Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger à l'indemniser du préjudice subi lors de son hospitalisation en date du 2 mai 2008 et de lui allouer une indemnité provisionnelle de 15 000 euros.
Par un jugement n° 1300098 du 4 février 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 15 mars 2016,
12 mai 2016, 13 mai 2016, 12 septembre 2016 et 3 mars 2017, M. B...A..., représenté par Me Parison, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement et notamment de l'infirmer en ce qu'il a mis à sa charge une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au profit du centre hospitalier ;
2° de diligenter une contre expertise et de mettre les frais d'expertise à la charge du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger d'Aulnay-sous-Bois ;
3° de réserver les dépens ;
4° de condamner le centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger
d'Aulnay-sous-Bois, par l'effet dévolutif de l'appel, au paiement d'une somme de 10 000 000 d'euros en réparation du préjudice subi ;
5° de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger d'Aulnay-sous-Bois le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A...soutient que :
- le jugement entrepris est insuffisamment motivé s'agissant de sa réponse au moyen tiré de ce que la responsabilité de l'établissement hospitalier serait engagée dès lors qu'il n'aurait pas donné son consentement à l'intervention chirurgicale litigieuse ; il ne précise pas les raisons pour lesquelles il aurait été retenu caché pendant plus de cinq jours pour y subir une expérimentation médicale ;
- le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il écarte les autres fautes invoquées ;
- la responsabilité du centre hospitalier est engagée à raison des conditions de son hospitalisation ;
- il n'est pas établi que l'opération chirurgicale qu'il a subie s'imposait en l'absence de fracture avec déplacement ;
- l'hôpital ne justifie d'aucune urgence ou raison impérieuse relative, par exemple, à son état, l'ayant conduit à se soustraire à son obligation d'information ; il n'a pas donné son consentement à cette intervention ; qu'il n'est pas justifié de la nécessité de la pose d'une plaque en PDS ;
- les déficits de la sensibilité dans le territoire du nerf sous orbitaire, de même que les troubles de la statique et de la motricité oculaire dont il souffre trouvent leur origine dans l'intervention qui a été pratiquée ;
- ses préjudices sont réels et sérieux ;
- le taux d'IPP de 5% retenu par l'expert doit être réévalué ;
- le retentissement psychologique est important, de même que le préjudice esthétique ;
- les préjudices de déficit fonctionnel total et permanent ont été sous-estimés par l'expert ;
- la date de consolidation retenue par l'expert est abstraite ;
- le préjudice de gêne fonctionnelle doit être réévalué ;
- l'expertise a été rendue sur le fondement d'éléments sommaires ; qu'il n'a pas été mis en mesure de produire toutes les pièces utiles au rapport de l'expert ;
- c'est à tort que les premiers juges ont jugé inutile le complément d'expertise qu'il demandait en première instance ; qu'il n'appartenait qu'à l'expert de se prononcer sur la nécessité d'une nouvelle expertise ;
- le compte rendu opératoire daté du 6 mai 2008 ainsi que le compte-rendu d'hospitalisation établi le 20 mai 2008 n'ont pas été rédigés, ni signés par le praticien ayant réalisé son opération ; les signataires de ces décisions ne disposaient donc pas de la compétence pour le faire ; la signature a été falsifiée ; il n'est pas possible de déterminer le véritable auteur de ces actes.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lepetit-Collin,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de M.A....
Une note en délibéré a été enregistrée le 16 mai 2018 pour M.A....
1. Considérant que M. A...a été admis, le 1er mai 2008, aux urgences du centre hospitalier Robert Ballanger d'Aulnay-Sous-Bois, pour un traumatisme de l'hémiface droite ; qu'il y a subi une intervention chirurgicale le 2 mai 2008 destinée à réduire la fracture de l'arcade zygomatique constatée avec mise en place de trois plaques ; que, le 8 octobre 2012,
M. A...a adressé au centre hospitalier une réclamation préalable tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis en conséquence de cette opération ; que le centre hospitalier a rejeté cette demande par courrier en date du 6 novembre 2012 ; que le
5 décembre 2012, M. A...a saisi la Commission de Conciliation et d'Indemnisation
d'Ile-de-France qui a rendu un avis défavorable à sa demande le 9 avril 2013 ; qu'enfin
M. A...a saisi le Tribunal administratif de Montreuil qui, par jugement en date du
4 février 2016, a rejeté sa demande indemnitaire ; que M. A...relève appel de ce jugement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions et moyens d'appel du requérant :
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que le jugement attaqué répond, en ses points 3 et 4, aux moyens tirés de l'existence d'une faute médicale et, en son point 8, au moyen tiré du défaut d'information et donc de consentement éclairé du patient et est suffisamment motivé dans la réponse qu'il donne à ces moyens ; que si le jugement ne revient pas sur l'ensemble des circonstances ayant entouré les conditions d'hospitalisation de M.A..., les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments, ni de faire état de l'ensemble des éléments de fait invoqués par le requérant à l'appui de sa demande dès lors, notamment, qu'aucune faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier n'était expressément invoquée en première instance ;
3. Considérant que si M. A...se plaint de ne pas avoir pu être présent ou représenté à l'une des réunions d'expertise à laquelle il avait été convoqué, les opérations d'expertise n'ont pas de ce seul fait méconnu le principe du contradictoire alors, au surplus, qu'il ressort des pièces du dossier que l'expert a organisé, le 10 février 2015, une réunion à laquelle le requérant a pu assister ; qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'imposait par ailleurs à l'expert de remettre un pré-rapport ; que s'il est enfin fait grief au rapport de traiter de questions dépassant le cadre de la mission de l'expert, mais, à l'inverse, de ne pas avoir pris en compte des clichés réalisés les 12 février et 7 avril 2015, ces circonstances non plus que les autres insuffisances du rapport d'expertise alléguées par M. A...ne faisaient pas davantage obstacle à ce que le rapport de l'expert, qui est daté du 10 février 2015 et qui constitue une des pièces du dossier, soit retenu à titre d'élément d'information par les premiers juges qui ont donc pu, sans entacher leur jugement d'irrégularité, se fonder sur les conclusions de ce rapport ;
Sur le bien fondé du jugement :
4. Considérant que M. A...se prévaut, en premier lieu, de fautes commises dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier ; qu'il soutient avoir été trompé par les médecins du centre hospitalier qui, dans un premier temps, l'auraient assuré qu'il n'y aurait pas d'opération, dans un second temps auraient falsifié les enregistrements, puis, dans un dernier temps, l'auraient hospitalisé dans un service qui n'était pas celui dans lequel opérait le chirurgien qui n'avait d'ailleurs aucun titre pour procéder à cette opération et qui a quitté le centre hospitalier depuis lors ; que toutefois, le rapport de l'expert relève que les conditions dans lesquelles s'est déroulée la prise en charge au centre hospitalier Robert Ballanger
d'Aulnay-sous-Bois ont été conformes aux données acquises de la science et aux règles de l'art ; que M. A...n'apporte aucun élément de nature à faire douter des conclusions de l'expertise sur ce point et à apporter un commencement de preuve des fautes dont il se prévaut ; que les fautes alléguées ne sont donc pas établies ; que la circonstance, alléguée, que le compte rendu opératoire et le compte rendu d'hospitalisation n'auraient pas été signés par le praticien ayant réalisé l'opération n'est, en tout état de cause, à l'origine d'aucun préjudice spécifique pour
M. A...qui ne peut donc prétendre à aucune indemnisation à ce titre ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que M. A...soutient que le centre hospitalier aurait commis deux fautes médicales, la première résidant dans la décision de pratiquer une intervention chirurgicale alors que son état ne le nécessitait pas, la seconde commise au décours de l'acte chirurgical lui-même ;
6. Considérant toutefois que le rapport de l'expert relève sans ambigüité que l'intervention chirurgicale apparaissait justifiée afin de réduire la fracture de l'os malaire et le maintenir par une ostéosynthèse réalisée par de petites plaques et vis dès lors que l'étude de la littérature permet de relever que les fractures du malaire nécessitent toujours un traitement chirurgical lorsqu'elles s'accompagnent d'un déplacement et que les déplacements du malaire ainsi mis en évidence doivent être réduits avec la plus grande précision possible, car seul le rétablissement de rapports anatomiques parfaits permet d'éviter au maximum l'installation de graves séquelles post-traumatiques à la fois esthétiques, fonctionnelles et nerveuses ; que si
M. A...conteste l'existence même de cette fracture, la fiche d'entrée de M. A...aux urgences qui figure, reproduite dans le rapport de l'expert, indique, au titre du motif d'hospitalisation " trauma crânien. Fracture (F barré) paroi ant et ext du sinus maxillaire. 2 fractures arcade zygomatique droit et (...) Fracture plancher orbite droit... " ; que ce constat est confirmé par le panoramique réalisé le même jour ainsi que par les autres documents établis au service des urgences le 1er mai 2008, le compte rendu opératoire de même que le compte rendu d'hospitalisation ; que les conclusions de l'expert elles-mêmes sont sans ambigüité ; que le choix d'une intervention chirurgicale réalisée sous anesthésie générale destinée, notamment, à réduire la fracture déplacée de l'os malaire dont M. A...a été victime ne peut donc être regardée comme fautif ;
7. Considérant que M. A...se prévaut d'une faute commise au cours de l'acte chirurgical qu'il soutient être à l'origine de déficits de la sensibilité dans le territoire du nerf sous orbitaire, de troubles de la statique et de la motricité oculaire et de conséquences esthétiques ; que si le rapport de l'expert indique que ce dernier a relevé, à l'examen, une perte une zone d'hypoesthésie atteignant le rebord orbital et la zone jugale adjacente, la partie latérale droite de la pyramide nasale, l'aile narinaire droite et la lèvre supérieure droite, ainsi que le déplore l'expert, le dossier médical du requérant ne permet pas de savoir si, à son arrivée, le patient présentait, ou non, des troubles de la sensibilité au niveau du visage et principalement dans le territoire du nerf sous-orbitaire droit et indique que l'absence de cliché post opératoire ne permet pas de répondre à la question de savoir si le déplacement qui existait préalablement à l'intervention s'est reproduit dans les suites du geste opératoire ou si la réduction de la fracture à l'occasion de l'opération a été incomplète ; que toutefois, il résulte de l'instruction que l'absence de cliché post opératoire est notamment imputable à M. A...qui devait se présenter à un entretien post opératoire et ne s'y est jamais rendu ; que si de tels clichés auraient pu être faits en post opératoire immédiat, il est vraisemblable, qu'en tout état de cause, le rendez-vous de contrôle avait cet objet et que ce contrôle à distance n'a pas pu avoir lieu du fait du requérant ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin de prononcer le complément d'expertise demandé par
M.A..., il ne peut être retenu de façon formelle, certaine et exclusive de lien de causalité entre l'intervention chirurgicale du 2 mai 2008 et les doléances de M. A...;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l'exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver. / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. (...) " ; que, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les médecins de leur obligation ; qu'un manquement des médecins à leur obligation d'information engage la responsabilité de l'hôpital dans la mesure où il a privé le patient d'une chance de se soustraire au risque lié à l'intervention en refusant qu'elle soit pratiquée ; que c'est seulement dans le cas où l'intervention était impérieusement requise, en sorte que le patient ne disposait d'aucune possibilité raisonnable de refus, que les juges du fond peuvent nier l'existence d'une perte de chance ; que, par ailleurs, indépendamment de la perte d'une chance de refuser l'intervention, le manquement des médecins à leur obligation d'informer le patient des risques courus ouvre pour l'intéressé, lorsque ces risques se réalisent, le droit d'obtenir réparation des troubles qu'il a subis du fait qu'il n'a pas pu se préparer à cette éventualité ;
9. Considérant qu'il n'est pas contesté que M. A...n'a reçu aucune information sur la nature et les conséquences prévisibles de l'opération qu'il était susceptible de subir et de nature à recueillir son consentement éclairé sur les suites de l'opération subie ; que toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 7, il ne résulte pas l'instruction que les séquelles dont se prévaut le requérant seraient la conséquence de la réalisation d'un risque connu d'invalidité consécutif à l'acte chirurgical à l'origine du litige et non de l'accident dont il a été victime ; que ses demandes à ce titre ne peuvent donc qu'être rejetées ;
10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1111-4 du code de la santé publique : " Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé. (...) Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. (...) " ; que si M. A...soutient également ne pas voir donné son consentement à l'opération, il ne se prévaut d'aucun préjudice d'impréparation, ni d'aucun préjudice moral conséquences de cette faute ; que, par suite, ses demandes sur ce point ne peuvent qu'être rejetées ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner la réalisation d'une contre-expertise ou d'une expertise complémentaire, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande, mis les dépens de l'instance à la charge de l'Etat et mis à la charge du requérant une somme de 3 000 euros au titre des frais liés au litige de première instance ; que, par voie de conséquence, sa requête, y compris dans ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peut qu'être rejetée ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
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N° 16VE00786