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22/03/2018 | FRANCE | N°17LY01413

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 22 mars 2018, 17LY01413


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Les sociétés Procedim et Sinfimmo ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions des 22 décembre 2010 et 26 mai 2011 du directeur du centre hospitalier spécialisé de la Savoie rejetant, d'une part, leur offre d'achat de parcelles de terrain situées sur le territoire de la commune de Bassens pour les céder à la société CIS Promotion et, d'autre part, leur recours gracieux contre cette décision.

Par un jugement n° 1104072 du 21 janvier 2014, le tribunal a rejeté cette d

emande.

Par un arrêt n° 14LY00915 du 19 mars 2015, la cour administrative d'appel ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Les sociétés Procedim et Sinfimmo ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions des 22 décembre 2010 et 26 mai 2011 du directeur du centre hospitalier spécialisé de la Savoie rejetant, d'une part, leur offre d'achat de parcelles de terrain situées sur le territoire de la commune de Bassens pour les céder à la société CIS Promotion et, d'autre part, leur recours gracieux contre cette décision.

Par un jugement n° 1104072 du 21 janvier 2014, le tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 14LY00915 du 19 mars 2015, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé contre ce jugement par les sociétés Procedim et Sinfimmo.

Par une décision n° 390347 du 27 mars 2017, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour.

Procédure devant la cour

Par effet de la décision du conseil d'Etat du 27 mars 2017, la cour se trouve à nouveau saisie de la requête présentée pour les sociétés Procedim et Sinfimmo le 21 mars 2014, désormais enregistrée sous le n° 17LY01413.

Par des mémoires produits après cassation, enregistrés les 23 mai 2017 et 16 février 2018, le centre hospitalier spécialisé de la Savoie, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête ou, subsidiairement, des seules conclusions à fin d'injonction et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge des sociétés Procedim et Sinfimmo au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- il n'y a plus lieu à statuer sur la requête compte tenu de la caducité du compromis de vente signé avec la société CIS Promotion ;

- le principe d'égalité de traitement entre les candidats n'a pas été méconnu ;

- la seule conséquence que pourrait avoir l'annulation de la décision de vendre les parcelles de terrain aurait été leur retour dans son domaine privé.

Par des mémoires en intervention, enregistrés les 21 juin 2017, 15 septembre 2017 et 9 janvier 2018, la société CIS Promotion, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- l'exception de non-lieu doit être écartée ;

- le Conseil d'Etat n'a pas considéré que le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement entre les candidats était fondé ; ce principe n'a pas été méconnu ;

- les autres moyens soulevés par les sociétés Procedim et Sinfimmo ne sont pas davantage fondés ;

- en tout état de cause, l'irrégularité de la procédure d'attribution ne saurait avoir pour conséquence d'imposer au centre hospitalier spécialisé de la Savoie de retenir les sociétés Procedim et Sinfimmo comme acquéreurs.

Par un mémoire enregistré le 11 octobre 2017, les sociétés Procedim et Sinfimmo, représentées par MeB..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 janvier 2014 du tribunal administratif de Grenoble et les décisions des 22 décembre 2010 et 26 mai 2011 du directeur du centre hospitalier spécialisé de la Savoie ;

2°) d'enjoindre au centre hospitalier de conclure avec elles la vente des biens en cause ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'exception de non-lieu doit être écartée ;

- le principe d'égalité de traitement entre les candidats a été méconnu : leur offre à l'issue de la première phase de consultation était la mieux-disante, ce qui explique que le centre hospitalier n'ait pas fait droit à leur demande de production des offres présentées par la société CIS Promotion et des procès-verbaux de la réunion de la commission ayant examiné les offres, et elle était identique au prix finalement convenu avec la société CIS Promotion, qui a pu s'aligner sur leur offre grâce à la communication par le centre hospitalier de leurs conditions financières et l'a ainsi privilégiée ;

- la déclaration d'infructuosité à l'issue de la première phase de consultation est illégale dans la mesure où, contrairement au motif invoqué, le montant du programme d'aménagement d'ensemble était connu courant 2ème semestre 2009 et était le même pour tous les concurrents ;

- dès lors que le centre hospitalier reconnaît implicitement que la commission avait considéré que leur offre était la mieux-disante à l'issue de la première phase de consultation, il l'aurait retenue ; il y a lieu de lui enjoindre de leur vendre son immeuble ;

- il y a lieu d'exiger qu'il produise les différentes offres présentées par la société CIS Promotion ainsi que les procès-verbaux de réunion de la commission ayant examiné les offres.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michel ;

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant les sociétés Procedim et Sinfimmo, de MeA..., représentant le centre hospitalier spécialisé de la Savoie et de MeC..., représentant la société CIS Promotion ;

1. Considérant que le centre hospitalier spécialisé de la Savoie, après avoir sollicité de plusieurs acquéreurs potentiels qu'ils lui adressent des offres d'achat, a décidé le 22 décembre 2010 de vendre des parcelles de terrain de son domaine privé, situées sur le territoire de la commune de Bassens, à la société CIS Promotion ; que les sociétés Procedim et Sinfimmo, dont l'offre conjointe d'achat n'a pas été retenue, ont demandé en vain au tribunal administratif de Grenoble d'annuler cette décision ainsi que le rejet du recours gracieux qu'elles avaient formé contre celle-ci ; que, par un arrêt du 19 mars 2015, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elles avaient formé contre ce jugement rendu le 21 janvier 2014 ; que, par une décision du 27 mars 2017, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Lyon ;

Sur l'intervention :

2. Considérant que la société CIS Promotion, cessionnaire des parcelles en litige, justifie d'un intérêt suffisant au maintien du jugement attaqué ; que son intervention au soutien des conclusions du centre hospitalier spécialisé de la Savoie est, par suite, recevable ;

Sur l'exception de non-lieu :

3. Considérant que n'est pas de nature à priver d'objet la requête d'appel des sociétés Procedim et Sinfimmo la circonstance que le compromis de vente conclu avec la société CIS Promotion le 31 mars 2011 et prorogé en dernier lieu jusqu'au 30 septembre 2016 serait devenu caduque ; qu'il y a lieu, dès lors, d'y statuer ;

Sur la régularité du jugement :

4. Considérant que les sociétés requérantes avaient invoqué, en première instance, la méconnaissance des principes de transparence et d'égalité de traitement des candidats ; qu'en écartant ce moyen, le tribunal n'a pas, contrairement à ce qu'elles soutiennent, statué sur un moyen qui n'était pas soulevé ; qu'au demeurant, la circonstance que le tribunal aurait, pour rejeter la demande, écarté un moyen qui n'était pas invoqué est, par elle même, sans incidence sur la régularité ou le bien-fondé du jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par le centre hospitalier spécialisé de la Savoie :

5. Considérant, en premier lieu, que les sociétés requérantes soutiennent qu'elles reprennent " l'intégralité des moyens articulés à l'encontre des premières décisions attaquées, aujourd'hui retirées " ; que, ce faisant, elles doivent être regardées comme se référant aux moyens qu'elles avaient soulevés dans leur demande présentée au tribunal administratif de Grenoble le 1er juillet 2010, enregistrée sous le n° 1002841, et rejetée par une ordonnance du 17 avril 2013 ; que cette affaire est toutefois distincte de celle dont ont eu à connaître les premiers juges dans le jugement attaqué ; que ni le dossier de première instance ni les pièces produites en appel, ne comportent copie de cette précédente demande ; qu'ainsi, ces moyens, en tant qu'ils seraient distincts de ceux expressément développés dans leurs écritures d'appel et de première instance dans le présent litige, ne sont pas présentés avec une précision suffisante pour permettre à la cour d'en connaître ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que si, à la date des décisions litigieuses, le centre hospitalier spécialisé de la Savoie était soumis au contrôle de l'Etat et devait, de ce fait, respecter les modalités d'aliénation des biens immobiliers applicables aux établissements publics de l'Etat, aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe général alors en vigueur ne lui imposait de recueillir l'avis du service France Domaine avant de décider de l'aliénation de parcelles relevant de son domaine privé ; que, par suite, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté leur moyen ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à une personne morale de droit public autre que l'Etat de faire précéder la vente d'une dépendance de son domaine privé d'une mise en concurrence préalable ; que, toutefois, lorsqu'une telle personne publique fait le choix, sans y être contrainte, de céder un bien de son domaine privé par la voie d'un appel à projets comportant une mise en concurrence, elle est tenue de respecter le principe d'égalité de traitement entre les candidats au rachat de ce bien ;

8. Considérant qu'en l'espèce le centre hospitalier spécialisé de la Savoie a adressé à des professionnels de l'immobilier un dossier présentant les contraintes liées à l'aménagement du terrain, notamment du point de vue du droit de l'urbanisme, et demandant aux personnes souhaitant présenter une offre de fournir avant une date déterminée divers documents, notamment l'engagement de mener à terme une opération de construction dans le respect des contraintes urbanistiques et environnementales définies en particulier dans le plan local d'urbanisme, des documents justifiant que leurs obligations fiscales et sociales sont respectées, tous renseignement permettant d'évaluer les capacités professionnelles, techniques et financières, des références en matière de construction et d'aménagement urbain, un plan de masse des constructions projetées et une offre de prix ; que onze candidats ont présenté une offre, et parmi eux, cinq ont été invités à présenter leur projet devant un jury le 3 juin 2009 ; que, par lettre du 24 juillet 2009, le centre hospitalier spécialisé de la Savoie a informé la société CIS Promotion que son projet d'acquisition avait retenu son attention mais que pour déterminer sa décision entre tous les dossiers retenus, il souhaitait que son projet architectural soit précisé et que son offre de prix, qui intégrait une participation à la réalisation des équipements publics d'un montant de 500 000 euros, soit réévaluée ; que cette première phase de consultation a été déclarée infructueuse en raison de l'incertitude sur le montant final de la transaction ; que, sur la base d'un nouveau cahier des charges précisant notamment que le coût du programme d'aménagement d'ensemble s'établirait à 500 000 euros, l'ensemble des candidats a été auditionné ; que les sociétés Procedim et Sinfimmo ont été informées du rejet de leur offre conjointe, le centre hospitalier ayant en définitive retenu celle présentée par la société CIS Promotion qui avait réévalué son offre de prix et intégré un projet architectural plus élaboré ; qu'à la suite d'un recours gracieux des sociétés Procedim et Sinfimmo et de la saisine le 1er juillet 2010 du tribunal administratif de Grenoble, la procédure a été déclarée infructueuse, puis intégralement reprise ; que l'établissement hospitalier a en définitive retenu le 22 décembre 2010 l'offre de la société CIS Promotion, pour un prix certes identique à celui que proposaient les sociétés Procedim et Sinfimmo dès la première phase de consultation mais dont l'offre présentait des erreurs et inexactitudes au regard du nouveau cahier des charges de la consultation ; qu'eu égard aux conditions dans lesquelles la procédure a été menée, ces deux sociétés ne sont pas fondées à soutenir que le centre hospitalier aurait méconnu le principe d'égalité de traitement entre les candidats ; que son refus de faire droit à leur demande de communication des offres présentées par la société CIS Promotion et des procès-verbaux de la réunion de la commission ayant examiné les offres ne saurait à lui seul caractériser un tel manquement ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que si la décision du 22 décembre 2010 contestée est intervenue après l'abandon de deux précédentes phases de consultation, les décisions déclarant infructueuses ces prospections ne constituent pas la base légale de cette décision, qui n'a pas davantage été prise pour leur application ; que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ces décisions est inopérant ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la confidentialité des offres présentées par les sociétés Procedim et Sinfimmo aurait été méconnue ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner la communication de pièces sollicitée par les requérantes, que les sociétés Procedim et Sinfimmo ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ; que leurs conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ;

12. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre des frais liés au litige ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la société CIS promotion est admise.

Article 2 : La requête des sociétés Procedim et Sinfimmo est rejetée.

Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier spécialisé de la Savoie tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Procedim, à la société Sinfimmo, au centre hospitalier spécialisé de la Savoie et à la Société CIS Promotion.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2018, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 22 mars 2018.

6

N° 17LY01413


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY01413
Date de la décision : 22/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-02-02-01 Domaine. Domaine privé. Régime. Aliénation.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : LIOCHON DURAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-03-22;17ly01413 ?
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