Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association " Le Chabot ", l'association " Comité écologique ariégeois ", Mme P... Q..., Mme J... U..., M. O... H..., M. A... R... K..., M. F... G..., M. T... M..., M. N... D... et M. B... E... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 juin 2009 par lequel le préfet de l'Ariège a autorisé la SAS Denjean Granulats à exploiter une carrière de sables et graviers sur le territoire de la commune de Saverdun. Mme L... I... et M. S... C... sont intervenus à l'instance au soutien de cette demande.
Par un jugement n° 0905635 du 24 avril 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté l'ensemble de ces demandes.
Par un arrêt no 14BX01825, 14BX01921, 14BX01922 du 16 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé, d'une part, par M. M..., M. R... K..., M. D..., d'autre part, par Mme I... et M. C..., enfin par l'association pour la protection des rivières Ariégeoises, l'association le comité écologique ariégeois, Mme Q..., M. H..., M. K..., M. G... et M. E..., contre ce jugement.
Par une décision n° 408182 du 16 mars 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par Mme L... I..., M. S... C..., M. T... M..., M. A... R... K..., M. N... D..., M. B... E... et M. F... G..., annulé l'arrêt du 16 décembre 2016 en tant qu'il statue sur l'appel de M. M..., M. R... K..., M. D..., M. E... et M. G... et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 20 juin 2014, le 9 avril 2015, le 12 mai 2015 et le 25 novembre 2016, ainsi que par les mémoires récapitulatifs enregistrés le 9 novembre 2018, le 14 décembre 2018, le 14 février 2019 et le 3 avril 2019, M. M..., M. R... K... et M. D..., représentés par Me Paul puis par Me Montrichard et Me Ciaudo, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 avril 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 juin 2009 par lequel le préfet de l'Ariège a autorisé la SAS Denjean Granulats à exploiter une carrière de sables et graviers sur le territoire de la commune de Saverdun, aux lieux-dits " La Borde Grande ", " La Barthale " et " Saint-Paul " ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :
- l'autorisation a été délivrée par une autorité incompétente dès lors que, l'exploitation de la carrière ayant des effets sur plusieurs départements, il revenait au ministre de l'environnement de la délivrer ;
- le dossier de demande d'autorisation d'exploiter est affecté de nombreuses lacunes ; il ne comporte pas les justifications des capacités techniques et financières de l'exploitant ; il ne comporte pas la justification de ce qu'une demande de permis de construire a été déposée parallèlement à la demande d'autorisation d'exploiter ; il ne comporte pas de plan d'ensemble à l'échelle 1/2500 et le plan à l'échelle 1/200 indiquant les dispositions projetées de l'installation ni de cartographie des risques significatifs dans le résumé non technique ; l'absence de production de ces cartes a conduit à une mauvaise information du public et de l'administration ; la société n'a pas non plus justifié qu'elle est le propriétaire du terrain d'assiette du projet ou qu'elle a obtenu le droit de l'exploiter notamment s'agissant des parcelles 1913, et 3293 qui figurent dans la demande et alors que le bornage prévu par l'arrêté préfectoral d'autorisation n'a toujours pas été réalisé ;
- l'étude de dangers, qui se borne à une description généraliste est insuffisante s'agissant des conséquences concrètes des pollutions accidentelles sur les terres et les eaux consécutive à la circulation des engins et au stockage d'hydrocarbures et en l'absence de toute réalisation des tests de lixiviation des déchets ;
- l'étude d'impact jointe à la demande d'autorisation comporte de nombreuses lacunes : l'étude d'impact propose une présentation insuffisante de l'état initial du site et de son environnement ; elle ne comporte pas une étude acoustique suffisante en l'absence d'étude phoniques détaillées notamment en ce qui concerne les horaires de passage des camions ou bulldozers de 7h à 21h et d'étude des vibrations et alors que l'étude d'impact concerne une extraction demandée de 500 000 tonnes alors que l'autorisation porte sur 700 000 tonnes soit 40% de plus ces informations n'ayant pas été fournies lors de l'enquête publique ; l'extraction réellement pratiquée est supérieure de 526% à ce qui est prévu dans l'étude d'impact qui a été volontairement fabriquée dans le but de tromper l'administration et le public sur les nuisances réelles de l'exploitation ; elle est lacunaire s'agissant des eaux souterraines et superficielles notamment en l'absence d'étude de l'impact sur la nappe phréatique du remblayage de matériaux polluants divers, d'absence de recensement de la source de la Barthale utilisée pour l'eau potable et du ruisseau du Rioufol qui traverse le projet, d'absence d'étude de l'impact de l'exploitation sur la disponibilité de la ressource en eau dans la zone d'impact alors que les puits et sources constituent les seuls points d'alimentation en eau potable des habitations, l'absence de suivi dans les eaux souterraines des métaux lourds remblayés ; elle ne comprend aucun exposé de l'impact de l'exploitation de la carrière sur les zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) et sur la zone Natura 2000 dans lesquelles elle se situe ou situées à proximité immédiate en violation de l'article R. 414-19 du code de l'environnement alors qu'est avéré un risque de pollution et de destruction des habitats naturels des espèces protégés ; elle s'avère gravement insuffisante en ce qu'elle n'envisage aucunement les dangers cumulés de la carrière dont l'exploitation est autorisée et des autres carrières et de la décharge intercommunale implantées à proximité ; elle est insuffisante en ce qu'elle ne précise pas le statut de protection de plusieurs espèces protégées et n'envisage aucune mesure de protection.
En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :
- en accordant l'autorisation d'exploiter litigieuse, le Préfet de l'Ariège a commis une erreur d'appréciation et méconnu les dispositions normatives imposant la préservation de l'environnement, et plus spécifiquement de la ressource en eau, ainsi que le principe de précaution ; compte tenu de l'ampleur de la pollution constatée sur place, un transport sur les lieux serait opportun ; les atteintes quantitatives à la ressource en eau résultant de l'exploitation de la carrière litigieuse sont incontestables et résultent notamment des analyses d'un hydrogéologue d'octobre 2018 ; les pièces concordantes du dossier établissent également les impacts qualitatifs négatifs de l'exploitation de la carrière litigieuse sur la ressource en eau et notamment sur les niveaux de la ressource en eau ; l'arrêté préfectoral complémentaire du 1er août 2016 demandant la mise en place d'un réseau renforcé et une surveillance complémentaire relative aux niveaux d'eau est insuffisant et se réfère à des normes de référence relative aux eaux brutes et non aux eaux potables comme prévu dans le dossier d'autorisation ; la validation par l'administration des piézomètres constitutifs du dispositif de surveillance des niveaux des eaux et de contrôle de la diffusion des matières polluantes prévu par l'arrêté de 2016 n'a jamais été produite ; le préfet n'a donc pas prescrit les mesures techniques suffisantes pour protéger les intérêts visés par les articles L. 211-1, L. 511-1 et n'a pas apprécié correctement les exigences découlant de l'article L. 512-3 du même code ; il y a lieu pour la cour de demander la transmission par l'administration des résultats de l'évolution du niveau de la nappe d'eau que le préfet soutient effectuer chaque année et qu'il n'a jamais voulu communiquer ; les experts hydrologues mandatés par la société Denjean s'agissant du niveau des eaux souterraines démontrent que les études Hydroexpert présentées par cette société à partir desquelles l'Etat a autorisé le projet ne sont pas représentatives, pas correctement calées et grevées d'un calage artéfactuel d'origine géologique donc insuffisantes ; les études hydrologiques de la société Denjean démontre une baisse du niveau de la nappe alluviale de 7 mètres dont le niveau ne présente en principe qu'une variation de 2 mètres ; la diminution des niveaux piézométriques relevée dans les expertises résulte des activités d'extraction de la carrière qui augmentent la perte d'eau et par le remblayage ; la carrière perturbe globalement les écoulements de la nappe dans le secteur de Saverdun comme l'a admis le préfet en 2017 et comme l'admet la société à propos des remblais en eau qui a implanté des drains traversant les remblais imperméables sans aucune efficacité et a tenté de réalimenter la nappe à partir de mares de plus en plus vastes alimentées par de l'eau de l'Ariège à partir de réseaux d'irrigation ce qui ne constitue pas une mesure de compensation durable ; le lien entre l'activité de la carrière et la réduction du bon écoulement de la ressource en eau est avéré ; l'analyse des études hydrologiques démontre la pollution de la ressource en eau à proximité de la carrière par des hydrocarbures, des sulfates, des éléments métalliques tels l'aluminium et des bactéries, affectant la potabilité de l'eau, et entrainant le dépérissement de la ripisylve de l'Ariège et la préfecture n'a jamais mis en œuvre les dispositions du protocole sur le remblaiement des carrières alluvionnaires de l'Ariège qui prévoient des sondages pour déterminer l'origine des pollutions des plans d'eau qui sont les plus élevées dans les plans d'eau de la carrière où sont stockés les déchets ; ces polluants n'existaient pas avant la carrière, n'existent pas en amont du site et démontrent le lien avec l'activité de la carrière ; cette pollution apparait dans les résultats des analyses d'autocontrôle du carrier ;
- il doit être fait application du principe de précaution pour prévenir une pollution des eaux et des sols entrainant des dommages irréversibles dès lors que le réseau de piézomètres de contrôle de la diffusion de polluants prévu initialement et renforcé par un seul piézomètre n'a fait l'objet d'aucune validation qui n'est pas produite par la société Denjean ;
- le PLU de la commune de Saverdun autorisant les activités de carrières en zone A dans le secteur Ac est entaché d'illégalité au regard des dispositions de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme ; l'affectation du site à usage de loisirs à l'issue de l'exploitation ne correspond pas à la vocation agricole des parcelles ; aucun protocole d'accord n'existe entre la commune et la société Denjean sur la transformation du site en espace de loisirs à la fin de l'exploitation ;
- le PLU de Saverdun méconnait les dispositions du SCOT de la vallée de l'Ariège qui impose le maintien de la destination agricole des terrains agricoles et le classement en zone à urbaniser des carrières existantes ; à la date à laquelle la cour statue, le PLU qui aurait dû être mis en compatibilité avec le SCOT approuvé en 2015 en application de l'article L. 153-49 du code de l'urbanisme est illégal ;
- le PLU révisé le 30 juin 2008 est illégal en ce qu'il a autorisé l'ouverture à l'urbanisation d'un nouveau secteur alors que la commune n'était couverte par aucun SCOT et soumise à l'article L. 122 -2 devenu L. 142-4 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté en litige méconnait le schéma départemental des carrières révisé le 24 décembre 2013.
Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés le 25 juin 2014, le 4 juillet 2014, le 11 mai 2015, le 23 novembre 2016, le 3 septembre 2018 et le 12 novembre 2018, et par mémoires récapitulatifs enregistrés le 24 décembre 2018, le 12 mars 2019 et le 22 mars 2019, et par mémoire complémentaire du 20 janvier 2021, l'association pour la protection des rivières ariégeoises (" le Chabot "), l'association le comité écologique ariégeois, M. B... E..., M. N... D..., Mme J... U... et M. F... G..., représentés par Me Terrasse, demandent à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 29 juin 2009 par lequel le préfet de l'Ariège a autorisé la SAS Denjean Granulats à exploiter une carrière de sables et de graviers et une installation de traitement des matériaux sur le territoire de la commune de Saverdun, aux lieux-dits " La Borde Grande ", " La Barthale " et " Saint-Paul " ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leurs mémoires et pièces sont recevables ; l'arrêt de la cour du 16 décembre 2016 n'est pas devenu définitif à leur endroit ;
- l'article R. 512-8 du code de l'environnement est méconnu en ce que le contenu de l'étude d'impact est insuffisant : le domaine de La Barthale a été totalement absent de l'étude en ce compris la source de la Barthale utilisée pour l'eau potable qui n'était pas recensée dans l'étude de modélisation hydrogéologique de la nappe permettant l'analyse des impacts du projet ; le ruisseau du Rioufol qui traverse la carrière n'était pas étudié, ni même mentionné ; l'étude ne comportait aucune étude hydrogéologique sérieuse des impacts de l'activité sur les eaux souterraines et superficielles ce qui a nui à l'information complète de la population et ont été de nature à exercer une influence sur la décision prise ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du principe de précaution compte tenu du faisceau d'indices concordants que le lien de causalité entre l'abaissement des niveaux de la nappe, les pollutions constatées dans le secteur et l'exploitation de la carrière est suffisant pour caractériser une insuffisance des prescriptions et justifier l'annulation de l'arrêté ou une expertise contradictoire ;
- à défaut d'annulation de l'arrêté, il y a lieu de suspendre l'activité le temps qu'une expertise indépendante mise à la charge de l'exploitant aux fins d'identifier les sources de pollution et de désordre et de définir les solutions adaptées pour éviter leur aggravation ;
- les prescriptions de l'arrêté de 2009 et de l'arrêté complémentaire de 2016 sont insuffisantes compte tenu des pollutions constatées, en l'absence de toute mesure à prendre pour remédier au phénomène de tarissement, de l'instauration a posteriori d'un réseau de surveillance, de l'absence de réponse aux accidents ; cette insuffisance est établie en 2017 par le préfet qui précise qu'une expertise du BRGM serait en cours et des demandes d'études à la société pour rétablir l'écoulement des eaux sans qu'aucune mesure ne soit intervenue depuis ; la société ne respecte pas l'arrêté complémentaire de 2016 ; des éléments émanant de l'administration démontre l'impact structurel de la carrière sur la nappe alluviale après 8 ans d'exploitation, notamment l'arrêté de 2016 et les constats d'huissier de baisse des débits des points d'eau et le rapport d'inspection de la DREAL de juin 2016 ; les éléments produits par la société Denjean ne remettent pas en cause la baisse de la nappe liée à la carrière ; elle démontre les pollutions, notamment en aluminium, de la ressource en eau par la production des analyses réalisées par le laboratoire départemental de la Haute-Garonne depuis 2016, compte tenu du remblaiement par des matériaux notamment en béton qui ne sont pas inertes ; le rapport du conservatoire botanique national des Pyrénées, établissement public agréé, de mai 2016 confirme cette pollution et son impact sur la végétation ; les analyses réalisées en septembre 2018 dans le rapport Ectare démontrent une pollution rendant l'eau impropre à la consommation humaine pour les riverains de l'exploitation qui ne sont pas raccordés au réseau d'eau potable et sont dépendants de la ressource en eau dont ils disposaient avant l'exploitation ; les risques résultant de l'exploitation de la carrière en raison de l'abaissement de la nappe alluviale et de la pollution de l'eau inquiètent les acteurs locaux notamment la commission d'enquête publique sur l'adoption du plan régional de prévention et de gestion des déchets et au regard d'une note de synthèse du BRGM sur l'impact des gravières alluvionnaires sur les eaux souterraines ainsi que de l'impact de l'exploitation de la gravière sur la nappe phréatique en basse vallée de l'Ariège et sur la qualité des terres après l'exploitation.
Par des mémoires en défense enregistrés le 5 décembre 2014, le 6 mai 2015, le 12 juin 2015, le 1er septembre 2015, le 4 juin 2018, le 12 septembre 2018, le 28 septembre 2018 et le 15 octobre 2018, et par mémoires récapitulatifs enregistrés le 10 décembre 2018, le 15 février 2019, le 21 mars 2019 et le 21 juin 2021, et par mémoires complémentaires du 27 novembre 2020 et du 19 mars 2021, la société Denjean Granulats, représentée par Me Larrouy-Castéra, conclut au rejet des demandes de l'ensemble des appelants et de l'intervenante, à titre subsidiaire à l'application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement et au sursis à statuer, et à ce qu'il soit mis solidairement à la charge des appelants la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les associations pour la protection des rivières ariégeoises (" le Chabot ") et l'association le comité écologique ariégeois, ne sont pas recevables à agir dans la présente instance ;
- les demandes de frais irrépétibles émanant de l'APROVA intervenante sont irrecevables ;
- la demande de transport sur les lieux est inutile et dilatoire ;
- le principe de précaution ne s'applique pas en l'espèce ; les risques sur la ressource en eau mis en exergue par les appelants sont suffisamment identifiés et sont évoqués de façon complète par les éléments composant le dossier de demande d'autorisation et par l'étude d'impact ; par ailleurs, il n'existe pas d'incertitude scientifiques quant à l'existence ou la portée des risques dont s'agit ; la société conteste être à l'origine de l'épuisement de la ressource en eau ou d'une quelconque pollution ; l'existence d'une responsabilité de sa part dans la survenance du risque n'est pas démontrée par les requérants ;
- les prétendues atteintes à la ressource en eau protégée par l'article L. 511-1 du code de l'environnement ne sont pas démontrées : toutes les prescriptions techniques nécessaires ont été prises par le préfet afin de contrôler un éventuel impact de la carrière sur la nappe conformément à l'article L. 512-3 du code de l'environnement ; l'article 22 de l'arrêté interdit à l'exploitant de nuire au bon fonctionnement de la nappe et encadre les types de matériaux qui peuvent être utilisés en remblai ; l'article 30.3 prescrit la mise en place d'une surveillance des eaux souterraines par un suivi hydrogéologique qui s'appuie sur un réseau de piézomètres ; ce dispositif a été renforcé par l'arrêté complémentaire du 1er août 2016 ; il n'est pas démontré que ces prescriptions seraient insuffisantes d'autant que les relevés transmis à l'administration n'ont pas relevé d'anormalité particulière imputable à l'exploitation de la carrière ; il n'existe pas de lien causal entre l'abaissement du niveau de la nappe et l'exploitation de la carrière alors que les données recueillies permettent de conclure que la pluviométrie est à l'origine du phénomène, la tendance actuelle à la remontée des niveaux d'eau étant liée aux récentes épisodes pluvieux ; le rapport Antéa de janvier 2018, actualisé en avril 2021, qu'elle a demandé conclut à l'absence d'abaissement global de la nappe lié à l'exploitation de la carrière et à l'absence de lien entre le tarissement de la source de La Barthale et l'exploitation de la carrière compte tenu de sa position ; les éléments produits par les requérants ne remettent pas en cause cette analyse ; les différentes études réalisées concluent à ce qu'il n'y a pas de pollution des eaux superficielles ou souterraines engendrées par la carrière ; quant aux valeurs élevées de métaux enregistrées sur les plans d'eau, lors des périodes d'exploitation, celles-ci résultent de la méthode d'analyse qui diffère entre les eaux souterraines et les eaux superficielles où la totalité des éléments recherchés sont mis en évidence et non, la seule fraction solubilisée ; elles ne peuvent provenir des matériaux de remblaiement puisque le lac vient d'être créé et n'a pas été remblayé encore et résulte de la composition du sous-sol du secteur ; elle produit l'actualisation des analyses d'eau réalisée par Ectare en avril 2021 qui démontre la conformité à la réglementation et l'absence de pollution des eaux souterraines ; la visite d'inspection du service des installations classées en février 2021 a conclu à l'absence de pollution de l'Ariège ; les études produites par les requérants confirment l'absence de pollution dans les plans d'eau ou la nappe souterraine ; le préfet n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation et a fait une exacte application des exigences découlant de l'article L. 512-3 du code de l'environnement en prescrivant les mesures techniques suffisantes pour protéger les intérêts visés par l'article L. 511-1 ;
- les autres moyens seront écartés par adoption des motifs déjà retenus par la cour dans son arrêt du 16 décembre 2016, qui n'ont pas été directement censurés par le conseil d'Etat.
Par mémoires en défense, enregistrés le 12 mai 2015, le 15 juin 2015, le 3 octobre 2018 et le 9 novembre 2018 et par un mémoire récapitulatif du 5 décembre 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet des requêtes.
Il soutient que :
- il n'est pas établi que la carrière autorisée par l'arrêté du 29 juin 2009 aurait des effets sur plusieurs départements ; le sens d'écoulement de la nappe d'accompagnement de l'Ariège au niveau de la commune de Saverdun suit un axe sud-est/ nord-est. Or, la carrière en litige se situe au sud-est de cette commune, en bordure de l'Ariège, et la commune de Calmont au nord-est. Les deux sites se situent donc d'un point de vue hydrologique sur deux axes d'écoulement parallèle. La carrière en litige ne peut donc avoir une quelconque influence sur le niveau des eaux souterraines au droit de la commune de Calmont. Ainsi, le préfet de l'Ariège était compétent pour délivrer cette autorisation ;
- s'agissant du niveau des eaux souterraines, l'activité d'extraction en elle-même n'a pas d'effet sur la quantité d'eau reçue par la nappe et n'en affecte les niveaux que de manière limitée dans le temps et dans l'espace. Par l'article 22 de l'arrêté en litige, le préfet a imposé les prescriptions de nature à réduire l'inconvénient de perte de perméabilité des terrains liés au remblaiement au niveau le plus faible possible de sorte qu'il ne puisse nuire à l'écoulement global de la nappe d'accompagnement de l'Ariège. Un protocole de remblaiement des carrières alluvionnaires a été signé en janvier 2014 ; les contrôles réalisés depuis n'ont pas détecté de non-conformités significatives dans l'admission et la gestion des déchets inertes sur la gravière ; l'exploitation fait l'objet d'un suivi des hauteurs d'eau qui montre que la baisse jusqu'en 2017 a été suivie d'une hausse en 2018 rattrapant les niveaux de 2013 et que les fluctuations sont liées aux conditions météorologiques majoritairement ; Par ailleurs aucune disposition réglementaire n'impose à l'autorité compétente de fixer un critère quantitatif en matière de niveau piézométrique des eaux souterraines ;
- s'agissant de la qualité des eaux souterraines, l'article 30.3 de l'arrêté en litige impose l'analyse dans la nappe d'accompagnement de l'Ariège sur six points de mesures répartis en amont et en aval de l'exploitation, des paramètres généraux de pollution. Ces dispositions ont été renforcées par le protocole de remblaiement du 4 janvier 2014 et par un arrêté complémentaire du 1er août 2016 qui ont respectivement imposé l'élargissement de la palette d'analyse aux métaux et composés organiques et le renforcement du réseau de surveillance piézométrique. Les dispositions du code de la santé publique invoquées par les requérants ne sont pas applicables faute pour la source alimentant l'habitation située au lieu-dit La Barthale de disposer du statut de captage pour l'alimentation en eau potable. Enfin, les analyses réalisées par l'exploitant sur le fondement des normes de qualité qui lui sont opposables ne montrent pas de pollution chronique des eaux de la nappe.
Par mémoires en intervention volontaire, enregistrés le 9 août 2018, le 2 octobre 2018 et le 17 octobre 2018, et par mémoires récapitulatifs enregistrés le 14 décembre 2018 et le 4 avril 2019, l'association de protection de la vallée de l'Ariège et de sa nappe phréatique (APROVA), représentée par la SCP d'avocats Goguyer, Lalande, Degiovanni, demande à la cour :
1°) de la déclarer recevable en son intervention ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 juin 2009 par lequel le préfet de l'Ariège a autorisé la SAS Denjean Granulats à exploiter une carrière de sables et graviers sur le territoire de la commune de Saverdun ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle justifie, par son objet statutaire et son action, d'un intérêt de nature à la rendre recevable à intervenir ;
- son mémoire en intervention, qui contient conclusions et moyens, est recevable.
En ce qui concerne la légalité externe :
- l'autorisation a été délivrée par une autorité incompétente, dès lors que l'exploitation de la carrière a des effets sur plusieurs départements ;
- le dossier de demande d'autorisation d'exploiter est affecté de nombreuses lacunes ; il ne comporte pas de plan d'ensemble à l'échelle 1/2500 et le plan à l'échelle 1/200 indiquant les dispositions projetées de l'installation ;
- l'étude d'impact jointe à la demande d'autorisation comporte de nombreuses lacunes ; elle indique à tort que le plan local d'urbanisme sera modifié pendant l'instruction de la demande afin de permettre l'exploitation de la carrière ; l'étude d'impact n'analyse pas suffisamment le risque d'inondation auquel est exposé le site car elle ne mentionne pas le plan de prévention des risques d'inondation qui couvre le territoire communal ; elle étudie insuffisamment l'état initial du site en ne précisant pas que la carrière était en partie située sur un espace boisé remarquable ; l'étude d'impact minore les conséquences du projet sur la propriété privée constituée par le château de La Barthale, ne procède pas à un relevé exhaustif du voisinage et du patrimoine proche et ignore les sources et puits présents aux alentours du site ; l'analyse hydrogéologique contenue dans l'étude d'impact est trop succincte faute d'indiquer l'utilisation et le statut des grandes masses d'eau du secteur et alors que les propriétés proches du site sont alimentées en eau par des puits et des sources ; les prescriptions relatives à la surveillance des eaux souterraines sont insuffisantes ; le protocole de surveillance des sources est déficient ; l'étude ne comprend pas d'analyse sérieuse des protections environnementales instituées dans le secteur de la carrière en se bornant à évoquer une ZNIEFF de type II ; l'étude d'impact mentionne une espèce protégée figurant en liste rouge, ce qui aurait dû conduire au dépôt d'une demande de dérogation au titre des espèces protégées ; l'étude d'impact ne comporte pas de relevé exhaustif et représentatif de la faune et de la flore présente sur le site de la carrière ; en outre, le relevé auquel il a été procédé est lacunaire ; l'étude d'impact analyse de manière insatisfaisante les effets du projet sur son environnement en ce qui concerne la question des déchets devant être immergés dans la nappe phréatique et sur l'existence de remblais constitués à l'aide de ces déchets ; en particulier, elle ne traite pas de la pollution de la nature par des hydrocarbures et des substances minérales ; aucune analyse des incidences de la carrière sur la zone Natura 2000 n'a été faite ; les impacts de l'exploitation sur la faune et sur la flore ont été mal étudiés car une partie d'entre elles a été omise dans l'étude tandis que la méthodologie mise en œuvre pour les recenser est contestable ; aucune analyse de l'impact du projet sur l'espèce protégé Agrion de Mercure n'apparait dans l'étude ; elle n'a rien prévu sur le déplacement de la ligne téléphonique qui n'a pas été recensée par la demande et qui traverse le site d'exploitation ; l'étude d'impact ne contient aucune mesure compensatoire des effets du projet sur la faune et la flore ; l'aménagement prévu de lacs aura une influence néfaste sur la stabilité des sols ;
- aucune étude n'a été menée quant au tracé des tapis de transport des matériaux qui coupe la route C 9 ni en ce qui concerne la modification de l'accès à la carrière par un rond-point ;
- l'étude de dangers jointe à la demande d'autorisation est insuffisante en ce qui concerne la description des dispositifs destinés à protéger la nappe phréatique utilisée pour l'alimentation en eau potable des riverains ;
- le dossier de demande d'autorisation ne justifie pas de la compatibilité du projet par rapport au schéma départemental des carrières car le pétitionnaire ne dispose d'aucune possibilité de transport des granulats par voie ferrée alors que ce transport est privilégié par ledit schéma ;
- le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur sont insuffisamment motivés ; celui-ci ne s'est livré à aucune analyse de l'ensemble des observations formulées par le public et s'est contenté d'y répondre en quelques lignes ;
- la publicité de l'enquête publique est irrégulière en raison de l'insuffisance de l'information par voie de publication dans les journaux ; en effet, l'avis d'enquête publique n'a pas été publié de nouveau au cours des huit premiers jours de l'enquête publique ;
- des modifications substantielles ont été apportées au projet après la fin de l'enquête publique, ce qui aurait dû conduire à l'organisation d'une nouvelle enquête ;
- l'avis émis par la commission départementale de la nature, des paysages et des sites le 18 juin 2009 n'est pas motivé, ce qui entache d'irrégularité la procédure suivie.
En ce qui concerne la légalité interne :
- l'autorisation est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle a été délivrée sur la base d'un dossier incomplet ; la demande d'autorisation d'exploiter ne mentionne pas les captages d'eau potable situés à l'aval de la carrière alors que ceux-ci sont identifiés dans le schéma départemental des carrières ; le site de la carrière se situe à moins de 50 mètres des rives de l'Ariège alors que l'avis favorable de la DREAL résulte d'une information fausse de l'implantation de la carrière à un kilomètre de l'Ariège ; la DDAF ayant évoqué un impact considérable de la carrière sur l'agriculture et les paysages ; le service départemental de l'architecture et du patrimoine et la DIREN ayant enfin rendu des avis réservés ou défavorables sur le projet ; l'avis favorable de la chambre d'agriculture a été rendu alors que son président est propriétaire de terres exploitées par la carrière avec laquelle il a signé un contrat de fortage avec une forte rémunération sur la durée d'exploitation et un engagement sur le remblaiement des terres ce qui conduit à s'interroger sur son objectivité ;
- l'autorisation aurait dû être refusée dès lors qu'elle n'était pas conforme au plan local d'urbanisme communal approuvé le 30 juin 2008 ;
- l'arrêté d'autorisation méconnait l'article 1er et l'article 3 de la Charte de l'environnement.
Par ordonnance du 24 juin 2021, la clôture de l'instruction a été reportée au 20 septembre 2021.
Des pièces, présentées par l'APROVA, ont été enregistrées le 2 décembre 2021.
Vu :
- les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la Charte de l'environnement ;
- le code de l'environnement ;
- le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dominique Ferrari,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,
- et les observations de Me Larrouy-Castera, représentant la SAS Denjean Granulats, et de Me Rover, représentant l'association " Le Chabot ".
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 29 juin 2009, le préfet de l'Ariège a autorisé la société Denjean Granulats, à exploiter une carrière de sables et graviers sur le territoire de la commune de Saverdun, aux lieux-dits " La Barthale ", " La Borde Grande ", " Manaud " et " Saint-Paul " pour une production maximale annuelle de 700 000 tonnes. L'association " Le Chabot " devenue l'association " Pour la protection des rivières ariégeoises ", l'association " Comité écologique ariégeois ", Mme P... Q..., Mme J... U..., M. O... H..., M. A... R... K..., M. F... G..., M. T... M..., M. N... D... et M. B... E... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 29 juin 2009. Mme L... I... et M. S... C... sont intervenus à l'instance au soutien de cette demande. Par un jugement n° 0905635 du 24 avril 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté l'ensemble de ces demandes. Par un arrêt nos 14BX01825, 14BX01921, 14BX01922 du 16 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé, d'une part, par M. M..., M. R... K..., M. D..., d'autre part, par Mme I... et M. C..., enfin par l'association pour la protection des rivières Ariégeoises, l'association le comité écologique ariégeois, Mme Q..., M. H..., M. K..., M. G... et M. E..., contre ce jugement. Par une décision n° 408182 du 16 mars 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur saisine d'un pourvoi présenté par Mme L... I..., M. S... C..., M. T... M..., M. A... R... K..., M. N... D..., M. B... E... et M. F... G..., a annulé l'arrêt du 16 décembre 2016 en tant qu'il statue sur l'appel de M. M..., M. R... K..., M. D..., M. E... et M. G..., pour erreur de droit, et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Sur l'intervention de l'association de protection de la vallée de l'Ariège et de sa nappe phréatique (APROVA) :
2. Selon ses statuts, l'APROVA, personne morale, a été créée dans un but de " préservation de la qualité des eaux, des écoulements naturels de la nappe, protection des terres agricoles contre toute altération des eaux ou de l'air, conservation de l'activité économique et de la valeur économique des propriétés de ses adhérents " et de protection de la Basse Vallée de l'Ariège.
3. Par son objet statutaire, l'association justifie ainsi d'un intérêt de nature à rendre son intervention au soutien des appels des particuliers et associations requérantes recevable devant le juge des installations classées.
Sur la recevabilité des mémoires et des pièces produites par l'association pour la protection des rivières Ariégeoises et l'association le comité écologique ariégeois :
4. La société Denjean Granulats (SDG) soulève l'irrecevabilité des moyens et pièces exposés par les associations au motif que l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 16 décembre 2016 serait devenu définitif à leur endroit.
5. Cependant, sous réserve des cas de cassation sans renvoi et de règlement au fond prévus par l'article L. 821-2 du code de justice administrative, lorsqu'il y a cassation, la juridiction de renvoi remet les parties au litige dans la situation dans laquelle elles se trouvaient avant l'intervention de l'arrêt annulé.
6. Par ailleurs, et en tout état de cause, M. B... E..., M. N... D..., Mme J... U... et M. F... G... qui ont été déclarés recevables à agir contre l'arrêté querellé et qui ont également formé un pourvoi devant le Conseil d'Etat dans l'instance n° 408182, se sont joints à la présente procédure aux côtés des associations. Dès lors, la fin de non-recevoir sera écartée.
Sur la légalité de l'arrêté d'autorisation du 29 juin 2009 :
7. Il appartient au juge de plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier, d'une part, le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et, d'autre part, celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme à apprécier au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de délivrance de l'autorisation.
En ce qui concerne la légalité externe :
S'agissant de la compétence de l'auteur de l'acte :
8. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral (...) ". Aux termes de l'article L. 512-2 du même code : " L'autorisation prévue à l'article L. 512-1 est accordée par le préfet (...) L'autorisation est accordée par le ministre chargé des installations classées (...) dans le cas où les risques peuvent concerner plusieurs départements ou régions. Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application de l'alinéa précédent ". Aux termes de l'article R. 512-40 dudit code : " La liste des installations qui, en application de l'article L. 512-2, sont autorisées par le ministre chargé des installations classées est fixée dans la nomenclature des installations classées. ". Aux termes de l'article R. 511-9 de ce code : " La colonne "A" de l'annexe au présent article constitue la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement. ". Selon l'article 5 du décret n° 2007-1467 du 12 octobre 2007 relatif au livre V de la partie réglementaire du code de l'environnement et modifiant certaines autres dispositions de ce code : " L'annexe au décret n° 97-1204 du 19 décembre 1997 pris pour l'application à la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement du 1° de l'article 2 du décret n° 97-34 du 15 janvier 1997 relatif à la déconcentration des décisions administratives individuelles est remplacée par l'annexe ci-après : Titre 1er Liste des décisions administratives individuelles prises au titre du code de l'environnement, par le ministre chargé de l'environnement seul ou conjointement avec un ou plusieurs ministres I. - Décisions administratives individuelles prises par le ministre chargé de l'environnement conjointement avec un ou plusieurs ministres (...) II. - Décisions administratives individuelles prises par le ministre chargé de l'environnement (...) Fixation des prescriptions assortissant l'autorisation délivrée aux installations classées mentionnées à l'article L. 512-2. ".
9. Il n'est pas établi par les requérants que l'exploitation de la carrière de Saverdun engendrerait des risques pour l'environnement qui iraient au-delà du seul département de l'Ariège. En particulier, une telle circonstance ne saurait être déduite de l'existence, non loin du site d'exploitation, de zones protégées et de la rivière l'Ariège, laquelle s'écoule en direction du département de la Haute-Garonne, ou encore du fait que les matériaux extraits de la carrière seront transportés dans des départements voisins. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que seul le ministre chargé des installations classées était compétent pour délivrer l'autorisation de mise en service de la carrière de Saverdun.
S'agissant de l'insuffisance du dossier de demande d'autorisation :
10. En premier lieu, aux termes de l'article R. 512-2 du code de l'environnement : " Toute personne qui se propose de mettre en service une installation soumise à autorisation adresse, (...) une demande au préfet du département dans lequel cette installation doit être implantée. ". Aux termes de l'article R. 512-3 du même code : " La demande prévue à l'article R. 512-2 (...) mentionne (...) 5° Les capacités techniques et financières de l'exploitant (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'une demande d'autorisation de création d'une installation classée doit, à peine d'illégalité de l'autorisation, permettre à l'autorité administrative compétente d'apprécier les capacités techniques et financières du pétitionnaire à assumer l'ensemble des obligations susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
11. La demande d'autorisation décrit dans son étude d'impact (p. 13/14) les moyens techniques dont dispose le groupe Denjean, auquel appartient la société Denjean Granulats, en précisant que cette dernière est une entreprise implantée en région Midi-Pyrénées qui exploite six gisements alluvionnaires dans la vallée de la Garonne. Par ailleurs, l'étude d'impact après avoir précisé que le groupe Denjean réalisait un chiffre d'affaires de 60 millions d'euros, détaille en annexe les modalités de calcul des garanties financières conformément à l'arrêté du 9 février 2004 relatif à la détermination du montant des garanties financières de remise en état des carrières. Ainsi, le dossier de demande précise de manière suffisante les moyens techniques et financiers du pétitionnaire.
12. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 512-4 du code de l'environnement : " La demande d'autorisation est complétée dans les conditions suivantes : 1° Lorsque l'implantation d'une installation nécessite l'obtention d'un permis de construire, la demande d'autorisation doit être accompagnée ou complétée dans les dix jours suivant sa présentation par la justification du dépôt de la demande de permis de construire. (...) ". Il ressort de ces dispositions que la production de la justification de la demande de permis de construire a pour objet d'assurer la coordination de la procédure d'instruction de ce permis et de l'autorisation d'installation classée. L'absence de ces justificatifs dans le dossier soumis à l'enquête publique est sans influence sur la légalité de cette autorisation, dès lors que cette justification a été apportée avant la délivrance de l'autorisation demandée.
13. Il ressort des pièces produites par le préfet de l'Ariège devant les premiers juges que la commune de Saverdun a délivré à la société pétitionnaire le récépissé du dépôt de sa demande de permis de construire le 13 novembre 2006. Dès lors le moyen sera écarté.
14. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement : " I. - A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 2° Un plan à l'échelle de 1/2500 au minimum des abords de l'installation jusqu'à une distance qui est au moins égale au dixième du rayon d'affichage fixé dans la nomenclature des installations classées pour la rubrique dans laquelle l'installation doit être rangée, sans pouvoir être inférieure à 100 mètres. Sur ce plan sont indiqués tous bâtiments avec leur affectation, les voies de chemin de fer, les voies publiques, les points d'eau, canaux et cours d'eau ; (...) 3° Un plan d'ensemble à l'échelle de 1/200 au minimum indiquant les dispositions projetées de l'installation ainsi que, jusqu'à 35 mètres au moins de celle-ci, l'affectation des constructions et terrains avoisinants ainsi que le tracé des égouts existants. Une échelle réduite peut, à la requête du demandeur, être admise par l'administration (...) ; 8° Pour les carrières et les installations de stockage de déchets, un document attestant que le demandeur est le propriétaire du terrain ou a obtenu de celui-ci le droit de l'exploiter ou de l'utiliser. ".
15. D'une part, il ressort des pièces du dossier de première instance que la société pétitionnaire a joint à sa demande d'autorisation un plan du site d'exploitation établi à l'échelle de 1/2500. Elle a aussi fait usage de la possibilité, prévue par les dispositions précitées, de déroger à l'obligation de déposer un plan à l'échelle 1/200 en produisant deux autres plans aux échelles respectives de 1/1500 et 1/750. Il ne résulte pas de l'instruction que ces plans, qui ont été déclarés recevables par le service instructeur, auraient empêché celui-ci d'apprécier le projet, notamment en ce qui concerne le tracé du Rioufol, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 512-6 du code de l'environnement.
16. D'autre part, eu égard notamment aux obligations qui peuvent être imposées par le régime des installations classées au propriétaire du terrain en cas de dommages pour l'environnement, il incombe à l'autorité administrative, lorsque le demandeur n'est pas le propriétaire du terrain, de s'assurer de la production de l'autorisation donnée par le propriétaire, sans laquelle la demande d'autorisation ne peut être regardée comme complète, mais également de vérifier qu'elle n'est pas manifestement entachée d'irrégularité. En l'espèce, il ressort des pièces soumises aux premiers juges que le dossier de demande désignait les parcelles composant le site d'implantation de la carrière, dont certaines d'ailleurs appartenaient à la société pétitionnaire ainsi que l'identité de tous leurs propriétaires. Le dossier comportait également les attestations desdits propriétaires autorisant la société pétitionnaire à exploiter la gravière sur leurs terrains et pas seulement à remettre en état le site en fin d'exploitation. Ces attestations étaient suffisantes et permettaient au service instructeur, avec le tableau parcellaire fourni au dossier, de connaître les limites exactes du futur site d'exploitation. Par ailleurs, les appelants ne peuvent utilement se prévaloir de la circonstance, à la supposer d'ailleurs établie, que la société ne disposerait pas de la maîtrise foncière des terrains sur lesquels l'article 19 de l'arrêté du 29 juin 2009 impose l'installation de deux piézomètres dès lors qu'elle se rapporte aux conditions de mise en œuvre de cet arrêté et non au contenu du dossier de demande d'autorisation. En outre, il ne ressort pas du plan de réaménagement du site en fin d'exploitation tel qu'il figure à l'étude d'impact (p. 140) que la ferme de la Barthale serait concernée par les futurs travaux de remise en état, ce qui aurait obligé la société à obtenir l'accord de leurs propriétaires pour la réalisation desdits travaux. Par suite, le moyen tiré de ce que le dossier de demande n'était pas composé conformément aux dispositions précitées du 8° de l'article R. 512 6 doit être écarté.
17. En quatrième lieu, les appelants contestent la complétude de l'étude de dangers en faisant valoir qu'elle est insuffisante s'agissant des conséquences concrètes des pollutions accidentelles sur les terres et les eaux consécutives à la circulation des engins sur le site et au stockage d'hydrocarbures et en l'absence de toute réalisation des tests de lixiviation des déchets. A cet égard, ils invoquent l'insuffisance de l'article 22-1 de l'arrêté en litige, qui prévoit une procédure d'acceptation préalable des déchets admis en remblai en eau par l'intermédiaire de tests de lixiviation. Or, les appelants font valoir qu'aucun résultat de tests de lixiviation n'a été produit par la société Denjean, ce qui démontrerait l'insuffisance de l'étude de dangers.
18. Cependant, d'une part, l'étude de dangers jointe à la demande d'autorisation envisage (p. 208 et s.) les hypothèses d'une pollution accidentelle des sols et de la nappe phréatique consécutive à la circulation des engins sur le site et au stockage d'hydrocarbures et décrit les procédés mis en place afin d'éviter la réalisation de ce risque. D'autre part, la qualité des mesures prévues pour pallier une éventuelle libération d'hydrocarbures ne se résume pas aux seules prescriptions fixées par l'article 22-1 de l'arrêté d'autorisation. Dès lors, le non-respect de certaines prescriptions de cet article ne démontre nullement que l'étude de dangers serait incomplète et que l'autorisation du 29 juin 2009 aurait été délivrée dans des conditions irrégulières. Le moyen sera écarté.
S'agissant du contenu de l'étude d'impact :
19. Aux termes de l'article R. 512-8 du code de l'environnement : " I. - Le contenu de l'étude d'impact (...) doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. II. - Elle présente successivement : 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que sur les biens matériels et le patrimoine culturel susceptibles d'être affectés par le projet ; 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents de l'installation sur l'environnement et, en particulier, sur les sites et paysages, la faune et la flore, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'agriculture, l'hygiène, la santé, la salubrité et la sécurité publiques, sur la protection des biens matériels et du patrimoine culturel. Cette analyse précise notamment, en tant que de besoin, l'origine, la nature et la gravité des pollutions de l'air, de l'eau et des sols, le volume et le caractère polluant des déchets, le niveau acoustique des appareils qui seront employés ainsi que les vibrations qu'ils peuvent provoquer, le mode et les conditions d'approvisionnement en eau et d'utilisation de l'eau ; 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les solutions envisagées, le projet présenté a été retenu ; 4° Les mesures envisagées par le demandeur pour supprimer, limiter et, si possible, compenser les inconvénients de l'installation ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes. Ces mesures font l'objet de descriptifs précisant les dispositions d'aménagement et d'exploitation prévues et leurs caractéristiques détaillées. Ces documents indiquent les performances attendues, notamment en ce qui concerne la protection des eaux souterraines, l'épuration et l'évacuation des eaux résiduelles et des émanations gazeuses, ainsi que leur surveillance, l'élimination des déchets et résidus de l'exploitation, les conditions d'apport à l'installation des matières destinées à y être traitées, du transport des produits fabriqués et de l'utilisation rationnelle de l'énergie ; 5° Les conditions de remise en état du site après exploitation ; (...) ".
20. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
21. En premier lieu, la circonstance que l'étude d'impact indique (p. 44) que le plan local d'urbanisme de Saverdun doit être modifié au cours de l'instruction de la demande d'autorisation en vue de permettre l'implantation de la carrière, alors que cette modification est intervenue postérieurement à la délivrance de ladite autorisation, ne constitue pas une information erronée de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie. Par ailleurs, l'étude rappelait (p. 45-46) les orientations du schéma départemental des carrières et les dispositions prises pour assurer la compatibilité du projet avec ce document.
22. En deuxième lieu, l'étude d'impact rappelle (p. 44 et p. 111 et s.) les risques d'inondation auxquels la commune de Saverdun est exposée en raison des crues de l'Ariège et du Crieu et des glissements de terrains provoqués par les circulations d'eau souterraines. Ce document précise qu'aucune activité d'extractions ou projet d'implantation d'ouvrages n'est prévu sur des terrains exposés à de tels risques, lesquels se situent à la limite de l'emprise du site d'exploitation ainsi que le montre la cartographie des zones exposées figurant en annexe à l'étude d'impact. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, les développements consacrés par l'étude d'impact sur ces différents points ne sont pas insuffisants. Par ailleurs, ce document n'avait pas à comprendre l'étude G 12 exigée par le plan de prévention des risques d'inondation de la commune avant tout travaux de terrassement ou de construction d'ouvrages dès lors qu'il n'est pas démontré que les terrains d'emprise de la carrière seraient concernés par un risque naturel consécutif à des mouvements des sols.
23. En troisième lieu, l'étude d'impact fait référence, y compris dans son résumé non technique, aux carrières exploitées dans le même secteur que celle autorisée par l'arrêté du 29 juin 2009. Les vues aériennes fournies dans l'étude permettent de localiser ces carrières tandis que leurs impacts, notamment sur le réseau hydraulique, y est également décrit. Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent les requérants, ladite étude n'avait pas à étudier l'impact cumulé de la carrière autorisée avec celui des exploitations de même nature dès lors que celles-ci en sont éloignées de plusieurs dizaines de kilomètres.
24. En quatrième lieu, l'étude d'impact comporte (p. 55) une description suffisante des propriétés situées aux alentours du périmètre de la carrière. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, la propriété " La Barthale " y est mentionnée ainsi que sur le plan intitulé " contexte paysager " (p. 51) jointe à ladite étude. Enfin, l'auteur de l'étude d'impact n'était pas tenu d'y recenser dans le détail toutes les constructions existantes dans le secteur d'implantation de la carrière.
25. En cinquième lieu, l'étude d'impact indique que plusieurs campagnes de mesures de bruits ont été réalisées sur le terrain en juin et juillet 2006 afin de connaître le contexte sonore de la commune, y compris au niveau de la propriété de " La Barthale ", révélant un niveau sonore ambiant allant de 36 à 52 décibels. Les appelants contestent la fiabilité de cette étude et font valoir qu'elle ne tiendrait pas suffisamment compte du trafic routier sur et autour du site d'exploitation de la carrière. Ils estiment que la prévention des nuisances liées à la circulation de poids lourds chargés de déchets de remblais ou à l'activité de bulldozers chargeurs pour les enfouir dans la nappe phréatique à grande proximité des habitations riveraines et de leurs terrains d'agrément constitue une lacune de l'étude d'impact. A cet égard, ils soutiennent que les effets sonores et vibratoires de la circulation des camions seraient responsables de nombreuses fissures dans les habitations du voisinage. Par ailleurs, ils font également valoir que l'étude acoustique théorique a été réalisée sur la base d'une extraction demandée de 500 000 tonnes alors que le préfet a autorisé une extraction de 700 000 tonnes, soit 40 % de plus pouvant ainsi générer des nuisances additionnelles en intensité et en durée. Toutefois, d'une part, concernant les vibrations, il n'est pas démontré par les pièces versées au dossier que les fissurations de certaines habitations auraient pour origine les vibrations résultant de l'exploitation de la carrière ou de son trafic routier. D'autre part, concernant le tonnage, il résulte des pièces versées au dossier que le chiffre de 500 000 tonnes mentionné dans la demande et servant de base à l'étude acoustique, correspond au rythme moyen d'extraction annuelle, alors que le chiffre de 700 000 tonnes correspond à la production annuelle maximale sollicitée par le pétitionnaire, comme cela est indiqué dans le dossier de demande d'autorisation d'exploiter soumis à enquête publique. Dès lors, l'insuffisance de l'étude acoustique manque en fait.
26. En sixième lieu, l'étude d'impact comporte (p.66 et s.) une analyse détaillée du réseau local des eaux souterraines et superficielles, y compris de la rivière l'Ariège qui longe partiellement le site d'implantation de la carrière, ainsi que de leur qualité et de leurs usages. Cette analyse est ensuite développée dans sa partie " effets de l'exploitation " (p. 110 à 127), qui prend en compte les impacts possibles du fonctionnement de la carrière sur le milieu aquatique, mentionne les mesures d'atténuation de ces impacts ainsi que le dispositif de surveillance de la qualité des eaux, et elle est enfin complétée par des annexes réalisées par des bureaux d'études spécialisés. Par ailleurs, l'étude, contrairement aux dires des appelants, fait état de la situation particulière en matière d'approvisionnement en eau de certains riverains du site et cette situation particulière des fermes situées dans le secteur du projet de carrière, alimentées par des puits domestiques, est prise en compte dans les études hydrogéologiques. Par suite, l'étude d'impact n'est pas entachée d'insuffisances sur ces points. Enfin, les critiques portant sur le volume total des déchets inertes pouvant être accueillis sur le site, sur la nomenclature des déchets utilisés comme remblaiement pour la remise en état et sur le non-respect par l'exploitant des prescriptions relatives à l'admission des déchets inertes sur le site, portent sur l'exécution de l'arrêté contesté.
27. En septième lieu, l'étude d'impact a répertorié l'ensemble des espèces animales observées et a procédé à une énumération précise des insectes, reptiles, amphibiens, oiseaux et mammifères présents sur les lieux d'exploitation et alentours (p. 80 et 81). A ce titre, elle mentionne l'observation sur le site de l'agrion de mercure, de la grenouille verte, de la bergeronnette grise, du milan noir, et de l'hirondelle de fenêtre. Les appelants font valoir que ces espèces animales font l'objet d'une protection et font référence à l'article 3 de l'arrêté du 23 avril 2007 fixant les listes des insectes protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection qui cite " l'agrion de mercure ", à l'article 3 de l'arrêté du 22 juillet 1993 fixant la liste des amphibiens et reptiles protégés sur l'ensemble du territoire qui mentionne la " grenouille verte " et à l'article 3 de l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection qui mentionne " la bergeronnette grise, le milan noir et l'hirondelle de fenêtre ". Dès lors, ils estiment qu'une demande de dérogation au titre des espèces protégées devait être faite. Cependant, d'une part, l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés et mentionnant à ce titre la protection de la bergeronnette grise, du milan noir et de l'hirondelle de fenêtre est postérieur à l'étude d'impact et à l'autorisation d'exploiter en litige. D'autre part, s'agissant de la grenouille verte et de l'agrion de mercure, qui sont des espèces protégées depuis 1993 et 2007, l'étude mentionne que ces espèces ont été observées dans la zone de la mare artificielle située au nord de la Barthale en limite ouest du site, aux abords du périmètre de l'autorisation mais non incluse dedans (p.78, 81 et 82). L'étude indique que le maintien de cette zone en l'état est donc à prendre en compte et que la modification de cet habitat ne devra pas être accélérée par les travaux sur le site du projet. Dès lors, compte tenu de la localisation de cette mare et des mesures de protection prévues pour confiner l'exploitation derrière des merlons pour limiter la gêne pouvant être occasionnée à la faune locale, l'étude d'impact n'est pas insuffisante sur ce point et il n'y avait pas lieu de procéder à une demande de dérogation au titre des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement. En outre, l'étude d'impact précise (p.79) qu'aucun habitat d'intérêt communautaire ni aucune espèce végétale à statut particulier n'ont été recensés sur le site d'implantation du projet.
28. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 414-4 du code de l'environnement : " I. - Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après "Evaluation des incidences Natura 2000" : (...) 2° Les programmes ou projets d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations (...) ". Il est soutenu que l'étude est lacunaire quant aux impacts de l'exploitation de la carrière sur la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) et le site Natura 2000 présents à proximité de son emprise. Les appelants font valoir que compte tenu de l'impact du risque de pollution de la rivière " Ariège " et de l'atteinte qui en résulterait pour les espèces protégées dont l'habitat est situé au sein de la zone Natura 2000, située à moins de 50 mètres des pistes de circulation génératrices de risque de pollution, une étude d'incidence du projet sur le site Natura 2000 était indispensable. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'étude d'impact précise (p.74) qu'il n'existe, à l'intérieur du site d'implantation de la carrière, aucune zone de protection particulière, la zone protégée la plus proche étant la ZNIEFF de type I " l'Ariège " située à 100 mètres du projet tandis qu'une ZNIEFF de type II couvre le cours d'eau " l'Ariège " dont le lit mineur est par ailleurs inclus également dans un site Natura 2000. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que le projet en cause serait de nature à affecter de façon notable le site Natura 2000 ainsi que les deux ZNIEFF de type I et II situées à proximité. Par suite, la réalisation d'aucune étude sur les incidences du projet sur le site Natura 2000 et les deux zones naturelles d'intérêt écologique n'était requise préalablement à la délivrance de l'arrêté contesté.
29. En neuvième lieu, l'étude d'impact (p.105) n'avait pas à préciser les modalités de déplacement de la ligne électrique haute tension qui traverse les terrains du projet depuis la ferme La Barthale et qui est rendu nécessaire par le fonctionnement de la carrière. De même, il n'est aucunement démontré qu'à la date de l'arrêté du 29 juin 2009, cette exploitation était susceptible de perturber les communications téléphoniques des habitants du lieu-dit La Barthale, de sorte que l'étude d'impact n'avait pas à analyser cette question.
30. En dixième lieu, alors que l'étude d'impact consacre (p.148 à 165) un titre entier aux effets potentiels du projet sur la santé, les requérants ne démontrent pas que son contenu serait lacunaire sur ce point ou qu'il traduirait une sous-estimation des différents risques engendrés par le fonctionnement de la carrière. Par ailleurs, ce document n'avait pas à étudier la question du dépôt des déchets dans la nappe phréatique, lequel n'est aucunement prévu dans le dossier de demande d'autorisation ni d'ailleurs dans l'arrêté d'autorisation lui-même qui se borne à exiger, en son article 22.1, l'usage de déchets inertes pour remblayer la carrière en fin d'exploitation.
31. En onzième lieu, l'étude d'impact expose (p.136/137) avec une précision suffisante les raisons qui ont conduit le pétitionnaire à choisir le site pour l'implantation de son activité d'extraction. Dès lors qu'aucun autre parti n'avait été envisagé, ce document n'avait pas à indiquer les raisons pour lesquelles ce projet avait été retenu parmi d'autres.
32. En douzième lieu, il ressort du plan de réaménagement du site figurant à l'étude d'impact (p.140) qu'aucune intervention n'est prévue à ce titre sur les dépendances de la propriété La Barthale, laquelle se situe à l'extérieur de l'emprise du projet. Ce document n'avait donc pas à analyser les conséquences possibles de la remise en état du site sur ladite propriété. Il étudie par ailleurs avec une précision suffisante (p.104/105) les divers effets du fonctionnement de la carrière et ceux attachés à son réaménagement en fin d'exploitation (p.129 et s.).
33. En treizième lieu, le volet paysager de l'étude d'impact comporte une description de l'état initial du site (p.49 s.), des effets du projet sur son environnement paysager et des mesures destinées à assurer son intégration dans celui-ci (p.87 s.), enfin des modalités de réaménagement du site en fin d'exploitation (p. 140 et s.). Par ailleurs, les autres effets sur l'environnement des installations de traitement de la carrière sont aussi analysés en termes d'intégration paysagère (p.49 s., p.87), de bruits, d'émissions de poussières, d'odeurs et de pollutions de l'air, d'émissions lumineuses et de transport des matériaux (p.89 s.). En outre, dès lors qu'il n'est pas démontré que le fonctionnement de la carrière était susceptible d'engendrer une pollution de son environnement par des métaux lourds, l'étude d'impact n'avait pas à envisager cette question.
34. En quatorzième lieu, la composition des remblais acheminés sur le site, qui seront constitués de déchets inertes comme l'exige l'article 22.1 de l'arrêté d'autorisation, est décrite dans l'étude d'impact (p.28 et s.), de même que les modalités de leur transport. Ce document précise également que les effluents provenant des sanitaires du site seront dispersés par tranchée d'infiltration après traitement par une fosse toutes eaux (p.37) et mentionne également (p.59) la présence de vestiges archéologiques situés toutefois à l'extérieur de l'emprise du projet.
35. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le préfet de l'Ariège n'a pas commis d'erreur d'appréciation de la régularité de l'étude d'impact produite par la société Denjean.
S'agissant de la publicité de l'enquête publique :
36. Les modalités de publicité de l'enquête publique relative à la mise en fonctionnement d'une installation classée pour la protection de l'environnement sont régies non par l'article R. 123-14 du code de l'environnement, qu'invoquent les requérants et qui ne vise que les opérations susceptibles d'affecter l'environnement, mais par les dispositions spécifiques de l'article 6 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, en vigueur à la date de l'avis d'enquête publique, codifié depuis à l'article R. 512-15 du code de l'environnement. Les dispositions de l'article 6 du décret du 21 septembre 1977 n'imposent pas que cet avis soit publié dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le département concerné par le projet dans les huit premiers jours de l'enquête. Par suite, le moyen tiré de ce que cette dernière formalité n'a pas été accomplie doit, en tout état de cause, être écarté.
S'agissant du contenu de l'avis du commissaire enquêteur :
37. Aux termes de l'article R. 512-17 du code de l'environnement : " (...) Le commissaire enquêteur (...) rédige, d'une part, un rapport dans lequel il relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies, d'autre part, ses conclusions motivées, qui doivent figurer dans un document séparé et préciser si elles sont favorables ou non à la demande d'autorisation. (...) ". Il résulte de ces dispositions que le commissaire enquêteur doit non seulement émettre un avis personnel et motivé sur le projet mais aussi analyser les observations formulées au cours de l'enquête publique même s'il n'est pas tenu d'y répondre.
38. En l'espèce, le commissaire enquêteur a bien analysé les différentes observations émises au cours de l'enquête, qu'il a regroupées par thèmes. Ce faisant, les exigences des dispositions précitées de l'article R. 512-17 ont été respectées.
S'agissant des modifications apportées postérieurement à l'enquête publique :
39. Aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'environnement : " L'enquête mentionnée à l'article L. 123-1 a pour objet d'informer le public et de recueillir ses appréciations, suggestions et contre-propositions, postérieurement à l'étude d'impact lorsque celle-ci est requise, afin de permettre à l'autorité compétente de disposer de tous éléments nécessaires à son information. ". Aux termes de l'article R. 512-33 du même code : " Toute modification apportée par le demandeur à l'installation, à son mode d'utilisation ou à son voisinage, et de nature à entraîner un changement notable des éléments du dossier de demande d'autorisation, doit être portée avant sa réalisation à la connaissance du préfet avec tous les éléments d'appréciation. Le préfet fixe, s'il y a lieu, des prescriptions complémentaires (...) S'il estime, après avis de l'inspection des installations classées, que les modifications sont de nature à entraîner des dangers ou inconvénients, mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, le préfet invite l'exploitant à déposer une nouvelle demande d'autorisation. (...) Les demandes mentionnées aux deux alinéas précédents sont soumises aux mêmes formalités que les demandes d'autorisation primitives. ".
40. En premier lieu, l'article 5 de l'arrêté d'autorisation du 29 juin 2009 prévoit un transport des matériaux issus de la carrière au moyen d'une installation terminale embranchée à la voie ferrée Toulouse-Puigcerda. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'étude d'impact envisageait bien cette possibilité (p. 135-136), en vue de réduire le trafic routier, compte tenu de la proximité du site d'exploitation avec la ligne ferroviaire. Cette question a ensuite été abordée au cours de l'enquête publique, le commissaire enquêteur ayant consigné dans son rapport (p. 17 et 20) les réponses apportées par le pétitionnaire aux observations du public relatives aux modalités de transport des matériaux issus de la carrière. Enfin, le choix d'un transport des matériaux par voie ferroviaire ne révèle pas, par lui-même, une modification substantielle du projet après l'enquête publique dès lors qu'il n'a aucune incidence sur la nature ou le volume de l'activité exercée, ou encore sur sa localisation et qu'en outre, il présente des garanties supérieures, en termes de développement durable et de protection de l'environnement, à celles du transport par voie routière également envisagé dans l'étude d'impact.
41. En second lieu, les éléments complémentaires que la société Denjean Granulats a adressés au préfet le 16 novembre 2007, à savoir un plan stratégique du Groupe Denjean, une étude paysagère expliquant les principes d'intégration du projet dans son environnement et un document faisant état de l'avancement du projet de transport par rail, avaient pour seul objet d'expliciter des informations déjà soumises à l'enquête publique. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, ces informations ne contenaient aucun élément nouveau de nature à modifier substantiellement le projet au point de rendre obligatoire une nouvelle enquête publique. Il en va de même de l'étude de modélisation globale des impacts hydrauliques du projet, réalisée en mai 2007 à la demande des services instructeurs, laquelle ne comporte aucun élément de nature à établir que l'information à laquelle le public a eu accès au cours de l'enquête aurait été insuffisante.
S'agissant de l'irrégularité de l'avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites :
42. Aux termes de l'article R. 341-16 du code de l'environnement : " La commission départementale de la nature, des paysages et des sites concourt à la protection de la nature, à la préservation des paysages, des sites et du cadre de vie (...) Elle est régie par les dispositions des articles 8 et 9 du décret n° 2006-665 du 7 juin 2006. (...) III.-Au titre de la gestion équilibrée des ressources naturelles, la commission, dans les cas et selon les modalités prévues par les dispositions législatives ou réglementaires, élabore le schéma départemental des carrières et se prononce sur les projets de décisions relatifs aux carrières. ".
43. Ces dispositions n'imposent pas à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de motiver son avis sur les projets d'autorisation de carrière. Si cette motivation était prévue par l'article L. 515-2 du code de l'environnement, celui-ci a été abrogé au 1er juillet 2006 par l'ordonnance n° 2004-637 du 1er juillet 2004 relative à la simplification de la composition et du fonctionnement des commissions administratives. Par suite, le moyen tiré de ce que l'avis émis le 18 juin 2009 sur le projet contesté par la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de l'Ariège n'était pas motivé est inopérant.
En ce qui concerne la légalité interne :
S'agissant de la méconnaissance des dispositions constitutionnelles et législatives relatives à la protection de l'environnement :
44. Aux termes de l'article 1er de la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 relative à la Charte de l'environnement : " Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. ". Aux termes de l'article 3 de cette même Charte : " Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences ". Aux termes de l'article 5 de cette Charte : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. ". L'article L. 110-1 du code de l'environnement précise que " Le principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable ".
45. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. Les dispositions du présent titre sont également applicables aux exploitations de carrières (...). Aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral. " En vertu de l'article L. 512-3 du même code : " Les conditions d'installation et d'exploitation jugées indispensables pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 " sont fixées " par l'arrêté d'autorisation et, éventuellement, par des arrêtés complémentaires pris postérieurement à cette autorisation ". Enfin, l'article L. 514-6 du même code prévoit que les décisions prises en application des articles L. 512-1 et L. 512-3 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction.
46. En premier lieu, les requérants demandent à la cour de déduire d'un faisceau d'indices et notamment des études produites, que le lien de causalité entre l'abaissement des niveaux de la nappe, les pollutions constatées dans le secteur et l'exploitation de la carrière litigieuse sont suffisants pour caractériser une insuffisance patente des prescriptions actuelles et justifier l'application du principe de précaution. Cependant, il résulte de l'instruction, d'une part, qu'il n'existe pas d'incertitude scientifique quant à l'existence ou la portée des risques dont s'agit et que d'autre part, lesdits risques sur la ressource en eau mis en exergue par les appelants sont suffisamment identifiés et sont évoqués de façon complète par les éléments composant le dossier de demande d'autorisation et par l'étude d'impact. Dès lors, ces risques ne sauraient être au nombre de ceux présentant des incertitudes quant à leur réalité et à leur portée en l'état des connaissances scientifiques. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de précaution ne peut qu'être écarté.
47. En deuxième lieu, les requérants soutiennent que l'exploitation de la carrière ainsi que les opérations de remblayage seraient responsables des perturbations et des atteintes quantitatives à la ressource en eau et que les prescriptions de l'arrêté en litige seraient à cet égard insuffisantes. Ils font valoir que l'impact structurel de la carrière sur la nappe alluviale est démontré par les procès-verbaux d'huissiers réalisés entre 2013 et 2016, constatant une diminution des débits sur certains points d'eau, ainsi que par la diminution des niveaux piézométriques relevée dans les expertises hydrogéologiques réalisées par le cabinet Calligee en mai 2018 et octobre 2018.
48. L'article 22 de l'arrêté en litige contient les prescriptions techniques de nature à réduire l'inconvénient de perte de perméabilité des terrains liés au remblaiement au niveau le plus faible possible de sorte qu'il ne puisse nuire à l'écoulement global de la nappe d'accompagnement de l'Ariège. Par ailleurs, l'article 30.3 de l'arrêté contesté prescrit la mise en place d'une surveillance des eaux souterraines par un suivi hydrogéologique qui s'appuie sur un réseau de piézomètres. Ce dispositif a été renforcé par l'arrêté complémentaire du 1er août 2016 avec notamment la mise en place de 6 nouveaux points de contrôle piézométriques (article 3.1). Ainsi, quatre points ont été implantés en aval de l'exploitation au niveau de la propriété " La Barthale " (Pz 23 bis, Pz 31, P2 et Pz 49), un autre en amont de la propriété du lieu-dit Manaud (Pz 14) et le dernier en amont hydraulique du site (Pz 4). Par ailleurs l'article 4.1 de l'arrêté complémentaire du 1er août 2016 prévoit des mesures des hauteurs d'eau trimestrielles sur chacun de ces 6 points de contrôle et au niveau des plants d'eau.
49. Concernant les procès-verbaux réalisés par huissiers entre 2013 et 2016, ils constatent une diminution des débits de certains points d'eau à un instant précis mais ne permettent pas d'établir l'origine de ce phénomène. De même, les études hydrogéologiques réalisées par le cabinet Calligee en mai 2018 et octobre 2018 constatent le tarissement de la nappe mais ne permettent pas d'établir un lien avec l'exploitation de la carrière. A cet égard, il résulte de l'instruction et notamment des études hydrogéologiques réalisées par le cabinet Antea Group en janvier 2018 et avril 2021 que la forme des courbes piézométriques et du niveau des plans d'eau entre 2017 et 2021 est équivalente tant en baisse qu'en hausse et cela sur l'ensemble des piézomètres, qu'ils soient situés en amont ou aval de la carrière. Il résulte ainsi de ces comparaisons, qu'il n'y a pas de baisse significative de la nappe qui serait localisée à l'aval hydraulique de la carrière. Par ailleurs, il résulte du rapport effectué en 2006 par le BRGM que la nappe d'accompagnement de l'Ariège est principalement alimentée non par ce cours d'eau mais par les précipitations et ce constat de la baisse de la nappe alluviale liée à la pluviométrie est d'ailleurs reconnu par l'étude Calligée d'octobre 2018.
50. Enfin, s'agissant des opérations de remblaiement du site d'exploitation qui consistent au remplacement des graves alluvionnaires extraites par des déchets inertes, en vue de pouvoir rendre les terrains excavés à l'agriculture, il est constant que ce remblaiement a pour conséquence une perte de perméabilité des terrains entrainant un abaissement ponctuel autour de la zone de remblai du niveau de la nappe. Cependant, ce phénomène a été pris en compte et modélisé dans l'étude d'impact du dossier de demande d'autorisation et a fait l'objet de prescriptions adaptées dans l'arrêté en litige (article 22) de nature à réduire cet inconvénient afin qu'il ne puisse nuire à l'écoulement global de la nappe d'accompagnement de l'Ariège. Ainsi, outre un travail de modelage des pentes de remblai, les types de déchets inertes admissibles sur le site ont été limités et un contrôle de ces déchets inertes a été imposé avec la mise en place par l'Etat depuis 2014 d'un contrôle annuel inopiné qui au demeurant n'a donné lieu à aucune détection de non-conformités significatives dans l'admission et la gestion des déchets inertes sur la gravière. En conséquence, les appelants et l'intervenante ne démontrent pas l'existence d'un lien causal entre l'exploitation de la carrière et l'abaissement ponctuel de la nappe.
51. En troisième lieu, les requérants estiment que les matériaux utilisés pour le remblaiement de la carrière seraient de nature à générer une pollution des eaux souterraines que les prescriptions édictées par l'arrêté d'autorisation contesté seraient inefficaces à combattre.
52. Il a déjà été mentionné que l'article 22 de l'arrêté en litige encadre les matériaux qui peuvent être acceptés en remblai et que l'article 30.3 impose la surveillance des eaux souterraines avec la mise en place d'un suivi annuel de la qualité dans un piézomètre aval et un piézomètre amont ainsi que dans les plans d'eau. Il a également été indiqué que ce dispositif a été complété par l'article 4.3 de l'arrêté complémentaire du 1er aout 2016 qui impose l'élargissement de la palette d'analyse aux métaux et composés organiques et prescrit l'analyse semestrielle sur un piézomètre en amont (le pz n° 4 ou le pz n° 14) et 2 en aval (le pz n° 23 bis, le pz n° 31, le pz n° 2 ou le pz n° 49). Enfin, l'article 7 de l'arrêté complémentaire indique les types de matériaux autorisés pour le remblayage et précise que tous les autres types de déchets sont interdits.
53. Afin d'établir la pollution chimique de l'eau, les requérants invoquent les analyses effectuées en 2016, 2017 et 2018 par le laboratoire départemental de la Haute Garonne concernant trois sources : le Naudounet, en amont du site d'extraction, La Barthale, sur le site d'extraction et le Roudeille, plus en aval du site d'extraction. Il ressort de ces analyses que concernant l'aluminium dissous en mg/l, sur la source en amont le Naudounet, le taux d'aluminium dissous est inférieur à 0,01mg/l, soit un taux indétectable qui reste le même en 2016 et 2017 et qui n'a pas été mesuré en 2018. En revanche sur les sources en aval de l'exploitation, les taux d'aluminium dissous sont nettement supérieurs et en particulier sur le puits de La Barthale où le taux est de 0,044 en 2016, 0,038 en 2017 et 0,565 en 2018, soit presque trois fois supérieur à la norme de potabilité pour la consommation humaine fixée à 0,2 mg/l par l'arrêté ministériel du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine, mentionnées aux articles R. 1321-2, R. 1321 3, R. 1321-7 et R. 1321-38 du code de la santé publique.
54. Cependant, d'une part, les dispositions du code de la santé publique invoquées par les requérants ne sont pas applicables au puits de La Barthale faute pour la source alimentant l'habitation située au lieu-dit La Barthale de disposer du statut de captage pour l'alimentation en eau potable. D'autre part, la société Denjean, fait valoir, en se basant sur la note de commentaires réalisées par le cabinet Ectare en mai 2018 et actualisée en avril 2021, que les valeurs élevées enregistrées pour certains paramètres sur les plans d'eau lors des périodes d'exploitation traduisent la différence de méthode d'analyse entre les eaux souterraines (piézomètres) et superficielles pour lesquelles jusqu'en 2017 la totalité des éléments recherchés étaient mis en évidence et non la seule fraction solubilisée qui est la seule présentant un risque de diffusion en aval. Ce phénomène est confirmé par les analyses menées sur la fraction dissoute de l'aluminium dans les plans d'eau qui ne montrent aucune concentration supérieure au seuil de détection soit 0,20mg/l depuis 2018. Seule l'analyse réalisée le 24 avril 2017 au piézomètre 49 présente une teneur en aluminium relativement élevée (0,35 mg/l contre 0,2 mg/l pour l'eau destinée à la consommation humaine). Néanmoins, ce phénomène ne se retrouve pas lors de l'analyse suivante le 17 octobre alors que l'exploitation se poursuit de la même manière sur cette zone et la baisse de la teneur en aluminium s'est confirmée depuis 2018. Dès lors, cette occurrence peut être expliquée par la composition du sol dans le secteur riche naturellement en métaux lourds et en fer.
55. Enfin, il résulte de l'instruction, notamment du rapport Calligée, que les analyses réalisées par l'exploitant sur le fondement des normes de qualité qui lui sont opposables ne montrent pas de contamination bactériologique des eaux de la nappe, contrairement à ce qui est soutenu.
56. Ainsi, les atteintes à la ressource en eau protégée par l'article L. 511-1 du code de l'environnement ne sont pas démontrées. Dès lors, le préfet n'a commis aucune erreur d'appréciation et a fait une exacte application des exigences découlant de l'article L. 512-3 du code de l'environnement en prescrivant les mesures techniques suffisantes pour protéger les intérêts visés par l'article L. 511-1 du même code.
S'agissant de l'exception d'illégalité du plan local d'urbanisme :
57. Aux termes de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme alors applicable : " Le règlement et ses documents graphiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, pour la création de lotissements et l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan. / (...) ". Selon l'article R. 123-7 du même code : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. / (...)". Et selon son article R. 123-11 : " Les zones U, AU, A et N sont délimitées sur un ou plusieurs documents graphiques. / Les documents graphiques du règlement font, en outre, apparaître s'il y a lieu : / (...) / c) Les secteurs protégés en raison de la richesse du sol ou du sous-sol, dans lesquels les constructions et installations nécessaires à la mise en valeur de ces ressources naturelles sont autorisées ; / (...) ".
58. Le site d'implantation de la carrière est classé en zone Ac, ainsi définie par le plan local d'urbanisme de Saverdun : " Zone A : Il s'agit d'une zone qu'il convient de protéger en raison de sa vocation essentiellement agricole. En conséquence, ne sont admises que les construction et installations liées et utiles à l'exploitation agricole. Un secteur a été défini : Ac où l'ouverture et l'exploitation de carrières, ainsi que la construction des installations classées nécessaires à leur fonctionnement, est autorisée (...) 8. En zone Ac, l'ouverture et l'exploitation des carrières, ainsi que les constructions relevant éventuellement du régime des installations classées pour la protection de l'environnement nécessaires à leur fonctionnement, sont autorisées sous réserve de réaménagement, soit à usage agricole, soit à usage de loisirs en fin d'exploitation. Le secteur dit de La Barthale - Bordegrande - Manaud - Saint-Paul, jouxtant un site d'intérêt communautaire Natura 2000, référencé FR7301822 relatif aux espèces peuplant le lit mineur de l'Ariège sera en outre soumis aux contraintes suivantes : la configuration du site et les méthodes d'exploitations envisagées seront déterminées de manière à ne pas porter atteinte aux milieux naturels et aux espèces associées protégées dans le cadre du site Natura 2000. Notamment une bande de 50 mètres en bordure de la rivière de l'Ariège sera maintenue inexploitée. ".
59. Les carrières d'extraction doivent être regardées comme des secteurs à protéger en raison de leur potentiel économique, au sens des dispositions précitées de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme. Si de telles exploitations ne sont pas au nombre des occupations du sol autorisées en zone A par l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, ces dispositions générales ne font pas obstacle à l'application de celles de l'article R. 123-11 du même code, qui permettent aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de délimiter, y compris à l'intérieur des zones A, des secteurs dans lesquels les constructions et les installations nécessaires à la mise en valeur des ressources du sol ou du sous-sol sont autorisées. En l'espèce, le site d'implantation de la carrière litigieuse se trouve classé en secteur Ac du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Saverdun, lequel autorise spécifiquement l'ouverture et l'exploitation des carrières, ainsi que, contrairement à ce que soutiennent les associations requérantes, la construction des installations nécessaires à leur fonctionnement, sous réserve de leur réaménagement à usage agricole ou de loisirs en fin d'exploitation. L'atteinte ainsi portée à la vocation agricole de ces terres, par ailleurs justifiée par la mise en valeur des ressources naturelles, reste relativement limitée compte tenu de la taille réduite dudit secteur Ac par rapport à l'ensemble des zones agricoles communales. Dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du plan local d'urbanisme en tant qu'il crée cette zone Ac, soulevé à l'appui de la demande d'annulation de l'arrêté du 29 juin 2009, doit être écarté.
60. Par ailleurs les dispositions précitées du plan local d'urbanisme régissant les zones Ac n'ont ni pour objet ni pour effet d'ouvrir ces dernières à l'urbanisation. En outre, comme cela a déjà été mentionné au point 59, les seules constructions autorisées concernent celles liées à l'exploitation et sous la condition d'être réaménagées pour un usage agricole ou de loisirs en fin d'exploitation. Par suite, les requérants ne peuvent utilement soutenir que le plan local d'urbanisme de Saverdun méconnait sur ce point la règle de la constructibilité limitée de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme.
S'agissant de la conformité de l'arrêté d'autorisation du 29 juin 2009 avec le plan local d'urbanisme de Saverdun :
61. Le dossier de demande d'autorisation ayant conduit à la délivrance de l'arrêté du 29 juin 2009 précise qu'une bande de terrain de 50 mètres en bordure de la rivière l'Ariège sera laissée inexploitée. Par suite, les dispositions précitées du plan local d'urbanisme de Saverdun, selon lesquelles la configuration du site et les méthodes d'exploitations devront respecter les milieux naturels notamment en maintenant inexploitée une bande de 50 mètres en bordure de la rivière de l'Ariège, ne sont pas méconnues.
S'agissant de la méconnaissance du schéma de cohérence territoriale (SCOT) de la vallée de l'Ariège :
62. La création de la zone Ac résulte de la révision du plan local d'urbanisme approuvée le 30 juin 2008. La légalité de ce document d'urbanisme doit ainsi être appréciée, y compris lorsqu'elle est contestée par voie d'exception, en fonction des considérations de droit qui existaient à cette date du 30 juin 2008. Par suite, le moyen tiré de ce que le plan local d'urbanisme révisé de Saverdun méconnait les prescriptions du schéma de cohérence territoriale de la vallée de l'Ariège est inopérant dès lors que celui-ci a été approuvé le 10 mars 2015 seulement.
S'agissant de la méconnaissance du schéma départemental des carrières de l'Ariège :
63. Aux termes de l'article L. 515-3 du code de l'environnement : " Le schéma départemental des carrières définit les conditions générales d'implantation des carrières dans le département. Il prend en compte l'intérêt économique national, les ressources et les besoins en matériaux du département et des départements voisins, la protection des paysages, des sites et des milieux naturels sensibles, la nécessité d'une gestion équilibrée de l'espace, tout en favorisant une utilisation économe des matières premières. Il fixe les objectifs à atteindre en matière de remise en état et de réaménagement des sites. (...) Les autorisations et enregistrements d'exploitation de carrières délivrées en application du présent titre doivent être compatibles avec ce schéma. ". Eu égard à l'office du juge de plein contentieux, la légalité de l'autorisation contestée doit être appréciée au regard des règles de fond posée par le schéma départemental des carrières de l'Ariège en vigueur à la date à laquelle il statue, alors même que ce dernier a été adopté postérieurement à ladite autorisation.
64. Les requérants invoquent à l'appui de leur moyen deux orientations du schéma départemental des carrières de l'Ariège, l'orientation n° 1 qui vise à " Protéger les zones à enjeux environnementaux et mettre en œuvre des mesures de réduction et de maîtrise des risques " et l'orientation n° 5 qui vise à " limiter la pression sur le foncier agricole ". Cependant, ils ne démontrent pas en quoi l'autorisation qu'ils contestent serait incompatible avec les orientations précitées.
S'agissant de la compatibilité du projet avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Adour-Garonne :
65. Aux termes de l'article L. 212-1 du code de l'environnement " XI. - Les programmes et les décisions administratives dans le domaine de l'eau doivent être compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux. ".
66. Une décision d'autorisation de carrière ne constitue pas une décision administrative dans le domaine de l'eau au sens de l'article L. 212-1 précité du code de l'environnement. Par suite, elle n'a pas à être compatible avec les dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE). Il s'ensuit que le moyen tiré par les requérants de la méconnaissance des dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Adour-Garonne est inopérant.
67. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise ou de procéder à une visite des lieux, que M M... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes.
68. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : L'intervention de l'association de protection de la vallée de l'Ariège et de sa nappe phréatique (APROVA) est admise.
Article 2 : La requête de M. M... et autres est rejetée.
Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. T... M..., M. A... R... K..., M. N... D..., Mme J... U..., à l'association pour la protection des rivières ariégeoises (" le Chabot "), à l'association le comité écologique ariégeois, à l'association de protection de la vallée de l'Ariège et de sa nappe phréatique (APROVA), à la société Denjean Granulats et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera délivrée au préfet de l'Ariège.
Délibéré après l'audience du 7 décembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2021.
Le rapporteur,
Dominique Ferrari La présidente,
Evelyne Balzamo Le greffier,
Lionel Boullemant
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX01101