Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Parc éolien des Grands Champs a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2015 lui refusant le permis de construire un parc de douze éoliennes et deux postes de livraison.
Par un jugement n° 1600385 du 13 décembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 décembre 2017, un mémoire enregistré le 14 mars 2019 et un mémoire (non communiqué) enregistré le 16 avril 2019, la société Parc éolien des Grands Champs, société par actions simplifiée, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 13 décembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Charente du 18 décembre 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Charente, à titre principal, de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de reprendre l'instruction de la demande de permis de construire dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'intervention des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France ne peut pas être admise dans la présente instance dès lors que le défendeur n'a pas produit à l'instance ; les sociétés ne justifient pas d'une atteinte portée par le projet en litige à leurs conditions d'exploitation ; d'ailleurs, leur projet est irréalisable dès lors qu'elles ne disposent pas des autorisations nécessaires ;
- le jugement attaqué est irrégulier en ce que les premiers juges ont violé les droits de la défense et le principe du contradictoire dès lors que l'intervention des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC a été admise alors que le mémoire en intervention est intervenu plus de neuf mois après la clôture d'instruction et ne lui a pas été communiqué ; le tribunal a par ailleurs accueilli les conclusions de l'intervenant tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative alors que ces conclusions sont irrecevables ;
- le jugement attaqué est entaché d'une violation du principe du contradictoire dès lors que son mémoire en date du 24 novembre 2017 n'a pas été communiqué ni étudié ;
- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction dans ses motifs dès lors que les premiers juges ont considéré que les circonstances de fait à la date du second refus de permis de construire du 18 décembre 2015 étaient différentes de celles à la date du premier en date des 14 novembre 2012 et 2 janvier 2013 alors qu'à la date du premier refus, la société MSE Le Vieux moulin était déjà titulaire de permis de construire délivrés les 21 décembre 2012 et 11janvier 2013 ;
- le jugement est entaché d'une méconnaissance de la chose jugée par le jugement n° 1300492 du 24 septembre 2015 ;
- le jugement est entaché d'un défaut d'examen du moyen tiré de la disparition du motif de refus du permis de construire ;
- c'est à tort que les premiers juges ont admis l'intervention des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC dès lors que la société MSE Le Vieux Moulin ne justifiait d'aucun intérêt à intervenir puisqu'elle a déclaré avoir vendu son projet en 2015 à la société SVNC et qu'elle ne possède ainsi plus d'autorisation d'exploiter ni de permis de construire ; de plus la SNVC ne justifie pas non plus d'intérêt à intervenir dès lors qu'elle n'a jamais demandé ni obtenu d'autorisation d'exploiter un parc éolien et que, si elle prétend avoir bénéficié de transferts de permis de construire du mois de novembre 2015 au mois de janvier 2016, elle n'a pas démontré que ces permis sont encore valides ;
- l'arrêté contesté est entaché d'une incompétence de son auteur dès lors qu'il a été signé par M. Lucien Giudicelli, secrétaire général de la préfecture alors que la compétence pour signer un tel arrêté appartient au préfet du département ;
- cet arrêté est entaché d'un défaut de motivation dès lors que le préfet de la Charente l'a motivé au regard de considérations étrangères à la sécurité publique, n'indique pas dans quelle mesure les caractéristiques de l'installation porteraient atteinte à la sécurité publique et s'est borné à reproduire les termes de son arrêté du 11 mars 2013 portant refus de l'autorisation d'exploiter le parc éolien de Nanteuil-en-Vallée ;
- cet arrêté a été pris en méconnaissance de l'autorité de la chose jugée dès lors que par jugement n°1300492 du 24 septembre 2015, devenu définitif, le tribunal administratif de Poitiers a annulé les premiers refus de permis de construire qui lui ont été opposés les 14 novembre 2012 et 2 janvier 2013 et qu'ainsi, le préfet de la Charente était tenu de respecter ce jugement ; c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les circonstances de fait à la date du second refus de permis de construire du 18 décembre 2015 étaient différentes de celles à la date du premier en date des 14 novembre 2012 et 2 janvier 2013 dès lors qu'à la date du premier refus, la société MSE Le Vieux moulin était déjà titulaire de permis de construire délivrés les 21 décembre 2012 et 11 janvier 2013 ;
- cet arrêté est erroné dès lors que le préfet de la Charente a considéré que deux projets de construction d'un parc éolien, l'un porté par la SAS Eolien des Grands Champs et l'autre porté par la société MSE Le Vieux Moulin étaient prévus sur le même secteur, alors que les arrêtés portant permis de construire et autorisation d'exploitation ont été rétroactivement annulés par la cour ou transférés à la société SVNC ;
- cet arrêté a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que, le projet de parc éolien de la société MSE Le Vieux moulin ayant disparu, le préfet de la Charente ne pouvait se fonder sur l'incompatibilité entre les deux projets pour refuser sa demande de permis de construire ; il appartenait à l'administration de prouver que le projet d'exploitation d'un parc éolien était de nature à porter atteinte à la sécurité ou à la salubrité publique et qu'un risque réel existait, ce qu'elle ne fait pas en se fondant sur une incompatibilité technique entre deux projets de parcs éoliens et sur les risques générés par " effets cumulés et dominos " ; son projet ne saurait induire de risque pour la sécurité publique eu égard à sa situation dans une zone relativement isolée ;
- le préfet de la Charente a entaché l'arrêté en litige d'une erreur d'appréciation dès lors que le site d'implantation du projet de parc éolien est situé dans les délimitations territoriales du schéma régional éolien Poitou-Charente approuvé par arrêté préfectoral du 29 septembre 2012, qu'il ne s'agit pas d'un site protégé, que ce projet ne rencontre pas d'opposition au niveau local et qu'ainsi, il s'inscrit parfaitement dans le cadre des politiques publiques énergétiques et environnementales locales.
Par des mémoires enregistrés le 26 octobre 2018 et 3 avril 2019 (non communiqué), les sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France, représentées par MeA..., concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Parc éolien des Grands Champs de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la société Parc éolien des Grands Champs n'est pas fondée à soutenir que son projet et les leurs ne sont pas incompatibles dès lors qu'elle a admis cette incompatibilité dans une note en délibéré devant le tribunal administratif ;
- la société Parc éolien des Grands Champs n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une violation des droits de la défense dès lors que le rapporteur public a invité, en première instance, la formation de jugement à renvoyer l'affaire afin que la société du Parc éolien des Grands Champs puisse répondre au mémoire en intervention et que celle-ci s'y est opposée ;
- elles disposent bien d'un intérêt à intervenir dès lors qu'elles agissent en leur qualité de titulaire de permis de construire sur le même secteur que l'arrêté contesté ; en vertu du principe d'indépendance des législations, la circonstance selon laquelle la société SVNC Energie France ne détiendrait pas d'autorisation d'exploitation ICPE est sans conséquence sur l'appréciation de son intérêt à agir au soutien du mémoire en défense du préfet de la Charente ;
- la société Parc éolien des Grands Champs n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer dès lors que le moyen tiré de ce que le motif du préfet de la Charente aurait disparu avait été soulevé dans un mémoire complémentaire qui n'a pas été communiqué à bon droit car n'apportant pas d'éléments nouveaux ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée est infondé dès lors que dans le premier jugement du 24 septembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a considéré que la société MSE le Vieux Moulin ne bénéficiait pas, à la date de l'arrêté attaqué, d'un permis de construire pour son projet de parc éolien alors que, lors du second, elle en bénéficiait ;
- le parc éolien Sud-Vienne Nord-Charente et le parc éolien de la société Parc éolien des Grands Champs sont situés sur le même secteur d'implantation ; si les deux parcs devaient être réalisés, ces éoliennes seraient donc imbriquées, à la limite du risque de collision des pales ; ainsi, la présence d'éoliennes supplémentaires est de nature à augmenter le risque pour la sécurité publique et dès lors, le préfet de la Charente n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 111-2 du code l'urbanisme en refusant la demande de permis de construire de son parc éolien à la société Parc éolien des Grands Champs ;
- contrairement à ce que soutient la société Parc éolien des Grands Champs, la non satisfaction des conditions posées à l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme n'entache pas l'arrêté contesté d'un défaut de motivation mais d'une erreur ;
- le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte est infondé dès lors que le préfet de la Charente a démontré en première instance que l'auteur de la décision était compétent pour signer celle-ci.
Par un mémoire enregistré le 4 avril 2019, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les sociétés MSE Le vieux moulin et SVNC Energie France ont intérêt à intervenir dès lors que le projet de la société requérante empêcherait leur propre projet et qu'elles étaient ou sont titulaires de permis de construire sans qu'importe le fait qu'elles ne disposent pas d'autorisations d'exploiter ni que leur intérêt n'a pas été reconnu dans le cadre d'une instance en tierce opposition ;
- l'absence de communication du mémoire du 24 novembre 2017 n'a pas entaché le jugement d'irrégularité dès lors qu'il n'apparaît pas que ce mémoire comportait l'exposé d'une circonstance de fait ou de droit dont la société n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire ;
- à la date du refus contesté, la société MSE le vieux moulin n'était pas titulaire d'un permis de construire ;
- dans son jugement du 24 septembre 2015, le tribunal n'a pas jugé que l'existence d'un risque lié à l'effet dominos ne suffisait pas à justifier le refus d'un permis de construire ; le tribunal n'a donc pas méconnu l'autorité de la chose jugée par ce jugement ;
- la délivrance d'un permis de construire à la société MSE Le vieux moulin constitue une circonstance de fait nouvelle, de sorte que le jugement attaqué ne méconnaît pas l'autorité de la chose jugée le 24 septembre 2015 ;
- la circonstance que le motif de refus du permis aurait disparu ne saurait avoir d'incidence sur la légalité de la décision contestée ; de plus, les permis de construire délivrés à la société MSE Le vieux moulin n'ont pas disparu du seul fait qu'ils ont été transférés à la société SVNC Energie France ;
- l'arrêté préfectoral qui est suffisamment motivé expose les risques liés à la proximité des deux projets de parcs éoliens dans des termes démontrant l'existence de ces risques ; le résumé non technique présenté par la société requérante mentionne que la zone de risque a une surface dont le rayon est de 150 mètres ; la société requérante a elle-même reconnu l'existence d'une situation de risque ; le caractère relativement isolé de la zone ne suffit pas à écarter le risque ; la société n'établit pas l'absence de risques ;
- le préfet a produit en première instance la délégation de signature à l'auteur de l'arrêté contesté.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant la société Parc éolien des Grands Champs.
Une note en délibéré présentée pour les sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France a été enregistrée le 2 mai 2019.
Une note en délibéré présentée pour la société Parc éolien des Grands Champs a été enregistrée le 7 mai 2019.
Une note en délibéré présentée par le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités a été enregistrée le 7 mai 2019.
Considérant ce qui suit :
1. Par une demande formulée le 29 décembre 2010, la société Parc éolien des Grands Champs a sollicité un permis de construire un parc de douze éoliennes et deux postes de livraison sur le territoire de la commune de Nanteuil-en-Vallée (Charente). Le silence gardé par le préfet de la Charente a fait naître une décision implicite de rejet qui a été confirmée par décision du 2 janvier 2013. Par jugement n° 1300492 du 24 septembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a annulé ces décisions. Par la suite, la société requérante a renouvelé sa demande le 15 décembre 2015. Par arrêté du 18 décembre 2015, le préfet de la Charente lui a de nouveau refusé la délivrance du permis de construire sollicité. La société Parc éolien des Grands Champs relève appel du jugement du 13 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'intervention en appel des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France :
2. Dans les circonstances de l'espèce, la société SVNC Energie France, titulaire de permis de construire, dont aucun élément n'indique qu'ils auraient perdu leur validité, pour un parc éolien sur des parcelles voisines ou, pour certaines éoliennes, sur les mêmes parcelles que celles concernées par le projet de la société requérante, justifie d'un intérêt suffisant au maintien de l'arrêté préfectoral contesté eu égard à la nature et à l'objet du litige. Dès lors que l'un au moins des intervenants est recevable, l'intervention doit être admise.
Sur la recevabilité de l'intervention des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France en première instance :
3. Contrairement à ce qui est soutenu, l'instruction de l'affaire devant le tribunal n'avait pas donné lieu à clôture antérieurement à l'intervention des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société SVNC Energie France justifie d'un intérêt suffisant au maintien de l'arrêté contesté. Dans ces conditions, et alors même que la société SVNC Energie France n'est pas titulaire d'une autorisation d'exploiter le parc éolien pour lequel elle dispose de permis de construire, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé recevable l'intervention de la société SVNC Energie France, qui intervenait conjointement avec la société MSE Le Vieux Moulin au soutien des conclusions du préfet de la Charente. Par suite, et dès lors qu'une intervention collective dont l'un au moins des intervenants est recevable, peut être admise dans son ensemble, c'est à bon droit que le tribunal a admis l'intervention des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France.
Sur le fond du litige :
4. Aux termes des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".
5. Il ressort des pièces du dossier que les deux projets de construction d'un parc éolien, l'un porté par la société Parc éolien des Grands Champs et l'autre par la société MSE Le Vieux Moulin, prévus dans le même secteur de la commune de Nanteuil-en-Vallée, se traduiront par la proximité de plusieurs couples d'éoliennes. Ainsi, trois couples d'éoliennes des installations de la société requérante et du projet initialement porté par la société MSE Le Vieux Moulin doivent être installés à des distances respectives de 108 mètres, 105 mètres et 143 mètres les unes des autres, ce qui réduirait à quelques mètres à peine la distance entre leurs pales, d'une longueur de 45 mètres pour un projet et d'une longueur de 46 mètres pour l'autre. Pour refuser la délivrance du permis de construire sollicité, le préfet de la Charente s'est fondé sur le fait que la proximité immédiate de trois couples d'aérogénérateurs rendait les deux projets incompatibles techniquement, sur la perte de rendement possible des éoliennes par l'effet de sillage, sur une augmentation, du fait de ce cumul, des impacts en matière de dégradation de l'insertion paysagère, sur les risques générés par les effets cumulés et l'effet domino en terme de distance d'effondrement et de zones de projection de glace ou de pale, sur le fait que la compatibilité entre les deux projets n'était pas démontrée et, enfin, sur l'absence de mesures possibles destinées à prévenir les dangers et inconvénients de l'installation dans des conditions acceptables pour le voisinage.
6. En premier lieu, les éventuelles difficultés de rendement des aérogénérateurs liées à la proximité entre plusieurs d'entre eux, qui ne créent, par elles-mêmes, aucune atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, ne sont pas au nombre des motifs qui peuvent légalement justifier un refus de permis de construire sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Il en va de même de l'éventuelle incompatibilité technique entre les projets, sur laquelle l'administration n'apporte aucune précision, notamment quant à la nature et à l'importance des atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique qui en résulteraient. Les effets cumulés des parcs éoliens projetés sur le paysage, sur lesquels l'administration n'apporte d'ailleurs pas de précision, ne sont pas davantage par eux-mêmes de nature à justifier un refus au titre des atteintes à la sécurité ou à la salubrité publique.
7. En second lieu, il ne ressort d'aucun élément du dossier que la proximité entre deux aérogénérateurs soit par elle-même de nature à favoriser la survenance de bris de pales ou d'effondrements de mâts. Il est par ailleurs constant que le projet de parc éolien de la société requérante est éloigné de plus de 500 mètres de toute zone destinée à l'habitation, à 840 mètres de l'habitation la plus proche et à 6 kilomètres d'une route nationale. Dans ces circonstances, et eu égard à la rareté des accidents liés à des bris de pales ou à l'effondrement d'un mât, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'effet domino lié au risque de ce type d'accidents fasse courir aux personnes susceptibles de fréquenter le site un danger significativement plus important que celui qui résulte de la seule présence d'un aérogénérateur. Ainsi, et en l'absence de tout élément de nature à traduire l'existence d'une atteinte pour la sécurité ou la salubrité publique du fait de l'implantation du projet à proximité du projet de la société MSE Le Vieux Moulin, le préfet ne pouvait légalement refuser à la société Parc éolien des Grands Champs la délivrance du permis de construire sollicité en se fondant sur l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. La société pétitionnaire est, par suite, fondée à demander pour ce motif l'annulation de l'arrêté contesté du 18 décembre 2015.
8. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est en l'état du dossier de nature à fonder l'annulation de la décision contestée.
9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que la société Parc éolien des Grands Champs est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Charente du 18 décembre 2015 et a mis à sa charge le versement de sommes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur les conclusions en injonction :
10. Lorsque le juge annule un refus d'autorisation ou une opposition à une déclaration après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou de prendre une décision de non-opposition. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui eu égard aux dispositions de l'article L. 600-2 du même code demeurent.... L'autorisation d'occuper ou utiliser le sol délivrée dans ces conditions peut être contestée par les tiers sans qu'ils puissent se voir opposer les termes du jugement ou de l'arrêt.
11. En l'absence de tout élément y faisant obstacle, dès lors notamment que l'administration, pour délivrer le permis, peut se référer aux avis émis précédemment en l'absence de changement dans les circonstances de droit ou de fait, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Charente délivre à la société Parc éolien des Grands Champs le permis de construire qu'elle avait sollicité pour les installations projetées. Il y a lieu de prescrire cette mesure dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Parc éolien des Grands Champs d'une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens. Les sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France étant intervenantes en appel, elles n'ont pas la qualité de parties et ne peuvent, par suite et en tout état de cause, demander l'application à leur profit des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Leurs conclusions sur ce point ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : L'intervention des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France est admise.
Article 2 : Les articles 2 et 3 du jugement n°1600385 du tribunal administratif de Poitiers du 13 décembre 2017 et l'arrêté du préfet de la Charente du 18 décembre 2015 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Charente de délivrer à la société Parc éolien des Grands Champs le permis de construire sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Les conclusions d'appel des sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Parc éolien des Grands Champs, au préfet de la Charente, au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et aux sociétés MSE Le Vieux Moulin et SVNC Energie France.
Délibéré après l'audience du 30 avril 2019 à laquelle siégeaient :
Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 mai 2019.
Le premier assesseur,
Frédéric FaïckLe président-rapporteur,
Elisabeth JayatLe greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX04033