Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Nice à lui verser la somme provisionnelle de 200 000 euros, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis à la suite de l'intervention chirurgicale en date du 21 avril 2000, outre la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice d'impréparation et de prescrire une mesure d'expertise afin d'évaluer l'ensemble des préjudices.
La caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes n'a fait valoir aucune demande au titre de ses débours mais a sollicité la mise à la charge du CHRU de Nice de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1501996 du 12 décembre 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 31 janvier 2018 et le 12 décembre 2018, M.A..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 12 décembre 2017 ;
2°) de condamner le CHRU de Nice à lui verser la somme provisionnelle de 200 000 euros, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis à la suite de l'intervention chirurgicale en date du 21 avril 2000, outre la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice d'impréparation, avec intérêts de droit à la date de la demande devant le tribunal, et d'ordonner la réalisation d'une mesure d'expertise dont les frais seront mis à la charge de l'établissement ;
3°) de mettre à la charge du CHRU de Nice la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il remplit les conditions de l'indemnisation au titre d'un accident médical non fautif intervenu avant le 5 septembre 2001, dès lors, en particulier, que l'exécution de l'acte est la cause directe du dommage qui est sans rapport avec son état initial comme avec l'évolution prévisible de cet état ;
- à titre subsidiaire, la perte de chance d'échapper au dommage survenu doit être réparée, dès lors qu'il n'a pas été informé du risque de radionécrose cérébrale ;
- il a subi un préjudice d'impréparation.
Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés le 19 novembre 2018 et le 18 avril 2019, le CHRU de Nice et la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), représentés par MeE..., concluent au rejet de la requête.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
Deux mémoires présentés pour M. A...ont été enregistrés le 15 mai 2019 et le 17 mai 2019 après la clôture immédiate de l'instruction intervenue le 15 mai 2019 en application du dernier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, notamment son article 101 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Jorda-Lecroq,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de MeF..., représentant M. A...et de MeD..., représentant le centre hospitalier régional universitaire de Nice et la Société hospitalière d'assurances mutuelles.
Considérant ce qui suit :
1. D'une part, lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue, mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y serait particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité.
2. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal de grande instance de Nice du 4 février 2013, que M.A..., atteint d'une malformation artério-veineuse temporo-pariétale interne droite, a fait l'objet le 8 mars 1995 d'un premier traitement par radiothérapie stéréotaxique. En l'absence de réduction totale de la malformation, une seconde séance de radiothérapie stéréotaxique, avec un dosage supérieur, a été effectuée le 21 avril 2000 au CHRU de Nice et a abouti à l'anéantissement de cette malformation. Toutefois, M. A... a présenté quelques mois plus tard des déficits neurologiques. Il est atteint d'une hémiparésie gauche et d'une hémianopsie latérale homonyme gauche du fait d'une radionécrose cérébrale. L'indication thérapeutique de l'intervention du 21 avril 2000 était justifiée. La réalisation de cette intervention a été conforme aux règles de l'art. Le risque de radionécrose cérébrale qui s'est réalisé, dont le taux de survenance est au moins de 3 % et était majoré dès lors qu'il s'agissait d'une seconde irradiation stéréotaxique, ne présentait toutefois pas un caractère exceptionnel. Par ailleurs, les dommages survenus ne sont pas, en dépit de la réduction totale de la malformation à l'issue de l'intervention du 21 avril 2000, sans rapport avec l'état initial du requérant ou avec son évolution prévisible, dès lors qu'une malformation artério-veineuse encéphalique telle que celle dont M. A...était atteint présente un risque hémorragique pouvant entraîner de graves complications neurologiques. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté la responsabilité sans faute du CHRU de Nice.
3. D'autre part, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé. Si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation. Un manquement des médecins à leur obligation d'information engage la responsabilité de l'hôpital dans la mesure où il a privé le patient d'une chance de se soustraire au risque lié à l'intervention en refusant qu'elle soit pratiquée. C'est seulement dans le cas où l'intervention était impérieusement requise, en sorte que le patient ne disposait d'aucune possibilité raisonnable de refus, que les juges du fond peuvent nier l'existence d'une perte de chance. La preuve de la délivrance de l'information peut être apportée par tout moyen.
4. En outre, indépendamment de la perte d'une chance de refuser l'intervention, le manquement des médecins à leur obligation d'informer le patient des risques courus ouvre pour l'intéressé, lorsque ces risques se réalisent, le droit d'obtenir réparation des troubles qu'il a subis du fait qu'il n'a pas pu se préparer à cette éventualité. S'il appartient au patient d'établir la réalité et l'ampleur des préjudices qui résultent du fait qu'il n'a pas pu prendre certaines dispositions personnelles dans l'éventualité d'un accident, la souffrance morale qu'il a endurée lorsqu'il a découvert, sans y avoir été préparé, les conséquences de l'intervention doit, quant à elle, être présumée.
5. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que M. A...a été informé des risques liés à la réalisation d'une seconde intervention de radiothérapie stéréotaxique, laquelle a été envisagée dès 1998, lors de la consultation pré opératoire du 11 avril 2000, ainsi que cela ressort, en particulier, du contenu du courrier établi par le médecin l'ayant reçu reproduit dans ce rapport, faisant état de cette information, étant précisé que le risque de radionécrose constitue le risque le plus connu de l'irradiation stéréotaxique et était nécessairement majoré s'agissant d'une seconde irradiation ainsi que cela a été exposé au point 2. Dès lors, en dépit de l'absence de document signé par le requérant relatif à cette information, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu qu'il n'était pas fondé à rechercher la responsabilité du CHRU de Nice pour défaut d'information, ni du fait d'une perte de chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé, ni au titre du préjudice d'impréparation.
6. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de prescrire la réalisation d'une mesure d'expertise, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au centre hospitalier régional universitaire de Nice, à la Société hospitalière d'assurances mutuelles et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 13 juin 2019, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente assesseure,
- MmeG..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 4 juillet 2019.
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N° 18MA00447
kp