Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...E...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 1er avril 2015 par lequel le président de la Métropole Nice Côte d'Azur a décidé de le licencier de ses fonctions de directeur de la promotion du territoire et des relations internationales.
Par un jugement n° 1502277 du 19 octobre 2016, le tribunal administratif de Nice a annulé cet arrêté du 1er avril 2015.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 décembre 2016, 25 septembre et 23 octobre 2017, sous le n° 16MA04738, la Métropole Nice Côte d'Azur, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 19 octobre 2016 ;
2°) de rejeter la demande de M.E... ;
3°) de mettre à la charge de M. E...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les preuves complémentaires apportées devant la Cour démontrent le bien fondé de la décision de licenciement en litige ;
- cette décision a été prise par une personne compétente ;
- elle est suffisamment motivée ;
- les faits invoqués au soutien de la décision contestée sont matériellement établis ;
- ils sont de nature à justifier le licenciement de M. E...pour insuffisance professionnelle ;
- la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle n'est pas intervenue en raison du congé maladie de l'intimé ;
- une période de quatre mois est suffisante pour apprécier la compétence d'un agent ;
- l'absence de critique significative préalablement à la mesure en litige ne suffit pas à remettre en cause la matérialité des faits ;
- elle n'a pas commis de détournement de procédure.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 août, 6 et 9 octobre 2017 et 19 septembre 2018, M. E...conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la Métropole Nice Côte d'Azur la somme 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la Métropole Nice Côte d'Azur ne sont pas fondés.
Les mémoires présentés par M.E..., enregistrés les 2 novembre 2017 et 5 octobre 2018, n'ont pas été communiqués.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de MmeH...,
- les conclusions de M.C...,
- et les observations de Me F...pour la Métropole Nice Côte d'Azur et de Me A... pour M.E....
Considérant ce qui suit :
1. La Métropole Nice Côte d'Azur relève appel du jugement du 19 octobre 2016 du tribunal administratif de Marseille qui a annulé l'arrêté du 1er avril 2015 par lequel elle a prononcé le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. E...de ses fonctions de directeur de la promotion du territoire et des relations internationales.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Il ressort de l'arrêté contesté que M. E...a été licencié de son poste de directeur de la promotion du territoire et des relations internationales, sept mois après son recrutement le 1er septembre 2014, en raison de son insuffisance professionnelle tenant à " son indisponibilité flagrante, son absence d'impulsivité managériale ou encore son manque de plan d'action concernant la direction dont il a la charge ". Pour annuler cet arrêté, le tribunal administratif de Nice a estimé que les manquements relevés sur la manière de servir de M. E...n'étaient aucunement corroborés par les pièces du dossier et que l'arrêté en litige reposait sur des faits matériellement non fondés.
3. S'agissant des deux premiers griefs tirés de l'indisponibilité flagrante et de l'absence d'impulsivité managériale, la Métropole Nice Côte d'Azur se prévaut d'un rapport du 22 janvier 2015 établi par le directeur adjoint à l'économie, l'innovation, l'emploi et l'international, supérieur hiérarchique de M.E..., faisant état du constat émanant des élus, plus particulièrement de l'adjoint au maire délégué au tourisme, qui a exprimé ses plus vives réserves sur les capacités de direction de l'intimé, des directeurs des autres directions générales selon lesquels l'intéressé n'aurait pas répondu à leurs demandes et des agents de sa direction qui auraient témoigné unanimement sur l'absence de disponibilité de leur directeur. M. E...établit sa disponibilité auprès des élus et des autres directions en produisant des échanges de courriels avec eux démontrant qu'il répondait dans la journée à leurs sollicitations et que les échanges étaient cordiaux. S'il n'a pas répondu immédiatement à certaines demandes, ces dernières n'indiquaient aucune urgence. Il ne ressort pas des réponses de M. E...que celles-ci auraient été inappropriées. Cependant, la Métropole produit pour la première fois devant la Cour des témoignages de neuf agents sur les douze que compte la direction de la promotion du territoire et des relations internationales dont huit relèvent les absences répétées non justifiées de M.E..., le défaut de réunions de bureaux, de directives et d'encadrement. Deux d'entre eux mentionnent également que M. E...leur avait confié sa déception face à un poste qui n'était pas à l'image de ce qu'il avait souhaité. Contrairement à ce que fait valoir ce dernier, ces témoignages peuvent être pris en compte alors même qu'ils ont été rédigés en novembre et décembre 2016 et qu'ils ne lui ont pas été notifiés lors de la procédure de licenciement dès lors qu'ils décrivent les capacités professionnelles de l'intéressé à la date de l'arrêté critiqué, les agents mentionnant d'ailleurs qu'ils réitèrent leurs déclarations faites dans le cadre du rapport hiérarchique du 22 janvier 2015. En se bornant à soutenir qu'en sa qualité de directeur il a nécessairement été retenu à l'extérieur du service par des réunions et déplacements et que ce reproche ne lui a jamais été opposé alors qu'il était en poste, M. E...ne justifie pas de sa disponibilité auprès des agents de son service. De même, il ne démontre pas en produisant un courriel du 4 décembre 2014 que, dès son entrée en fonction, il aurait souhaité donner une nouvelle orientation au service afin de modifier les habitudes prises antérieurement et de mettre en place une nouvelle organisation en fixant des objectifs précis à chacun ni qu'il aurait sollicité le recrutement d'un chargé de mission, d'une assistante de direction et d'un agent chargé du développement économique des relations internationales.
4. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté contesté, le tribunal administratif de Nice a estimé que les deux griefs tirés de l'indisponibilité flagrante de M. E...à l'égard de ses agents et de son absence d'impulsivité managériale étaient matériellement inexacts.
5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. E...devant le tribunal administratif de Nice et la Cour.
6. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté a été signé par M.G..., directeur général adjoint des ressources humaines, qui bénéficiait, par un arrêté 2014 ADM n° 215 du 10 octobre 2014, d'une délégation du président de la métropole Nice Côte d'Azur à l'effet de signer notamment les arrêtés portant licenciement d'un agent. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit dès lors être écarté.
7. Aux termes de l'article 42 du décret du 15 février 1988 dans sa version applicable à la date de l'arrêté en litige : " (...) La décision de licenciement est notifiée à l'intéressé par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement et la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis. ".
8. Après avoir visé les textes applicables, plus particulièrement le code général des collectivités territoriales, les lois des 13 juillet 2013 et 26 janvier 1984, ainsi que le décret du 15 février 1988, l'arrêté contesté mentionne que M. E...ne remplit pas les conditions d'aptitude professionnelle nécessaires à l'exercice des fonctions de directeur de la promotion du territoire et des relations internationales, en raison de son indisponibilité flagrante, de son absence d'impulsivité managériale ou encore de son manque de plan d'action concernant la direction dont il a la charge. Ces motifs ne présentent pas de caractère trop général alors que, par ailleurs, ils étaient suffisamment précisés dans la lettre du 9 avril 2015 de notification de l'arrêté de licenciement. Il s'en suit que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté en litige doit être écarté.
9. M. E...fait valoir que la Métropole Nice Côte d'Azur n'a pas pris en compte les conditions dégradées dans lesquelles il a pris ses fonctions tenant à la succession de plusieurs directeurs à son poste, à la présence d'agents fragilisés et démotivés, à l'existence de tensions entre eux, qu'il n'a disposé d'une imprimante et d'un portable de service qu'un mois et demi après son arrivée, qu'il ne s'est pas vu attribuer une ligne téléphonique internationale et qu'il lui a été imposé une directrice adjointe. Toutefois, la Métropole Nice Côte d'Azur soutient que seuls deux directeurs se sont succédés les années précédentes à la tête du service. Quant à la démotivation des agents de la direction dont M. E...avait la charge, à la supposer même établie, il ne démontre pas avoir pris les mesures nécessaires pour y remédier. Les autres circonstances invoquées par M. E...ne sont pas de nature à démontrer que la Métropole Nice Côte d'Azur aurait eu une appréciation erronée de ses aptitudes professionnelles. Par ailleurs, les deux griefs matériellement établis, comme dit au point 3, tirés de l'indisponibilité flagrante de M. E...à l'égard de ses agents et de son absence d'impulsivité, caractérisent à eux seuls, eu égard aux fonctions exercées par l'intéressé, une insuffisance professionnelle de nature à justifier le licenciement en litige, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la réalité du troisième grief tiré du manque de plan d'action dès lors qu'il résulte de l'instruction que la Métropole Nice Côte d'Azur aurait pris la même décision en se fondant sur les deux premiers griefs.
10. Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions. Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l'insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l'agent ni qu'elle ait persisté après qu'il ait été invité à remédier aux insuffisances constatées. Par suite, une évaluation portant sur la manière dont l'agent a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions est de nature à justifier légalement son licenciement.
11. Il ressort des pièces du dossier que M. E...a été recruté à compter du 1er septembre 2014 par la Métropole Nice Côte d'Azur et licencié par arrêté du 1er avril 2015. Il a en outre été placé en congés maladie à compter du 22 décembre 2014. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 3 et 9, cette période de trois mois était suffisante pour évaluer l'insuffisance professionnelle de l'intimé.
12. Aux termes de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 : " (...) Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de (...) leur état de santé, (...) ".
13. Au regard de ce qui a été dit aux point 3 et 9, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'insuffisance professionnelle de M. E...résulterait de son congé maladie. La circonstance que l'attestation Pôle Emploi établie postérieurement à l'arrêté en litige mentionne qu'il est licencié pour inaptitude physique est sans incidence sur sa légalité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 doit être écarté.
14. Compte tenu de ce qui a été dit au point 13, le détournement de pouvoir et de procédure résultant selon M. E...de son exclusion en raison de son congé maladie n'est pas établi.
15. Il résulte de tout ce qui précède que la Métropole Nice Côte d'Azur est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal a annulé l'arrêté du 1er avril 2015.
Sur les frais liés au litige :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Métropole Nice Côte d'Azur, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. E...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. E...une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la Métropole Nice Côte d'Azur et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 19 octobre 2016 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. E...devant le tribunal administratif de Nice et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : M. E...versera à la Métropole Nice Côte d'Azur une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Métropole Nice Côte d'Azur et à M. B...E....
Délibéré après l'audience du 30 novembre 2018, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- MmeH..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 14 décembre 2018.
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N° 16MA04738
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