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15/03/2018 | FRANCE | N°17-11891

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 mars 2018, 17-11891


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que les éléments recueillis dans le cadre d'une vérification irrégulière par échantillonnage et extrapolation ne peuvent fonder, même dans la limite des bases effectivement vérifiées, un redressement ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société BS services a fait l'objet d'un contrôle portant sur les années 2008 à 2010 par l'URSSAF d'Ile-de-France, qui a do

nné lieu à une lettre d'observations du 19 mai 2011 ; que le redressement relatif aux indemn...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que les éléments recueillis dans le cadre d'une vérification irrégulière par échantillonnage et extrapolation ne peuvent fonder, même dans la limite des bases effectivement vérifiées, un redressement ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société BS services a fait l'objet d'un contrôle portant sur les années 2008 à 2010 par l'URSSAF d'Ile-de-France, qui a donné lieu à une lettre d'observations du 19 mai 2011 ; que le redressement relatif aux indemnités de grand déplacement a été calculé par la méthode d'échantillonnage et d'extrapolation ; que son recours ayant été rejeté par la commission de recours amiable, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu qu'ayant constaté que le contrôle des indemnités de grand déplacement avait été effectué par échantillonnage et extrapolation sans que l'accord de l'employeur au recours à cette méthode ait été préalablement recueilli, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que l'inspecteur de l'URSSAF a procédé à une analyse exhaustive de quatorze dossiers pour l'année 2008, de dix-sept dossiers pour 2009 et de huit dossiers pour 2010, et qu'il n'y a pas lieu, par conséquent, d'annuler la partie du redressement établi sur ces bases réelles ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne l'URSSAF d'Ile-de-France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'URSSAF d'Ile-de-France et la condamne à payer à la société BS services la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille dix-huit, et signé par Mme Flise, président, et par Mme Szirek, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société BS services

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris, et en conséquence d'AVOIR confirmé le redressement de cotisations opéré par l'URSSAF d'Ile de France sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 pour un montant de 277.728 € en principal et de 38.141 € au titre des majorations de retard, d'AVOIR condamné la société à payer à l'URSSAF d'Ile de France la somme 315.869 € au titre des cotisations et majorations de retard afférentes à la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010, et d'AVOIR débouté la société BS SERVICES de sa demande de remboursement de la somme de 18.523 € ;

AUX MOTIFS QUE « [sur le] Chef de redressement N° 3 : indemnités de grands déplacements. La SARL BS SERVICES fait valoir : - que l'inspecteur de l'URSSAF a choisi d'utiliser la méthode de contrôle par échantillonnage et extrapolation prévue à l'article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale sans recueillir l'accord préalable de la SARL BS SERVICES et en la privant de l'ensemble des garanties de procédure instaurées par ces dispositions, - que le non-respect de ces dispositions constitue un vice de forme de nature à justifier l'annulation du redressement opéré. Il ressort des articles R. 243-59-2 et R. 242-5 du code de la sécurité sociale que le redressement doit être établi sur des bases réelles lorsque la comptabilité de l'employeur permet à l'agent de contrôle d'établir le chiffre exact des sommes à réintégrer, le recours à la méthode d'évaluation par sondage et extrapolation sur la base d'une comptabilité réelle de l'entreprise n'étant régulière que si l'employeur a donné son accord pour l'utilisation d'une telle méthode ou lorsque la comptabilité de l'entreprise est incomplète. Il ressort de la lettre d'observations qu'il a d'abord été demandé à la société de fournir les contrats de mission et les justificatifs de domicile ; qu'au vu du nombre important de salariés concernés, il lui a été demandé de fournir les dossiers d'une dizaine de salariés. A la suite de cette étude, la liste des dossiers a été étendue aux salariés percevant des indemnités de grand déplacement supérieur à 5.000 €. En l'absence de pièces justifiant de la résidence habituelle des salariés, l'exclusion de l'assiette des cotisations au titre des frais professionnels au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale n'a pas été admise. Les sommes versées ont été réintégrées dans l'assiette des cotisations selon un ratio calculé à partir des données fournies. Le redressement opéré du chef des indemnités de grand déplacement a été évalué à partir de 14 dossiers examinés pour l'année 2008 (base 126.978 €), 17 dossiers pour l'année 2009 (base 147.190 €) et 8 dossiers pour l'année 2010 (base 68.729 €) dont les résultats ont été étendus par extrapolation à l'ensemble des salariés. Il est établi que ce contrôle a été effectué par échantillonnage et extrapolation sans que l'accord de l'employeur au recours à cette méthode ait été préalablement recueilli. Cependant, ainsi que le relèvent les premiers juges, l'inspecteur URSSAF a procédé à une analyse exhaustive de 14 dossiers pour l'année 2008, de 17 dossiers pour 2009 et de 8 dossiers pour 2010. Il n'y a donc pas lieu d'annuler la partie du redressement établi sur ces bases réelles. En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a maintenu le redressement opéré à hauteur de 182.720 € en principal et condamné la société BS SERVICES au paiement de la somme de 277.728 € en principal et 38.141 € au titre des majorations de retard » ;

ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « en l'espèce, le redressement opéré du chef des indemnités de grand déplacement a été évalué à partir de 14 dossiers examinés pour l'année 2008 (base 126.978 €), 17 dossiers pour l'année 2009 (base 147.190 €) et 8 dossiers pour l'année 2010 (base 68.729 €), dont les résultats ont été étendus par extrapolation à l'ensemble des salariés ; Attendu que la société indique que le recours à une méthode d'évaluation par extrapolation sur la base d'une comptabilité réelle n'est pas régulier en l'absence de son accord pour un tel procédé et que le redressement de ce chef doit donc être annulé ; Attendu cependant qu'il est établi que l'inspecteur a procédé à une analyse exhaustive de 14 dossiers pour l'année 2008, 17 dossiers pour 2009 et 8 dossiers pour 2010 et qu'il n'y a donc pas lieu d'annuler la partie du redressement établie sur ces bases réelles ; Attendu que la société n'a pas contesté le principe et le nouveau chiffrage opéré par l'URSSAF ; Que dès lors, le redressement opéré à ce titre sera maintenu à hauteur de 182.720 € en principal ; En conséquence, la société BS SERVICES sera condamnée au paiement de la somme de 277.728 € en principal et de 38.141 € au titre des majorations de retard » ;

1) ALORS QUE selon l'article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale, les inspecteurs du recouvrement peuvent proposer à l'employeur d'utiliser les méthodes de vérification par extrapolation ou par échantillonnage ; qu'ils sont tenus dans cette hypothèse de mettre en oeuvre un protocole composé de quatre phases définies par l'arrêté du 11 avril 2007 : à savoir la constitution d'une base de sondage, le tirage d'un échantillon, la vérification exhaustive de l'échantillon et l'extrapolation à la population ayant servi de base à l'échantillon ; qu'après avoir été informé de la mise en oeuvre de cette technique de calcul, l'employeur peut s'opposer à l'utilisation de ces méthodes ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté que « ce contrôle [portant sur les indemnités de grands déplacement] a été effectué par échantillonnage et extrapolation sans que l'accord de l'employeur au recours à cette méthode ait été préalablement recueilli » ; qu'il s'en induisait que la procédure mise en oeuvre par les inspecteurs de l'URSSAF d'Ile de France était entachée d'une irrégularité de fond, l'organisme de recouvrement ayant entendu appliquer la procédure de vérification et de redressement par échantillonnage sans respecter la procédure en vigueur, et notamment sans recueillir l'accord préalable de l'employeur ; que ce manquement aux dispositions protectrices des droits du cotisant a entaché de nullité, pris en son ensemble, le chef de redressement n° 3 relatif aux indemnités de grand déplacement ; qu'en décidant le contraire et en validant sur ce point le redressement infligé à la société BS SERVICES, la cour d'appel a violé les articles L. 242-1, R. 243-59-2 et R. 242-5 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au litige ;

2) ALORS QUE toute substitution de motif décidée par l'URSSAF après l'envoi des lettres d'observations et de mise en demeure intervient en méconnaissance des droits de la défense du cotisant en ce qu'elle entraîne la perte pour le cotisant de son droit de se défendre en toute connaissance de cause avant que ne lui soit notifié le redressement ; qu'en l'espèce en validant néanmoins pour partie le chef de redressement n° 3 sur une base réelle, tout en constatant que l'URSSAF avait entendu procéder, dans la lettre d'observations, à un redressement sur la base de la technique de vérification par échantillonnage, la cour d'appel a violé les articles L. 242-1 et R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au litige, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-11891
Date de la décision : 15/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX - Preuve - Procès-verbaux des contrôleurs de la sécurité sociale - Opérations de contrôle - Méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation - Mise en oeuvre - Vérification irrégulière - Effets - Détermination - Portée

SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX - Preuve - Procès-verbaux des contrôleurs de la sécurité sociale - Opérations de contrôle - Méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation - Mise en oeuvre - Vérification irrégulière - Effets - Redressement sans fondement - Eléments recueillies dans la limite des bases effectivement vérifiées - Absence d'influence

Il résulte de l'article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale que les éléments recueillis dans le cadre d'une vérification irrégulière par échantillonnage et extrapolation ne peuvent fonder, même dans la limite des bases effectivement vérifiées, un redressement


Références :

article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 08 décembre 2016

A rapprocher :2e Civ., 4 décembre 2008, pourvoi n° 08-10665, Bull. 2008, II, n° 263 (rejet) ;2e Civ., 19 juin 2014, pourvoi n° 13-19150, Bull. 2014, II, n° 149 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 mar. 2018, pourvoi n°17-11891, Bull. civ.Bull. 2018, II, n° 58
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, II, n° 58

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.11891
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