Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 février 2015 par lequel le maire de la commune de Pérols a refusé de lui délivrer un permis de construire.
Par un jugement n° 1503776 du 22 février 2017, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 avril 2017, la commune de Pérols, représentée par la SCP d'avocat Margall-d'Albenas, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 février 2017 ;
2°) de rejeter la demande de Mme A... présentée devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'adjoint au maire disposait d'une délégation consentie par le maire pour refuser le permis ;
- la demande de pièces complémentaires ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme ;
- les pièces ont été reçues au plus tard le 16 décembre 2014 ;
- à la date du 10 février 2015, Mme A... n'était pas titulaire d'un permis de construire tacite ;
- contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, le " porter à connaissance " n'est pas le seul motif du refus opposé mais vient en complément des dispositions du plan de prévention des risques naturels d'inondation et de celles de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- dans l'appréciation portée sur la réalité des risques nés du projet au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, l'avis défavorable émis par la direction départementale des territoires et de la mer qui n'est pas de nature à prohiber par lui-même toute construction à usage d'habitation dans la zone, ne pouvait être ignoré ;
- sur le fondement de l'article R. 111-2 précité, compte tenu des impératifs de sécurité et de salubrité publiques, révélés par le " porter à connaissance " et au regard de la situation concrète des lieux, le maire était tenu de refuser la demande de permis ;
- il ne pouvait être prescrit de mesures spéciales dans la mesure où le projet s'appuie sur des murs de clôture en béton et parpaings comme éléments porteurs entravant l'écoulement des eaux ;
- il ressort de ces éléments que le maire a procédé à un examen particulier de la demande ;
- la délivrance de permis de construire antérieurs sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté ;
- le moyen tiré du détournement de pouvoir devra être écarté.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2017, Mme A..., représentée par la SCP Lebon et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Pérols une somme de 5 000 euros.
Elle soutient que les moyens soulevés par la commune de Pérols ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté pour la commune de Pérols a été enregistré le 21 juin 2018 et n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant la commune de Pérols.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 10 février 2015, le maire de la commune de Pérols a refusé de délivrer à Mme A... un permis de construire une maison à usage d'habitation sur un terrain d'assiette cadastré section AW n° 169 et 170, en bordure de l'étang de Pérols sur le territoire de la commune. Par le jugement dont la commune de Pérols relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 10 février 2015 :
2. D'une part, l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme prévoit que le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. L'article L. 562-1 du code de l'environnement dispose que l'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles, en particulier pour les inondations, qui ont notamment pour objet de délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de leur nature et de leur intensité, d'y interdire les constructions ou la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages ou de prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités. L'article L. 562-4 du code de l'environnement énonce que le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique et il est annexé au plan local d'urbanisme, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme.
3. Il résulte de ces dispositions que si, dans les zones délimitées par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, les prescriptions auxquelles un tel plan subordonne une construction en application des 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement s'imposent directement aux autorisations de construire, qui ne sauraient être légalement accordées lorsque ces prescriptions sont méconnues, il n'en va de même, s'agissant des mesures de prévention, de protection et de sauvegarde définies par un tel plan comme incombant aux particuliers dans ces mêmes zones en application du 3° du II du même article, que lorsque leur réalisation a été rendue obligatoire dans les conditions prévues au III de cet article. Si leur réalisation n'a pas été rendue obligatoire, ces mesures font seulement partie des éléments que l'autorité chargée de délivrer les autorisations de construire peut, en fonction de leur objet, prendre en considération pour apprécier le respect du règlement national d'urbanisme ou des dispositions ayant un objet similaire d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu. Par conséquent, la circonstance que le projet ne met pas en oeuvre les mesures de prévention préconisées par le plan de prévention des risques naturels prévisibles ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que le permis de construire puisse légalement être accordé. L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme peut aussi, si elle estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet pour lequel l'autorisation de construire est sollicitée, y compris d'éléments déjà connus lors de l'élaboration du plan de prévention des risques naturels, que les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique le justifient, refuser, sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de délivrer un permis de construire, alors même que le plan n'aurait pas classé le terrain d'assiette du projet en zone à risques ni prévu de prescriptions particulières qui lui soient applicables.
4. Par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé l'arrêté du maire de la commune de Pérols du 10 février 2015 au motif que le maire en s'étant estimé lié par le " porter à connaissance " du préfet de l'Hérault du 5 janvier 2015 sans procéder à l'examen particulier de la demande de permis de construire déposée par Mme A..., notamment au regard de la possibilité d'assortir sa décision de prescriptions particulières, a entaché sa décision d'une erreur de droit.
5. Toutefois, il ressort des énonciations mêmes de l'arrêté contesté que, pour s'opposer à la demande de permis de construire, le maire de la commune de Pérols a, outre la mention de l'objet des travaux et de la localisation du terrain d'assiette du projet, après le rappel de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, visé notamment, les dispositions du plan de prévention des risques naturels d'inondation approuvé le 6 février 2004, le " porter à connaissance du risque d'inondation par submersion marine" du préfet de l'Hérault du 5 janvier 2015 et l'avis défavorable de la direction départementale des territoires et de la mer du 28 janvier 2015. Alors même que l'arrêté précise que les informations transmises par le préfet de l'Hérault dans son " porter à connaissance " complètent les dispositions du plan de prévention des risques naturels d'inondation et interdisent toute construction située dans un secteur urbain ou naturel de zone d'aléa fort, il ressort de cet arrêté que le maire de la commune de Pérols ne s'est pas cru lier par les seules informations du préfet, portées à sa connaissance mais, dans le cadre d'un examen particulier de la demande d'autorisation de construire sollicitée par Mme A..., au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, a refusé celle-ci en se fondant sur les atteintes portées par le projet en litige à la sécurité publique. Dès lors, la commune de Pérols est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé, pour le motif énoncé au point 4, l'arrêté du maire de la commune du 10 février 2015.
6. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif de Montpellier.
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, le maire peut déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints.
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme C..., adjoint signataire de l'arrêté en litige, a reçu, par un arrêté du 29 septembre 2014, délégation du maire de la commune de Pérols en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire à l'effet de prendre toutes les décisions nécessaires relevant du domaine de sa délégation. Il entre dans le champ de compétence de cet adjoint, notamment tant les décisions d'autorisation que celles portant refus d'autorisation. En conséquence, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige doit être écarté.
9. En deuxième lieu, Mme A... soutient que, dès lors que les services instructeurs ont demandé la communication de pièces complémentaires ne relevant pas de celles prévues limitativement par les articles R. 431-5 à R. 431-12 du code de l'urbanisme, elle se trouvait titulaire d'une autorisation de construire tacite et qu'ainsi, l'arrêté contesté doit être regardé comme ayant retiré cette autorisation tacite en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations alors en vigueur. Toutefois, à la supposer établie, l'illégalité de la décision de l'administration sollicitant du pétitionnaire la production de pièces complémentaires qui ne peut être requise en vertu du code de l'urbanisme, ne saurait avoir pour effet de rendre le pétitionnaire titulaire d'une décision implicite d'autorisation de construire. Par suite, le moyen invoqué par Mme A..., tiré de ce qu'en raison de l'illégalité de la demande de pièces complémentaire, un permis de construire tacite est né et les moyens tirés de ce que l'arrêté du 10 février 2015 aurait retiré cette décision tacite en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée, ne peuvent pas être utilement invoqués.
10. En troisième lieu, il est constant que le terrain d'assiette du projet est classé zone urbaine UD2iR du plan local d'urbanisme de la commune de Pérols et en zone rouge RU 2 au plan de prévention des risques naturels d'inondation approuvé le 6 février 2004. Le règlement du plan de prévention relatif à la zone rouge, autorise les nouvelles constructions sous réserve de " caler la sous-face du 1er plancher aménagé à la cote de PHE (plus hautes eaux) fixée pour l'évènement marin de référence estimée à 2 mètres NGF, + 30 cm, de ne pas créer de surfaces de garages en dessous du niveau de la cote de PHE " et, enfin, que " les constructions soient conçues de façon à ce que leur vulnérabilité en dessous de la cote de référence soit la plus faible possible ". Or, au vu des études plus récentes portées à la connaissance du maire de la commune dans le cadre des informations transmises par le préfet de l'Hérault, notamment les travaux du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, le terrain d'assiette du projet de construction qui, en limite Sud, longe le chemin des Douaniers, en bordure immédiate du l'étang de Pérols, est soumis à un aléa submersion marine fort. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice descriptive annexée à la demande de permis de construire que sur le terrain d'assiette du projet situé à une altitude de 1,11 mètres NGF, la sous-face du premier plancher de la construction envisagée atteint une hauteur de 2,30 mètres NGF. Cette construction prend appui sur des murs de clôture en béton et parpaings comme éléments porteurs. Il est précisé, en outre, dans la notice que seuls "10 % de la superficie située au dessous de la cote de PHE est transparente aux écoulements permettant le libre écoulement de l'eau ". Contrairement à ce que soutient Mme A..., au regard de la situation du terrain d'assiette du projet, des modalités de la construction, ainsi envisagées et de l'aggravation des risques révélés par les études récentes, en dépit de la surélévation du bâtiment d'habitation projeté et de la réalisation d'aménagements sur le chemin des Douaniers par la mise en place de palles-planches et le rehaussement du chemin le long de l'étang, le projet contesté est soumis à un risque d'inondation de nature à occasionner des dommages aux habitants du projet, à leurs biens et à accroître la vulnérabilité des constructions voisines. Les circonstances que le terrain d'assiette est situé à moins de trente mètres d'une zone bleue classée UD2IB et que des permis de construire ont été délivrés sur des parcelles voisines sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 10 février 2015. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à reprocher au maire de la commune de Pérols d'avoir opposé un refus à sa demande de permis de construire et de ne pas avoir assorti l'autorisation de construire de prescriptions particulières. En conséquence, l'appréciation portée par le maire sur la demande de permis présentée par Mme A... n'est pas entachée d'erreur.
11. En dernier lieu, Mme A... n'établit pas que le maire aurait poursuivi des objectifs étrangers à l'impératif de sécurité publique. Ainsi, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Pérols est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 10 février 2015. Dès lors, elle est fondée à demander l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Montpellier.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Pérols, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la commune de Pérols tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 février 2017 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Pérols et à Mme B...A....
Délibéré après l'audience du 26 juin 2018, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 10 juillet 2018.
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N° 17MA01746