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05/06/2018 | FRANCE | N°17LY00606

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 05 juin 2018, 17LY00606


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B... E...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011 et des pénalités correspondantes.

Par l'article 2 du jugement n° 1406463 du 12 décembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance,

a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B... E...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011 et des pénalités correspondantes.

Par l'article 2 du jugement n° 1406463 du 12 décembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, a rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 février 2017 et 11 mai 2018 M. et Mme E..., représentés par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 12 décembre 2016 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande, et à titre subsidiaire, de prononcer sa réformation partielle ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités correspondantes, et à tout le moins des pénalités pour manquement délibéré dont l'imposition litigieuse a été assortie ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le lieu de direction effective de la société de droit polonais Podlogi Komfort SP Zoo se situe en Pologne et non en France ; la société ne dispose d'aucune adresse en France ;

- la jurisprudence et la doctrine administrative référencée BOI-RPPM-RCM-30-30-30-30 nos 40 à 60 ainsi que l'instruction 14B-3-03 du 22 mai 2003 relative à la convention de 1999 France-Algérie fixe les critères d'établissement du siège de direction effective au lieu où sont prises les décisions stratégiques en matière de gestion et de politique industrielle et commerciale nécessaires à la conduite des affaires de l'entreprise ;

- l'administration fiscale n'apporte pas la preuve qui lui incombe susceptible de renverser la présomption d'établissement du siège effectif au lieu du siège statutaire en Pologne en confondant les taches d'exécution matérielle et les tâches stratégiques relatives aux actes de direction effective ; l'administration fiscale ne parvient pas à caractériser l'existence d'un centre de décision situé en France et procède par affirmations ;

- M. E... assure la direction effective de l'entreprise en Pologne, notamment le recrutement du personnel ; les moyens d'exploitation sont présents sur place où la société dispose de locaux professionnels équipés et d'une salariée à plein temps chargée des tâches administratives ; il ne s'agit pas d'un simple centre de domiciliation ;

- l'activité de l'entreprise consiste avant tout à recruter du personnel et la direction effective est exercée sur place en Pologne au lieu de son siège statutaire ; les autorités polonaises, saisies, ont répondu que la société n'était pas résidente française en vertu de la convention fiscale applicable ;

- les dispositions de l'article 7 de la convention fiscale bilatérale trouvent à s'appliquer ; la société Podlogi Komfort SP Zoo dispose d'un établissement stable en Pologne imposable dans ce pays ; il eut été plus conforme à la réalité du fonctionnement de l'entreprise de taxer un établissement stable en France plutôt que de tenter de rapatrier la direction effective et le siège social en France pour l'imposer sur l'intégralité de ses bénéfices ;

- l'existence, le montant et l'appréhension des distributions ne sont pas établis par l'administration fiscale ; la présomption d'appréhension n'est pas fondée ;

- ils n'ont pas été en mesure de contester efficacement la reconstitution du bénéfice imposable pour aboutir au résultat taxable en France ;

- à titre subsidiaire, la preuve de l'existence des distributions et de leur appréhension n'est pas apportée ;

- l'administration fiscale n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'élément matériel et de l'élément intentionnel justifiant l'application des pénalités pour manquement délibéré ; la société n'est pas imposable en France et M. E... n'est redevable d'aucun impôt à ce titre ; la reconstitution du résultat imposable apparaît erronée ; la société a été déficitaire sur deux des trois années rectifiées en sorte que le gérant et son épouse ne peuvent être imposés sur le bénéfice d'aucun revenu distribué ; l'activité de l'entreprise étant régulièrement déclarée et imposée en Pologne, M. E... ignorait devoir déclarer ces sommes en France.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions des appelants à concurrence des dégrèvements prononcés et au rejet du surplus de la requête.

Le ministre soutient qu'aucun des moyens soulevés par M et Mme E... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention fiscale conclue entre la France et la Pologne le 20 juin 1975 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code civil ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., première conseillère ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... E... ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2009, 2010 et 2011 à l'issue duquel l'administration fiscale leur a notamment notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au motif que constituaient, sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, des revenus distribués au profit de M. E..., les bénéfices non déclarés réalisés par la société de droit polonais Podlogi Komfort SP ZOO, dirigée par M. E... et dont le siège social déclaré se situe à Varsovie en Pologne, mais pour laquelle une vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2011 a permis de mettre en évidence que le siège de direction effectif se situait en France à Thonon-les-Bains (Haute-Savoie). M. et Mme E... ont contesté ces rectifications que l'administration a confirmées dans sa réponse aux observations des contribuables. M. et Mme E...ont saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge et des pénalités correspondantes. Ils ont, en cours d'instance, bénéficié d'un dégrèvement partiel de ces suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, en droits et pénalités, au titre de l'année 2010 à raison de la réduction du montant des bénéfices regardés comme distribués. Par la présente requête, M. et Mme E... relèvent appel du jugement du 12 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus de leur demande.

Sur l'étendue du litige :

2. Par décision du 25 juillet 2017, l'administration fiscale a, postérieurement à l'introduction de la présente instance, accordé, en application de la décision du Conseil Constitutionnel QPC 10-2-2017 n°2016-610, à M. et Mme E... un dégrèvement partiel de 19 792 euros, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires de contributions sociales mises à leur charge au titre des années 2010 et 2011 correspondant à la réduction en base de ces contributions sociales au titre des deux années, initialement établies sur une base majorée de 25 % en application des dispositions du 2° de l'article 158-7 du code général des impôts. Les conclusions de leur requête sont, par suite, dans la mesure de ce montant, devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

3. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Toutefois, ces bénéfices sont augmentés de ceux qui sont légalement exonérés dudit impôt, y compris les produits déductibles du bénéfice net en vertu du I de l'article 216, ainsi que des bénéfices que la société a réalisés dans des entreprises exploitées hors de France et diminués des sommes payées au titre de l'impôt sur les sociétés. ". Aux termes de l'article 47 de l'annexe II audit code : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées. ".

En ce qui concerne la charge de la preuve :

4. En cas de refus des rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve, d'une part, de l'existence et du montant des revenus distribués et, d'autre part, de leur appréhension par le contribuable.

5. M. et Mme E... ont contesté, dans le délai légal, respectivement par lettres du 8 février 2013 et 9 août 2013, les suppléments d'impôts mis à leur charge dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers notifiés selon la procédure de rectification contradictoire par propositions de rectification du 21 décembre 2012 en ce qui concerne l'année 2009, et du 12 juillet 2013 en ce qui concerne les années 2010 et 2011. M. et Mme E... n'ayant pas accepté les rectifications découlant du rattachement à leur revenu global des revenus regardés comme distribués à la suite de la vérification de comptabilité de la société de droit polonais Podlogi Komfort SP ZOO, il incombe à l'administration d'apporter la preuve, d'une part, de l'existence, du montant et, d'autre part, de l'appréhension des sommes imposées entre leurs mains.

En ce qui concerne l'existence et le montant des distributions :

6. Aux termes de l'article 209 du code général des impôts : " I. - Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45, 53 A à 57, 108 à 117, 237 ter A et 302 septies A bis et en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France, de ceux mentionnés aux a, e, e bis et e ter du I de l'article 164 B ainsi que de ceux dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions. (...) ".

7. Aux termes des stipulations de l'article 4 de la convention signée le 20 juin 1975 entre la France et la Pologne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression " résident d'un Etat contractant " désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue, mais n'inclut pas les personnes qui ne sont imposables dans cet Etat que pour le revenu qu'elles tirent de sources situées dans ledit Etat ou pour la fortune qu'elles possèdent dans cet Etat. (...) 3. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne autre qu'une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, elle est réputée résident de l'Etat contractant où se trouve son siège de direction effective. ". Aux termes de l'article 5 de cette même convention : " Etablissement stable / 1 Au sens de la présente Convention, l'expression " établissement stable " désigne une installation fixe d'affaires où l'entreprise exerce tout ou partie de son activité. / 2. L'expression " établissement stable " comprend notamment : a) Un siège de direction ; /b) Une succursale ; / c) Un bureau d'affaires commerciales ; / (...) g) Un chantier de construction ou de montage dont la durée dépasse douze mois. / 3. On ne considère pas qu'il y a établissement stable si : (...) e) Une installation fixe d'affaires est utilisée, pour l'entreprise, aux seules fins de publicité, de fourniture d'informations, de recherches scientifiques ou d'activités analogues qui ont un caractère préparatoire ou auxiliaire. ". Aux termes de l'article 7 de cette même convention : " Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé. Si l'entreprise exerce son activité d'une telle façon, les bénéfices de l'entreprise sont imposables dans l'autre Etat mais uniquement dans la mesure où ils sont imputables audit établissement stable. ".

8. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer, en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office, si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale. Il en est ainsi à l'égard de toute convention ayant cet objet, telle que la convention conclue le 20 juin 1975 entre la France et la Pologne, alors même qu'elle définit directement les critères de la résidence fiscale à prendre en compte pour les besoins de son application.

9. La société de droit polonais Podlogi Komfort SP ZOO, qui exerce une activité de travaux de construction et de finition et de vente au détail de moquette, tapis et revêtement de sols, créée par M. B... E..., gérant statutaire et principal associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité sur la période du 29 août 2006, date de sa création, au 31 décembre 2011 à l'issue de laquelle l'administration fiscale a réintégré dans l'assiette de l'impôt sur les sociétés des produits non déclarés correspondant aux résultats de la société de droit polonais Podlogi Komfort SP ZOO, qu'elle a imposés comme des revenus distribués sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts au titre des années 2009, 2010 et 2011 entre les mains de M. E..., son gérant.

10. Les nombreuses pièces saisies lors de la visite domiciliaire diligentée en application des dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales auprès de la société Sols Confort Entreprise majoritairement détenue par le requérant ont permis à l'administration fiscale de démontrer que l'activité de la société de droit polonais Podlogi Komfort SP ZOO, dont l'appelant est le gérant et principal associé, était effectivement exercée en France par M. E... qui donnait ses directives à partir des locaux de la société Sols Confort Entreprise à Thonon-les-Bains où il est établi que la société de droit polonais disposait d'une adresse professionnelle à laquelle des courriers à son nom ont été retrouvés. Si le siège social de la société de droit polonais est formellement situé à Varsovie, il correspond à une adresse de domiciliation dans un centre d'affaires où la société louait un bureau de six mètres carrés et où M. E... n'établit s'être rendu qu'à quatre reprises en 2008. L'administration fiscale démontre, en faisant état des informations obtenues par l'exercice de son droit de communication et dans le cadre de l'assistance administrative internationale, qu'aucune activité n'était exercée en Pologne où la société ne disposait d'aucun moyen matériel d'exploitation. Le cabinet comptable de la société polonaise disposait d'une procuration à l'effet de signer les contrats de travail avec les salariés recrutés en Pologne pour travailler sur des chantiers situés en France. Les nombreux documents comptables et de gestion de la société saisis par l'administration fiscale lors de la visite domiciliaire permettent de démontrer que le siège de direction effective de la société se situait en France à Thonon-les-Bains, à partir duquel était donné l'ensemble des directives relatives à l'organisation des chantiers situés exclusivement en France, et à partir duquel M. E... effectuait le démarchage de nouveaux clients, signait et gérait les contrats de sous-traitance pour des travaux réalisés en France, établissait les factures de la société et gérait l'hébergement des salariés polonais, présents en France de manière continue, en procédant sur place au versement de leurs salaires. La circonstance que la société polonaise aurait respecté ses obligations fiscales en Pologne, où elle n'a déclaré que des déficits au titre des années en cause, est sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition de ses résultats en France et ne saurait démontrer l'existence d'un établissement stable dans ce pays. Dans ces conditions, l'administration fiscale est fondée à soutenir que la société de droit polonais Podlogi Komfort SP ZOO disposait en France d'un établissement stable au sens de l'article 5 de la convention fiscale franco-polonaise, dont l'activité est exclusivement exercée en France et depuis la France, dont les résultats sont imposables en France.

11. L'administration fiscale ayant démontré que l'ensemble de l'activité exercée par cette société était localisée en France, en l'absence d'éléments démontrant l'existence de recettes et de charges correspondant à l'activité déployée en Pologne susceptible de caractériser l'existence d'un établissement stable dans ce pays, les stipulations de l'article 7 de la convention franco-polonaise dont entendent se prévaloir, à titre subsidiaire, les appelants ne sont pas de nature à remettre en cause le montant et le caractère imposable en France de ses bénéfices déterminés par l'administration fiscale et, par suite, le montant des revenus réputés distribués.

12. M. E...ne produit aucun élément de nature à remettre en cause le montant imposable des bénéfices de la société de droit polonais déterminé par l'administration fiscale à l'issue du contrôle, et à permettre ainsi de considérer comme exagéré le montant des revenus distribués imposables en résultant, en se bornant à contester le montant des rectifications qui lui a été notifié au motif qu'il n'a pas été en mesure de contester efficacement le montant des bénéfices de la société Podlogi Konfort SP ZOO déterminés par l'administration fiscale à partir des pièces saisies au cours des opérations de visite ou communiquées au cours du contrôle.

En ce qui concerne l'appréhension des distributions par M. E... :

13. En faisant valoir, sans être sérieusement contestée, que M. E..., associé à 100 % avec son épouse et gérant statutaire et de fait de la société de droit polonais Podlogi Komfort SP Zoo dont il est également le représentant légal, et dont il assure, depuis la France, la direction effective en disposant des fonds sociaux et de la signature bancaire et sociale, est le véritable maître de l'affaire, l'administration fiscale apporte la preuve, qui lui incombe, de l'appréhension par M. et Mme E...des revenus distribués par cette société au titre des années 2009, 2010 et 2011.

Sur les pénalités :

14. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration. ".

15. L'administration fiscale fait valoir qu'en domiciliant sa société en Pologne, alors qu'il savait pertinemment que l'activité était effectivement conduite en France, M. E... a délibérément cherché à éluder l'impôt en France. Par suite, l'administration fiscale apporte la preuve qui lui incombe de l'intention délibérée du contribuable d'éluder l'impôt justifiant l'application de la majoration de 40 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts aux impositions litigieuses.

16. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté, pour l'essentiel, le surplus de leur demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme E...au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme E... à concurrence d'une somme de 19 792 euros.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à M. et Mme E... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme B... E... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 15 mai 2018, à laquelle siégeaient :

Mme Menasseyre, présidente assesseure assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

Mme C..., première conseillère,

Mme A..., première conseillère.

Lu en audience publique le 5 juin 2018.

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N° 17LY00606


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