Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Café Georges V a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation du titre exécutoire n°00075570 émis à son encontre le 20 mars 2015 par le maire de Paris et à la décharge de l'obligation de payer une somme 78 104,91 euros au titre des droits de voirie additionnels résultant dudit titre exécutoire, outre une demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1513069/4-1 du 29 septembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire susvisé, a déchargé la société Café Georges V de l'obligation de payer la somme de 78 104,91 euros au titre des droits de voirie additionnels de l'année 2014 et a mis à la charge de la ville de Paris la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour:
Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2016, la ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 septembre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande de la société Café Georges V devant le Tribunal administratif de Paris ;
3°) de mettre à la charge de la société Café Georges V une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier car il est insuffisamment motivé ;
- la demande de première instance était irrecevable car tardive;
- c'est à tort que les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de l'erreur de droit pour méconnaissance de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques du fait de l'application pure et simple aux indemnités pour installation irrégulière de dispositifs de chauffage et d'écrans parallèles sur une contre-terrasse du tarif existant pour le calcul des redevances dues pour l'installation de dispositifs de chauffage et d'écrans parallèles sur une terrasse ;
- les autres moyens soulevés en première instance par la société Café Georges V, que la Cour devra examiner dans le cadre de l'évocation ou de l'effet dévolutif de l'appel, sont infondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2017, la société Café Geoges V, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la ville de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la ville de Paris ne sont pas fondés.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 16 mai 2017, la ville de Paris maintient ses conclusions par les mêmes moyens.
Par un second mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2017, la société Café Georges V maintient ses conclusions par les mêmes moyens.
Par ordonnance du 22 mai 2017, la clôture d'instruction a été reportée au 6 juin 2017 à 12 heures.
Un mémoire a été déposé par la société Café Georges V le 21 mars 2018 postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques,
- le nouveau règlement des étalages et terrasses applicable, à compter du 1er juin 2011, sur l'ensemble du territoire de la ville de Paris,
- l'arrêté du maire de Paris en date du 24 décembre 2013 fixant les nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2014,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pagès,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- les observations de Me A...pour la ville de Paris,
- et les observations de Me B...pour la société Café Georges V.
1. Considérant que la SAS Café George V, qui exploite un café, liquoriste de luxe avec buffet et restaurant, 120 avenue des Champs-Élysées à Paris, a fait l'objet d'un avis des sommes à payer pris en application d'un titre exécutoire n° 75570, en date du 20 mars 2015, de 78 104,91 euros pour le paiement de droits de voirie additionnels au titre de l'année 2014 afférents aux dispositifs de chauffage et d'écrans parallèles installés sur sa contre-terrasse ; que, par un jugement du 29 septembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire susvisé, a déchargé la société Café Georges V de l'obligation de payer la somme de 78 104,91 euros au titre des droits de voirie additionnels de l'année 2014 et a mis à la charge de la ville de Paris la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que la ville de Paris relève appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que, contrairement à ce que soutient la ville de Paris, les premiers juges ont suffisamment explicité, aux points 2 à 4 du jugement attaqué, les motifs de droit et de fait qui les conduisaient à accueillir le moyen tiré de l'erreur de droit pour méconnaissance de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques du fait de l'application pure et simple aux indemnités pour installation irrégulière de dispositifs de chauffage et d'écrans parallèles sur une contre- terrasse, du tarif en vigueur pour le calcul des redevances dues pour l'installation de dispositifs de chauffage et d'écrans parallèles sur une terrasse ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour insuffisance de motivation doit donc être écarté ;
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la ville de Paris tirée de la tardiveté de la demande de première instance :
3.Considérant que la ville de Paris soutient que la demande de première instance était irrecevable car tardive, ce qu'il appartenait aux premiers juges de relever au besoin d'office ; que, toutefois, la ville de Paris n'apporte pas la preuve de la notification du titre exécutoire du 20 mars 2015, pas plus qu'elle n'apporte la preuve de la notification de l'avis des sommes à payer correspondant à ce titre exécutoire ; que faute de connaître la date de notification du titre exécutoire ou de l'avis des sommes à payer, la ville de Paris n'est pas fondée à soutenir que la demande de première instance, enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Paris le 29 juillet 2015, était tardive et donc irrecevable ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance. (...) " ; que l'article L. 2125-3 du même code dispose : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation. " ; qu'aux termes du " 3 - terrasses ouvertes " du nouveau règlement des étalages et terrasses applicable, à compter du 1er juin 2011, sur l'ensemble du territoire de la ville de Paris : " 3.1- Définition. Une terrasse ouverte est une occupation délimitée du domaine public de voirie destinée limitativement aux exploitants de débits de boissons, restaurants, glaciers et salons de thé pour disposer des tables et des sièges afin d'y accueillir leur clientèle (...) " ; que l'article 4.1 du même règlement définit les contre-terrasses comme : " une occupation du domaine public, destinée limitativement aux exploitants de débits de boissons, restaurants, glaciers et salons de thé, non contiguë à la façade du commerce devant laquelle elle est établie, et ce pour y disposer des tables et des chaises pour y accueillir leur clientèle (...) un espace destiné à la circulation des piétons d'une largeur de 1,80 mètre au minimum doit être laissé libre entre la façade de l'immeuble, ou la terrasse éventuelle existante, et la contre-terrasse " ; que par ailleurs, l'article DG.6 du même règlement précise que " (...) Le chauffage des contre-terrasses, quel qu'en soit le mode, est interdit (...) " ;
5. Considérant qu'une commune est fondée à réclamer à l'occupant, qui utilise de manière irrégulière le domaine public, une indemnité compensant les revenus qu'elle aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant cette période ; qu'à cette fin, elle doit rechercher le montant des redevances qui auraient été appliquées si l'occupant avait été placé dans une situation régulière, soit par référence à un tarif existant, lequel doit tenir compte des avantages de toute nature procurés par l'occupation du domaine public, soit, à défaut de tarif applicable, par référence au revenu, tenant compte des mêmes avantages, qu'aurait pu produire l'occupation régulière de la partie concernée du domaine public communal ;
6. Considérant que pour calculer le montant de l'indemnité due pour l'année 2014 au titre des droits de voirie additionnels relatifs à l'utilisation irrégulière de dispositifs de chauffage et d'écrans parallèles sur la contre-terrasse installée par la SAS Café George V, la ville de Paris s'est référée, comme cela ressort de l'avis des sommes à payer litigieux et de ses écritures, aux tarifs applicables aux terrasses ouvertes figurant en annexe à l'arrêté susvisé du 24 décembre 2013 fixant les nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2014, dans la grille tarifaire C ; que, toutefois, cet arrêté ne prévoit pas de tarif applicable aux contre-terrasses, qui compte tenu de leurs caractéristiques commerciales ne peuvent être assimilées à des terrasses ouvertes dans la mesure où l'occupation du domaine public par une contreterrasse n'est autorisée, contrairement aux terrasses ouvertes, que pour une période limitée, en l'espèce du 1er avril au 31 octobre de l'année ; qu'en se bornant à faire application purement et simplement du tarif existant pour une terrasse, au lieu de tenir compte des avantages de toute nature procurés par l'utilisation irrégulière du domaine public ou du revenu qu'aurait pu produire une contre-terrasse équipée de dispositifs de chauffage et d'écrans parallèles, la ville de Paris a méconnu les dispositions précitées du code général de la propriété des personnes publiques, comme l'ont estimé avec raison les premiers juges ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la ville de Paris n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de la société Café Georges V ;
Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Café Georges V, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la ville de Paris demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la ville de Paris une somme quelconque au titre des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la ville de Paris est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Café Georges V présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié à la ville de Paris et à la société Café Georges V.
Délibéré après l'audience du 27 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Lu en audience publique le 10 avril 2018.
Le rapporteur,
D. PAGESLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile de France, préfet de Paris en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA03504