant en application de l'actuel code du travail que des dispositions antérieures à sa recodification, l'ancien article L. 122-14-16 du code du travail renvoyant à cet égard à la protection, prévue par l'article L. 412-18 dont bénéficiaient les délégués syndicaux, que l'article L. 412-18 soumettait à autorisation de l'inspecteur du travail, non seulement le licenciement, mais aussi l'interruption du contrat de mission par l'entrepreneur de travail temporaire et la notification du non-renouvellement de la mission, que si les dispositions relatives au conseiller du salarié ne faisaient plus référence à la protection dont bénéficiaient les délégués syndicaux, la recodification étant intervenue à droit constant, le conseiller du salarié bénéficiait toujours de la même protection, et enfin qu'aux termes de l'article L. 2421-8 du code du travail, l'arrivée du terme du contrat à durée déterminée n'entraînait la rupture de ce dernier qu'après saisine de l'inspection du travail en application de l'article L. 2412-1, peu important que cet article, énumérant la liste des mandats permettant de bénéficier d'une telle protection, ne cite pas celui de conseiller du salarié ; qu'en statuant ainsi, par référence à des dispositions portant sur le licenciement ou la rupture de contrats de mission, les seules dispositions relatives au contrat à durée déterminée renvoyant à une liste qui, ainsi qu'elle l'a relevé, ne mentionnaient pas le mandat de conseiller du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 2421-8, L. 2412-1, L. 2411-1, et L. 1232-14 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige ;
2°/ qu'en admettant même que l'on puisse se référer, ainsi que l'a retenu la cour d'appel, aux dispositions applicables aux délégués syndicaux pour déterminer la protection dont bénéficient les conseillers des salariés, l'article L. 2412-2 du code du travail n'impose d'autorisation de l'administration du travail qu'en cas de rupture du contrat à durée déterminée avant l'échéance de son terme ou de non renouvellement du contrat à durée déterminée comportant une clause de renouvellement ; qu'en l'espèce, il était constant que le contrat de M. [Q] n'avait pas été rompu avant l'échéance du terme et la cour d'appel a constaté qu'il ne comportait pas de clause de renouvellement ; qu'en statuant néanmoins comme elle l'a fait, elle a violé les articles L. 2421-8 et L. 2412-1, L. 2412-2, L. 2411-1, et L. 1232-14 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige.
Réponse de la Cour
6. Aux termes de l'ancien article L. 122-14-16 du code du travail, le licenciement par l'employeur du salarié inscrit sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département, chargé d'assister les salariés convoqués par leur employeur en vue d'un licenciement, est soumis à la procédure prévue par l'article L. 412-8 du présent code.
7. Aux termes de l'ancien article L. 412-8, le délégué syndical lié à l'employeur par un contrat de travail à durée déterminée bénéficie des mêmes garanties et protections que celles accordées aux délégués du personnel et aux membres du comité d'entreprise, conformément aux articles L. 425-2 et L. 436-2.
8. Il en résulte que, la recodification étant intervenue à droit constant, le conseiller du salarié bénéficie de la protection prévue à l'article L. 2421-8 du code du travail imposant que, lorsque le contrat à durée déterminée arrive à son terme, l'inspecteur du travail autorise préalablement la cessation du lien contractuel.
9. Ayant constaté que l'inspecteur du travail n'avait pas été saisi préalablement à l'arrivée du terme du contrat à durée déterminée, la cour d'appel en a exactement déduit que la rupture des relations contractuelles, intervenue en violation de l'article L. 2421-8 du code du travail, était nulle et que l'intéressé pouvait de ce fait prétendre à une indemnité au titre de la violation du statut protecteur dont le montant est égal aux salaires qu'il aurait dû percevoir entre le jour suivant le terme de son contrat et la fin de la période de protection.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Laboratoires Juva santé aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Laboratoires Juva santé et la condamne à payer à M. [Q] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Laboratoires Juva santé
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ces chefs, d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur [Q] est abusif et d'AVOIR condamné la société LABORATOIRES JUVA SANTE à lui payer les sommes de 67.840 ? à titre de dommages et intérêts pour violation de son statut protecteur de conseiller du salarié, 4.000 ? à titre dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, 11.000 ? bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1.100 ? bruts au titre des congés payés afférents, et 1.000 ? en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QU « aux termes du contrat de travail, M. [Q] a été engagé du 10 juin 2013 au 14 février 2014 afin de remplacer Mme [M], responsable de l'administration du personnel et de la paie, en arrêt lié à sa maternité. Ce contrat stipulait qu'il pourrait être renouvelé si la société le jugeait opportun, par accord entre les parties, et que si la société désirait le renouvellement, elle proposerait à M. [Q] un avenant pour en fixer les conditions dans les deux semaines précédant le terme du contrat. Il s'en déduit que le contrat de travail ne comportait pas de clause de renouvellement en l'absence de précision relative aux conditions de mise en oeuvre de ce dernier. Sur le statut protecteur du conseiller du salarié. Le conseiller du salarié assiste le salarié d'une entreprise dépourvue d'institution représentative du personnel lors de l'entretien préalable à un éventuel licenciement. A cet effet, il a vocation à intervenir au cours de l'entretien afin de solliciter des explications de la part de l'employeur et de présenter ses observations. Il exerce par ailleurs ses fonctions dans une entreprise tierce et figure sur une liste établie par la Direccte dans chaque département. Le Conseil constitutionnel, saisi dans le cadre de la loi n° 89-549 du 2 août 1989, a précisé qu'il ressortait des débats parlementaires que la personne qui, à la demande d'un salarié peut être présente à ses côtés, lors de l'entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement, n'était investie d'aucun pouvoir particulier à l'encontre de l'employeur et qu'elle n'avait d'autre mission que d'assister le salarié et de l'informer sur l'étendue de ses droits (n° 89-257 DC du 25 juillet 1989). Sur la protection en cas de licenciement ; Préalablement à la nouvelle numérotation du code du travail, le licenciement du conseiller du salarié en exercice était soumis, en application de l'artcle L. 122-14-16 ancien du code du travail, à la procédure prévue par l'article L. 412-18 ancien applicable aux délégués syndicaux impliquant de recueillir l'autorisation de l'inspecteur du travail et ce, pendant les douze mois suivant le terme du mandat qui devait avoir été exercé pendant au moins un an. Ce dernier article était inclus dans la section 2 du code du travail relative à la résiliation du contrat à durée indéterminée. Au regard de la nouvelle codification du code du travail intervenue à droit constant, le conseiller du salarié bénéfice, aux termes des articles L. 2411-1 16° dans sa version applicable aux faits et L. 1232-14 du code du travail, d'une protection en cas de licenciement, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, ce dernier précisant que l'exercice de la mission de conseiller du salarié ne peut être une cause de rupture du contrat de travail et que son licenciement est soumis à la procédure d'autorisation administrative prévue par le livre IV de la deuxième partie. Il est donc certain que le licenciement du salarié exerçant le mandat de conseiller du salarié nécessite de recueillir l'autorisation de l'inspection du travail, son statut étant notamment calqué sur celui du délégué syndical, du membre du personnel élu au comité économique et social ou du conseiller prud'homme. Sur la protection en cas d'arrivée du terme du contrat de travail à durée déterminée ; Dans l'ancienne codification, l'article L. 412-18 du code du travail prévoyait qu'outre la protection accordée en cas de licenciement, l'interruption du fait de l'entrepreneur de travail temporaire ou la notification du non-renouvellement de la mission d'un travailleur temporaire, était soumise à la procédure d'autorisation de l'inspection du travail. Cet article avait donc instauré un contrôle préalable de l'inspection du travail en cas de non-renouvellement de la mission de travailleur temporaire. La circulaire n° 91-16 du 5 septembre 1991 relative au statut de salarié protégé du conseiller du salarié précise qu'il ressort clairement des débats parlementaires que l'ensemble des dispositions de l'article L. 412-18 du code du travail est applicable au conseiller du salarié (article 1.2.1) ; Il est constant que s'appliquent au conseiller du salarié licencié les dispositions de l'article L. 2411-3 du code du travail relatives à la durée de la protection dont bénéfice le délégué syndical, sauf dispositions expresses contraires, la recodification étant intervenue à droit constant (Cour de cassation en date du 27 janvier 2010 n° 08-44.376). Il est également constant qu'en application de l'article L. 2413-1 du code du travail recodifiant à droit constant les anciens articles L. 112-14-16, L. 412-18 et L. 423-10 du code du travail, le travailleur temporaire, conseiller du salarié, qui ne s'est plus vu confier de mission et invoquant que la cessation de tous liens avec l'entreprise de travail temporaire est intervenue en violation de son statut protecteur, est protégé non seulement en cas d'interruption ou de notification du non-renouvellement de sa mission mais encore dans le cas où l'entreprise de travail temporaire décide de ne plus lui confier de mission, cette dernière devant solliciter l'autorisation de l'inspection du travail dès lors que le contrat du salarié est parvenu à son terme prévu et ne comporte pas de clause de renouvellement (Cour de cassation 24 octobre 2012 n° 11-21.946). Il en résulte qu'au regard de la nouvelle codification du code du travail, l'article L. 2421-8 du code du travail dans sa version applicable au faits, disposant que l'arrivée du terme d'un contrat de travail à durée déterminée n'entraîne la rupture du contrat de travail qu'après constatation par l'inspecteur du travail, saisi en application de l'article L. 2412-1, que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire, est applicable au conseiller du salarié et ce, même si l'article L. 2412-1 du code du travail, qui énumère la liste des mandats permettant de bénéficier d'une telle protection, ne cite pas expressément le conseiller du salarié. Si dans le cadre de la nouvelle version du code du travail, entrée en vigueur le 1er mai 2008, seul le licenciement du conseiller du salarié est soumis à la procédure d'autorisation administrative prévue par le livre IV de la deuxième partie du code du travail (L. 1232-14 et L. 2411-21), et si les dispositions relatives au conseiller du salarié ne font plus référence au maintien de la protection prévue pour les délégués syndicaux à l'issue de leur mandat, il est constant que, sauf dispositions expresses contraires, la recodification du code du travail étant intervenue à droit constant, s'appliquent au conseiller du salarié les dispositions de l'article L. 2411-3 du code du travail relatives à la durée de la protection d'un délégué syndical. L'article L. 1243-5 du code du travail se réfère également à l'article L. 2412-1 s'agissant des salariés titulaires d'un mandat de représentation pour lesquels le contrat de travail à durée déterminée ne cesse pas de plein droit à l'échéance du terme. Enfin, le bénéfice de la procédure spécifique en cas de rupture du contrat de travail à durée déterminée, celle-ci étant identique en cas de licenciement, est également réservé par l'article L. 2421-7 aux salariés mentionnés à l'article L. 2412-1 du code du travail. En conséquence, M. [Q], en sa qualité de conseiller du salarié, bénéficiait du statut protecteur exorbitant du droit commun, cette protection subsistant au cours des douze mois suivant le terme de son mandat à condition pour l'intéressé d'avoir exercé ses fonctions pendant au moins un an, ce qui n'est pas contesté par la société intimée. En application de l'article L. 2421-8 du code du travail, la fin du contrat de travail à durée déterminée d'un salarié protégé est soumise à la procédure d'autorisation un mois avant l'arrivée du terme. A défaut, la relation de travail est réputée se poursuivre sous le régime du contrat de travail à durée indéterminée de sorte que sa rupture est nulle. La cour, statuant dans les limites de la demande, juge le licenciement abusif. En l'espèce, la société Laboratoires Juva santé n'a pas saisi l'inspection du travail avant l'issue du contrat de travail à durée déterminée de sorte que M. [Q] peut légitimement prétendre à une indemnité forfaitaire spécifique au titre de la violation du statut protecteur qui est égale aux salaires que le salarié aurait dû percevoir jusqu'à l'expiration de la période de protection. Le terme du contrat de travail à durée déterminée est intervenu le 14 février 2014. La fin de la période triennale de révision de la liste des conseillers du salarié arrêtée par l'autorité administrative est intervenue le 31 août 2015, ce dont il se déduit que l'indemnité pour violation du statut protecteur de M. [Q] s'élève à la somme de 67.840 ? correspondant aux salaires qu'il avait vocation à percevoir durant cette période. Sur le préjudice résultant de la rupture abusive du contrat de travail ; En l'absence d'autorisation de la part de l'inspection du travail, la relation de travail est réputée se poursuivre sous le régime du contrat de travail à durée indéterminée de sorte que sa rupture est nulle. M. [Q] peut donc prétendre à une indemnité réparant le préjudice résultant du caractère illicite de la rupture qui, compte tenu de son ancienneté au sein de l'entreprise, est évaluée à la somme de 4 000 ?. Il peut également prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis de 11 000 ? bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et à celle de 1 100 ? bruts au titre des congés payés y afférents » ;
1. ALORS QUE l'article L. 2412-1 du code du travail, auquel renvoie l'article L. 2421-8 relatif à la « procédure applicable au salarié titulaire d'un contrat à durée déterminée », ne mentionne pas, parmi les mandats ouvrant droit à la protection, celui de conseiller du salarié ; que, pour considérer que Monsieur [Q], titulaire d'un contrat à durée déterminée pour la période du 10 juin 2013 au 14 février 2014, aurait dû, eu égard à son mandat de conseiller du salarié, bénéficier d'un statut protecteur, dire que la cessation des relations contractuelles intervenue par l'échéance du terme sans saisine préalable de l'administration du travail était nulle, et condamner l'exposante au paiement de sommes à titre de dommages et intérêts pour méconnaissance du statut protecteur, rupture abusive, indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, la cour d'appel a successivement retenu que le conseiller du salarié bénéficiait d'une protection contre le licenciement, ce tant en application de l'actuel code du travail que des dispositions antérieures à sa recodification, l'ancien article L. 122-14-16 du code du travail renvoyant à cet égard à la protection, prévue par l'article L. 412-18 dont bénéficiaient les délégués syndicaux, que l'article L. 412-18 soumettait à autorisation de l'inspecteur du travail, non seulement le licenciement, mais aussi l'interruption du contrat de mission par l'entrepreneur de travail temporaire et la notification du non-renouvellement de la mission, que si les dispositions relatives au conseiller du salarié ne faisaient plus référence à la protection dont bénéficiaient les délégués syndicaux, la recodification étant intervenue à droit constant, le conseiller du salarié bénéficiait toujours de la même protection, et enfin qu'aux termes de l'article L. 2421-8 du code du travail, l'arrivée du terme du contrat à durée déterminée n'entraînait la rupture de ce dernier qu'après saisine de l'inspection du travail en application de l'article L. 2412-1, peu important que cet article, énumérant la liste des mandats permettant de bénéficier d'une telle protection, ne cite pas celui de conseiller du salarié ; qu'en statuant ainsi, par référence à des dispositions portant sur le licenciement ou la rupture de contrats de mission, les seules dispositions relatives au contrat à durée déterminée renvoyant à une liste qui, ainsi qu'elle l'a relevé, ne mentionnaient pas le mandat de conseiller du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 2421-8, L. 2412-1, L. 2411-1, et L. 1232-14 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige ;
2. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en admettant même que l'on puisse se référer, ainsi que l'a retenu la cour d'appel, aux dispositions applicables aux délégués syndicaux pour déterminer la protection dont bénéficient les conseillers des salariés, l'article L. 2412-2 du code du travail n'impose d'autorisation de l'administration du travail qu'en cas de rupture du contrat à durée déterminée avant l'échéance de son terme ou de non-renouvellement du contrat à durée déterminée comportant une clause de renouvellement ; qu'en l'espèce, il était constant que le contrat de Monsieur [Q] n'avait pas été rompu avant l'échéance du terme et la cour d'appel a constaté qu'il ne comportait pas de clause de renouvellement ; qu'en statuant néanmoins comme elle l'a fait, elle a violé les articles L. 2421-8 et L. 2412-1, L. 2412-2, L. 2411-1, et L. 1232-14 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige ;
3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'une fraude du salarié peut le priver de la protection attachée à son mandat ; qu'en l'espèce, l'exposante avait fait valoir qu'il revenait à Monsieur [Q], qui occupait le poste d'administration du personnel et paie, de gérer l'arrivée à terme des contrats à durée déterminée, y compris le sien, et qu'il avait fait preuve d'une totale déloyauté en s'abstenant de demander lui-même l'autorisation de l'inspecteur du travail, ne faisant valoir son statut de salarié protégé que dans le cadre du contentieux prud'homal engagé contre son employeur ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur la fraude ainsi invoquée, laquelle était de nature à priver le salarié du bénéfice de la protection revendiquée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR condamné la société LABORATOIRES JUVA SANTE à payer à Monsieur [Q] la somme de 67.840 ? à titre de dommages et intérêts pour violation de son statut protecteur de conseiller du salarié ;
AUX MOTIFS QUE « (...) M. [Q] peut légitimement prétendre à une indemnité forfaitaire spécifique au titre de la violation du statut protecteur qui est égale aux salaires que le salarié aurait dû percevoir jusqu'à l'expiration de la période de protection. Le terme du contrat de travail à durée déterminée est intervenu le 14 février 2014. La fin de la période triennale de révision de la liste des conseillers du salarié arrêtée par l'autorité administrative est intervenue le 31 août 2015, ce dont il se déduit que l'indemnité pour violation du statut protecteur de M. [Q] s'élève à la somme de 67.840 ? correspondant aux salaires qu'il avait vocation à percevoir durant cette période » ;
ALORS QUE l'indemnité pour méconnaissance du statut protecteur à laquelle peut, le cas échéant, prétendre le conseiller du salarié, ne peut excéder 12 mois de salaires, correspondant à la période de protection prévue par l'article L. 2411-3 du code du travail ; qu'en allouant à Monsieur [Q] la somme de 67.840 ? correspondant aux salaires qu'il aurait perçus entre le 14 février 2014 et le 31 août 2015, la cour d'appel a violé les articles L. 2412-1 et L. 2421-8 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable, ensemble son article L. 2411-3.